Abbaye de Salem

édifice religieux allemand
Abbaye de Salem
image de l'abbaye
Vue de l'abbaye depuis le nord-est
Nom local Kloster Salmansweiler
Diocèse Constance puis
Fribourg
Numéro d'ordre (selon Janauschek) CXXV (125)[1]
Fondation 15 mai 1138
Dissolution 1804
Abbaye-mère Lucelle
Abbayes-filles 190 - Raitenhaslach (1143-1803)
598 - Wettingen (1227-1841)
696 - Königsbronn (1302-1553)
Congrégation Cisterciens (1138-1804)
Période ou style Art cistercien
Architecture gothique
Coordonnées 47° 46′ 35″ N, 9° 16′ 39″ E[2]
Pays Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Ancien duché Souabe
Land Bade-Wurtemberg
Arrondissement Lac de Constance
Commune Salem
Site http://www.salem.de
Géolocalisation sur la carte : Bade-Wurtemberg
(Voir situation sur carte : Bade-Wurtemberg)
Abbaye de Salem
Géolocalisation sur la carte : Allemagne
(Voir situation sur carte : Allemagne)
Abbaye de Salem

L'abbaye de Salem (Kloster ou Reichskloster Salem) était une abbaye impériale cistercienne à Salem dans les environs de Constance en Allemagne.

Vue aérienne de l'abbaye de Salem

Histoire modifier

Moyen Âge modifier

Fondation modifier

L'abbaye est fondée en 1134 grâce au don de Guntram von Adelsreute, un chevalier germanique, qui offre certaines de ses possessions dans le Linzgau (de) pour créer une abbaye cistercienne. Il se tourne vers l'abbaye de Lucelle, à l'extrême sud de l'Alsace, pour trouver une communauté susceptible de fonder l'abbaye. Cette dernière, fondée seulement huit années auparavant, n'était pas encore suffisamment développée pour envoyer un groupe suffisant de moines (douze moines et un abbé) fonder un établissement au loin. Ce n'est qu'en 1137 que l'abbé de Lucelle accepte le départ d'une partie de sa communauté[3].

En 1138, le chevalier Guntram effectue un nouveau don, à Salmansweiler (qui deviendra plus tard « Salem »). Dès 1140, l'abbaye est confirmée dans sa fondation par le pape Innocent II, ainsi que par Frédéric II, duc de Souabe. Les empereurs Conrad III (en 1142) puis Frédéric Ier (en 1155) prennent également l'abbaye sous leur protection, lui conférant ainsi le statut d'abbaye impériale[3].

Développement médiéval et rayonnement modifier

Forte de cette protection, l'abbaye grandit rapidement. En 1147, elle compte déjà soixante moines ; ce nombre passe en 1311 à cent trente (plus 180 convers). De nombreuses donations lui sont effectuées, ce qui lui permet de s'agrandir considérablement, notamment par une politique active d'achat de terres, que mène particulièrement l'abbé Eberhard von Rohrdorf (de) (1191-1240). Cet accroissement ne se fait pas sans que ne se créent des tensions, notamment avec l'évêque de Constance, les seigneurs locaux et les paysans cultivant les terres qui entourent l'abbaye[3].

L'abbaye fonde au Moyen Âge des abbayes-filles : Raitenhaslach en 1143, Wettingen en 1227 et Königsbronn en 1302[2]. Par ailleurs, sa renommée profite aussi de son lien très fort avec l'église de Birnau, lieu de pèlerinage desservi par un prieuré dépendant de l'abbaye de Salem[4].

Les crises médiévales modifier

Une représentation de l'abbaye en 1536.

Au XIVe siècle, le monastère entre en crise. Des attaques de seigneurs voisins appauvrissent l'abbaye. Sous l'abbatiat d'Ulrich von Seelfingen, une amélioration survient. À la faveur de ce renouveau, les travaux de la nouvelle église abbatiale sont lancés (1297-1414). Celle-ci, de vastes proportion, est qualifiée de « Cathédrale » (Münster). Néanmoins, de nouvelles attaques de l'abbaye surviennent quand l'abbé prend publiquement le parti des Habsbourg, ce qui mécontente le comte de Werdenberg-Heiligenberg. À la fin de ce siècle, l'abbaye ne compte plus que cent moines et 80 convers[3].

Époque moderne modifier

Le renouveau à la Renaissance modifier

La faveur impériale est cependant conservée à l'abbaye et se manifeste au début du XVIe siècle, quand l'abbé de Salem est à plusieurs reprises membre du gouvernement impérial. Cette protection permet à l'abbaye d’échapper aux pillages durant la guerre des paysans[3].

La Réforme n'ayant eu que peu d'impact dans la région du monastère, l'abbaye de Salem n'est pas fermée ; au contraire, un développement économique et spirituel se produit, avec une reconstruction des bâtiments[3].

Les destructions du XVIIe siècle modifier

Le grand incendie du , tableau d'Andreas Brugger.

En revanche, la guerre de Trente Ans amène à l'occupation et donc au pillage de l'abbaye par les troupes impériales, suédoises et françaises. La communauté monastique est décimée d'environ un tiers ; en ce qui concerne les moines prêtres, leur nombre passe de cinquante à dix-huit[3].

La destruction la plus importante survient dans la nuit du 9 au , quand un incendie ravage complètement le monastère. La bibliothèque est notamment entièrement détruite[5].

La prospérité du XVIIIe siècle modifier

L'abbaye en 1765.

L'abbaye est réputée extrêmement prospère au XVIIIe siècle, en tout cas sur le plan matériel. Elle est entièrement rebâtie, sous la maîtrise d'œuvre de l'architecte Peter Thumb, à l'exception de l'église, relativement préservée de l'incendie. La reconstruction se fait en style rococo, en particulier sous l'abbatiat d'Anselme II (de), abbé de 1746 à 1798, durant lequel l'abbaye atteint l'apogée de sa richesse. Cette prospérité attire également les vocations : en 1780, l'abbaye compte 94 moines[3]. Le bâtiment principal est long de 180 mètres ; un clocher est érigé au-dessus de la croisée du transept, haut de soixante mètres et comptant seize cloches ; le poids de celles-ci est tel que l'ouvrage doit être démoli peu après sa construction[4].

L'église de Birnau est quant à elle entièrement rebâtie, toujours par Peter Thumb, également en style rococo[4].

Tout à la fin du XVIIIe siècle, l'abbaye est réputée avoir un revenu annuel d'un million de florins ; l'abbé était tellement puissant qu'à la fermeture de la totalité des abbayes françaises, François Trouvé, le dernier abbé de Cîteaux, lui transfère par motu proprio, avec la permission du pape Pie VII, la responsabilité de la totalité de l'ordre[6].

Fermeture modifier

La sécularisation de l'abbaye de Salem, tableau de Johann Sebastian Dirr.

L'abbaye est sécularisée par les troupes napoléoniennes en 1804. À cette date, elle est déjà de nouveau sur le déclin, mais elle compte encore 61 moines et 17 convers. Après la sécularisation, l'abbaye est utilisée par le margrave de Bade comme résidence principale[3] ; l'aménagement des lieux y est conforté, une école y est installée[7].

Architecture modifier

L'église abbatiale aujourd'hui.

L'église abbatiale modifier

Si, en dehors du clocher, l'apparence extérieure de l'abbatiale reste celle d'une église gothique, l'aménagement intérieur est complètement revu au XVIIIe siècle dans le style rococo. L'abbatiale compte notamment vingt-sept autels d'albâtres disséminés dans l'édifice, 94 stalles ornées de bas-reliefs représentant des scènes de l'Ancien Testament, trois tribunes dont celle de l'orgue, une vingtaine de statues[7].

Notes et références modifier

  1. (la) Leopold Janauschek, Originum Cisterciensium : in quo, praemissis congregationum domiciliis adjectisque tabulis chronologico-genealogicis, veterum abbatiarum a monachis habitatarum fundationes ad fidem antiquissimorum fontium primus descripsit, t. I, Vienne, , 491 p. (lire en ligne), p. 50 & 51.
  2. a et b (it) « Salem », sur cistercensi.info, Ordre cistercien (consulté le ).
  3. a b c d e f g h et i (de) Thomas Fricke, « Zisterzienserabtei Salem - Geschichte », sur Klöster in Baden-Württemberg (consulté le ).
  4. a b et c Leroux-Dhuys & Gaud 1998, Historique, p. 319.
  5. [Mabillon à Leibniz 1698] (de + fr) Gottfried Wilhelm Leibniz et Jean Mabillon, Correspondance de Leibniz : Oktober 1698 - April 1699, Oldenbourg Verlag, , 891 p. (ISBN 9783050032559, lire en ligne), « Jean Mabillon an Francois Pinsson für Leibniz Über Leibniz Edition des Chronicon Alberici Beilage zu N 356 », p. 590-592.
  6. [Hervé-Julien Le Sage 1798] Hervé-Julien Le Sage, De la Bretagne à la Silésie : mémoires d'exil de Hervé-Julien Le Sage (1791 à 1800), Éditions Beauchesne, , 433 p. (ISBN 9782701010427, lire en ligne), « L'abbaye de Salem », p. 331-337.
  7. a et b Leroux-Dhuys & Gaud 1998, Historique, p. 316.

Voir aussi modifier

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Articles connexes modifier

Liens externes modifier

Bibliographie modifier