Argentinosaurus
Argentinosaurus huinculensis
Argentinosaurus est un genre fossile de dinosaures sauropodes du groupe des Titanosauria, et l'un des plus grands dinosaures jamais découverts. Selon Paleobiology Database en 2022, ce genre est resté monotypique et la seule espèce est Argentinosaurus huinculensis.
Présentation
modifierArgentinosaurus, découvert en Argentine en 1989 par le paléontologue Guillermo Heredia, est un genre de dinosaures sauropodes du groupe des Titanosauria. Il est l'un des plus grands dinosaures jamais découverts[1]. Les restes retrouvés se limitant à quelques rares ossements, morceaux de vertèbres et péroné, les estimations de sa taille sont cependant entachées d'une marge d'erreur importante. Les estimations actuelles font état d'une longueur de 35 mètres[2],[3] (basée en partie sur le taxon-sœur Patagotitan) et un poids d'environ 80 tonnes[4]. Ce dinosaure géant a vécu au Crétacé supérieur, plus précisément au Cénomanien, il y a entre 96,2 et 92,19 millions d'années, dans ce qui est maintenant l'Amérique du Sud.
Le genre Argentinosaurus ne comporte, à ce jour, qu'une seule espèce, Argentinosaurus huinculensis. Le nom générique Argentinosaurus, que l'on peut traduire par « Lézard d'Argentine », fait référence au pays d'origine du fossile. Le nom spécifique fait lui, plus précisément référence au lieu de découverte, la ville de Plaza Huincul dans la province de Neuquén[5].
Découverte
modifierLes premiers fossiles d'Argentinosaurus sont découverts en par Guillermo Heredia, un éleveur local. Son signalement permet l'exhumation d'un os fossile, dans un premier temps identifié comme un tibia, par l'équipe du musée Carmen Funes de Plaza Huincul. Puis, à l'été , une équipe du Musée argentin des sciences naturelles de Buenos Aires dirigée par José F. Bonaparte procède à la mise au jour d'autre matériel fossile. Ce matériel rejoint également les collections du musée Carmen Funes[6].
« Je travaillais dans le Neuquén en 1987 et un jour je suis allé voir le musée de Plaza Huincul. Je suis tombé sur quelque chose de surprenant : un tibia très érodé donné par un marchand ambulant qui l'avait trouvé aux abords de la ville », raconte José F. Bonaparte. Après s'être rendu sur les lieux avec le directeur du musée, ils constatent le gigantisme de l'animal découvert. La municipalité et l'entreprise YPF participent financièrement et matériellement à l'extraction des os. Bonaparte étant le seul paléontologue, il est nommé responsable des fouilles et recommande son illustrateur Rodolfo Coria lorsque le maire souhaite développer le musée Carmen Funes en y engageant un paléontologue permanent[5].
Présenté une première fois lors de la VIe Conférence argentine de paléontologie des vertébrés, les fossiles d'Argentinosaurus sont étudiés, décrits et publiés en sous le nom spécifique A. huinculensis, par les paléontologues argentins José F. Bonaparte et Rodolfo Coria[6].
Sa découverte est toutefois disputée par Jorge Calvo, géologue et docteur en paléontologie, directeur du centre paléontologique Lago Barreales. Il affirme avoir fait partie des équipes ayant excavé les fossiles. Bonaparte et lui auraient passé un accord verbal en concernant la double découverte de l'Andesaurus delgadoi et de l'Argentinosaurus, pour que figurent leurs deux noms lors de la publication des études, mais Bonaparte l'aurait volontairement remplacé au profit de Coria[5].
Description
modifier- Époque : Crétacé supérieur (Cénomanien), il y a environ entre 95 Ma (millions d'années)[7].
- Hauteur : 8 mètres[8].
- Longueur : 35 mètres[9]
- Masse : 80 tonnes
- Habitat : Argentine (Neuquén)
- Régime alimentaire : Herbivore
Le matériel attribué à Argentinosaurus est relativement peu conséquent. Le spécimen holotype, PVPH-1, comprend plusieurs côtes fragmentaires, un péroné droit, un os iliaque, huit vertèbres dorsales, cinq vertèbres du sacrum[5],[6]. Six vertèbres dorsales ont été décrites en détail, la plus grande atteignant une hauteur de 1,59 m de haut et 1,29 m de large. Le péroné, initialement pris pour un tibia, mesure environ 1,55 mètre de long. Les côtes sont cylindriques, creuses et légèrement incurvées, avec l'articulation distale par laquelle elles se connectent à la colonne vertébrale, faisant saillie vers le bas à environ 45°. Les corps vertébraux du sacrum sont érodés et endommagés, mais confirment la présence de cinq vertèbres soudées.
En plus de ces vestiges, un fémur incomplet, le spécimen MLP-DP 46-VIII-21-3, retrouvé non loin de la zone de fouille, est également attribué au genre Argentinosaurus. Cet axe fémoral de 1,18 m est privé de ses extrémités, sa longueur est donc inconnue. Cependant, José Bonaparte et Rodolfo Coria l'estiment à environ 2,4 m de long. Il appartiendrait à l'animal dans la mesure où il a été trouvé dans la même couche géologique et possède les mêmes proportions que les autres fossiles[5]. En comparaison, il existe des fémurs complets conservés d'autres titanosaures géants, ainsi celui d'Antarctosaurus giganteus qui mesure 2,35 m ou celui de Patagotitan mayorum qui mesure 2,38 m. Les os de ce type jouent un rôle crucial dans le maintien du poids des organismes terrestres vertébrés. La circonférence épaisse du fémur suggère un animal d'un poids énorme, plusieurs études ont donc tenté d'estimer la masse corporelle du « Lézard argentin ».
Débat sur les caractéristiques physiques
modifierComme pour beaucoup d'espèces de dinosaures de cette taille, les données de taille et de masse varient fortement selon les sources. Concernant l'argentinosaure, les fourchettes d'estimation sont très larges. La plupart des sources indiquent une masse autour de 60-80 tonnes, pour une longueur estimée entre 30 et 40 mètres. Il est ainsi d'une taille comparable à celle de Patagotitan, dont la découverte a été annoncée en 2014 et qui vivait également en Argentine à la même époque[10]
Systématique
modifierÀ ce jour, une seule espèce est connue : Argentinosaurus huinculensis (Bonaparte & Coria, ).
Argentinosaurus est un sauropode titanosaure. À sa description en 1993, José Bonaparte et Rodolfo Coria l'ont classé au sein des Andesauridae. En 1997, une équipe dirigée par Leonardo Salgado a réalisé son appartenance aux Titanosauridae, ils ont alors classé Argentinosaurus au sein d'un clade non nommé en compagnie des Opisthocoelicaudia et d'un titanosaure indéterminé[11].
En , Paul Upchurch et son équipe ont suggéré l'existence d'un nouveau groupe, Lithostrotia, groupe qui comprenait tous les membres dérivés de Titanosauria. Argentinosaurus a alors été classé comme un titanosaure basal[12]. La position basale de Argentinosaurus au sein de Titanosauria a été confirmée ensuite par plusieurs études ultérieures[13].
Une étude réalisée en par José L. Carballido et son équipe a réintégré Argentinosaurus au sein des Lognkosauria et du taxon frère de Patagotitan[14]. En , González Riga et ses collègues ont également découvert qu’il appartenait à Lognkosauria, qui, à son tour, s’avérait appartenir à Lithostrotia[15]. Une autre étude réalisée en par l'équipe de Hesham M. Sallam a suggéré deux positions phylogénétiques différentes pour Argentinosaurus, sur la base de deux ensembles de données différents. Ils l'ont considéré soit comme un titanosaure basal, soit comme le taxon frère de Epachthosaurus[16]. En , une nouvelle étude de González Riga a réintégré Argentinosaurus au sein des Lognkosauria et indiqué que ce groupe formait un clade plus important avec Rinconsaurus au sein des Rinconsauria, clade qu'ils ont baptisé Colossosauria[17].
Le cladogramme suivant montre la position de Argentinosaurus au sein des Colossosauria, suivant la proposition de Bernardo González Riga et son équipe, en 2019.
Colossosauria |
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Étymologie
modifierArgentino : « argentin » et saurus : « lézard », soit, littéralement, « lézard d'Argentine ».
Paléobiologie
modifierComme les autres sauropodes géants, Argentinosaurus devait vivre en troupeau et migrer constamment en quête de nourriture. Herbivore, il se nourrissait de feuilles de conifères grâce à sa taille gigantesque et son long cou qui lui permettait d'atteindre la cime des arbres, mais aussi de balayer le sol pour y consommer des fougères et des prêles. Il ingurgitait avec cette végétation des cailloux, gastrolithes, qu'il gardait dans son estomac pour faciliter la digestion[18].
D'après Kristi Curry Rogers, la masse d'Argentinosaurus devait probablement croître d'environ 50 kilogrammes par jour à l'adolescence (le développement maximal des grands sauropodes est estimé à 56 kg/j)[19].
Voir aussi
modifierLiens externes
modifier- Ressources relatives au vivant :
Notes et références
modifierNotes
modifierRéférences taxonomiques
modifier- (en) Référence Paleobiology Database : Argentinosaurus Bonaparte et Coria, 1993 (consulté le )
Références
modifier- Documentaire Dinosaures géants de Patagonie
- (en) Kenneth Carpenter, Biggest of the big: a critical re-evaluation of the mega-sauropod Amphicoelias fragillimus Cope, 1878, Paleontology and Geology of the Upper Jurassic Morrison Formation, bulletin n°36, New Mexico Museum of Natural History, John R. Foster, Spencer G. Lucas (éd.), 2006. Lire en ligne.
- (en) Jorge Orlando Calvo, Ruben D. Juarez Valieri, Juan D. Porfiri, Re-sizing giants: estimation of body lenght of Futalognkosaurus dukei and implications for giant titanosaurian sauropods, IIIe Congrès latino-américain de paléontologie des vertébrés (Neuquén, Patagonie, Argentine, 2008). Lire en ligne
- (en) Gerardo V. Mazzetta, Per Christiansen, Richard A. Fariña, Giants and Bizarres: Body Size of Some Southern South American Cretaceous Dinosaurs, Historical Biology, 16, 2004. Lire en ligne
- Miguel Prenz (trad. Cyril Gay), La guerre des dinosaures [« Gigantes. La Guerra de los dinosaurios en la Patagonia »], Marchialy, , 220 p. (ISBN 979-10-95582-44-1)
- (es) José F. Bonaparte et Rodolfo A. Coria, « Un nuevo y gigantesco sauropodo titanosaurio de la formacion Rio Limay (Albiano-Cenomaniano) de la provincia del Neuquen, Argentina », Ameghiniana, vol. 30, no 3, , p. 271-282 (lire en ligne, consulté le ) voir aussi
- (en) Holtz, Thomas R. Jr. (2012) Dinosaurs: The Most Complete, Up-to-Date Encyclopedia for Dinosaur Lovers of All Ages, Winter 2011 Appendix
- (en) « Argentinosaurus », sur www.prehistoric-wildlife.com (consulté le )
- (en) « Argentinosaurus huinculensis schematic », sur Deviantart.com,
- (en) J.L. Carballido, D., A. Otero, I.A. Cerda, L. Salgado, A.C. Garrido, J. Ramezani, N.R.Cúneo et J.M. Krause, « A new giant titanosaur sheds light on body mass evolution among sauropod dinosaurs », Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences, vol. 284, no 1860, (lire en ligne, consulté le ).
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- Paul Upchurch, Paul M. Barret, Peter Dodson, Sauropoda, in : The Dinosauria (2e éd.), Berkeley : Presses de l'Université de Californie, p. 259–322, (2004). (ISBN 978-0-520-25408-4).
- Jeffrey A. Wilson, An overview of titanosaur evolution and phylogeny, Actus de las III Jornadas Sobre Dinosaurios y Su Entorno. Burgos: Salas de los Infantes, 169 : 169-190, 2006.
- José L. Carballido, Diego Pol, Alejandro Otero, Ignacio A. Cerda, Leonardo Salgado, Alberto C. Garrido, Jahandar Ramezani, Néstor R. Cúneo, Javier M. Krause, A new giant titanosaur sheds light on body mass evolution among sauropod dinosaurs, Proceedings biological sciences, Royal society Publishing, vol. 284, 2017.
- Bernardo J. Gonzalez Riga, Phillip D. Mannion, Stephen F. Poropat, Leonardo D. Ortiz David, Juan Pedro Coria, Osteology of the Late Cretaceous Argentinean sauropod dinosaur Mendozasaurus neguyelap: implications for basal titanosaur relationships, Zoological Journal of the Linnean Society, 184 (1), p.136-181, 2018. https://doi.org/10.1093/zoolinnean/zlx103
- Hesham M. Sallam, Eric Gorscak, Patrick M. O'Connor, Iman M. El-Dawoudi, Sanaa El-Sayed, Sara Saber, Mahmoud A. Kora, Joseph J.W. Sertich, Erik R. Seiffer, Matthew C. Lamanna, New Egyptian sauropod reveals Late Cretaceous dinosaur dispersal between Europe and Africa, Nature Ecologie & Evolution, 2 (3), p.445–451, 2018.
- Bernardo J. González Riga, Matthew C. Lamanna, Alejandro Otero, Leonardo D. Ortiz David, Alexander W.A. Kellner, Lucio M. Ibiricu, An overview of the appendicular skeletal anatomy of South American titanosaurian sauropods, with definition of a newly recognized clade. Anais da Academia Brasileira de Ciências, vol.91, supl.2, 2019.
- (en) T. Haines et P. Chambers, The Complete Guide to Prehistoric Life, Firefly Books Ltd, , p. 118–119
- (en) Kristi Curry Rogers, « Quelle poussée de croissance ! », sur La Recherche, , p. 39