Attentat du 2 novembre 2020 à Vienne

attentat

L'attentat du à Vienne, capitale de l'Autriche, est une fusillade terroriste islamiste survenue dans la soirée du , qui a fait plusieurs morts et blessés. Des coups de feu sont d'abord entendus dans la Seitenstettengasse[1] près de la synagogue Stadttempel située à proximité de la Schwedenplatz, dans le quartier central de la ville, Innere Stadt.

Attentat du
à Vienne
Image illustrative de l’article Attentat du 2 novembre 2020 à Vienne
La Seitenstettengasse et le Stadttempel.

Localisation Innere Stadt, Vienne, Drapeau de l'Autriche Autriche
Cible Civils
Coordonnées 48° 12′ 43″ nord, 16° 22′ 29″ est
Date
Vers 20 h (UTC+1)
Type Fusillades
Armes Fusil d'assaut Kalachnikov
Arme de poing
Machette
Morts 4 (et 1 terroriste)
Blessés 23
Auteurs Kujtim Fejzulai
Organisations Drapeau de l'État islamique État islamique
Mouvance Terrorisme islamiste

Carte

L'assaillant, Kujtim Fejzulai, est abattu par la police tandis qu'un policier est gravement blessé. Les médias locaux parlent très vite d'une « attaque terroriste », information non reprise par les autorités dans un premier temps[2], puis qu'elles confirment au matin du 3 novembre en qualifiant l'attentat d'attaque « terroriste islamiste »[3].

Déroulement

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L'attaque commence à 20 h, à quelques heures de la mise en place du confinement contre la Covid-19[4], sur la Seitenstettengasse, près de la Schwedenplatz de Vienne, et près de l'Opéra et de la grande synagogue Stadttempel[3], quand un homme armé d'une Kalachnikov de type Zastava M70[5], d'une Arme de poing et d'une Machette commence à tirer[6]. Le maire de Vienne, Michael Ludwig, évoque des fusillades dans des restaurants[7].

Les faits donnent lieu rapidement à une importante mobilisation policière, tandis que les autorités appellent les habitants à rester chez eux[3].

Les fusillades font plusieurs morts et une quinzaine de blessés dont un policier. Un terroriste est abattu à 20 h 9. Les forces spéciales EKO Cobra et Wega mobilisent tous leurs efforts pour faire le point et assurer l'élimination des terroristes.

Les attaques ont eu lieu dans six voies fréquentées du centre historique de Vienne : Salzgries, le Fleischmarkt, le Bauernmarkt, le Graben, la Seitenstettengasse et la Morzinplatz[8].

Le chancelier fédéral, Sebastian Kurz, dénonce à 23 h 15 « une attaque terroriste répugnante »[9]. Le ministre de l'Intérieur Karl Nehammer évoque dans une conférence de presse à une heure du matin le « plusieurs morts et plusieurs blessés »[10] et demande à la population de rester chez elle dans la mesure du possible et de ne pas emmener les enfants à l'école le lendemain[11]. Franz Ruf, directeur de la sécurité publique, déclare un renforcement des contrôles aux frontières et la mise en place de barrages dans la ville[12].

Kujtim Fejzulai
Terroriste islamiste
Information
Naissance [13]
Mödling (Autriche)
Décès (à 20 ans)
Vienne (Autriche)
Cause du décès Abattu par la police
Nationalité Drapeau de l'Autriche Autrichien
Drapeau de la Macédoine du Nord Macédonien
Allégeance Drapeau de l'État islamique État islamique
Idéologie Salafisme djihadiste
Surnom Abou Doujana al-Albani
Attentats Attentat du 2 novembre 2020 à Vienne
Victimes 4 morts et 23 blessés

Le ministre autrichien de l'Intérieur, Karl Nehammer, décrit l'assaillant abattu comme un « terroriste islamiste » sympathisant du groupe État islamique (EI)[14].

Le terroriste abattu, Kujtim Fejzulai, est né en 2000 à Mödling (selon une déclaration du ministère des Affaires intérieures de la Macédoine du Nord (en)[15]), où il a grandi dans une famille musulmane originaire de Macédoine du Nord[16] et membre de la minorité albanaise[17],[18] de ce pays des Balkans. Il se fait connaître de la justice autrichienne en 2018 pour avoir essayé de rejoindre la Syrie pour prendre part à la guerre civile. Arrêté en Turquie et renvoyé en Autriche, il est condamné en à vingt-deux mois de prison. Au cours de son procès, il affirme être prêt à se battre pour l'État islamique et place lui-même le début de sa radicalisation à 2016, une année de sa vie marquée par des conflits familiaux et l'échec scolaire[19]. Après avoir envisagé l'Afghanistan, il avait opté pour la Syrie[19].

Il est libéré sous condition en de la même année car, étant jeune adulte, il bénéficie des avantages de la loi sur les tribunaux pour mineurs (JGG)[20]. Il intègre un programme de déradicalisation au cours duquel il montre des signes encourageants[19]. A posteriori, le ministre Karl Nehammer parle d'une pratique de taqîya pour tromper les personnes chargées de son suivi[21] et dissimuler son extrémisme[19].

L'homme, âgé de 20 ans, était aussi détenteur de la nationalité autrichienne[22].

Le matin du jour de l'attaque, l'assassin avait publié diverses photos sur Instagram, qui comprenaient un serment d'allégeance au chef de l'EI Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, ainsi que des photos le montrant avec les armes qui ont ensuite été utilisées[23].

Victimes

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L'attaque fait quatre morts, deux hommes et deux femmes, et vingt-trois blessés[24], dont sept personnes sont dans un état critique[3],[25]. Une des deux femmes décédées est de nationalité allemande[26].

Une jeune femme allemande de 24 ans étudiante à l'université des arts appliqués de Vienne est abattue devant un pub sur la Ruprechtsplatz, où elle travaillait également comme serveuse. Au coin du Fleischmarkt et du Bauernmarkt, le terroriste tire sur un jeune homme de Korneuburg âgé de 21 ans, originaire de Macédoine du Nord, et un restaurateur chinois de 39 ans ayant obtenu la citoyenneté autrichienne est abattu sur la Schwedenplatz[27]. Enfin, une Autrichienne de 44 ans est décédée à la clinique d'Ottakring (de) des suites de ses blessures.

Vingt-trois personnes ont été blessées, dont sept femmes et seize hommes. Parmi les femmes figurent trois Autrichiennes, une binationale germano-suisse, une Bosnienne, une Slovaque et une Chinoise ; parmi les hommes dix Autrichiens, un Luxembourgeois, un Afghan, un Slovaque et trois Allemands. Treize personnes sont très grièvement blessées par balle[28],[29],[30].

Enquête

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L'appartement de Kujtim est perquisitionné la nuit du crime. Des perquisitions à domicile sont également menées dans l'entourage du terroriste dans la matinée du 3 novembre. Les enquêteurs vérifient également si un ou plusieurs autres auteurs sont en fuite[31].

Au cours de l'enquête, quatorze personnes ont été arrêtées en Autriche. Les premières évaluations des données fournies n'ont révélé aucune preuve de l'existence d'un autre auteur[24].

En Suisse, dans la journée du 3 novembre, deux jeunes hommes détenteurs de passeports helvétiques, âgés de 18 et 24 ans, sont arrêtés à Winterthour en lien avec l’attaque[32].

Selon le ministère de l'Intérieur, l'assassin avait au moins un fusil d'assaut, une arme de poing et une machette avec lui. À l'été 2020, le jeune homme de 20 ans s'était rendu en Slovaquie pour y acheter des munitions. Les services secrets slovaques avaient alors mis en garde l'Autriche à ce sujet[33]. On ignore pourquoi rien n'a été fait par la suite[24].

En rapport avec l'attaque islamiste de Vienne, une intervention policière a lieu en Allemagne le au matin. L'Office fédéral de police criminelle annonce que les forces de sécurité ont perquisitionné les maisons et les locaux commerciaux de quatre personnes en Basse-Saxe, Hesse et Schleswig-Holstein. Les quatre hommes âgés de 19 à 25 ans appartenaient également à la mouvance islamiste[34].

Revendication

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Le , Daech revendique l'attaque dans les termes suivants : « Avec la grâce d'Allah Tout-Puissant, le soldat du califat Abou Doujana al-Albani — qu'Allah l'accepte — s'est rendu hier aux rassemblements des croisés à Vienne en Autriche, et les a ciblés avec sa mitrailleuse, un pistolet et un couteau, tuant et blessant environ 30 croisés, dont un officier et des policiers, et à Allah appartient la louange »[35].

Erreurs des autorités de sécurité autrichiennes et discussion politique

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Le ministre de l'Intérieur Karl Nehammer (ÖVP) pointe la principale erreur judiciaire au lendemain de l'attaque alors que le ministère de la Justice est sous la responsabilité d'Alma Zadić (Les Verts), car l'assassin avait été libéré prématurément de sa détention et il souligne le fait que la communication entre les autorités judiciaires et l'Office fédéral pour la protection de la Constitution et la lutte contre le terrorisme (BVT) et l'Office d'État pour la protection de la Constitution et la lutte contre le terrorisme (de) (LVT) n'a pas fonctionné[36]. La ministre de la Justice Alma Zadić défend quant à elle la libération anticipée de prison du terroriste, car les libérations conditionnelles après les deux tiers de la peine de prison sont accompagnées d'une période de suivi de trois ans et de traitement, de soins. Si la peine de prison avait été purgée intégralement en , il n'y aurait plus eu de possibilité de « contrôle » sur le terroriste.

Comme l'a déclaré la porte-parole du Corps de police de la République slovaque à la chaîne d'information TA3 le , des personnes suspectes, y compris le terroriste islamiste, avaient franchi à l'été 2020 la frontière slovaque pour acheter des munitions. Cette information a été immédiatement transmise au BVT (services de renseignement fédéral contre la terrorisme) autrichien[37]. Ce même jour, Nehammer déclare dans une conférence de presse qu'au sein du BVT « quelque chose a mal tourné dans la communication ». Il annonce la formation d'une commission d'enquête indépendante par le ministère de l'Intérieur et celui de la Justice pour enquêter sur les événements[38] De plus, il met la faute sur son prédécesseur à l'Intérieur Herbert Kickl (FPÖ), qu'il avait pourtant défendu contre de telles accusations alors qu'il était ministre du premier gouvernement de coalition de Kurz (ÖVP-FPÖ)[39] et suggère que son passage à l'Intérieur a «endommagé de façon permanente, pour ne pas dire détruit» l'autorité[40]. Kickl et le FPÖ répliquent que Nehammer devrait démissionner.

Au cours de la semaine qui a suivi l'attaque, les médias ont également révélé que dans les mois qui ont suivi sa sortie de prison en , le terroriste avait eu des contacts avec des djihadistes allemands qui étaient connus de la police et qui ont été en rapport avec lui au cours d'une visite à Vienne, ce dont le LVT de Vienne était parfaitement au courant par les services de renseignement allemands (BfV). On ignore pourquoi cette alerte n’a pas été traitée et le tribunal pénitentiaire de Krems, qui aurait pu révoquer sa libération conditionnelle, n’a pas été informé. Le , le directeur des services du renseignement du LVT de Vienne, Erich Zwettler, est démis de ses fonctions[41].

Références

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  1. (de) Terroranschlag in Wien.
  2. « Fusillade en Autriche devant la grande synagogue de Vienne : « probablement une attaque terroriste » », sur ouest-france.fr, .
  3. a b c et d « Attentat islamiste à Vienne : au moins 3 morts, un assaillant tué, un autre en fuite », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  4. (en) Laura O'Callaghan, « Vienna shooting: Terror attack fears after multiple shots fired by city's main synagogue », Daily Express,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. (de) « Polizei veröffentlicht Fotos von Tatwaffen des Anschlags » [« La police publie des photos des armes du crime utilisées lors de l'attentat »], Salzburger Nachrichten, (consulté le ).
  6. (de) « Terrorangriff in Wien: Täter zündete Sprengsatz », Kronen Zeitung,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. (de) Die Zeit, Schüsse vor Synagoge, 2 novembre 2020.
  8. (de) Kurier, article du 2 novembre 2020.
  9. zonebourse.com, 2 novembre 2020.
  10. Dont sept dans un état grave selon le maire Michael Ludwig,.
  11. (de) Conférence de presse en ligne sur YouTube.
  12. Le Monde, article du 3 novembre 2020.
  13. (en) Kirsti Knolle, « What we know about the man who killed four in Vienna shooting spree », Reuters, (consulté le ).
  14. « Autriche : suivez en direct les dernières informations sur l’attaque terroriste à Vienne », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) « Vienna gunman: IS supporter who 'fooled' the system », sur France24.com, (consulté le ).
  16. (de) 20-jähriger Wien-Attentäter hieß Fejzulai Kujtim, Austria Presse Agentur, 3 novembre 2020
  17. (it) MattiaD, « Kujtim Fejzulai, chi era l'autore dell'attacco di Vienna », sur Inews.it, (consulté le ).
  18. « The 20-year-old terrorist of Albanian origin in the Vienna massacre wanted to join ISIS », sur Oculus News (consulté le ).
  19. a b c et d « Attentat à Vienne : ce que l'on sait de Kujtim Fejzulai, identifié comme l'auteur de l'attaque qui a fait quatre morts », sur francetvinfo.fr, .
  20. IS-SympathisantWien-Attentäter: 20 Jahre und radikalisiert, kleinezeitung.at, 3 novembre 2020
  21. « Il avait "trompé" le protocole de déradicalisation : qui est le terroriste de Vienne ? », sur LCI (consulté le ).
  22. Le Point.fr, « EN DIRECT. Fusillades à Vienne : l'assaillant avait tenté de rejoindre la Syrie », sur Le Point, (consulté le ).
  23. (de) Erste Details über mutmaßlichen Täter, sur bild.de
  24. a b et c (de) Weitere Festnahmen nach Attacke in Wien, tagesschau.de, 3 novembre 2020
  25. (de) Terror im Herzen von Wien Mindestens fünf Tote, 17 Verletzte: Täter war IS-Sympathisant, mehrere Festnahmen, kleinezeitung.at, 3 novembre 2020
  26. (de) Eine Deutsche unter Todesopfern des Anschlags von Wien, faz.net, 3 novembre 2020
  27. (de) Was wir über die Opfer des Terroranschlags von Wien wissen, derStandard.at
  28. (de) Terror: Todesopfer wurden identifiziert, orf.at
  29. (de) Unter den Todesopfern auch eine Deutsche, sur tagesschau.de
  30. (de) Todesopfern bei Anschlag in Wien: Drei Österreicher, sur vienna.at
  31. (de) Drei Tote bei islamistischem Terroranschlag in Wien, ein Täter erschossen – Mehrere Hausdurchsuchungen, mehrere Festnahmen, sur derstandard.at
  32. Daech revendique l’attentat de Vienne, deux Suisses arrêtés près de Zurich, nouvelobs.com, 3 novembre 2020
  33. (de) "Etwas schiefgegangen": Österreichs Innenminister räumt nach Wien-Terror Fehler ein, focus.de, 4 novembre 2020
  34. (de) Durchsuchungen in Deutschland, deutschlandfunk.de, 6 novembre 2020
  35. (es) « Estado Islámico reclama la autoría del atentado en Viena », sur Público, (consulté le ).
  36. (de) Nehammer: actuellement aucune référence à un deuxième auteur, article du 3 novembre 2020
  37. (de) « Anschlag von Wien: Terrorist wollte Munition in Slowakei kaufen » [« Attentat de Vienne : le terroriste voulait acheter des munitions en Slovaquie »] [archive du ], RedaktionsNetzwerk Deutschland, .
  38. (de) Info de Slovaquie: Nehammer constate des erreurs dans le BVT, article du 4 novembre 2020
  39. (de) Quand Nehammer a toujours défendu et applaudi Kickl, article de derStandard.at
  40. (de) information de Slovaquie: Nehammer voit des erreurs dans le renseignement
  41. (de) Michael Möseneder, Der Standard, le 6 novembre 2020

Voir aussi

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