Alphonse Cabra
Alphonse Cabra, né le à Chièvres et mort le à Anvers, est un officier et explorateur belge dans l'État indépendant du Congo. Il est connu pour ses travaux de traçage et de bornage de la frontière entre l'État indépendant du Congo et les colonies voisines. Il a participé aux combats de la Première Guerre mondiale à Namur et sur le front de l'Yser. Il a atteint le grade de lieutenant-général.
Alphonse Cabra | |
Naissance | Chièvres, Belgique |
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Décès | (à 69 ans) Anvers, Belgique |
Origine | Belge |
Arme | infanterie |
Grade | lieutenant général |
Années de service | 1878 – 1924 |
Commandement | IIe corps d'armée (Anvers) (1919→1924) |
Conflits | Première Guerre mondiale |
Faits d'armes | révolte des Batetela du fort de Shinkakasa en 1900, siège de Namur en 1914 |
Autres fonctions | topographe, « Commissaire du Roi souverain » (1901→1907) |
Famille | Berthe Gheude de Contreras (son épouse) |
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Biographie
modifierJeunesse et début de carrière militaire
modifierAlphonse François Édouard Cabra, né le à Chièvres, est le fils d'Alphonse Cabra, employé des accises, et d'Athanasie Seghers. Le , il épouse Berthe Gheude de Contreras qui deviendra grâce à ces missions de topographie en 1906, la première femme blanche à traverser l'Afrique d'est en ouest. Il est l'oncle de l'as belge de l'aviation lors de la Première Guerre mondiale, Willy Coppens de Houthulst.
En 1878, il entre comme mineur volontaire de 2e classe au régiment du Génie. Promu sergent, et grâce à une bourse d'études, il devient, entre 1880 et 1882, élève à l'École royale militaire. Il en sort avec le grade de sous-lieutenant et est affecté au régiment des Carabiniers. Élevé au grade de lieutenant en 1887, il rentre à l’École de Guerre, sort premier de sa promotion en 1890 et breveté d'état-major.
Entre 1890 et 1894, il est adjoint d'état-major au 5e régiment de Ligne et, en 1894, devient capitaine-commandant ainsi que l'aide de camp du lieutenant-général Félix Marchal.
Séjours en Afrique
modifierEn 1896, sa carrière prend un tournant imprévu. Il est désigné, par ses chefs, pour continuer une mission scientifique dans la province de Boma (Voir carte de 1888) dans l'État indépendant du Congo.
Il effectue en tout cinq missions dans l'État indépendant du Congo :
- à : il s'occupe de la construction du chemin de fer Matadi-Tumba et de la région du Bas-Congo et assiste à l'inauguration du premier tronçon de voies le . Jusqu'au , il fait des observations géodésiques et magnétiques au Mayombe en vue de la construction du chemin de fer en direction de Stanleyville.
- à : le capitaine Cabra délimite de à la frontière entre l'État indépendant du Congo et l'enclave portugaise de Cabinda [1]. À la suite d'un différend avec le vice-gouverneur général Émile Wangermée, il démissionne et retourne à Boma. Du 17 au , il participe aux opérations de poursuite des mutins du fort de Shinkakasa puis retourne en Belgique, résidant à Bruxelles ;
- à : il est chargé comme commissaire du roi Léopold II de la délimitation du parallèle entre Noki sur le fleuve Congo et la rivière Kwango et borne la frontière entre l'État indépendant du Congo et l'Angola. Le commandant Cabra revient en Belgique à bord de l'Anversville en et réchappe à son retour au Congo en au naufrage du vapeur Stanleyville.
- juin à : il part de Belgique à bord de l'Anversville en . Sa mission est de tracer et borner la frontière entre l'État indépendant du Congo et le Congo français. Lors de cette mission, il est accompagné par son épouse qui lui sert d'adjoint et de public relation avec les Français[Notes 1] ;
- à : inspection des postes militaires des provinces orientales de Ruzizi et du Kivu dans la région des Grands-Lacs convoitées par les Allemands. Cette mission fait sensation en Europe car son épouse devient la première femme à traverser l'Afrique d'est en ouest (de Mombasa à Boma). En , Berthe Cabra rentre en Belgique alors que son mari est appelé d'urgence à Uvira pour un problème de frontière entre l'État indépendant du Congo et l'Afrique orientale allemande. Malade, Alphonse Cabra doit, aussi, rentrer en Europe et arrive au port d'Anvers le . C'est sa dernière mission en Afrique.
Chacune de ses missions lui a donné l'occasion d'effectuer des études scientifiques comme la collecte d'échantillons de minéraux, d'insectes, de plantes ou de tétrapodes naturalisés mais aussi de photographies et de relevés météorologiques. Cette collecte fait, maintenant, partie intégrante des collections du musée royal de l’Afrique centrale à Tervuren. Ses comptes rendus d'inspection du cadre militaire concernant aussi bien la discipline, les rapports des militaires avec la population civile ou la présence souhaitable des épouses européennes « ...les missions où se trouvent des femmes, où les choses prennent une tout autre tournure et ne sentent pas le provisoire... »[2] sont d'une sensibilité très en avance sur l'époque. Ses notes ethnographiques et sociologiques parlent aussi de la place de l'enfant « ...serviteur de l'adulte... » ou de la femme « ...l'esclave et la bête de somme », « ... les dumbas ou femmes libres non mariées, dont le sort est, morale mise à part, plus enviable que celui de la femme mariée. »[3]. Il était opposé au travail forcé des Noirs, au portage pour des salaires de misère et aux transferts de population. À ce titre, il s'est attiré l'inimitié de certains colons blancs[4].
Suite de sa carrière en Belgique
modifierAprès sa guérison, il reprend du service dans l'armée en . Il est nommé dans différents états-majors. La mobilisation générale du pour la Première Guerre mondiale le trouve colonel de la 4e division d'armée et chef d'état-major du général Michel, commandant la Position fortifiée de Namur. Après la chute de celle-ci en , il se replie en France et rejoint la Position fortifiée d'Anvers. Sur l'Yser, il est promu en 1915 général-major commandant la 5e brigade puis de la 2e division d'armée. C'est à la tête de cette division qu'il participe en 1918 dans les Flandres à l'offensive libératrice de la Belgique. Sa division livre notamment de violents combats pour conquérir la « Flandern-stellung » ainsi qu'à Izeghem, Ingelmunster et Oostrozebeke[5].
En 1919, il est promu lieutenant-général, grade le plus élevé dans la hiérarchie militaire belge. Il est nommé gouverneur militaire de la Position fortifiée d'Anvers et commandant de la 2e circonscription militaire d'Anvers et s'installe avec sa famille à Berchem. Il est finalement désigné comme commandant du IIe corps d'armée jusqu'à sa retraite en 1924.
Il a fait partie de nombreuses associations ou société privées :
- membre du Conseil colonial en 1919 par vote du Sénat et le restera jusqu'à sa mort en 1932 ;
- membre d'honneur du Comité belge d'organisation des Jeux olympiques de 1920 à Anvers en 1920;
- membre de conseils d'administration de sociétés belges et coloniales ;
- président du conseil d'administration de Bell Telephone Company ;
- membre d'honneur de la Société philanthropique Mutualité congolaise (à partir de 1924) ;
- membre d'honneur de la Société royale belge de géographie.
Alphonse Cabra meurt le à Anvers et est inhumé dans une des parcelles militaires du cimetière de Schoonselhof à Wilrijk (allée no 32, tombe no 16)[6].
Ouvrages et manuels
modifier- Émile Libbrecht et Alphonse Cabra, Attaque et défense des places, Bruxelles, G. Deprez, , 166 p. (OCLC 13910708) (KBR code II 66.618 A)
- Mission Cabra, 1897-1898-1899 : Délimitation des frontières, t. I et II, , 248 p. — Rapports manuscrits en deux tomes de 124 pages chacun.
- Manuel d'astronomie, de géodésie et de cartographie pratiques : À l'usage des officiers et des explorateurs de l'État indépendant du Congo et des colonies, Bruxelles, F. Vanbuggenhoudt, , 186 p. (OCLC 16916181)
Hommage et distinctions
modifierLa rue général Cabra (Generaal Cabrastraat) à Berchem.
Il a reçu de nombreuses distinctions belges et étrangères. Il a été fait :
- Grand officier de l'ordre de Léopold en 1922 (Belgique) ;
- Grand-croix de l'ordre de la Couronne en 1924 (Belgique) ;
- Croix militaire de 1ère classe en 1907 (Belgique) ;
- Croix de Guerre 14-18 en 1916 (Belgique) ;
- Étoile de Service en 1899 (État indépendant du Congo) ;
- Chevalier de l'ordre de l'Étoile africaine en 1904 (État indépendant du Congo) ;
- Grand-croix de l'ordre de l'Étoile noire en 1921 (France/Bénin) ;
- Grand cordon de l'ordre militaire du Mérite d'Espagne en 1922 ;
- Grand cordon de l'ordre de Saint-Sava en 1922 (Serbie) ;
- Modèle:Déco Grand Officier de l'ordre des Saints-Maurice-et-Lazare en 1922 (Italie) ;
- Grand officier de l'ordre de la Couronne d'Italie en 1922
- Grand officier de l'ordre Polonia Restituta en 1922 (Pologne) ;
- Commandeur de la Légion d'honneur en 1918 (France) ;
- Distinguished Service Medal en 1922 (États-Unis) ;
Notes et références
modifierNotes
modifier- Alphonse Cabra s'est toujours félicité d'avoir son épouse à ses côtés pour faciliter les relations humaines (Inventaire des archives historiques des époux Cabra - Chapitre II, p. 24).
Références
modifier- « Le lieutenant-général Cabra est mort mardi à Anvers », L'Indépendance Belge, , p. 2 (lire en ligne )
- Inventaire des archives historiques des époux Cabra.[réf. incomplète]
- Inventaire papiers Alphonse Cabra, lieutenant général (1862-1932), Rapport 1897-1899, 1re minute, 3e partie, pp. 30-43
- R.D., « Madame Cabra, première femme blanche qui traversa le continent africain », La Libre Belgique, , p. 1 (lire en ligne )
- « Mort du général Cabra », Le Soir, , p. 2 (lire en ligne )
- Jacques Buermans, « Alphonse Cabra », sur schoonselhof.be (consulté le )
Bibliographie
modifier- C. Libens, Inventaire papiers Alphonse Cabra, lieutenant général (1862-1932), Tervuren, Musée royal de l'Afrique centrale, coll. « Inventaire des archives historiques / 7 » (no D/1977/0254/9), (lire en ligne [PDF])