Alexis Debat
Naissance
Nationalité Drapeau de la France française
Pays de résidence États-Unis (depuis 2001)
Profession

Alexis Debat (né en 1977[1]) est un Français ayant travaillé aux États-Unis comme consultant politique pour divers médias et organismes.

Biographie modifier

Il a travaillé de 2001 à pour ABC News et pendant un an et demi, jusqu'en , pour la revue The National Interest, où il était directeur du programme de terrorisme et de sécurité nationale[2]. Il faisait aussi partie du Comité des consultants de la revue Politique internationale dirigée par Patrick Wajsman[3]. Debat travaillait en outre, jusqu'en , pour l'institut de sécurité nationale de l'université George Washington, sur un projet d'études sur la radicalisation islamiste en Afghanistan depuis 2005[4]. Depuis 2003, il est intervenu comme « expert » dans Time, U.S. News & World Report, le National Journal, le Boston Herald, le Los Angeles Times, Associated Press, PBS, etc. Il a aussi écrit des éditoriaux dans le Financial Times et l' International Herald Tribune [4].

Il a démissionné d'ABC News et du National Interest à la suite de doutes au sujet de son CV (il aurait notamment excipé d'une thèse à la Sorbonne non achevée ni soutenue[5], et se faisait passer pour un ancien employé du ministère de la Défense[6]) et parce qu'il avait publié des entretiens fictifs d'importantes personnalités dans la revue Politique internationale. Le , le ministère de la Défense a nié l'avoir employé, affirmant qu'il était simplement stagiaire pendant cinq mois en 2000[7].

À la suite du scandale, Alexis Debat serait « parti à l’étranger sans laisser d’adresse »[4]. Certaines sources à Washington affirment qu'il serait parti dans un pays du Moyen-Orient[1]. Il est en fait resté aux États-Unis et vit aujourd’hui a Los Angeles après avoir changé d’identité (Yves Bergquist).[1]

Scoop de Rue89 au sujet des pseudo-interviews (septembre 2007) modifier

Le , le site Rue89 révélait qu'il avait signé pour la revue française Politique internationale (pour laquelle il travaillait depuis quatre ans), dirigée par Patrick Wajsman, un certain nombre d'interviews fictives, dont celles de Barack Obama, candidat à l'investiture démocrate aux États-Unis [5],[8], Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale, Bill Clinton, ancien président des États-Unis, Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants, Michael Bloomberg, Bill Gates et Kofi Annan, l'ancien secrétaire général aux Nations unies[6]. Politique internationale a depuis retiré tous les entretiens et articles signés par Alexis Debat[9], qui lui-même a démissionné d'ABC News et du National Interest.

Alexis Debat a admis avoir fait une fausse interview de Barack Obama, mais en ce qui concerne les autres interviews, dont il admet aussi le caractère fictif, il rejette pour cela la responsabilité sur la revue Politique internationale. Patrick Wajsman, directeur de Politique internationale, dément cette version, jugeant l'affaire « surréaliste » [10]. Politique internationale a déclaré qu'ABC News les avaient informés au sujet de Debat[10] — bien qu'ils n'aient retiré leur entretien de Barack Obama qu'à suite du scoop de Rue89[9]. Patrick Wajsman a annoncé qu'il allait porter plainte contre Debat[11]. Debat, pour sa part, a affirmé qu'il allait poursuivre Pascal Riché, l'auteur du scoop de Rue89, ainsi que Rue89, pour « diffamation » [12].

Reprise par le Washington Post [13], l'affaire a déclenché une polémique aux États-Unis, le Nixon Center et ABC News étant tous deux très bien considérés. En outre, elle conduit à s'interroger sur les liens entre les consultants, payés, et les médias. Mother Jones souligne ainsi que si Debat était payé en tant que consultant pour ABC, il écrivait aussi des articles dans le Blogger d'ABC, et était aussi cité comme source pour divers articles, effaçant ainsi la frontière entre une source (payée, de plus, ce qui contredit la déontologie journalistique) et un journaliste[2].

Associated Press l'avait cité en 2001 et en 2004[7]. Debat avait aussi récemment affirmé, lors d'une conférence au National Interest, que le Pentagone avait un plan destiné à écraser en trois jours l'Iran, information reprise par le Sunday Times le et largement diffusée[14].

Démentis du ministère et de l'AFP en 2002 modifier

Si Alexis Debat était très bien intégré à Washington (district de Columbia), des doutes existaient pourtant depuis un certain temps. Ainsi, en , à la suite d'un entretien dans Libération, le ministère de la Défense dément l'information présentant Debat comme fonctionnaire du ministère (démenti publié par Libération) [6]. Le , à la suite d'un article d'ABC News au sujet de Zacarias Moussaoui, le Français accusé d'avoir participé aux attentats du 11 septembre 2001, où Alexis Debat se présentait de nouveau comme membre du ministère de la Défense, l'AFP publie une dépêche démentant cette information[2].

En , le Pakistan dément des informations fournies par Debat selon lesquelles les États-Unis et le Pakistan soutiendraient de manière clandestine le groupe Jundullah afin de déstabiliser l'Iran[2],[15].

En outre, Politique internationale avait décidé, à l'époque, de ne pas publier l'entretien avec Kofi Annan à la suite de protestations de son porte-parole, selon lesquelles cet entretien avait été monté de toutes pièces[16]. Mais la revue continua néanmoins à publier d'autres entretiens de Debat, jusqu'en .

L'enquête au sein d'ABC News modifier

Selon ABC News, où Alexis Debat était sous la supervision de Brian Ross, une enquête aurait été déclenchée à son sujet en à la suite d'informations venues de l'ambassade de France. Pourtant, selon Rue89, ce ne serait pas l'ambassade qui aurait contacté ABC News, mais bien l'inverse [17]. En , un lanceur d'alerte au sein d'ABC News a entamé une enquête discrète au sujet de Debat[18]. ABC News a ensuite publié un rectificatif confirmant les informations de Rue89. Selon eux, le lanceur d'alerte a mentionné un CV de Debat annoté par le ministère de la Défense, d'où leur erreur[19]. Mais Rue89 a affirmé, à son tour, que le CV en question n'avait pas été annoté par le gouvernement français, mais par un chercheur interrogé par la RAND Corporation qui voulait embaucher Debat[18].

Rue89 s'interrogeait aussi sur le fait que la seconde enquête au sein d'ABC News au sujet d'Alexis Debat, déclenchée à la suite de l'article de Pascal Riché, soit placée sous la direction de Brian Ross, son supérieur hiérarchique direct[20]. Selon ABC News, il a été cité comme expert en contre-terrorisme au sujet de Zacarias Moussaoui, des attentats de Londres du 7 juillet 2005 et de la traque de membres d'Al-Qaïda au Pakistan[11]. ABC News a décidé d'envoyer un journaliste au Pakistan afin de vérifier le travail de Debat[21].

Enfin, selon Brian Ross, les informations de Debat publiées par ABC News selon lesquelles Oudaï Hussein, le fils de Saddam Hussein, aurait obligé deux étudiants français à avoir des relations sexuelles en public, ont été vérifiées [21].

ABC affirme aussi qu'Alexis Debat les aurait prévenus que Matiur Rehman, suspecté d'activités terroristes, n'avait pas été arrêté au Pakistan, comme l'affirmait un article publié par ABC. Le lendemain de la publication de cet article, ABC l'a retiré parce que Rehman n'avait effectivement pas été arrêté[22]. ABC News a néanmoins retiré de son site, le , les articles de Debat[16].

Notes et références modifier

  1. a et b Nicolas Bourcier et Corine Lesnes, L'"affaire Debat", un bluff américain, Le Monde, 22 septembre 2007 (fr)
  2. a b c et d Laura Rozen, « Subject to Debat: Did ABC Know About Its Expert's Sourcing Problem? », Mother Jones, 14 septembre 2007
  3. Selon l'organigramme de Politique internationale, accédé le 15 septembre 2007.
  4. a b et c Philippe Grangereau, « Alexis Debat, indiscutable expert en bobards » in Libération, 21 septembre 2007 lire ici
  5. a et b Une fausse interview d'Obama dans Politique internationale, Rue89, 5 septembre 2007
  6. a b et c Guillemette Faure et Pascal Riché, Comment Alexis Debat a trompé tout Washington, Rue89, 14 septembre 2007
  7. a et b John Leicester, "France Casts Doubt on Ex-ABC Consultant", Associated Press, 14 septembre 2007 hosted.ap.org
  8. Howard Kurtz, Ex-ABC Adviser Faces New Allegations, The Washington Post, 14 septembre 2007
  9. a et b Pascal Riché, Politique internationale retire (enfin) sa fausse interview, Rue89, 10 septembre 2007
  10. a et b AFP, "Fausses interviews: Politique Internationale incrimine un "mystificateur"", 14.09.07 | 20h09, lemonde.fr
  11. a et b Brian Ross, Clinton, Pelosi, Greenspan, Powell, Bloomberg, Gates, Annan Also Say Interviews 'Fakes', ABC News, 13 septembre 2007
  12. Alexis Debat Responds, Talking Points Memo
  13. Howard Kurtz, Consultant Probed in Bogus Interview, The Washington Post, 12 septembre 2007
  14. Sarah Baxter, Pentagon ‘three-day blitz’ plan for Iran, The Sunday Times, 2 septembre 2007
  15. Justin Rood et Gretchen Peters, Pakistan Denounces ABC News Report on Backing Iran Radicals, ABC News, 5 avril 2007
  16. a et b Suzanne Goldenberg, 'Expert' who made up interviews is exposed, The Guardian, 15 septembre 2007
  17. Guillemette Faure, ABC News enquête sur les "scoops" de son expert, Rue89, 12 septembre 2007
  18. a et b Pascal Riché, A whistleblower alerted ABC News about the reliability of its consultant, Rue89, 14 septembre 2007
  19. CV annoté par un chercheur d'Alexis Debat, procuré par Mother Jones
  20. Guillemette Faure, ABC NEWS investigates one of its terrorism experts, Rue89, 12 septembre 2007
  21. a et b Bill Carter, ABC Reopens Investigation, Again Wary of a Reporter, The New York Times, 14 septembre 2007
  22. Bill Carter, Former ABC Consultant Says He Faked Nothing, The New York Times, 15 septembre 2007