Affaire Elisa Pilarski

Affaire Elisa Pilarski
Titre Affaire Elisa Pilarski
Pays Drapeau de la France France
Lieu Forêt de Retz (Aisne)
Date
Nombre de victimes 1 (Elisa Pilarski)

L'affaire Elisa Pilarski a pour objet la mort violente d'Elisa Pilarski, une béarnaise de 29 ans, enceinte de 6 mois, tuée le par de multiples morsures de chien en forêt de Retz, dans l'Aisne. Au moment du drame, Elisa Pilarski promenait un pitbull nommé Curtis appartenant à son compagnon Christophe Ellul, alors qu’une chasse à courre se déroulait à quelques centaines de mètres dans la même forêt. Christophe Ellul, arrivé peu de temps après sur les lieux du drame à la suite d'un appel de sa compagne, a accusé les chiens de la meute d’avoir tué cette dernière. La responsabilité de ces chiens est toutefois démentie par les expertises qui établissent que c’est Curtis qui a provoqué la mort d’Élisa Pilarski par ses morsures.

Une information judiciaire contre X conduit à la mise en examen pour « homicide involontaire » du propriétaire du molosse.

Enquête modifier

Le , Elisa Pilarski se trouvait en forêt de Retz, où elle promenait Curtis, un chien que son propriétaire présente au début de l’enquête comme un croisement d'un Patterdale avec un lévrier Whippet [1],[2]. Il s'avère après vérification par les gendarmes qu'il s'agit d'un Pitbull, chien interdit en France, importé illégalement depuis les Pays-Bas et non déclaré. Trois mois avant le drame, le chien avait remporté en Belgique un « concours de mordants sportifs » réservé aux pitbulls[2]. Il est à noter que le Pit Bull Terrier n'est pas considéré comme une race de chiens par la loi française, mais comme un type morphologique, la race American Staffordhire Terrier étant rattachée à ce type[3].

Après le drame, Christophe Ellul, le maître de Curtis, affirme avoir eu sa compagne au téléphone alors qu'elle se débattait, et que celle-ci aurait été tuée par les chiens d'une meute de chasse à courre présente sur les lieux.

Les chasseurs mis en cause arguent alors, dès le début de l'enquête, que leurs chiens sont contrôlés et qu'aucun chien de vénerie n'a jamais attaqué un humain, si on en croit la littérature consacrée à la vénerie. Il apparaît donc rapidement comme hautement probable que ce soit Curtis, entraîné au mordant pour des concours interdits en France, qui se soit retourné contre la compagne de son maître[4].

En décembre 2019, une cagnotte est néanmoins lancée sur internet dans le but de récolter de l'argent pour assurer la défense du chien Curtis. Elle rapporte 7 000 euros[5].

Le , le rapport d'expertise demandé par la justice à deux vétérinaires est rendu public[6]. Après avoir procédé à l'étude des mâchoires des 5 chiens du couple et de 62 autres appartenant à l'association de chasse à courre, les deux vétérinaires pointent la responsabilité de Curtis dans la mort d'Élisa Pilarski, en affirmant : « le chien Curtis est l'unique auteur des morsures ayant causé le décès […]. Les morsures individualisables sont compatibles avec la mâchoire du seul Curtis, et non des chiens de chasse. »[7],[8].

Les experts ont également examiné le comportement de Curtis, comportement qualifié de « prédation détournée de sa finalité [en raison de son dressage] contre nature, [relevant d'une] forme de maltraitance animale »[7]. L'expertise écarte en outre la thèse selon laquelle Curtis aurait défendu la victime contre les chiens de chasse : aucune trace des pattes de chiens de la meute autour du corps, aucune blessure des chiens de chasse qui résulterait d'un combat, et les blessures minimes sur la tête de Curtis ne sont pas consécutives à des morsures de chien, mais probablement causées par lui-même pour arracher sa muselière[9],[6].

Les résultats des analyses génétiques, communiqués le , confirment l'avis des experts : on retrouve l'ADN de Curtis sur le corps de Pilarski, pas ceux de la chasse à courre[10],[11].

Le , Christophe Ellul, le compagnon de la victime, est mis en cause par le procureur de la République[12],[13]. Son avocat demande une contre-expertise[14].

Une information judiciaire contre X est en cours pour « homicide involontaire par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence (…) résultant de l'agression commise par des chiens »[12].

Même après ces révélations sur les analyses des morsures de chien qui ont été fatales à Elisa Pilarski, Christophe Ellul continue d'affirmer qu'il est impossible que son chien soit responsable de sa mort[15] lors d'une conférence de presse donnée avec son avocat Alexandre Novion début . De plus, Ellul conteste le fait que son chien était dans une « situation illégale ». Enfin, la race même de Curtis pose question. Alexandre Novion conteste pour sa part à la télévision mi- la méthodologie et les conclusions des experts chargés des analyses qui ne correspondent pas selon lui aux constatations faites sur le corps par les médecins-légistes. Il annonce même qu'il va demander une contre-expertise et un complément d'information sur les analyses des tests ADN.

Le , Christophe Ellul est mis en examen pour homicide involontaire et placé sous contrôle judiciaire. Il lui est interdit d'entrer en contact avec la famille de la victime[16].

Le 29 mars 2021, il est à nouveau convoqué à Soissons, cette fois pour une confrontation avec la famille d'Elisa Pilarski. Le portable de cette dernière a été analysé, il contient des photos du chien prises pendant la promenade peu de temps avant son décès, ainsi qu'un texto de son compagnon : « Je le fais piquer », qui laisse à croire qu'il avait conscience du rôle de son chien dans le drame. La thèse de Christophe Ellul, arguant que le chien était muselé et ne pouvait avoir mordu sa compagne, s'effondre un peu plus, du fait que le chien ne portait pas de muselière sur les photos. Par ailleurs, le fait qu'une muselière n'appartenant pas à ce chien a été retrouvée dans le bois sur les lieux du drame, ouvre la porte à l'hypothèse selon laquelle elle aurait pu être apportée par Ellul lui-même, ce qui signifierait qu'il aurait délibérément modifié la scène du drame[17],[18].

Le chien incriminé, Curtis, fut quant à lui recueilli depuis dans un chenil en Haute-Garonne, en attente de son éventuelle euthanasie dès lors que son rôle dans la mort de sa maîtresse sera juridiquement définitivement établi[19].

Aspects juridiques liés à la possession de chiens de catégorie 1 et 2 modifier

L'American Pit Bull Terrier (pitbull) n'est pas reconnu comme une race par la législation française, contrairement à l'American Staffordshire Terrier (Amstaff). Tous les chiens typés pitbull sans papiers français sont classés en « catégorie 1 » selon la loi du , codifiée aux articles L211-12 à L211-16 du Code rural et de la pêche maritime, qui concerne les chiens dits "dangereux" définis par l'arrêté interministériel du [3]. Les Amstaff enregistrés au registre français sont en catégorie 2.

L'acquisition, l'importation et la cession (même à titre gratuit) des chiens de catégorie 1 sont interdites en France[20]. Leur stérilisation est obligatoire depuis cette loi de 1999, sous peine de six mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende pour les propriétaires contrevenants. Quand l'animal importé illégalement blesse ou tue un autre animal ou un humain, son détenteur risque jusqu'à cinq ans de prison et 600 000 euros d'amende. La loi datant de 1999 et l'espérance de vie de ces chiens étant de 8 à 15 ans, les seuls chiens de morphotype pitbull qui subsistent légalement en France sont des descendants d'American Staffordshire Terriers enregistrés en France avant cette date (chiens rentrant dans la catégorie 2 : chien de garde et de défense).

Bibliographie modifier

  • Olivier Darrioumerle et Matthias Tesson, Un chien, l'affaire Curtis-Pilarski, Le Cherche midi, [21]

Notes et références modifier

  1. « Femme tuée par des chiens dans l’Aisne: ce que l’on sait », sur LA VDN, (consulté le ).
  2. a et b « Importation illégale, concours de mordant : le profil du chien Curtis pose question », lefigaro.fr, 6 mars 2020, consulté le 1er novembre 2020.
  3. a et b « Les chiens de catégorie 1 et 2 dits « chiens dangereux » », sur agriculture.gouv.fr (consulté le ).
  4. « La dernière balade en forêt d’Elisa Pilarski et du chien Curtis », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. « Affaire Elisa Pilarski : "Ils se sont servis de moi" regrette la créatrice de la cagnotte pour le chien Curtis », sur France Bleu, (consulté le ).
  6. a et b Par Fabrice Alves-Teixeira, « Affaire Pilarski : le rapport complet de 46 pages qui accuse Curtis », sur Oise Hebdo, (consulté le ).
  7. a et b « Elisa Pilaski a été tuée par son chien Curtis, selon un rapport d'expertise », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. « Mort d'Elisa Pilarski : un seul chien l'a mordue, celui de son compagnon, selon les experts vétérinaires », nouvelobs.com, consulté le 1er novembre 2020.
  9. Par Fabrice Alves-Teixeira, « Les mensonges d'Ellul qui ont semé le trouble dans l'enquête Pilarski », sur Oise Hebdo, (consulté le ).
  10. « Mort d'Elisa Pilarski : seul l'ADN de son chien a été retrouvé sur son corps », liberation.fr, 3 novembre 2020, consulté le 4 novembre 2020.
  11. « Elisa Pilarski a été tuée par le chien de son compagnon et non par un chien de chasse, annonce le parquet », lemonde.fr, 3 novembre 2020, consulté le 4 novembre 2020.
  12. a et b « Mort d'Elisa Pilarski : son compagnon mis en cause par le procureur après l'implication de son chien Curtis », sur www.midilibre.fr, (consulté le ).
  13. Fabrice Alves-Teixeira, « Affaire Pilarski. Le procureur met en cause Christophe Ellul », sur www.oisehebdo.fr, (consulté le ).
  14. « Elisa Pilarski tuée par le chien Curtis : l'avocat de Christophe Ellul demande de nouvelles expertises », leprogres.fr, 4 novembre 2020, consulté le 4 novembre 2020.
  15. https://actu.orange.fr/france/mort-d-elisa-pilarski-mon-chien-curtis-est-innocent-il-n-aurait-jamais-touche-elisa-dit-son-compagnon-CNT000001uOIGZ.html.
  16. « Le compagnon d'Elisa Pilarski, tuée par un chien, mis en examen pour homicide involontaire », LeMonde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  17. « Mort d'Élisa Pilarski : une confrontation a eu lieu entre Christophe Ellul et la famille de la victime », sur Franceinfo, (consulté le ).
  18. « Affaire Pilarski : « Christophe Ellul n'a pas eu le temps de bouleverser la scène de crime », assure son avocat », sur LEFIGARO (consulté le ).
  19. « Mort d'Elisa Pilarski : le chien Curtis, seul responsable du décès selon les expertises, recueilli dans un chenil près de Toulouse », sur ladepeche.fr (consulté le ).
  20. « Chiens dangereux : le dispositif applicable ».
  21. « Un chien, l’affaire Curtis-Pilarski : un roman-enquête sur la mort tragique d’Elisa, "Notre objectif était de remettre la victime à sa place" », sur France 3 Hauts-de-France,

Liens externes modifier