Apparitions mariales de Louda
Les apparitions mariales de Louda ou les apparitions mariales de Yagma désignent des événements survenus au Burkina Faso, en différents lieux mais principalement dans les sanctuaires mariaux de Louda et de Yagma, où une fille, Marie-Rose Kaboré, a affirmé être témoin d'apparitions de la Vierge Marie de 1986 à 1996.
Date | du à 1996 |
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Lieu | Sanctuaire marial de Louda et Sanctuaire marial de Yagma Burkina Faso |
Résultat | Apparitions non reconnues par l’Église catholique |
Ces affirmations ont fait l'objet d'une enquête canonique par l'évêque du lieu, Mgr Guirma en 1993 qui l'amène, à la fin de la même année, à reconnaitre les apparitions. Une seconde déclaration en 1995 confirme cette première décision. Cependant, sa décision est contestée par le cardinal Zoungrana du diocèse de Ouagadougou (également lieu d'apparitions). En 1994, Mgr Zoungrana, après avoir établi sa propre commission d'enquête canonique condamne ces présumées apparition (sur le périmètre de son diocèse). Il est suivi en 1996 par Mgr Jean-Baptiste Tiendrebeogo, le nouvel évêque de Kaya, qui prend la succession de Mgr Guirma. Depuis cette date, ces supposées apparitions ne sont plus reconnues par l’Église catholique comme « authentiques ».
Historique
modifierLe contexte
modifierLe sanctuaire de Yagma a été fondé par des laïcs locaux en 1967, et dédié à Notre-Dame de Lourdes. Le lieu devient rapidement un centre de pèlerinage marial pour tout le diocèse. Le sanctuaire de Louda, consacré au Cœur immaculé de Marie, est fondé par le Mgr Guirma, au début de son épiscopat, en 1979[1].
Marie-Rose Kaboré fait partie d'une famille pauvre de 12 enfants. En 1986, elle est catéchumène (se préparant au baptême) et elle étudie au lycée[2]. Elle vit dans la paroisse de Kologh-naba. Son curé, le père Guirma, deviendra l'évêque du diocèse de Yagma[1].
Les apparitions
modifierLe , Marie-Rose, élève au lycée Newton, déclare « voir une jeune fille » et notifie la directrice de l'établissement que cette « jeune fille » demande que tous les élèves de l'établissement se rendent le dimanche suivant (le 29 juin) au sanctuaire marial de Yagma[N 1]. Les élèves se rendent sur ce lieu de pèlerinage et le jour dit, le 29 juin, Marie-Rose déclare « revoir la Vierge ». Une autre enfant présente déclare avoir reçu un message de la Vierge : « une pluie abondante tombera sur la région en proie à la sécheresse ». Le lendemain, une averse torrentielle s'abat sur Yagma[2].
En juin 1988, la voyante annonce que « Yagma sera une cité sainte, un centre de pèlerinage international et que le Pape en personne viendrait bénir cette colline »[N 2],[1].
Postérité, reconnaissance et contestation
modifierMarques de reconnaissances ecclésiales
modifierAvant même la reconnaissance canonique des apparitions, les autorités de l’Église catholique ont apporté des marques implicites de reconnaissance à ces événements, comme le premier pèlerinage national au sanctuaire de Yagma en 1989, avec la participation du cardinal Etchegaray, ou celui du en présence du pape Jean-Paul II[2].
La voyante
modifierLe , Marie-Rose est consacrée au Cœur immaculé de Marie. La voyante déclare continuer a bénéficier d'apparitions mariales en 1993 et après la reconnaissance canonique. En 1995 elle s'installe à Ouagadougou, dans la résidence même de l'évêque. Les « messages qu'elle dit recevoir » en grand nombre font de nombreuses références à « la France fille ainée de l’Église »[2].
D'après René Laurentin, la voyante dérive dans les années 1995, abandonnant la pratique religieuse, ayant des problèmes de mœurs, et sollicitant de plus en plus de dons, demandes relayées par l'évêque qui continue de la soutenir et lui faire confiance. D'après l'auteur, c'est « un cas instructif sur les risques et tentations des voyants », soulignant ainsi le besoin pour les voyants de disposer de « conseils et de guides sûrs » sachant les éclairer dans les oppositions parfois violentes dont ils font l'objet[2].
Vivant en vase clos, entourée de quelques religieux qui lui sont restés fidèles, la jeune femme continue à déclarer qu'elle reçoit des messages du Ciel, et développe une vie de plus en plus « libre ». Elle meurt le , âgée de 42 ans, « abandonnée de ses anciens soutiens, dans la plus grande détresse spirituelle et morale »[3].
Contestations
modifierÀ partir de 1995, des rumeurs contestant l’authenticité des faits et la moralité de la voyante se font jour. René Laurentin écrit dans son Dictionnaire des apparitions « qu'aujourd'hui, Marie-Rose n'a plus aucun crédit auprès de l’Église locale » (du fait de dérives postérieures à la reconnaissance canonique). Selon l’auteur, Mgr Guirma, après avoir reconnu officiellement la voyante, s'est laissé influencer par elle et manipuler par la jeune femme[2].
René Laurentin rapporte que la voyante fait de fréquentes demandes de fonds et de dons en nature « au nom de la Vierge » qui troublent et choquent les correspondants européens. La police elle-même accuse les mœurs de la présumée voyante.
Position officielle de l’Église catholique
modifierLe Mgr Guirma met en place une commission d'enquête canonique. Dans le cadre de cette enquête, la voyante est examinée par le docteur Philippe Loron, neurologue à la Salpêtrière[2].
Le , l'évêque reconnait officiellement les apparitions et proclame que « la Dame du Ciel et son Fils s'étaient manifestés et se manifestent » au Burkina Faso. Le , l'évêque confirme la reconnaissance des apparitions mariales survenues à Louda et Yagma dans une lettre pastorale où il déclare : « En raison des signes qui nous ont été donnés (...), j’ai reconnu et proclamé à mes diocésains l’authenticité des apparitions de la Vierge Marie à Marie-Rose, ayant eu lieu dans mon territoire à Louda et à Kaya, et par là même, j’ai reconnu l’authenticité de toutes les apparitions de la Vierge et de son Fils à la petite Marie-Rose partout où elle s’est trouvée, entendu que ces apparitions ne sont pas attachées à un lieu mais à la personne de la petite voyante. »[2], [4].
Cependant, le cardinal Zoungrana du diocèse de Ouagadougou considère que Mgr Guirma « outrepasse son pouvoir ordinaire de juridiction en reconnaissant l’authenticité des apparitions partout où la visionnaire se trouve »[N 3]. Il institue le une commission canonique dans son propre diocèse pour étudier les apparitions survenues dans son diocèse, dans le sanctuaire de Yagma. À l'issue du travail de cette commission, le cardinal Zoungrana condamne officiellement les apparitions survenues dans son diocèse, sur le site de Yagma[4],[N 4],[3]. En mars 1996, Mgr Jean-Baptiste Tiendrebeogo prend la succession de Mgr Guirma dans le diocèse de Kaya. Contrairement à son prédécesseur, il se rallie, dès sa prise de fonction, à la décision de Mgr Zoungrana, et condamne à son tour les présumées apparitions mariales survenues dans son diocèse (dans le sanctuaire de Louda). Si bien que depuis cette date, les apparitions ne sont plus reconnues par l’Église catholique, ni à Louda, ni à Yagma[4],[3].
D'après Justine Louis, en 2007, Mgr Guirma n'est pas revenu sur sa décision initiale de reconnaissance. Juistine Louis indique qu'il « soutient toujours la présumée voyante » et continue à transmettre les « messages que la voyante reçoit »[4].
Notes et références
modifierNotes
modifier- Ce sanctuaire de Yagma a été fondé en 1967 par des laïcs.
- Ce sera effectivement le cas deux ans plus tard, quand le pape Jean-Paul II viendra en visite dans le pays.
- Selon les règles établies par le Vatican, un évêque ne peut se prononcer que sur des événements survenus dans son diocèse.
- L'évêque, Mgr Zoungrana écrit le , dans sa déclaration : « Je déclare que, en l’état actuel des choses, il n’existe aucun signe d’authenticité et de crédibilité des dits messages et apparitions de Yagma. (...) J’interdis, sur l’ensemble du territoire du diocèse de Ouagadougou, toute célébration publique qui serait organisée en lien avec ces dits messages et apparitions de Yagma. (...) Je demande au curé de la Paroisse de Kologh-Naaba de signifier à la principale actrice de ces faits d’avoir à cesser toute activité dans les associations de service d’Église (...). ».
Références
modifier- Joachim Bouflet et Philippe Boutry, Un signe dans le ciel : Les apparitions de la Vierge, Paris, Grasset, , 475 p. (ISBN 978-2-246-52051-1), p. 435-438.
- René Laurentin et Patrick Sbalchiero, Dictionnaire des "apparitions" de la Vierge Marie, Fayard, , 1426 p. (ISBN 9782213-671321, lire en ligne), p. 1357-1358.
- Joachim Bouflet, Les apparitions de la Vierge Marie : Entre merveilles et histoire, Cerf, , 909 p. (ISBN 9782204118231, lire en ligne).
- Justine Louis, L'Église catholique face à l'extraordinaire chrétien depuis Vatican II : Mémoire de thèse, Lyon, Université Lyon 3, , 536 p. (lire en ligne), p. 127,360,363,364,366.
Annexes
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifierBibliographie
modifier- René Laurentin et Patrick Sbalchiero, Dictionnaire des "apparitions" de la Vierge Marie, Fayard, , 1426 p. (ISBN 9782213-671321, lire en ligne), p. 1357-1358.
- Joachim Bouflet et Philippe Boutry, Un signe dans le ciel : Les apparitions de la Vierge, Paris, Grasset, , 475 p. (ISBN 978-2-246-52051-1), p. 435-438.
- Nicolas Damiens, Quand le ciel parle aux hommes de ce temps : Les récentes manifestations de la Vierge Marie reconnues par l'Eglise catholique (1947-2002), Francois-Xavier de Guibert, , 191 p. (ISBN 978-2755400281), p. 125-143.
- René Bélemsida Guirma, Au Burkina, la Dame du ciel et son Fils nous visitent et nous parlent : apparitions et messages à Marie Rose Kaboré, Editions du Parvis, (ISBN 978-2880221829).