Armand Seguin (chimiste)

chimiste français

Armand Jean François Segouin, dit Seguin est un chimiste, industriel, homme d'affaires, et même banquier, né le à Paris[1], fils de Hector Hyacinte Segouin (dit Séguin), né en 1731 et notaire à Chartres, et de Marie Anne Madeleine Chancerel. Il est mort à Paris le . Il a donné son nom à l'Île Seguin, sur la Seine (Boulogne-Billancourt).

Armand Seguin
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Armand Seguin (petit-fils en lignée masculine)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Biographie

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Lavoisier assisté de son épouse et d'Armand Seguin.

Armand Seguin fut un collaborateur d'Antoine Lavoisier et cobaye humain de ses expériences sur la respiration animale (parmi d'autres). Mais il ne fit rien pour sauver son mentor, et refusa toujours de condamner son exécution.[réf. nécessaire]

Chimiste et patient expérimentateur, il mit au point, alors que les armées révolutionnaires manquaient de souliers, un procédé de tannage rapide des cuirs épais (trois semaines au lieu de dix-huit mois), en utilisant l'acide sulfurique dilué et diverses solutions tanniques. Il installa en 1795, à la demande de la Convention, qui lui procura toutes les facilités possibles, une grande manufacture sur l'île de Sèvres, dont il fit rapidement l'acquisition (c'est l'île Seguin, rattachée à Boulogne-Billancourt, près de Paris), qui rationalisait les chaînes de production. Il fut aussi en 1804 un des découvreurs de la morphine avec Bernard Courtois[2] et Charles Derosne.

Dès 1796, il avait fait fortune comme principal fournisseur de cuir pour les armées révolutionnaires, puis de l'Empire ; son usine traitait plus de 100 000 peaux par an[3].

Il étonna le Tout-Paris (ou ce qu'il en restait) par le faste de ses réceptions [4],[5]. En l'an IX, le , il se porte acquéreur pour 300 000 francs d'une partie de la collection d'œuvres d'art de François-Antoine Robit, important drapier et également fournisseur aux armées[6] ; le , il achète le château de Jouy-en-Josas, qu'il fait reconstruire dans le style néo-classique par l'architecte Bienaimé ; en l'an XII (), il acquiert l'hôtel d'Orsay[7], au 35 rue de Varennes (actuel n° 69), alors annexe du ministère de la Guerre, mais il ne pourra l'habiter qu'en 1815[8]. Il fit partie de la Compagnie dite des Négociants réunis, chargée de trouver des fonds pour le Trésor, mais les spéculations aventureuses du banquier Ouvrard dans les affaires d'Espagne compromirent l'entreprise. Au retour du vainqueur d'Austerlitz, il fallut rendre des comptes. Le passif de la compagnie, d'abord évalué à 87 millions, fut porté fin 1806 à 142 millions, dont le nouveau ministre Mollien poursuivit méthodiquement la restitution [9]. En 1807, Séguin dut céder à Napoléon son hôtel particulier (Hôtel de Brancas, à Sèvres) [10], puis son domaine de Ravanne (à Écuelles, près de Nemours), et fut finalement emprisonné pour malversations de 1810 à la chute de l'Empire. La Restauration le réhabilita, et même le dédommagea, au grand scandale des ultras [11]. Sa tannerie périclitant, faute des commandes de l'Etat, il transforma l'île de Sèvres, située sur la Seine entre les rivages de Sèvres et ceux de Billancourt, en un superbe haras d'une centaine de pur-sang. Cette île sera dès lors appelée l'île Seguin et sera industrialisée bien plus tard (en 1925) par le constructeur automobile Renault qui y construira une gigantesque usine. D'un caractère obstiné et rancunier, Armand Seguin réussit à faire emprisonner Ouvrard à Sainte-Pélagie (1825) pour une dette prétendue de 1.670.000 francs, plus les intérêts, mais celui-ci ne lâcha rien [9]. Toujours en butte aux attaques des Ultras, qui le rendirent paranoïaque, il rompit toutes relations mondaines, persécuta sa famille (sa femme dut s'enfuir auprès de sa fille en Angleterre), et mourut seul, enfermé dans une mansarde de son hôtel, odieux à tous, en laissant ses chevaux, ses affaires et ses biens dans le plus complet abandon.

Séguin réservait ses communications scientifiques à l'Institut, dont il était correspondant (Mémoires sur l'opium, le quinquina, etc.). Amateur de musique, il collectionna les manuscrits précieux et démonta un certain nombre de superbes violons (Stradivarius, Guarnerius, etc.) dans l'espoir d'en percer les secrets. Il protégea des musiciens, notamment le compositeur Giuseppe Maria Cambini qui conduisit un orchestre de chambre à son service [12]. Sur la fin de sa vie, il publia de nombreux opuscules (plus d'une centaine : voyez la Biographie Universelle de Michaud) sur l'état des finances, les courses ou les haras, ponctués de sentences ou d'aphorismes curieux. Son principal ouvrage parait être : Considérations sur les systèmes suivis en France dans l'administration des finances ; et vues générales sur les éléments de la fortune publique ; terminées par la proposition d'un nouveau plan de finances, conçu dans l'intention de subvenir aux indemnités réclamées en faveur des anciens propriétaires des domaines nationaux... par Armand Séguin ; Paris, sd. (vers 1825), 4 vol. in-8°.

Il avait deux frères, Félix-Adrien (1759-1793), également chimiste, qui périt victime de la Révolution[13] comme ex-secrétaire du duc de Montpensier, le 9 thermidor ; et Charles, qui laissa une descendance.

Portrait de Zoé Elmore, fille d'Armand Séguin, peinte en 1821 par Théodore Géricault

Armand avait épousé à Paris (11e anc.), le 7 Nivôse an IV () Marie (Emilie) Félicité Raffard de Marcilly [14], qui lui donna deux enfants nés à Sèvres : une fille, Zoé (1797-1877), épouse d'Adam Elmore, et un fils, Abel (1799-1873). Marie Cappelle, qui fut leur voisine à Paris sous l'Empire, donne de curieux détails sur leur éducation, exclusivement destinée à en faire des musiciens [4]. Ses héritiers revendront ses biens, le château de Jouy (en 1835), l'hôtel d'Orsay (en 1836) avec sa bibliothèque musicale, et la plus grande partie de l'île Seguin (sauf la pointe aval), et vivront pendant plusieurs générations de sa colossale fortune. La tombe d'Abel Séguin, à Dannes (Pas-de-Calais), porte les armoiries de sa mère : "d'or à trois griffons de gueules" [15].

Armand Seguin, peintre de l'École de Pont-Aven, est un de ses petits-fils.

Notes et références

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  1. Baptisé à Saint-Sulpice (Etat-civil, série V)
  2. Jean-François Mariotti, Sertürner, le rendez-vous manqué dans la revue Napoléon n°21 p. 58
  3. En 1796, l'usine recevait 72 000 peaux de bovins, 21 218 peaux de veaux, et plus de 10 000 peaux de chevaux (cf. Mercier, op. cit., p. 226c), soit environ 1 500 tonnes de cuirs verts [p. 224b] ; toutes n'étaient pas traitées immédiatement, et ces dépôts empestaient l'air des sévriens… Fin 1798, on compte 548 fosses de tannage, 250 cuves de gonflement, une centaine de cuves à tanin, une centaine d'autres cuves et bassins pour le travail du cuir, etc. Un système de tuyauterie en plomb et 2 200 robinets de cuivre distribuent l'eau et les tannins concentrés dans les différentes cuves.
  4. a et b Marie Cappelle, Mémoires de Marie Cappelle, veuve Lafarge, , p 23-31
  5. Abrantès (Laure Junot, duchesse d'), Histoire des salons de Paris, Bruxelles, , to 3, p 357-374
  6. « Robit, François-Antoine, l'aîné », notice référencée du Getty Research Center.
  7. Vacquier (Jules), Les Vieux Hôtels de Paris (IIIe série), le Faubourg Saint Germain (vol I), Paris, F. Contet, , Hôtel d'Orsay, pl. 3 à 8
  8. Hillairet (Jacques), « Dict. Hist. des Rues de Paris », II-598,‎
  9. a et b Weill (Georges), « Le financier Ouvrard », Revue Historique,‎ 1918/01 (tome 127), p. 31-61 ; la Restauration p. 48-53 ; sa prison p. 56-57
  10. Mercier (Pierre), op. cit., p.228c
  11. Il dut supporter l'accusation, à peine voilée, d'avoir tanné des peaux humaines aux pires moments de la Terreur (voyez notamment l'Histoire de France de Montgaillard, 1817, to 3, p 290 ; Dusaulchoy de Bergemont, Mosaïque historique, littéraire et politique…, 1818, to.1 p 140 ; Harmand, Anecdotes..., 1820, p 78 ; Danican, Les brigands démasqués). Le fait, s'il était avéré, ne concerne en rien la production industrielle de l'île Seguin, comme le prétendaient les Ultras, prompts à l'amalgame, mais plutôt ses premières expériences dans les serres du Parc Monceau. Celles-ci ne se trouvaient qu'à quelques mètres du cimetière des Errancis, où furent déposé les corps de 751 victimes de la guillotine (25 mars - 8 juin 1794). Cette proximité est troublante, mais ne prouve rien : il existait 33 tanneries à Paris, et autant d'artisans susceptibles de procurer aux "Enragés" les tristes spécimens qu'ils réclamaient pour confectionner bottes, culottes de peau ou reliures. Quoi qu'il en soit, ces terribles accusations jouèrent certainement un rôle dans sa dépression.
  12. Note à Cambini dans la Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique de Fétis
  13. Émile Campardon, « Tribunal révolutionnaire (1793-an III) : Répertoire numérique des affaires jugées - W 268 à 499 » [PDF], sur Archives Nationales
  14. Mercier (Pierre), op. cit. ; Etat-civil de Paris
  15. Parenty (Michel), Châteaux et maisons de campagne du Boulonnais… to. II-2, Boulogne-sur-Mer, , p. 60-71 (château de Dannes)

Annexes

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Bibliographie

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  • Charles Leroux-Cesbron, Bul. de la Société historique et archéologique des VIIIe et XVIIe arrondissements, 1921, pages 67-75.
  • Pierre Mercier, Armand-Jean-François Seguin (1767-1835), chimiste, tanneur et financier, Bulletin de la section d'histoire des Usines Renault, , p. 218-233.
  • Gilbert Hatry, Pierre Mercier, L'Île Seguin, Éditions Jcm, 1991.
  • Les archives départementales des Hauts-de-Seine conservent les documents utilisés par Pierre Mercier pour établir sa biographie ((14J) ainsi que des autographes achetés à la librairie Saffroy.

Liens externes

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