Élisabeth-Marie d'Autriche

Archiduchesse autrichienne

Élisabeth-Marie Henriette Stéphanie Gisèle d'Autriche, née le à Laxenbourg et morte le à Vienne, est une archiduchesse d'Autriche, princesse royale de Bohème, de Hongrie et de Croatie, issue de la Maison de Habsbourg-Lorraine.

Élisabeth-Marie d’Autriche
Description de cette image, également commentée ci-après
Photographie de l'archiduchesse Élisabeth-Marie (1910).
Biographie
Titulature Princesse impériale d’Autriche
princesse royale de Hongrie
princesse royale de Bohême
Archiduchesse d’Autriche
Dynastie Maison de Habsbourg-Lorraine
Nom de naissance Elisabeth Marie Henriette Stephanie Gisela von Österreich
Naissance
Laxenbourg (Autriche-Hongrie)
Décès (à 79 ans)
Vienne (Autriche)
Sépulture Cimetière d'Hütteldorf
Père Rodolphe, prince héritier d’Autriche-Hongrie
Mère Princesse Stéphanie de Belgique
Conjoints Prince Othon de Windisch-Graetz
Léopold Petznek
Enfants Prince François-Joseph de Windisch-Graetz
Prince Ernest de Windisch-Graetz
Prince Rodolphe de Windisch-Graetz
Princesse Stéphanie de Windisch-Graetz
Religion Catholicisme romain

À partir des années 1929, la presse de l'époque la surnomme l'Archiduchesse rouge (en allemand « Rote Erzherzogin ») en raison de ses affinités avec le parti socialiste autrichien.

Biographie

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Enfance et formation

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Élisabeth-Marie, qu'on appelait Erzsi, diminutif hongrois affectueux, est confrontée aux drames qui secouent sa famille et l'Europe. Le , Maximilien de Wittelsbach, duc en Bavière, son bisaïeul paternel, meurt. L'année suivante, le , son père est retrouvé mort, en compagnie de la baronne Marie Vetsera, sa maîtresse de 17 ans, dans ce qui devient la « tragédie de Mayerling ». L'empereur prend son éducation en main. Ludovica de Wittelsbach, duchesse en Bavière, veuve de Maximilien et bisaïeule paternelle, meurt le . Le , Sophie-Charlotte de Wittelsbach, épouse du duc d'Alençon et grand-tante paternelle, périt brûlée vive dans l'incendie du bazar de la Charité à Paris. Le , Élisabeth de Wittelsbach, Sissi, sa grand-mère paternelle, impératrice d'Autriche-Hongrie, est assassinée à Genève par un anarchiste italien. La mort d'autres membres de la famille Habsbourg-Lorraine, marque la fin du XIXe siècle à Vienne.

Le , sa mère Stéphanie s'unit, en secondes noces, à Elemér Lónyay (1863-1946), un diplomate et noble hongrois, de second rang, qui devient prince en 1917. Ce remariage fait que Erzsi n'a presque plus de contacts avec sa mère et rompt progressivement avec la famille royale belge. Elle est déshéritée par Stéphanie en [1].

Famille

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Elle est la fille de Rodolphe de Habsbourg-Lorraine (1858-1889), héritier de l'empire d'Autriche-Hongrie, et de Stéphanie de Saxe-Cobourg et Gotha (1864-1945), princesse de Belgique[2].

Son père est le fils de François-Joseph Ier (1830-1916), empereur d'⁣⁣Autriche⁣⁣, puis d'Autriche-Hongrie, et roi de Bohème, et d'Élisabeth de Wittelsbach (1837-1898), duchesse en Bavière.

Sa mère est la fille de Léopold II dit le Roi bâtisseur (1835-1909), roi des Belges, et de Marie-Henriette de Habsbourg-Lorraine (1838-1902), archiduchesse d'Autriche.

L'archiduchesse et son époux.

Pressentie pour devenir l'épouse d'Albert de Saxe-Cobourg et Gotha (1875-1934), héritier de Léopold II, Erzsi ne sera pas choisie, au profit d'Élisabeth de Wittelsbach (1876-1965), nièce de l'impératrice Sissi.

Elle entame l'année suivante une relation avec Othon de Windisch-Graetz (1873-1952), officier et prince autrichien alors âgé de 28 ans, et souhaite l'épouser. L'empereur d'Autriche-Hongrie convoque l'officier qui obtempère et demande la main de la petite-fille de son souverain[1]. François-Joseph consent à ce mariage morganatique en automne 1901 et verse une dot, ainsi qu'une rente fort importante à sa petite-fille, sans l'exclure de la Maison impériale. Sa mère, Stéphanie, en avait été exclue deux ans plus tôt pour la même raison.

Les noces sont célébrées le . Le couple princier s'installe au château de Ploschkowitz en Bohême[1]. Ils ont plusieurs enfants, dont quatre survivront :

Le château de Ploschkowitz.

Dès 1912, la mésentente s'installe entre les époux. La crise conjugale se mue en véritable animosité. Comme Sissi, sa grand-mère paternelle, la princesse de Windisch-Graetz multiplie les voyages, son époux préfèrant rester en Bohème. Le prince et la princesse ont tous deux des liaisons adultérines. La princesse surprend une des maîtresses de son mari et la blesse d'un coup de revolver[3]. L'historien autrichien Friedrich Weissensteiner fournit une autre version : Élisabeth-Marie aurait en fait tiré sur le valet de chambre qui montait la garde à l'entrée de la chambre à coucher[1].

La princesse s'affiche à partir de 1913 avec le lieutenant de vaisseau Egon Lerch. Il meurt le 7 août 1915 dans son sous-marin coulé par les Italiens au large de Trieste. Cette disparition touche profondément l'archiduchesse[1].

Après la Première Guerre mondiale

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François-Joseph meurt le à Vienne, au milieu de la Première Guerre mondiale, déclenchée par l'assassinat de son neveu François-Ferdinand, le à Sarajevo. Il laisse à son petit-neveu, Charles Ier (1887-1922), un empire miné par les défaites successives, ainsi que par les pressions externes et internes pour finir la guerre. Celui-ci est contraint de renoncer au pouvoir, le , sans toutefois abdiquer à proprement parler. L'Empire d'Autriche-Hongrie se désagrège en de multiples pays. Chacun devient souverain et vote la déchéance de la dynastie des Habsbourg-Lorraine. Seule la Hongrie demeure un royaume où survit une régence.

Élisabeth-Marie perd ses titres de noblesse, interdits par la première république d'Autriche.

Elle entame une procédure de « séparation de table et de lit » (le divorce n'étant pas légalement reconnu), et rencontre en 1919 Leopold Petznek (1881-1956), professeur et homme politique social-démocrate, qui deviendra député en 1921. Issu d'un milieu modeste mais cultivé, Leopold est marié. Son épouse, dont il a un fils, séjourne en hôpital psychiatrique jusqu'à sa mort en 1935. Ils deviennent amants à partir de 1921. En 1924, la princesse liquide sa séparation avec son époux. La presse en parle abondamment[1].

Élisabeth-Marie demeurera la concubine de Leopold pendant vingt-quatre ans. La législation interdisait le divorce et lui interdit de l'épouser. Avec ses enfants, ses relations se dégradent. Elle n'acceptera pas leurs conjoints.

À partir de 1929, le couple s'installe à Hütteldorf, un quartier résidentiel de Vienne, dans une villa qu'elle vient d'acheter. Elle rejoint le Parti social-démocrate et la presse la surnomme « l'Archiduchesse rouge » en raison de son soutien financier au parti socialiste[1]. L'Autriche restant un pays conservateur, Leopold Petznek est emprisonné de la fin 1933 à .

A cause de ce soutien financier au parti politique socialiste, Élisabeth-Marie est accusée de dilapider la fortune familiale par son mari et son fils. Ils déclenchent une procédure de mise sous curatelle en 1934. Elle n'aboutira pas.

En 1938, après l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie, la princesse est interrogée plusieurs fois par la police. Son concubin Leopold est déporté au camp de concentration de Dachau en [1]. Il sera libéré en par les troupes américaines. Le couple se marie en 1948.

La tombe anonyme de « l'archiduchesse rouge ».

Vienne est libérée par l'Armée rouge. La villa de la princesse est réquisitionnée et saccagée par les soldats russes.

Lorsque l'Autriche et Vienne sont subdivisées en zones d'occupation par les troupes alliées. Hütteldorf se trouve en zone d'occupation française. La villa est occupée par les Français du général Antoine Béthouart[4]. En 1955, à la fin de l'occupation de la ville par les Alliés et alors que l'Autriche retrouve sa complète souveraineté, le couple septuagénaire peut y revenir.

L'ancienne archiduchesse passe de plus en plus de temps en fauteuil roulant. En , son époux meurt d'une crise cardiaque[1].

Élisabeth-Marie se consacre à l'élevage de bergers allemands ; elle remporte plusieurs concours.

Elle décède à Vienne le à 79 ans. Dans son testament, elle interdit à ses deux enfants survivants de pénétrer chez elle non accompagnés, et s'oppose à ce que ses belles-filles puissent y venir. Seule sa fille a été autorisée à lui rendre une dernière visite de quelques minutes, accompagnée de domestiques.

Élisabeth-Marie est inhumée le dans une tombe anonyme du cimetière d'Hütteldorf, en conformité avec ses dernières volontés.

Dans son testament, elle lègue les collections impériales, meubles et tableaux (qu'elle avait récupérés après le saccage de sa villa) à des musées viennois. Ses chiens sont euthanasiés, ainsi qu'elle l'a souhaité. Elle ne voulait pas pour eux d'autres maîtres qu'elle[1].

Notes et références

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  1. a b c d e f g h i et j Friedrich Weissensteiner, L'archiduchesse rouge, Payot, , 240 p. (ISBN 978-2-228-90727-9)
  2. Mémoires de Guerre, « Elisabeth-Marie d'Autriche », sur Mémoires de Guerre (consulté le )
  3. Windisch-Graetz, Ghislaine de., Kaiseradler und rote Nelke : das Leben der Tochter des Kronprinzen Rudolf, Amalthea, (ISBN 3-85002-264-1 et 978-3-85002-264-4, OCLC 22709301, lire en ligne)
  4. Antoine Béthouart, La bataille pour l'Autriche, Paris, Presses de la Cité, , 318 p.

Voir aussi

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Bibliographie

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  • Antoine Béthouart, La bataille pour l'Autriche, Paris, Presses de la Cité, 1962
  • (de) Friedrich Weissensteiner, Die rote Erzherzogin : das ungewöhnliche Leben der Tochter des Kronprinzen Rudolf : Versuch einer Biographie, Österreichischer Bundesverlag, Vienne, (Autriche), 1982 (2e édition), 227 p., (ISBN 3215046709), (LCCN 83136530).
  • Friedrich Weissensteiner, traduit par Marie Reygnier, L'Archiduchesse rouge : la vie tumultueuse d'Élisabeth-Marie d'Autriche, petite-fille de Sissi et fille de Rodolphe, Payot, Paris, 2010, 221 p.
  • (de) Ghislaine de Windisch-Graetz, Kaiseradler und rote Nelke : das Leben der Tochter des Kronprinzen Rudolf, éditions Amalthea, Vienne (Autriche), 1989 (2e édition), 463 p.-[24] p., (ISBN 3850022641), (LCCN 90158978).
  • Ghislaine de Windisch-Graetz, L'Archiduchesse rouge : la vie d'Élisabeth-Marie, orpheline de Mayerling : 1883-1963, éditions Duculot, coll. « Document Duculot », Paris et Louvain-la-Neuve, 1990, 347 p.-[16] p., (ISBN 2-8011-0881-2), (BNF 35181790). – Note : il est probable que cet ouvrage soit une traduction de l'ouvrage en allemand, du même auteur, mais aucun élément ne permet de s'en assurer.

Liens externes

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