Élections législatives tunisiennes de 2019

élection législative en Tunisie

Les élections législatives tunisiennes de 2019 ont lieu le [1] afin d'élire l'Assemblée des représentants du peuple pour un mandat de cinq ans. Il s'agit des seizièmes élections législatives en Tunisie et des deuxièmes depuis l'adoption de la Constitution entrée en vigueur le .

Élections législatives tunisiennes de 2019
217 sièges de l'Assemblée des représentants du peuple

4-6 octobre 2019 à l'étranger
Type d’élection Élections législatives
Campagne -
Corps électoral et résultats
Inscrits 7 065 885
Votants 2 946 628
41,70 % en diminution 26,7
Votes exprimés 2 870 314
Votes blancs 26 403
Votes nuls 49 704
Ennahdha – Rached Ghannouchi
Voix 561 132
19,63 %
en diminution 8,2
Sièges obtenus 52 en diminution 16
Au cœur de la Tunisie – Nabil Karoui
Voix 416 004
14,55 %
en augmentation 14,6
Sièges obtenus 38 en augmentation 38
Parti destourien libre – Abir Moussi
Voix 189 356
6,63 %
en augmentation 6,6
Sièges obtenus 17 en augmentation 17
Courant démocrate – Mohamed Abbou
Voix 183 473
6,42 %
en augmentation 4,5
Sièges obtenus 22 en augmentation 19
Coalition de la dignité – Seifeddine Makhlouf
Voix 169 651
5,94 %
en augmentation 5,9
Sièges obtenus 21 en augmentation 21
Mouvement du peuple – Zouhair Maghzaoui
Voix 129 604
4,53 %
en augmentation 3,2
Sièges obtenus 15 en augmentation 12
Tahya Tounes – Youssef Chahed
Voix 116 582
4,08 %
en augmentation 4,1
Sièges obtenus 14 en diminution 29
Composition de l'assemblée élue
Diagramme
Chef du gouvernement
Sortant Élu
Youssef Chahed
Tahya Tounes
Elyes Fakhfakh
Ettakatol
Instance supérieure indépendante pour les élections

Du fait de l'avancement de la présidentielle à la suite du décès du président Béji Caïd Essebsi, le scrutin législatif a lieu entre le premier et le second tour de la présidentielle.

Les élections donnent lieu à un parlement extrêmement fragmenté. Le parti islamo-conservateur Ennahdha arrive en tête mais en recul avec moins d'un quart des sièges, devançant le parti laïc populiste Au cœur de la Tunisie de Nabil Karoui, candidat qualifié pour le second tour de la présidentielle. Arrivent ensuite le Parti destourien libre, axé sur la nostalgie de l'ère Ben Ali, celui de centre gauche Courant démocrate et celui islamiste de la Coalition de la dignité. La fragmentation du parlement en mouvements fortement opposés entre eux entraine une longue et difficile formation d'un gouvernement jusqu'en . Elyes Fakhfakh, du parti Ettakatol, devient chef du gouvernement à la tête d'une coalition menée par Ennahdha et le Courant démocrate.

Contexte

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Le corps électoral est convoqué le . Un total de 7 081 307 électeurs sont inscrits sur les listes électorales grâce à une importante campagne, qui permet l'inscription d'un million et demi de nouveaux électeurs sur les trois millions et demi de non inscrits, la population en âge de voter étant estimée à un peu moins de neuf millions. Lors des élections municipales de 2018, ils n'étaient ainsi que 5 369 843. Le nouveau corps électoral se voit rajeuni et féminisé, la tranche d'âge la plus représentée parmi les nouveaux inscrits étant celle des 18-35 ans, tandis que les femmes représentent 54 % des nouveaux inscrits. Le porte-parole de l'Isie, Hasna Ben Slimane, juge ainsi le nouveau corps électoral relativement représentatif de la population. Le total des inscrits est légèrement plus faible que celui arrêté pour la présidentielle, dont les listes ont été closes un peu plus tard, totalisant 7 066 940 inscrits. L'organisation du scrutin présidentiel était en effet prévue après les législatives, avant que le décès du président Béji Caïd Essebsi le ne l'avance au mois de septembre[2],[3].

Le dépôt des candidatures a lieu du 22 au , et la campagne du au , suivi d'un jour de silence électoral le 5. Les Tunisiens vivant à l'étranger peuvent voter du 3 au , tandis que le vote sur le territoire national a lieu le 6. Les résultats préliminaires devraient être divulgués au plus tard quatre jours plus tard, et ceux définitifs avant le [4],[5].

Modalités

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Système électoral

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L'Assemblée des représentants du peuple est définie par l'article 50 de la Constitution comme l'institution qui représente le peuple et qui lui permet d'exercer le pouvoir législatif. D'après l'article 53, peut être candidat aux législatives tout électeur détenant la nationalité tunisienne depuis dix ans au moins, âgé d'au moins 23 ans lors de la présentation de sa candidature et qui ne se trouve dans aucun des cas d'interdiction prévus par la loi. Les articles 55 et 56 précisent que les membres de l'Assemblée des représentants du peuple sont élus au suffrage universel, libre, direct et secret pour un mandat de cinq ans, au cours des soixante derniers jours du mandat parlementaire, tout en garantissant le droit de vote et de représentativité des Tunisiens de l'étranger en son sein.

Le scrutin est proportionnel : les 217 sièges sont ainsi pourvus pour cinq ans au scrutin proportionnel plurinominal à listes bloquées dans 27 circonscriptions électorales de quatre à dix sièges en Tunisie même, totalisant 199 sièges, et six circonscriptions pour les Tunisiens de l'étranger. Ces dernières se décomposent en deux circonscriptions de cinq sièges en France, une circonscription de trois sièges en Italie, une d'un siège en Allemagne, une de deux sièges pour le reste de l'Europe et le continent américain et une autre de deux sièges également pour les pays arabes et le reste du monde, pour un total de 18 sièges. Une fois le décompte des suffrages effectué, la répartition des sièges se fait dans un premier temps sur la base du quotient électoral, puis sur la base du plus fort reste[6].

Les partis ont l'obligation de présenter des listes avec une parité homme-femmes, mise en œuvre via l'alternance de noms de candidats masculins et féminins[7]. Les listes doivent également comporter dans les circonscriptions de plus de quatre sièges au moins un homme et une femme de moins de 35 ans parmi leurs quatre premiers candidats[8].

Tentative de changement

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Assemblée sortante :

En novembre 2018, une commission parlementaire vote un amendement de la loi électorale en vue de l'instauration d'un seuil électoral de 5 %, en dessous duquel les partis seraient exclus de la répartition des sièges[9]. Un vif débat s'ensuit à l'Assemblée des représentants du peuple sur le vote de cette mesure[10], qui a lieu le , un seuil de 3 % étant finalement retenu[11]. Le jour même, l'assemblée adopte des amendements controversés, accusés de barrer la route à Nabil Karoui et Olfa Terras dans la course à la présidentielle[12]. Karoui et son parti Au cœur de la Tunisie[13] figure alors en tête des sondages pour la présidentielle et les législatives[14]. Le , 51 députés de Nidaa Tounes et du Front populaire déposent un recours pour inconstitutionnalité[15].

Malgré le rejet du recours, le président Caïd Essebsi, amoindri par l'âge et la maladie, refuse de promulguer le texte mais ne le renvoie pas à l'assemblée pour une seconde lecture, ni le soumet au référendum[16], ce qui est, selon des juristes, contraire à la Constitution, qui ne prévoit pas une telle décision[17]. Cette décision pousse la coalition au pouvoir à envisager de prononcer son incapacité, arguant qu'il aurait été forcé à ne pas signer le texte[18]. Caïd Essebsi meurt le , au lendemain d'une nouvelle hospitalisation[19],[20]. La Constitution dispose que dans ce cas le président de l'Assemblée des représentants du peuple est chargé de l'intérim[21] ; il s'agit en l'espèce de Mohamed Ennaceur.

Forces en présence

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Partis
politiques
Idéologies Dirigeants Résultats en 2014
Nidaa Tounes Centre gauche à centre droit
Bourguibisme, social-libéralisme, sécularisme
Hafedh Caïd Essebsi 37,56 % des voix
86 députés
Ennahdha Droite
Démocratie islamique, conservatisme, libéralisme économique
Rached Ghannouchi 27,79 % des voix
69 députés
Front populaire Gauche
Socialisme, laïcité, nationalisme arabe, panarabisme
Mongi Rahoui 3,66 % des voix
15 députés
Afek Tounes Centre à centre droit

Libéralisme, progressisme, francophilie

Yassine Brahim 3,02 % des voix
8 députés
Courant démocrate Centre à centre gauche
Social-démocratie, social-libéralisme, progressisme, nationalisme
Mohamed Abbou 1,93 % des voix
3 députés
Mouvement du peuple Gauche
Socialisme,nationalisme arabe,panarabisme
Zouhair Maghzaoui 1,34 % des voix
3 députés
Parti destourien libre Centre à Extrême droite
Bourguibisme, anti-islamisme, étatisme, sécularisme
Abir Moussi 0,33 % des voix
Extra-parlementaire
Tahya Tounes Centre gauche à centre droit
Bourguibisme, social-libéralisme, sécularisme
Youssef Chahed Nouveau
Au cœur de la Tunisie Centre à centre gauche
Populisme, sécularisme
Nabil Karoui Nouveau
Coalition de la dignité
Al Karama
Extrême droite
Populisme, islamisme, conservatisme, francophobie
Seifeddine Makhlouf Nouveau
Al Badil Ettounsi Centre
Libéralisme, sécularisme
Mehdi Jomaa Nouveau

Sondages

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Campagne

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Fragmentation et dégagisme

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La campagne débute officiellement le , en même temps que s'achève celle de la présidentielle[50]. Les préoccupations d'ordre économiques et sociales prennent nettement le pas sur la campagne, la pauvreté se mêlant à une volonté de changement du personnel politique existant, jugé sur son incapacité à y mettre fin[51],[52]. Ce « vent de dégagisme » de la part des électeurs se reflète dans les sondages d'opinions dès , avec l'apparition d'outsiders indépendants détrônant les principales personnalités politiques dans les prévisions de la présidentielle organisée en quasi concomitance[53]. Cette dynamique se vérifie également dans les intentions de vote aux législatives, un éventuel parti du candidat Nabil Karoui recueillant alors plus de 30 % dans les sondages, avant même d'obtenir une existence légale[54],[55]. L'expression du « dégagisme » renvoie au slogan « Dégage ! » asséné au président Zine el-Abidine Ben Ali lors de la révolution de 2011[53].

Le parti présidentiel Nidaa Tounes est également l'objet de divisions ayant donné naissance au cours des années précédentes à des partis dissidents : Tahya Tounes formé autour de Youssef Chahed ou Machrouu Tounes autour de Mohsen Marzouk. Ces scissions amplifient l'éparpillement des voix au sein du camp moderniste. De son côté, la gauche s'éparpille tout autant entre le Front populaire, le Courant démocrate et Tounes Okhra[56]. Le parti islamiste Ennahdha est par ailleurs affecté par l'inversion du calendrier électoral ayant placé le premier tour de la présidentielle avant les législatives à la suite de la mort du président Essebsi. Ennahdha, qui s'était jusqu'à présent refusé à ne serait ce que tenter d'obtenir la présidence, de peur de soulever l'opposition de la société et du monde politique en Tunisie comme à l'étranger face à l'hégémonie d'un parti islamiste sur le pays, se voit contraint de présenter un candidat, Abdelfattah Mourou. Le parti estime en effet impossible de ne pas présenter de candidat à moins de devenir inaudible au cours de la période resserrée de la campagne électorale[57].

L'emprisonnement de Karoui fait fondre son écart entre son mouvement et Ennahdha, si bien que pour le dernier sondage publié par Sigma Conseil, les deux partis sont au coude-à-coude[58].

Économie

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Malgré un capital sympathie à l'étranger en raison du processus de démocratisation, qui assure le soutien des Occidentaux et du Fonds monétaire international, la situation économique tunisienne reste difficile en 2019[59]. Le secteur touristique, qui constitue une part importante du PIB national, se relève seulement, après avoir été durement frappé par les incertitudes post-révolutionnaires et surtout l'attentat islamique de Sousse de 2015[56]. La hausse des prix est responsable de vives tensions sociales au cours des années précédentes, ce qui amène le gouvernement à mener une politique de lutte contre l'inflation, au détriment de la croissance[60]. Bien que l'inflation ait été contenue à 7 % en 2018 et début 2019, les moyens utilisés à cet effet ont causé un important resserrement du crédit. Les relèvements successifs des taux par la Banque centrale pèsent également sur la croissance, qui est de 2,5 %, alors que le pays est toujours en voie de développement et que le chômage reste élevé, autour de 15 %. La reprise récente du secteur touristique a cependant permis un relèvement du dinar, qui s'apprécie face à l'euro, après une dépréciation de 65 % de 2011 à 2018. La dette publique reste cependant à un niveau élevé, à 77 % du PIB, du fait de déficits budgétaires chroniques. L'incertitude liée à la présidentielle et aux législatives maintient par ailleurs les investisseurs dans l'attentisme[60]. Le pays se redresse à peine du bilan économique catastrophique d'Ennahdha lors de son passage au pouvoir de 2011 à 2014 au sein de la troïka. Accusé d'avoir procédé à une véritable distribution des emplois publiques à ses partisans et soutiens en vue de « noyauter l'administration », le gouvernement de la troïka amène en effet le nombre des fonctionnaires de l'État tunisien à gonfler de 35 %. L'augmentation de la masse salariale continue de peser sur le budget du pays, alors en pleine stagnation économique[61],[62]. Le parti perd de fait plus d'un million d'électeurs entre l'élection de la constituante de 2011 et les municipales de 2018, tout en restant le principal parti du pays dans un contexte de forte abstention[57].

Résultats

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Au soir du scrutin, l'ISIE annonce un taux de participation de 41,32 %, qui s'établit finalement à 41,70 %, en nette baisse par rapport à 2014, où il avait été de 68,36 %[63].

Résultats définitifs des législatives tunisiennes de 2019[64],[65],[66],[67],[68]
Parti, coalition ou liste Voix % +/- Sièges +/-
Ennahdha 561 132 19,55 en diminution 8,16 52 en diminution 17
Au cœur de la Tunisie 416 004 14,49 Nv 38 en augmentation 38
Parti destourien libre 189 356 6,60 N/a[a] 17 en augmentation 17
Courant démocrate 183 473 6,39 en augmentation 4,49 22 en augmentation 19
Coalition de la dignité 169 651 5,91 Nv 21 en augmentation 21
Mouvement du peuple 129 604 4,52 en augmentation 3,19 15 en augmentation 12
Tahya Tounes 116 582 4,06 Nv 14 en augmentation 14
Union populaire républicaine 59 924 2,09 N/a[b] 3 en augmentation 3
Aïch Tounsi 46 401 1,62 Nv 1 en augmentation 1
Al Badil Ettounsi 46 046 1,60 Nv 3 en augmentation 3
Espoir et travail[c] 45 196 1,57 Nv 2 en augmentation 2
Afek Tounes 43 892 1,53 en diminution 1,48 2 en diminution 6
Nidaa Tounes 43 213 1,51 en diminution 36,05 3 en diminution 83
Machrouu Tounes 40 869 1,42 Nv 4 en augmentation 4
Errahma 40 071 1,40 N/a[d] 4 en augmentation 4
Front populaire 32 226 1,12 en diminution 2,53 1 en diminution 14
Le Front[e] 30 013 1,05 Nv 0 en stagnation
Union démocratique et sociale 29 828 1,04 Nv 1 en augmentation 1
La Tunisie autrement[f] 26 341 0,92 Nv 0 en stagnation
Al Amal 26 196 0,91 Nv 0 en stagnation
Tous pour la Patrie[g] 19 954 0,70 Nv 0 en stagnation
Courant de l'amour 17 749 0,62 en diminution 0,58 1 en diminution 1
Al Watan Al Jadid 16 955 0,58 Nv 0 en stagnation
Mouatinoun et Ncharek 16 533 0,57 Nv 0 en stagnation
Parti socialiste destourien[h] 16 235 0,57 Nv 1 en augmentation 1
Chabeb Tounes Al Watani 13 975 0,49 Nv 0 en stagnation
Beni Watani 13 154 0,46 Nv 0 en stagnation
Parti de la voix des agriculteurs 9 366 0,33 en augmentation 0,23 1 en stagnation
Congrès pour la République 8 869 0,31 en diminution 1,83 0 en diminution 4
Parti socialiste 8 209 0,29 N/a[i] 0 en stagnation
Ettakatol 7 507 0,26 en diminution 0,46 0 en stagnation
Listes indépendantes[j] 46 006 1,60 - 11 en augmentation 10
Autres partis ou listes 399 784 13,93 - 0 en diminution 30
Suffrages exprimés 2 870 314 97,41
Votes blancs 26 403 0,90
Votes nuls 49 704 1,68
Votes annulés[k] 207 0,01
Total 2 946 628 100 - 217 en stagnation
Abstention 4 120 312 58,30
Inscrits / Participation 7 065 885 41,70

Recours et annonce des résultats

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Le , le tribunal administratif de Tunis restitue à Ben Arous le siège d'Errahma aux dépens du Mouvement du peuple. À Kesserine, celui-ci récupère un siège obtenu par Nidaa Tounes. Enfin, dans la circonscription d'Allemagne où Ennahdha a obtenu un siège, le scrutin est invalidé[70],[71].

Le , après appel de la décision du tribunal, Ennahdha récupère le siège d'Allemagne, tandis que Nidaa récupère celui de Kasserine. Cependant, le tribunal confirme le siège d'Errahma[72].

Les résultats définitifs sont annoncés le [73]. Les nouveaux députés prêtent serment le [74].

Tractations

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Groupes parlementaires :

Dès le soir du scrutin, Ennahdha et Au cœur de la Tunisie revendiquent être arrivés en tête[63]. Le , les résultats préliminaires sont annoncés et Ennahdha arrive en tête[75].

Ennahdha devrait être chargé de former une coalition gouvernementale. Zied Ladhari, ministre sortant du Développement, et membre de la jeune garde du parti, est pressenti pour diriger un gouvernement mené par Ennahdha. Mohamed Abbou, secrétaire général du Courant démocrate, n'exclut pas d'entrer au gouvernement, si son parti n'est pas cantonné à un rôle de figurant. Du côté du perchoir, le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, est cité[76]. Ennahdha pourrait également se tourner vers la Coalition de la dignité[77], ou alors former une coalition avec Au cœur de la Tunisie. Enfin ce dernier pourrait aussi s'allier avec le Parti destourien libre, Tahya Tounes et le Courant démocrate. Cependant, ces deux derniers sont peu enclins à accepter, le premier, dirigé par le chef du gouvernement Youssef Chahed, est accusé par Karoui d'être derrière son arrestation, tandis que le dernier accuse Karoui d'être corrompu[78]. Enfin, un gouvernement technique est également évoqué[79].

Peu après l'annonce des résultats préliminaires, le Mouvement du peuple, Tahya Tounes, Au cœur de la Tunisie et le Parti destourien libre annoncent vouloir siéger dans l'opposition[80]. Pour sa part, Ennahdha exclut de négocier toute coalition gouvernementale avec ces deux derniers[81]. Le , Ennahdha choisit de soutenir une candidature issue de ses rangs pour le poste de chef du gouvernement. Le régime étant semi-présidentiel, le président élu Kaïs Saïed a une semaine après son investiture pour charger le parti arrivé en tête des législatives de former un gouvernement. Celui-ci aura ainsi trente jours - renouvelable une fois - pour obtenir la confiance du Parlement[82]. Les tractations débutent le [83]. Le président reçoit les délégations d'Ennahdha et d'Au cœur de la Tunisie[84], ceux de la Coalition de la dignité le [85] puis ceux de Machrouu Tounes, Nidaa Tounes et l'Union populaire républicaine le [86], d'Errahma le [87], puis de Nahnou Houna le [88].

Tentative infructueuse d'Habib Jemli

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Le , Kais Saied désigne Habib Jemli, candidat d'Ennahdha, pour le poste de chef du gouvernement et le charge de former un gouvernement[89].

De leur côté, le Mouvement du peuple et le Courant démocratique forment un groupe parlementaire commun, le Bloc démocrate[90].

Les négociations entreprises par Habib Jemli essuient un revers le avec le retrait du Mouvement du peuple et du Courant démocratique. Le premier exprime par la voie de son secrétaire général, Zoheir al Maghzaoui, son refus d'intégrer un gouvernement qui ne « condamne pas le discours extrémiste » et dont le programme économique est jugé « ambigu ». Le dirigeant du Courant démocratique, Mohamed Abbou, annonce quant à lui renoncer définitivement à participer au gouvernement proposé par Ennahdha, évoquant une crise de confiance après son refus de partager des ministères régaliens. Le Courant démocratique demandait notamment les ministères de la Justice et de l'Intérieur. Les deux partis considèrent par ailleurs le gouvernement comme une vitrine des Frères musulmans et rejettent son rapprochement en cours avec la Coalition de la dignité. Le départ des deux composantes du Bloc démocrate obligerait Ennahdha à tenter de se rapprocher du parti Cœur de la Tunisie[91]. Un gouvernement de coalition composé d'Ennahda et d'Au cœur de la Tunisie ainsi que de membres d'Ettakatol, avec le soutien sans participation de la coalition de la dignité et d'Errhama est attendu[92]. Après des semaines de retard et l'impossibilité de former un gouvernement politique, Jemli présente une liste de ministres pour un gouvernement technique le [93]. Bien qu'indépendants, certains ministres sont cependant proches d'Ennahdha et d'Au cœur de la Tunisie[94].

Le , Jemli échoue à obtenir la confiance du parlement[95].

Gouvernement Fakhfakh

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Formation

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Elyes Fakhfakh

Saïed dispose dès lors de dix jours pour désigner un nouveau chef du gouvernement[96]. Le , il désigne Elyes Fakhfakh, membre d'Ettakatol[97]. Il reçoit le soutien du Bloc démocrate et de Tahya Tounes[98].

Son gouvernement est annoncé le . Malgré l'attribution de plusieurs ministères à des membres d'Ennahdha, le parti annonce son intention de ne pas voter la confiance au gouvernement, du fait de la non participation d'Au cœur de la Tunisie. En parallèle, la commission mixte du parlement adopte un projet de modification de la loi électorale portant le seuil électoral de 3 à 5 %. Ce projet contesté pour l'avantage qu'il fournit aux partis les plus importants leur permettrait de s'engager plus facilement vers des élections anticipées[99]. Kaïs Saïed annonce deux jours plus tard qu'à défaut d'une approbation du gouvernement présenté, il procédera à la dissolution de l'assemblée le . Le président exclut ainsi les autres voies préconisées par Ennahdha d'une démission de Fakhfakh ou encore du vote d'une motion de censure contre le gouvernement sortant de Youssef Chahed, estimant que cette dernière option est inconstitutionnelle puisque le gouvernement expédie les affaires courantes[100]. Une version légèrement modifiée du gouvernement, mais sans la participation d'Au cœur de la Tunisie est annoncée le , et Ennahdha, craignant une dissolution, accepte de voter la confiance[101].

Entrée en fonction

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Le , l'Assemblée des représentants du peuple accorde la confiance au gouvernement[102]. L'assermentation est prévue le jour même au palais présidentiel de Carthage[103].

Démission

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Elyes Fakhfakh démissionne le à la demande du président de la République (ce qui permet à ce dernier de choisir son successeur)[104], après le dépôt d'une motion de censure par 105 députés, dont notamment ceux d'Ennahdha — qui lui a retiré sa confiance la veille[105] — et d'Au cœur de la Tunisie[106]. Lors des jours précédents, Fakhfakh avait tenté de remplacer les ministres membres d'Ennahdha[107], alors que le chef du gouvernement était sous le coup d'accusations de conflits d'intérêts[108]. La capacité du chef du gouvernement de remanier son gouvernement en accord avec la Constitution était par ailleurs remise en cause par le règlement intérieur de l'Assemblée, qui exige un vote de confiance pour les nouveaux membres du gouvernement[109].

Alors que la Constitution est floue et que la Cour constitutionnelle n'est toujours pas en place, il y a désaccord pour savoir qui du parti majoritaire ou du président de la République a la prérogative de désigner le prochain chef du gouvernement[110]. La présidence annonce la mise en oeuvre de la première option. Le président de la République doit nommer dans les dix jours un nouveau chef du gouvernement, qui doit à son tour obtenir le vote de confiance des députés dans les trente jours[111], délai renouvelable une fois. Dans le cas contraire, le président peut dissoudre l'Assemblée[112]. Le soir de sa démission, Fakhfakh limoge les ministres membres d'Ennahdha et confie leurs portefeuilles à des intérimaires[113].

Gouvernement Mechichi

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Formation

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Hichem Mechichi

Le , Saïed charge Hichem Mechichi de former un gouvernement[114],[115]. Le , il propose de former un gouvernement composé uniquement d'indépendants[116].

Le , il en dévoile la composition[117]. Le gouvernement, dont la composition suscite les réserves d'Ennahdha et d'Au cœur de la Tunisie[118], se compose de vingt huit « technocrates » indépendants. Il comporte notamment huit femmes, ainsi que d'un homme malvoyant[119].

Entrée en fonction

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Le suivant, le gouvernement est investi par 134 voix contre 67 par l'Assemblée des représentants du peuple[120].

Notes et références

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  1. Manque de données sur les résultats du parti en 2014.
  2. Manque de données sur les résultats du parti en 2014.
  3. Liste indépendante du député Yassine Ayari.
  4. Manque de données sur les résultats du parti en 2014.
  5. Scission du Front populaire dirigée par Hamma Hammami
  6. Tounes Okhra, coalition entre Hizb el-Harak de Moncef Marzouki et le Mouvement Wafa
  7. Liste indépendante
  8. Parti créé en 2016, ayant repris le nom de l'ancien Parti socialiste destourien (1964-1988)
  9. Manque de données sur les résultats du parti en 2014.
  10. Un siège chacune aux listes Ligue verte, Al Khayr, Retour aux origines, Jeunes indépendants, Citoyenneté et développement, Fidélité, Badhl Wa Ataa, Tous la Tunisie, Siliana dans nos yeux, Excellence et Nahnou Houna.
  11. Correspond à l'annulation par l'ISIE des résultats d'une liste: annulation partielle des résultats de Aïch Tounsi dans la circonscription France 2 (207 voix), celui-ci perd un siège[69].

Références

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  2. « Tunisie : inscription record sur les listes électorales », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  3. Arianna Poletti et Camille Lafrance, « Tunisie : les scénarios possibles pour la promulgation du Code électoral », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
  4. Raja Bessais, « Tunisie : le calendrier des élections législatives et présidentielles de 2019 », sur webmanagercenter.com, (consulté le ).
  5. Laameri Dorsaf, « Tunisie- Les principales dates des élections législatives », sur Tunisie Numerique, (consulté le )
  6. « Majlis Nawwab ash-Sha'ab (Assemblée des représentants du peuple) », sur archive.ipu.org (consulté le ).
  7. Thierry Portes, « Tunisie : duel entre séculiers et islamistes », sur lefigaro.fr, 25-26 octobre 2014 (consulté le ), p. 6.
  8. « IFES Election Guide » (consulté le )
  9. Syrine Attia, « Tunisie – Seuil de représentativité électorale à 5 % : mort des petits partis ou efficacité renforcée ? », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
  10. « Tunisie : bataille autour du seuil électoral », sur espacemanager.com, (consulté le ).
  11. « Tunisie : adoption du seuil de 3 % des voix pour entrer à l'Assemblée », sur tunisienumerique.com, (consulté le ).
  12. « En Tunisie, un code électoral "taillé sur mesure pour éliminer certains candidats" », sur france24.com, (consulté le ).
  13. « Nabil Karoui lance son parti politique « Cœur de Tunisie » », sur espacemanager.com, (consulté le ).
  14. Benoît Delmas, « Tunisie : Nabil Karoui, un nabab qui dérange », sur lepoint.fr, (consulté le ).
  15. « Tunisie : recours contre une modification du code électoral », sur lorientlejour.com, (consulté le ).
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