Émile Blanche

aliéniste français, XIXe siècle
Émile Blanche
Fonction
Conseiller municipal de Paris
à partir du
Biographie
Naissance
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Montmartre (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 72 ans)
ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
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Distinctions

Émile Blanche est un aliéniste français, né le à Montmartre et mort le dans le 16e arrondissement de Paris.

Biographie modifier

Antoine Émile Blanche naît en 1820, rue Traînée (nommée de nos jours rue Norvins) à Montmartre, au sein de la maison de santé que son père Esprit Blanche, aliéniste, reprend vers la même époque à son collègue Pierre-Antoine Prost, un disciple de Philippe Pinel[1] ; comme Prost, Esprit Blanche applique dans l'établissement de nouvelles méthodes, cherchant les causes des maladies de ses patients. Émile suivra lui-aussi cette voie. Il fait de brillantes études au lycée Condorcet, avant de répondre aux vœux de son père en embrassant à son tour la carrière médicale[2] ; il prend ce dernier, Chomel et Guéneau de Mussy pour maîtres[3].

Vue en 1835 du sommet de la butte Montmartre, avec la première « maison du docteur Blanche », dirigée par Esprit Blanche ; son fils Émile y réside toute sa jeunesse, de sa naissance à ses années de formation de futur médecin aliéniste.

Au concours de 1845, il est nommé interne des hôpitaux à la Salpêtrière, dans le service de Jean-Étienne Mitivié, neveu de Jean-Étienne Esquirol. Il est reçu docteur en médecine le , à 28 ans, avec une thèse intitulée Du cathétérisme œsophagien chez les aliénés, sous l’autorité du docteur Leuret[4]. Il s'adonne ensuite exclusivement à l’étude et au traitement des maladies mentales. Ayant commencé à assister son père durant ses études[5], il partage avec celui-ci la direction de maison de santé pour aliénés, devenue très réputée, qui de Montmartre a été transférée en 1846 à Auteuil, à l’hôtel de Lamballe.

En 1851, il est nommé expert près les tribunaux de la Seine, souvent appelé pour juger de l’état mental des prévenus ou des accusés[6]. L’année suivante, son père étant mort, il prend la direction de la clinique familiale[7]. Comme son père avant lui, il vit avec sa famille sur le même site que ses malades. Personnage assez mondain, sa maison était le lieu de réunion de Parisiens distingués. Son salon a été, pendant trente ans, parmi les plus recherchés de Paris. Tous les samedis, il tenait table ouverte, où savants artistes et philosophes échangeaient leurs idées. À cette table, dans la grande salle à manger, s’asseyaient tous les soirs, à six heures, les malades qui n’étaient pas gravement atteints et qui continuaient à rester en pension dans la maison : prenaient place, à huit heures, parmi les peintres Paul Chenavard et Delacroix, parmi les poètes Charles Baudelaire, Théophile Gautier et Antony Deschamps. Hector Berlioz y a fait entendre pour la première fois le premier acte des Troyens, et Gounod y jouait au piano toutes ses œuvres. Là vint John Lemoinne, l’un de ses plus vieux amis ; Prévost-Paradol a dîné chez lui, la veille de son départ pour l’Amérique, où il devait mourir. Parmi les fidèles, se comptaient encore Alexandre Welll, Ludovic Halévy, Gustave Planche, Jules Brésil, Charles Vervoitte, Charles-Edmond[8], etc[3].

Le docteur Jean Bouley, intime de Renan et de Renouvier, vivait chez lui[9]. Émile Blanche soignait dans son établissement des célébrités de son temps comme les musiciens Fromental Halévy, Gounod, les écrivains Guy de Maupassant[10],[n 1], Gérard de Nerval[n 2],[11], Marie d'Agoult, ou encore Theo Van Gogh, le frère du peintre[12]. Le prince Napoléon y a été incarcéré[n 3],[3].

Pendant le siège de Paris, une ambulance est installée dans sa maison de santé. En récompense des soins qu’il y a prodigués aux blessés, Émile Blanche est élevé le au grade d'officier de la Légion d'honneur, qu’il occupait depuis 1854 à celui de chevalier[13]. Le 23 juillet 1871, il est élu aux élections municipales et siège au centre-droit[14], mais cette élection étant incompatible, avec celle, pour un autre quartier, de son beau-frère, l’architecte Léon Ohnet, en application de la loi électorale ne leur permettant pas de siéger dans cette assemblée tous les deux, un tirage au sort est organisé entre les deux élus, et il doit abandonner son siège, par décision du sort chargé de trancher la difficulté[15]. En 1877, il est élu associé libre de l’Académie de médecine[n 4]. On lui doit diverses améliorations dans le traitement des aliénés et l’invention d’un mandrin articulé[pas clair], applicable à ceux de ses malades qui refusent toute alimentation, dont il a publié la description[7].

Dans ses dernières années, il avait pris comme associé le docteur André Isidore Meuriot, pour le suppléer dans la direction de la maison de santé. Ses travaux font preuve de sûreté dans les études spéculatives et s’illustrent par la largeur des vues[7].

En 1910, vue de l'hôtel de Lamballe entre Auteuil et Passy, qui fut à partir de 1846 la seconde « maison du docteur Blanche ». Elle est dirigée à partir de 1852 par Émile Blanche.

Amateur d’art, en 1879, il commande à Auguste Renoir deux dessus-de-porte pour la salle à manger de sa maison de Dieppe. Grand amateur de musique, il indique au peintre le sujet Tannhäuser de Richard Wagner acte I et acte III : Apparition de Vénus à Tannhauser - Wolfram et Vénus, deux œuvres formant pendant[16].

Il a été président de la société médico-psychologique de Paris et de la société de médecine légale, vice-président de l’association des médecins de la Seine, président de la société de secours mutuels des médecins aliénistes et membre fondateur de la société des médecins du 16e arrondissement de Paris. Outre la Légion d’honneur, il était commandeur de l'ordre d'Isabelle la Catholique et chevalier de l'ordre de Charles III d'Espagne[9]:11.

Il avait épousé sa cousine, Félicité Baron-Chatillon (1820-1895). Leurs trois premiers enfants sont morts jeunes : Marie (1855-1860), Joseph (1856-1868) et Louis (-). Il est le père du peintre mondain Jacques-Émile Blanche, le beau-frère de l’architecte Léon Ohnet, l’oncle de l’écrivain Georges Ohnet et le frère d’Alfred Blanche, architecte à Paris.

Sépulture du docteur Blanche.

Il meurt en août 1893, âgé de 72 ans, dans la propriété qu’il avait fait construire en 1873, au 15, rue des Fontis[n 5], à Auteuil, d’une occlusion intestinale, consécutive à des lésions organiques de l’intestin. La cérémonie funèbre a lieu en l'église Notre-Dame-d'Auteuil[3]. Il est enterré au cimetière de Passy[n 6].

Edmond de Goncourt écrit quelques lignes sur « le vieux Blanche » dans son Journal du 27 août 1893, dont ceci : « La bonne et douce figure du docteur disait un peu de ses inépuisables charités ».

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. C’est dans cette clinique qu’il mourra.
  2. C’est dans cette clinique qu’il a commencé la rédaction d’Aurélia ou le Rêve et la Vie.
  3. Il disposait d’un pavillon, où il pouvait recevoir quelques visites, sous la surveillance d’un gardien spécial. Voir le Gaulois, op. cit..
  4. Pour son ouvrage Des homicides commis par les aliénés.
  5. Rue qui porte aujourd’hui le nom de son père.
  6. 2e section.

Références modifier

  1. « La Folie-Sandrin », paris-promeneurs.com, consulté le 28 décembre 2021.
  2. Guy de La Prade, Le Cimetière de Passy et ses sépultures célèbres, Paris, Éditions des écrivains, , 210 p., ill., couv. ill. en coul. ; 21 cm (ISBN 978-2-91213-425-7, OCLC 263928135, lire en ligne), p. 45.
  3. a b c et d Saint-Réal, « La mort des docteurs Charcot et Blanche », Le Gaulois, 17 août 1893, p. 1-2.
  4. Véronique Cauhapé, « La Clinique du docteur Blanche », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. Université de Paris IV : Paris-Sorbonne. Centre de recherche, d’étude et d’édition de correspondances du XIXe siècle, Correspondance d’Alfred de Vigny : mai 1839 - mars 1843, t. 4, Paris, Presses universitaires de France, , 928 p., 24 cm (ISBN 978-2-13048-898-9, lire en ligne), p. 873.
  6. Ernest Glaeser, Biographie nationale des contemporains, t. 1, Paris, Glaeser et Cie, , 838 p. (lire en ligne), p. 54.
  7. a b et c Georges Moreau, Revue universelle, t. 3, Paris, Larousse, , 733 p. (lire en ligne), p. 901.
  8. Emmanuel Desurvire, Charles Edmond Chojecki : patriote polonais, explorateur, soldat, poète, dramaturge, romancier, journaliste, bibliothécaire…, t. II 1857-1872, Saint-Escobille, E. Desurvire, , 400 p. (ISBN 978-1-47098-125-9, lire en ligne), p. 269.
  9. a et b Émile Blanche : 1828-1893, Corbeil, E. Crété, , 46 p., in-8° (lire en ligne sur Gallica), p. 3.
  10. Alberto Lumbroso, Souvenirs sur Maupassant, sa dernière maladie, sa mort : avec des lettres inédites communiquées par Madame Laure de Maupassant, et des notes recueillies parmi les amis et les médecins de l’écrivain, Rome, Bocca frères, , 708 p., 1 vol. : pl. et fac-sim. ; in-8° (lire en ligne sur Gallica), p. 8.
  11. (en) David Burke, Writers in Paris : Literary Lives in the City of Light, Berkeley, Catapult, , 258 p., 23 cm (ISBN 978-1-58243-958-7, OCLC 436619969, lire en ligne), p. 378.
  12. Laure Murat, La Maison du docteur Blanche : histoire d’un asile et de ses pensionnaires, de Nerval à Maupassant, Paris, Jean-Claude Lattès, , 424 p., 24 cm (ISBN 978-2-70962-088-8, OCLC 802966456, lire en ligne).
  13. Archives Nationales, « Dossier LH/252/1 », sur Base Léonore, (consulté le ).
  14. Mac Vernoll, « Première séance du conseil municipal de Paris », Le Monde illustré, Paris,‎ , p. 102 (lire en ligne sur Gallica, consulté le ).
  15. Adolphe Bitard, Dictionnaire de biographie contemporaine française et étrangère : contenant les noms, prénoms, pseudonymes de tous les personnages célèbres du temps présent, l’histoire de leur vie, de leurs actes et de leurs œuvres, la date de leur naissance et des principaux évènements de leur carrière, etc., Paris, L. Vanier, , 1198 p. (lire en ligne), p. 145.
  16. Huiles sur toile à vue arrondie sur les côtés 53 × 139 cm, signées et datées. Vente de la succession Mica Salabert par Hoebanx & Couturier en collaboration avec Ader & Tajan, Dauberville, Pacitti & de Louvencourt Drouot le 29 novembre 1993, La Gazette Drouot no 45, p. 18. Les deux toiles furent acquises par le même acheteur français.

Publications modifier

Articles modifier

  • « L’Aliénation mentale considérée comme cause de divorce », communication à l’Académie de médecine, 1884.
  • « La Mélancolie », communication à l’Académie de médecine, 1887.
  • « Le Traitement moral de la folie ».
  • « la Réforme sur la loi des aliénés ».
  • « Les Placements volontaires dans les asiles d’aliénés de la Seine ».
  • Un rapport sur les réformes à apporter dans la législation des aliénés, etc.

Ouvrages modifier

  • Du cathétérisme œsophagien chez les aliénés, 1848.
  • Des homicides commis par les aliénés, 1878.

Bibliographie modifier

Filmographie modifier

Iconographie modifier

Liens externes modifier