Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués

établissement public à caractère administratif français visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale

L'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) est un établissement public à caractère administratif français sous tutelle des ministères de la Justice et du Budget visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale.

Histoire modifier

Création modifier

La création de l'Agrasc a été prévue par la loi no 2010-768 du , portée par le député des Ardennes Jean-Luc Warsmann[1]. Elle est effectivement créée par un décret en 2011, codifié en l'article R54-1 du code de procédure pénale [2].

Cette loi, afin de mieux appréhender les profits générés par la délinquance et le crime organisé, afin de renforcer l’effet dissuasif de la sanction pénale, a élargi le champ des biens susceptibles d’être saisis et confisqués. Elle a également créé une procédure de saisie pénale spéciale aux fins de confiscation, plus adaptée que les procédures civiles d’exécution, complexes et coûteuses.

Dans ce cadre, elle a inséré dans le code de procédure pénale les articles 706-159 à 706-164 relatifs à l'Agrasc, l’entrée en vigueur de ces textes étant subordonnée à l’édiction d’un décret en Conseil d’État, lequel a été publié le . L'activité de l'agence a débuté en .

Missions et prérogatives modifier

Les missions sont organisées autour de trois pôles :

Le pôle juridique modifier

Il exécute les décisions de justice. Pour cela il enregistre et exécute les saisies ; il exécute les décisions de restitution (désintéressement des créanciers publics) ; il indemnise les parties civiles ; il exécute les décisions de confiscation au profit du budget général de l’État, de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) et du fonds Proxénétisme ;

Le pôle opérationnel modifier

Il assiste les magistrats et enquêteurs et publie les mesures foncières et fournit un appui à l’exécution des confiscations d’immeubles et de fonds de commerce. D'après l'article 6[3], l'Agrasc est chargé du financement de la protection des lanceurs d'alertes par exemple.

Le pôle de gestion modifier

Il est structuré en une unité de gestion immobilière chargée de la valorisation et de la cession des actifs immobiliers et une unité de gestion mobilière.

La gestion est centralisée, sur un compte ouvert à la Caisse des dépôts et consignations ; il reçoit toutes les sommes saisies (c'est-à-dire appréhendées dans l’attente d’un jugement définitif, en vue d’une éventuelle confiscation) lors de procédures pénales en France.

L'agence procède à l’ensemble des publications, auprès des services de publicité foncière, des saisies pénales immobilières. L’agence est également chargée de la publication des confiscations immobilières prononcées par les juridictions.

Elle gère, sur mandat de justice, tous les biens complexes qui lui sont confiés, c'est-à-dire tous les biens qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration.

Elle assure la gestion de biens saisis et procède à leur vente et à la répartition du produit en exécution de toute demande d’entraide internationale ou de coopération émanant d’une autorité judiciaire étrangère. À ce titre, l'Agrasc a été désignée par la France, le , comme bureau de recouvrement des avoirs au sens de la décision du du Conseil de l’Union européenne.

Elle veille, le cas échéant, à l’information préalable des créanciers (créanciers publics ou victimes) avant exécution de toute décision judiciaire de restitution et à l’indemnisation prioritaire des parties civiles sur les biens confisqués à la personne condamnée.

Mesures conservatoires modifier

En application de l'article 706-166[4], en cas d'information ouverte pour l'une des infractions, punie d'une peine égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement, figurant au sein du titre Ier du livre III du code pénal, le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République, peut, dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article 706-103[5] du présent code, ordonner des mesures conservatoires sur les biens, meubles ou immeubles, divis ou indivis, de la personne mise en examen afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, l'indemnisation des victimes.

Les mesures comme hypothèque ou saisie conservatoire concernent les comptes bancaires, les actions et parts de sociétés commerciales ou civiles qu'elles soient cotées ou non cotées, gérées en portefeuille ordinaire ou sous forme de contrats d'assurance-vie. Les meubles de toute nature sont concernés comme voitures, avions, bateaux mais aussi objets d'art, meubles meublants, bijoux, or et métaux précieux monnayés ou en lingot. Enfin les immeubles de toute nature peuvent faire l'objet de mesures conservatoires. L'Agence peut transporter les meubles en entrepôt spécial, en confier la gestion à un tiers de confiance ou un gardien salarié.

La condamnation vaut validation des mesures conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés. Selon l'article 706-164, à l'issue de la condamnation de la personne mise en examen, ses victimes peuvent, dans un délai de deux mois après la condamnation, obtenir de l'Agence que leurs dommages et intérêts leur soient payés par prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens du débiteur dont la confiscation a été décidée par une décision définitive[6].

Une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, la mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique et de l'action civile.

Instances et moyens modifier

Le directeur général de l’agence est magistrat de l’ordre judiciaire, nommé par arrêté du ministre de la Justice pour une durée de trois ans renouvelable, il assure la gestion et la conduite générale de l’agence. Le directeur est assisté par le secrétaire général, nommé par arrêté du ministre du Budget[7].

Le conseil d'administration, présidé par un magistrat de l’ordre judiciaire, est composé de six membres de droit, de quatre personnalités qualifiées et de deux représentants du personnel de l’agence.

L'agence est composée d'agents provenant des ministères de la Justice, de l’Intérieur et du Budget. En 2023, les effectifs de l'Agrasc ont atteint 83 agents alors qu'en 2020 l'agence ne disposait que de 45 agents[8].

En 2021, deux antennes sont ouvertes à Lyon et Marseille[9]. Deux autres antennes sont ouvertes à Lille et à Rennes en 2022[10].

Activité et résultats modifier

Montant des avoirs criminels saisis par l'Agrasc avant éventuelle restitution[11],[12]:

L'évolution des saisies et confiscations pénales immobilières

depuis la création de l’agence[9]

2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022
Saisies 202 320 404 660 730 792 707 800 696 573 660 665
Confiscations 23 11 15 29 67 110 92 140 134 140 202 202
Confiscations

exécutées

- - - - 25 52 58 83 87 94 128 168

En 2017, l'agence a enregistré 21 036 affaires[13] (augmentation de 44 % par rapport à 2016). Le compte ouvert à la Caisse des dépôts a un solde de 986 656 328 euros. Les entrées de l'année se sont élevées à 221 786 616 euros et les sorties à 63 732 493 euros. Les entrées sont constituées du montant des sommes pénalement saisies ainsi que des produits des ventes ; les sorties sont constituées des sommes qui ont été versées au budget général de l’État, à la MILDECA et à l’Agence, aux parties civiles, et des sommes restituées aux mis en cause et aux créanciers publics.

Identité visuelle modifier

Références modifier

  1. Mathieu Delahousse, « Les confiscateurs », Vanity Fair n°12, juin 2014, pages 116-123 et 174-175.
  2. Article R54-1 du code de procédure pénale, Légifrance
  3. « N° 3785 tome I - Rapport sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (n°3623). », sur www.assemblee-nationale.fr (consulté le )
  4. « article 706-166 du code de procédure pénale », sur www.legifrance.gouv.fr
  5. « article 706-103 du code de procédure pénale », sur www.legifrance.gouvv.fr
  6. « article 706-164 du code de procédure pénale », sur www.legifrance.gouv.fr
  7. Bulletin officiel du ministère de la justice et des libertés Circulaire du 3 février 2011 relative à la présentation de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) et de ses missions NOR : JUSD1103707C
  8. vboccara, « Activité de l’AGRASC : un cercle vertueux », sur Actu-Juridique, (consulté le )
  9. a et b « Rapport d'activité 2021 de l'AGRASC | Ministère de la justice », sur www.justice.gouv.fr, (consulté le )
  10. « Agrasc : création de deux nouvelles antennes | Ministère de la justice », sur www.justice.gouv.fr, (consulté le )
  11. Philippe Romain, « Les saisies d'avoirs criminels explosent », in lefigaro.fr, 17 juillet 2013.
  12. « Les saisies d'avoirs criminels ont représenté un demi-milliard d'euros en 2014 », Le Figaro,‎ (lire en ligne)
  13. « Rapport 2017 », sur economie.gouv.fr

Liens externes modifier