Le vote préférentiel est admis, en inscrivant un numéro d'ordre en face du nom d'un, de plusieurs, ou de tous les candidats de la liste. Mais l'ordre ne peut être modifié que si au moins la moitié des suffrages portés sur la liste est numérotée (dans les faits les modifications ne dépassent jamais les 7 %). Le total des voix d'une liste correspond ainsi généralement à la moyenne des suffrages recueillis par chacun de ses membres, d'où la légère différence entre le nombre total de voix comptées et le nombre effectif de suffrages exprimés.
La loi électorale du 7 mai 1951 permet à plusieurs listes de s'apparenter entre elles avant le déroulement du scrutin, pour peu qu'elles se rattachent à un des « partis ou groupements nationaux » reconnus par le Ministère de l'Intérieur. Si la somme des voix obtenues par l'apparentement obtient une majorité absolue des suffrages exprimés, ces listes se partagent l’ensemble des sièges à pourvoir. Dans le cas contraire, les sièges sont répartis entre l'ensemble des listes, apparentées ou non, suivant la méthode de la plus forte moyenne. Les apparentements sont autorisés dans 95 des 103 circonscriptions métropolitaines, seuls les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise en étant exclus.
Département rural et plutôt conservateur, le Cantal est dominé depuis la Libération par le Parti paysan d'union sociale – rattaché au Centre national des indépendants et paysans depuis 1951 – localement représenté par Camille Laurens, figure influente du syndicalisme agricole et un des principaux porte-paroles du camp modéré à l'Assemblée nationale.
Ayant emporté l'ensemble des sièges à pourvoir au législatives de 1951 grâce à un large apparentement avec le MRP, l'UDSR et le Parti radical, Camille Laurens aborde le scrutin de 1956 avec une certaine assurance, confiant dans sa capacité à atteindre une nouvelle fois la majorité absolue des suffrages. De ses anciens partenaires de 1951 seuls les radicaux ont refusé de s'apparenter à lui, préférant faire liste commune avec leurs alliés socialistes du Front républicain.
La liste du Rassemblement des groupes républicains et indépendants français, déposée dans le seul but de gonfler la présence électorale du mouvement et obtenir le statut de « groupements national », ne participe pas à la campagne et ne fait imprimer aucun bulletin de vote.
Les prévisions préfectorales, faisant peu de cas de la liste poujadiste, annoncent la victoire de l'apparentement du Centre droit, la réelection de Camille Laurens, l'élection de son colistier Louis Thioléron et celle de l'UDSR Augustin Chauvet[1].
Les résultats sont une nette déception pour la majorité sortante, dont l'apparentement échoue à réunir la majorité absolue des suffrages. Les indépendants-paysans perdent plus de 6 points par rapport à 1951, passant sous la barre des 30 % pour la première fois depuis 1945. Ce net recul est principalement imputable à la percée poujadiste, la liste UFF ralliant à elle toute une frange de l'électorat paysan déçu par l'éloignement croissant de son député sortant et sensible à la dénonciation de « l’État inquisiteur »[1].
↑ a et bGilles Richard, « Parti paysan et société rurale dans la France d'après guerre. L'exemple du Cantal (1945-1962) », Histoire & Sociétés Rurales, (lire en ligne)