Brème commune
Abramis brama
La brème commune (Abramis brama) est une espèce de poissons d'eau douce téléostéen eurasiatique qui vit dans les eaux douces, lentes et profondes.
Origine du nom
modifierDu francique brahsima[réf. nécessaire].
Description
modifierLa brème commune a un corps caractéristique, élevé et plat (on la surnomme parfois plateau).
Sa nageoire anale est très longue et la nageoire caudale fortement échancrée, avec un lobe inférieur un peu plus long que le supérieur. La nageoire dorsale a ses trois premiers rayons épineux, de même pour la nageoire anale[1].
La tête, petite se termine par une bouche protractile sans barbillon (se dépliant vers l'avant), ce qui la différencie de la brème bordelière[2]. L'œil est plutôt petit.
Les flancs sont couleur bronze plutôt qu'argenté (alors que la Brème bordelière est plus argentée). Le dos gris-vert présente des reflets, le ventre est gris brunâtre, les nageoires grises à noires foncées et parfois nuancées de violet. La jeune brème se distingue de l'adulte par sa couleur argentée (silver) et elle diffère d'autres Cyprinidés (comme les gardons ou rotangles) par un corps plus plat et une bouche orientée vers le bas.
Les adultes mesurent le plus souvent de 30 à 40 cm pour un poids de 0,5 à 2 kg les grands individus atteignent parfois 75 cm tandis que les records tournent autour de 90 cm pour environ 9 kg. Sa couleur est vert bronze, avec des flancs gris et un ventre blanc.
On dénombre plus de 10 écailles entre la ligne latérale et l’insertion de la nageoire dorsale.
Durée de vie
modifierCe poisson a une durée de vie moyenne de 20 à 25 ans[réf. nécessaire].
Habitat
modifierLa brème commune vit dans les eaux calmes aux fonds vaseux et limoneux, des cours d'eau larges et lents, dans les canaux, les lacs et les étangs.
Mode de vie, écologie
modifierC'est un poisson grégaire (qui vit en groupe) et qui comme la carpe peut jouer un rôle dans le mélange des couches d'eau et la remise en suspension de particules du sédiment[3] ; en fouillant la vase, les brèmes remettent en suspension des particules sédimentées (effet qui augmente linéairement avec la biomasse de poissons benthivores)[3] ; provoquant une augmentation de la turbidité (facilement mesurable à l'aide du disque de Secchi), avec une augmentation de 46 g de sédiment par mètre carré de plan d'eau et par jour pour une biomasse de brèmes de 100 kg/ha de plan d'eau. Aucune relation n'a été trouvée entre la taille des poissons et l'importance de la remise en suspension, mais l'effet de la brème était deux fois plus important que celui de la carpe[3]. L'alimentation benthivore a diminué à partir du mois de mai en raison de l'apparition d'aliments de substitution (zooplancton). Cette remise en suspension augmente la densité de la masse d'eau en chlorophylle. On a constaté une augmentation du phosphore et des nitrates dans l'eau corrélée à la biomasse de brèmes, mais pas des orthophosphate[3].
Alimentation, croissance, santé et parasitoses
modifierCe benthivore se nourrit principalement en filtrant efficacement les sédiments qu'il met en suspension ; grâce à la structure de son filtre branchial. Ce filtre est muni de « crêtes transverses » formées par un pont charnu positionné entre la partie centrale de l'arc branchial et les parties osseuses de ses branchicténies et situées à la face supérieure des arcs branchiaux[4]. Ces crêtes forment un réseau de canaux aptes à retenir les particules de nourriture. En bordure latérale de l'arc branchial, des muscles sont liés aux branchicténies permettant un mouvement de l'élément racleur osseux latéral. En présence de particules très fines (diamètre moindre que celui du canal), le mouvement de ces branchicténies semble pouvoir ajuster le filtre en réduisant le diamètre du canal opposé, permettant à la brème d'ajuster ce filtre à la taille du plancton présent[4]
Il semble relativement opportuniste[5], se nourrissant de petits mollusques, larves d'insectes, vers, et débris de végétaux et de zooplancton (Cladocera et Copepoda)[6] du printemps à l'automne[7], c'est un poisson fouilleur. Sa bouche protractile permet aux alevins et jeunes brèmes, par rapport aux gardons de mieux capturer des proies telles que les copépodes (plus difficiles à attraper que les daphnies)[6]. Dans leur milieu naturel brème et gardon sont en compétition pour les daphnies et copépodes. Le tube des jeunes brèmes contient plus de copépodes que celui des gardons, mais avec des variations liées au moment et lieu du butinage alimentaire[6].
Il a été montré dans le lac Tjeukemeer (aux Pays-Bas) que le « compartimentage des ressources alimentaires » entre brèmes (Abramis brama) et l'anguille européenne (Anguilla anguilla) est fortement lié aux variations d'abondance des daphnies (Daphnia hyalina) et des larves de chironomidés, leurs principales proies. La niche écologique de ces deux poissons varie selon le nombre de jeunes poissons planctonivores, en particulier l'éperlan (Osmerus eperlanus) ; si ce dernier est abondant, les populations de daphnies sont composées d'individus plus petits et la brème, qui était planctonivore s'adapte en devenant benthivore, mais avec une détérioration de santé (gonades mal développées). Alors que dans les mêmes circonstances, l'anguille s'adapte en remplaçant son alimentation en pupes de chironomidés et en mollusques par un régime composé totalement de poissons (les chercheurs ont noté que la santé des anguilles de moins de 35 cm se détériore quand la population de chironomidés diminue (en nombre et en biomasse). Inversement, quand le recrutement de poissons planctivores est faible, les daphnies D. hyalina sont plus grosses et le régime alimentaire et la santé des brèmes et anguille changée à nouveau. Dans ce cas (lac Tjeukemeer), le régime hydrologique modifie périodiquement et fortement la taille du stock de jeunes poissons planctivores (surtout par l'immigration de larves d'éperlan allochtones) bien que la biomasse des populations de brème et d'anguille soit relativement stable.
Comme tous les poissons qui se nourrissent dans la vase ou les sédiments, même dans des sites jugés relativement faiblement pollués, il peut se contaminer en ingérant divers polluants (polluants organiques persistants, métaux lourds, métalloïdes...), qu'il peut bioaccumuler dans certains organes ou tissus[8]. Une étude faite dans le bassin ouest du lac Balaton (Hongrie) d'octobre 1999 à mai 2000 a relevé des concentrations moyennes de métal pour différents organes variant dans les fourchettes suivantes : de 0,42 à 2,10 pour le cadmium ; 1,77 à 56,2 pour le cuivre ; 0,01 à 0,19 pour le mercure ; 0,44 à 3,24 pour le plomb ; 10,9 pour le zinc (poids sec)[8].
Le Cd, Cu, Pb et Zn étaient plus concentrés dans le foie ou les branchies alors que le mercure (Hg) était principalement concentré dans le muscle. Dans le foie, le cadmium, cuivre et mercure présentaient des associations positives liées à l'âge et à la taille du poisson[8] ; de même pour la charge en mercure qui augmente avec la taille et l'âge pour les trois organes étudiés[8]. Dans les muscles et les branchies, les taux de plomb et zinc augmentent similairement aux concentrations mesurées dans le foie mais les associations liées à l'âge et à la taille ont été négatives. Des variations saisonnières de la charge en métaux lourds existent, attribuables aux changements d'alimentation plus qu'à des variations de la pollution de leur environnement[8].
Les brèmes grandissent moins vite quand leur teneur en métaux lourds augmente[9].
On trouve des brèmes polluées dans des eaux ne contenant que très peu de métaux lourds, ce qui laisse penser que leur charge en éléments traces métalliques reflète celle de leur nourriture et du sédiments bien plus que celle de l'eau ambiante[9].
La peau ou les branchies de cet animal peuvent être colonisés par quelques parasites dont du gendre Caryophyllaeus [10], Ergasilus[11] ou Dactylogyrus [12],[13].
Reproduction
modifierEn mai et juin dans une eau à 17 °C, chaque femelle pond entre 50 000 et 60 000 œufs. Le développement embryonnaire est partiellement sous contrôle de la température de l'eau[14],[15], de même que celui de la jeune brème[16]. Il arrive que la brème s'hybride avec le gardon ou la brème bordelière. L'hybridation du gardon et de la brème donne un poisson au nombre de rayons différent sur la nageoire anale :
- brème : 23 à 29 ;
- gardon : 8 à 12 ;
- hybride : 14 à 19[17].
Les hybrides ne sont pas fertiles[1].
État des populations, pressions, menaces
modifierC'est une espèce qui peut être victime de nombreux polluants accumulés par le sédiment ou bioconcentrés par ses proies, dont des pesticides neurotoxiques (organophosphorés par exemple[18]) ou des perturbateurs endocriniens[19].
Intérêt halieutique
modifierIntérêt halieutique professionnel et de subsistance
modifierPoisson d'intérêt économique vivrier dans bon nombre de pays européens (Autriche, Pologne, Pays de l'Est, etc.).
Intérêt halieutique de loisir
modifierSon intérêt réside dans le fait que c'est un poisson facile à capturer et de bonne taille.
Intérêt culinaire
modifierDe goût fade, sa chair renferme de nombreuses arêtes. Absente de la cuisine contemporaine, la brème comme la plupart des poissons étaient consommés au Moyen Âge[20]. Les « Enseingnemenz qui enseingnent a appareillier toutes manières de viandes », un ensemble de recettes écrites par un auteur anonyme du début du XIVe siècle à Paris, proposent un assaisonnement au verjus[21], un jus acide extrait des raisins n'ayant pas mûri utilisé pour déglacer les sauces.
Autres noms communs
modifierCet animal porte de nombreux noms, plus ou moins locaux ou régionaux, dont[1] :
- grande brème
- Brème carpée,
- brame
- brama,
- brémo,
- breume
- plateau
- plaquette,
- daoradou,
- daourado d'aou,
- dorée,
- hariot,
- hazelin,
- omblais,
- plaquette (jeunes brème)
Galerie
modifierNotes et références
modifier- Brème commune (Abramis brama) ; (Linnaeus, 1758) ; fiche n°237, DORIS
- Fiche Brème commune et brème bordelière, Canton de Berne
- Breukelaar AW, Lammens EH, Breteler JGK & Tatrai I (1994) Effects of benthivorous bream (Abramis brama) and carp (Cyprinus carpio) on sediment resuspension and concentrations of nutrients and chlorophyll a. Freshwater Biology, 32(1), 113-121 (résumé).
- Hoogenboezem, W., Boogaart, J. G. V. D., Sibbing, F. A., Lammens, E. H., Terlouw, A., & Osse, J. W. (1991). A new model of particle retention and branchial sieve adjustment in filter-feeding bream (Abramis brama, Cyprinidae). Canadian Journal of Fisheries and Aquatic Sciences, 48(1), 7-18.
- Michel, P., & Oberdorff, T. (1995). Feeding habits of fourteen European freshwater fish species. Cybium, 19(1), 5-46.
- WINFIELD IJ, PEIRSON G, CRYER M & TOWNSEND CR (1983) The behavioural basis of prey selection by underyearling bream (Abramis brama (L.)) and roach (Rutilus rutilus (L.)). Freshwater Biology, 13(2), 139-149.
- Van Den Berg, C., Van Den Boogaart, J. G. M., Sibbing, F. A., & Osse, J. W. M. (1994). Zooplankton feeding in common bream (Abramis brama), white bream (Blicca bjoerkna) and roach (Rutilus rutilus): experiments, models and energy intake. Netherlands journal of zoology, 44(1-2), 15-42.
- Farkas A, Salánki J & Specziár A (2003) Age-and size-specific patterns of heavy metals in the organs of freshwater fish Abramis brama L. populating a low-contaminated site. Water Research, 37(5), 959-964.
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- Maladie : Dactylogyrus (vers de la peau et des branchies), sur aquabase.org
- Dzika E & Szymanski S (1989) Co-occurrence and distribution of Monogenea of the genus Dactylogyrus on gills of the bream, Abramis brama L. Acta Parasitologica Polonica, 34(1), 1-14 (résumé)
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- Kucharczyk, D., Luczynski, M., Kujawa, R., Kaminski, R., Ulikowski, D., & Brzuzan, P. (1998). Influences of temperature and food on early development of bream (Abramis brama L.). Archiv für Hydrobiologie, 141(2), 243-256.
- Voir page (anonyme) "Les Cyprinidés" [URL: [1], site Etang Providence [URL:[2].
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- Rambourg, P. (2003, October). L'abbaye de Saint-Amand de Rouen (1551-1552): de la différenciation sociale des consommateurs, au travers des aliments, à la pratique culinaire. In Production alimentaire et lieux de consommation dans les établissements religieux au Moyen Âge et à l'époque Moderne (Vol. 19, pp. pages-217). Histoire médiévale et archéologie, CAHMER, Amiens, 2006.
- Mane Perrine (2005) Les fruits dans les traités culinaires français (XIIIe – XVe siècles).. In: Archéologie du Midi médiéval. Tome 23-24. pp. 129-144 ; doi : 10.3406/amime.2005.1830 http://www.persee.fr/doc/amime_0758-7708_2005_num_23_1_1830
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierRéférences taxonomiques
modifier- (en) Référence Animal Diversity Web : Abramis brama (consulté le )
- (en) Référence Catalogue of Life : Abramis brama (Linnaeus, 1758) (consulté le )
- (fr) Référence DORIS : espèce Abramis brama (consulté le )
- (en) Référence Fauna Europaea : Abramis brama (Linnaeus, 1758) (consulté le )
- (en + fr) Référence FishBase : (consulté le )
- (fr) Référence INPN : Abramis brama (Linnaeus, 1758) (TAXREF) (consulté le )
- (fr + en) Référence ITIS : Abramis brama (Linnaeus, 1758) (consulté le )
- (en) Référence NCBI : Abramis brama (taxons inclus) (consulté le )
- (en) Référence UICN : espèce Abramis brama (Linnaeus, 1758) (consulté le )
- (en) Référence WoRMS : espèce Abramis brama (Linnaeus, 1758) (consulté le )
Bibliographie
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- Kucharczyk, D., Kujawa, R., Luczynski, M., Glogowski, J., Babiak, I., & Wyszomirska, E. (1997). Induced spawning in bream, Abramis brama (L.), using carp and bream pituitary extract and hCG. Aquaculture Research, 28(2), 139-144.
- Brandstätter, R., & Kotrschal, K. (1990). Brain growth patterns in four European cyprinid fish species (Cyprinidae, Teleostei): roach (Rutilus rutilus), bream (Abramis brama), common carp (Cyprinus carpio) and sabre carp (Pelecus cultratus). Brain, behavior and evolution, 35(4), 195-211.
- Persson, A., & Brönmark, C. (2002). Foraging capacities and effects of competitive release on ontogenetic diet shift in bream, Abramis brama. Oikos, 97(2), 271-281.
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