Alain Duménil
Alain Duménil, né le [1] à Neuilly-sur-Seine, est un homme d'affaires franco-suisse, 465e fortune de France en 2013 (70 millions d'euros)[2].
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Alain Duménil a fait fortune en vendant la banque familiale Duménil-Leblé avant le krach de 1987, puis a investi dans l’immobilier à Paris via la société Acanthe Développement[3]. Il s’est ensuite diversifié dans l’industrie et dans le luxe, rachetant les marques Jean-Louis Scherrer et Stéphane Kélian, et a lancé certaines en Bourse, comme le couturier Francesco Smalto et le joaillier Poiray[3]. Il est également le propriétaire du quotidien économique romand L’Agefi.
Biographie
modifierAscension et chute de la banque Duménil-Leblé
modifierEn 1975, sorti de HEC, Alain Duménil hérite à l’âge de 26 ans de la société de courtage bancaire parisienne de son père[4],[5], l'établissement Duménil-Leblé, fondée en 1912
L'établissement, transformé en banque d'affaires[4], prospère rapidement sous la férule de Jacques Letertre, à qui Alain Duménil en a confié les clés en 1985. Jacques Letertre, qui appartenait à la direction du Trésor, âgé d'à peine 28 ans[6], multiplie par 50 le chiffre d'affaires de Duménil-Leblé[6].
Duménil-Leblé multiplie en effet « les bons coups » en bourse à une époque où les marchés financiers, dérégulés, explosent[6]. Durant ces « années folles de la finance »[7], Jacques Letertre se lance notamment à l'assaut du Groupe Rivaud, avec l'aide de la banque Stern, dirigée alors par Jean Peyrelevade. La prise de contrôle manque de peu mais le binôme en retirera une très importante plus-value[6].
En 1987, l'audace et les idées de Jacques Letertre séduisent Carlo De Benedetti , un homme d'affaires italien, et Alain Minc, alors président de Cerus. Alain Duménil vend ses parts à Cerus (qui appartient De Benedetti) au prix fort quelques mois avant le krach boursier[6],[8]. La même année, Alain Duménil s'établit en Suisse[9].
Cerus fusionne avec la banque en 1989[6] mais se trouve, à cause de cette dernière, désormais surexposée dans la spéculation immobilière. Sept années après le rachat, Cerus se résout à fermer la banque Duménil-Leblé, devenue un gouffre financier, en janvier 1996[6].
Rachat de la société foncière Acanthe Développement
modifierEn 1993, Alain Duménil rachète la société foncière Acanthe Développement dont le cours en bourse explose en 1999[10]. Avec elle, en pleine crise immobilière, il acquiert en effet à faible prix des immeubles de bureaux, d'habitations, mais également des commerces et des résidences hôtelières, qu'il parvient rapidement à revendre plus cher.
Alors que les activités de la société s’essoufflent, Alain Duménil met en vente Acanthe Développement en avril 2004 mais en garde finalement le contrôle à 66,1 % via Ardor Investments[11]. Il recentre toutefois l'activité sur l'immobilier haut de gamme de bureaux parisiens et dispose alors d'un patrimoine évalué à 400 millions[11].
Diversification dans le luxe
modifierAu début des années 2000, Alain Duménil se diversifie dans le secteur du luxe avec la volonté de constituer un groupe de « taille intermédiaire ».
Il crée ainsi le groupe Alliance Designers en 2002 qui rachète de petites sociétés de luxe en difficulté pour les relancer[12]. En 2002, il rachète la société France Luxury Group, en fin de restructuration, propriétaire des marques Jean-Louis Scherrer, Jacques Fath, Emmanuelle Khanh et du chausseur Harel. Ces marques se sont ensuite vu rejoindre par d'autres parmi lesquelles Francesco Smalto, Stéphane Kélian, Louis Féraud ou encore Poiray[13].
En 2006, l'entreprise rachète la marque de chaussure René Mancini[14], fermée en 2010 : certaines des marques appartenant au groupe ont été revendues (Jean-Louis Scherrer en 2011[12]), d’autres ont pris leur indépendance[12], conservant Alain Duménil dans leur capital (Jacques Fath, Louis Féraud) et quelques-unes ont été introduites en bourse[12] (Smalto, Poiray). Une d'entre elles, Stéphane Kélian, a déposé le bilan en 2005, reprise ensuite par le groupe Royer.
AD Industrie
modifierAu début des années 2000, Alain Duménil s'intéresse secteur industriel. Il crée en 2004 le groupe AD Industrie, devenu un acteur du secteur de la sous-traitance aéronautique, notamment auprès des motoristes (principalement Snecma, Turbomeca et Rolls-Royce[15][source insuffisante]), spécialisé en ingénierie mécanique et hydraulique[16]. Groupe français intervenant sur les secteurs de l’aéronautique, de la défense et de l’énergie (dont nucléaire), et constitué par le rachat et l’intégration successive de PME françaises possédant certaines expertises, AD Industrie affichait en 2012 un chiffre d'affaires de 185 M€ et plus de 1 400 emplois[17][source insuffisante]. Lors de la 53ᵉ édition du Salon aéronautique du Bourget, l'entreprise française a signé un accord avec le Maroc afin de doubler la capacité de son site de Midparc de Casablanca[18].
Culture
modifierAlain Duménil a repris les éditions de L’Herne en 2003[19], maison d’édition indépendante fondée au début des années 1960 et située rue Mazarine à Paris.
Il crée en 2007 un prix littéraire doté de 60 000 euros[20] et portant son nom, le Prix Duménil, qui récompense chaque année, en juin, le livre d'un auteur de langue française paru entre début janvier et fin avril.
Dans les années 2000, Alain Duménil a été le propriétaire du Théâtre de Paris[19] (situé 15, rue Blanche, dans le 9e arrondissement de Paris), il rassemble une salle de 1 100 places ainsi que le Petit Théâtre de Paris de 300 places dont il se séparera en , en le revendant à Jacques-Antoine Granjon, le patron de Ventes-privées.com.
Presse
modifierDébut 2009, Alain Duménil rachète à GSMN (Genolier Swiss Medical Network SA) 51 % du groupe de presse Agefi SA, qui détient en particulier L'Agefi, un quotidien économique suisse, pour 5 millions de francs suisses (environ 4 millions d’euros)[8].
Affaires judiciaires
modifierAlain Duménil est un « grand habitué des acrobaties financières »[21] qui lui ont valu de nombreuses difficultés avec la justice française et suisse.
Banqueroute frauduleuse de la maison Kélian
modifierAlain Duménil a acquis pour 3 millions d’euros la maison Stéphane Kélian, chausseur français, fin 2003, alors en redressement judiciaire, après un premier dépôt de bilan. L’entreprise est alors séparée en onze entités distinctes, chargées notamment de la vente en boutique, des solderies, de la logistique ou encore de la production. Alain Dumenil procède en 2005 à une augmentation de capital jugée frauduleuse de son groupe[12].
Alain Duménil est condamné par la justice française, le , à un an de prison avec sursis et 75 000 € d’amende pour complicité de banqueroute et complicité de faux en écriture et usage de faux en écriture dans le cadre de la liquidation de Stephane Kélian Production[22]. La justice lui reproche notamment d’avoir organisé la faillite de l’entreprise en 2005. Toutefois, le , la Cour européenne des droits de l'homme, saisie d'un recours pour violation des droits de la défense[23], a reconnu que la procédure n'avait pas été respectée (au motif que « la requalification opérée par la Cour d'appel de Grenoble, en cours de délibéré, de l'infraction de banqueroute à complicité de banqueroute a privé le requérant de la possibilité de discuter contradictoirement le bien-fondé de l'accusation pénale dirigée contre lui et de présenter sa défense sur la nouvelle qualification retenue dans des conditions satisfaisant aux exigences de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme »). La France a reconnu cette erreur de procédure.
Délit d'initiés
modifierL'Autorité des marchés financiers (AMF) impose à Alain Duménil une sanction de 500 000 euros pour avoir commis un délit d'initiés concernant la Foncière Paris Nord (anciennement « ADT »)[24]. Le 27 novembre 2014, cette décision est confirmée par la cour d'appel de Paris[25]. Le pourvoi d'Alain Duménil est rejeté par la cour de cassation le 11 mai 2017[26]
Fraudes fiscales
modifierAlain Duménil, contribuable suisse depuis 1997[3], a reçu des dividendes exceptionnels de la société immobilière Acanthe Développement entre 2003 et 2011 pour un montant total de 54 millions de francs suisses, qu'il aurait omis de déclarer, ce qui correspondrait à un montant d'impôts soustraits de 20 millions de francs[9]. Le , les autorités fédérales judiciaires suisses mènent des perquisitions aux domiciles d'Alain Duménil à Crans-Montana et à ses deux adresses à Genève[3]. Alain Duménil invoque en vain son immunité diplomatique malgache[27].
Le , le tribunal correctionnel de Paris condamne Alain Duménil pour fraude fiscale à 1 an de prison avec sursis et 37 500 euros d'amende. Ce même tribunal a condamné solidairement Alain Duménil à payer les impôts fraudés avec la SAS Financière des Pins et Alliance Développement Capital SIIC. Alain Duménil n'a pas fait appel de cette décision[28].
Le 28 décembre 2018, dans une autre procédure, le Conseil d'Etat a rejeté le pourvoi d'Alain Duménil visant à faire entériner par l'administration fiscale l'application à des sociétés de son groupe du régime d'imposition privilégié « mères/filles ».
Banqueroute frauduleuse d'Alliance Designers
modifierAlain Duménil est poursuivi pour banqueroute frauduleuse sur la société Alliance Designers et mis en examen[29] le 26 mai 2021.
Cette affaire l'oppose singulièrement à la DGSE qui avait investi dans la société de luxe des fonds d'Etat pour se prémunir en cas d'invasion du territoire[30] et aurait perdu 15 millions d'euros[21] dans cette banqueroute soupçonnée d'être frauduleuse. En 2016, deux agents de la DGSE auraient ainsi menacé Duménil lors de son arrivée à l’aéroport de Roissy afin de tenter de récupérer ces fonds. A la suite d'une plainte déposée par l’homme d’affaires, la justice ouvre une seconde enquête pour tentative d’extorsion et met en examen Bernard Bajolet, alors directeur des renseignements extérieurs français, en octobre 2022 pour « complicité d’extorsion » et « atteinte arbitraire à la liberté individuelle par dépositaire de l’autorité publique »[31].
Autres
modifierLe , il achète le château d'Alincourt dans l'Oise (à Parnes) dans une vente aux enchères, pour 4,57 millions d'euros[32]. Il tente alors de déloger les 80 familles locataires du parc dans un camping ouvert par l'ex-propriétaire en 1976, via une société de sécurité privée[32],[33],[34].
Le , Alain Duménil est contrôlé par trois policiers au volant d’une voiture lui appartenant, mais dotée d'une immatriculation diplomatique du fait de sa fonction d'attaché culturel de la république de Madagascar auprès de l’ambassade de Genève en Suisse. Alain Duménil tient des propos agressifs et profère des insultes à l'encontre de ces personnes dépositaires de l'autorité publique dans l'exercice de leurs fonctions. Le , le tribunal a estimé que la plainte déposée ensuite par les trois fonctionnaires de police était recevable, étant donné qu’Alain Duménil, s’il était couvert par un statut diplomatique, ne pouvait dans le cas présent s’en prévaloir puisqu’il était de nationalité française[35]. Alain Duménil a démissionné de ses fonctions auprès de Madagascar le [27],[36].
Publications
modifier- La fête royale (roman), Plon, (ISBN 978-2-259-20848-2, BNF 41257044)« C’est le premier roman, ou plutôt un récit qui se lit comme un roman, de l’homme d’affaires Alain Duménil, passionné de littérature et fasciné par son personnage qui avait l’envergure d’un homme d’État. Un livre foisonnant qui conte en fait une fable, celle de l’écureuil (Fouquet), de la couleuvre (Colbert) et du soleil naissant (Louis XIV) » selon Marie-Catherine, dans Famille chrétienne[37].
- Parfum d'empire : la vie extraordinaire de François Coty (biographie), Plon, (ISBN 978-2-259-21031-7, BNF 41491980).
- Rue Bassano (roman), Fayard, (ISBN 978-2-213-66851-2, BNF 42667462)Une histoire d'amour sous l'Occupation à Paris ayant lieu rue Bassano, où siège l'entreprise de l'auteur et homme d'affaires.
Décorations
modifier- Officier de l'ordre national du Mérite (2003[38])
- Chevalier du 22 octobre 1995[39]
- Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres (2004)[40]
La légion d'honneur lui est suspendue en 2014 pour dix ans, à la suite de ses condamnations[41],[42].
Notes et références
modifier- Site edecideur.info, fiche de présentation de la société AD Industrie dont Alain Duménil est le président.
- « Classement 2013 Fortunes de France », Challenges.
- François Pilet, « Le propriétaire de «L’Agefi» est soupçonné d’avoir caché 54 millions au fisc », L'Hebddo,
- Nicolas Cori, « Duménil, un habile créateur de cash », sur Libération, (consulté le )
- Sébastien Ruche, « Présent dans la presse et l’immobilier en Suisse romande », sur Le Temps, (consulté le ).
- Renaud Lecadre, « La saga Duménil Leblé s'achève, le malade est débranché. La banque est officiellement morte, hier, après avoir planté Carlo de Benedetti de 3 milliards de francs. », sur Libération, (consulté le )
- Eric Leser, « La banque d'affaires Duménil-Leblé va disparaître », sur Le Monde, .
- « Alain Duménil s'empare du quotidien économique suisse L'Agefi », Performance Bourse, 9 février 2009.
- « Le propriétaire de «L’Agefi» aurait caché 54 millions au fisc », sur 24 heures, (consulté le )
- « Acanthe Développement perçoit les dividendes de sa stratégie », Les Echos, (lire en ligne)
- Renaud Honoré, « Acanthe Développement revoit son orientation stratégique », Les Echos, (lire en ligne)
- « La marque Jean-Louis Scherrer tente de renaître de ses cendres », sur Les Échos, (consulté le ).
- « Alain Duménil va ajouter Poiray à son groupe de luxe », Les Echos, (lire en ligne).
- « Alliance Designers rachète René Mancini », Fashion Network, (lire en ligne).
- « AD Industrie - Atout Capital », sur Atout Capital, (consulté le ).
- Jean-Marc Faure, « AD Industrie rachète Exameca », sur La République des Pyrénées, .
- « Chiffres clés », sur adgroupe.com.
- « Aéronautique: AD Industries va doubler la capacité de son site à Midparc », sur Medias 24, .
- Nicolas Cori, « Duménil, un habile créateur de cash » , sur liberation.fr, Libération, (consulté le ).
- « Alain Duménil : un prix à tout prix », Livres Hebdo, (lire en ligne).
- David Bensoussan;Antoine Izambard, « L’homme d’affaires Alain Duménil vend un appartement à 100.000 euros le mètre carré », sur Challenges, (consulté le )
- Liquidation de Stephane Kélian.
- CEDH, DUMENIL c. FRANCE, 5 juillet 2019, 63418/13.
- « AMF: Alain Duménil doit payer 500.000€ », sur Le Figaro, (consulté le ).
- « SAN-2013-14 - Décision de la Commission des sanctions du 5 juin 2013 à l'égard des sociétés ADT, Lado, Y et Z et de MM. C, D, A et B », sur amf-france.org.
- Cour de cassation, « Arrêt du 11 mai 2017 », sur www.courdecassation.fr, (consulté le ).
- (de) Philippe Reichen et Thomas Knellwolf, « Widmer-Schlumpf liess Tresore von Verleger räumen », Tages-Anzeiger, (consulté le ).
- https://www.boursorama.com/bourse/forum/1rPACAN/detail/452096309/.
- Par Éric Pelletier Le 19 novembre 2016 à 07h00, « Alain Duménil poursuivi pour banqueroute », sur leparisien.fr, (consulté le ).
- Par Éric Pelletier Le 19 novembre 2016 à 07h00, « Alain Duménil poursuivi pour banqueroute », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « La DGSE et son magot secret dans les filets de la justice », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- « À Alincourt, le nouveau châtelain a déclaré la guerre aux campeurs », sur L'Obs avec Rue89, .
- Gautier Lecardonnel, « Millionnaire, pas gérant de camping »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Le Courrier picard, .
- Locataires harcelés au château d’Alincourt, Politis, 28 avril 2009 .
- Laurent Mauduit, « Un fait divers pitoyable en dit long sur les liens entre pouvoir et affaires », sur Mediapart, (consulté le ).
- François Pilet, « Le propriétaire de «L'Agefi» est soupçonné d’avoir caché 54 millions au fisc », L'Hebdo, (version du sur Internet Archive).
- « La fête royale », Famille chrétienne, (lire en ligne).
- [1].
- Décret du 14 mai 2003 portant promotion et nomination (lire en ligne)
- « Nomination ou promotion dans l'ordre des Arts et des Lettres juillet 2004 », sur www.culture.gouv.fr (consulté le ).
- « Alain Duménil et le "blé" de la DGSE », sur L'Express, (consulté le )
- Laurent Lagneau, « La DGSE dément tout tentative d'extorsion à l'encontre d'un homme d'affaires franco-suisse », sur Zone Militaire, (consulté le )