Cercle Jeune Nation

Le Cercle Jeune Nation est un ancien groupuscule ultra-nationaliste du Québec classé à l'extrême droite. Il a été fondé en 1986 par François Dumas, Gilbert Gendron et Rock Tousignant[1].

Hormis la courte note de Ivan Carel dans le Bulletin d'histoire politique de l'Association québécoise d’histoire politique - (AQHP) en 2002, il n'existe pas à proprement parler dans la province de Québec (Canada) d'étude universitaire sérieuse sur le groupe Jeune Nation.

Définition des origines modifier

Le Cercle Jeune Nation était un petit groupe d'activistes qui relevait de l'affirmationnisme blanc en contexte québécois du début des années 1980 au milieu des années 90.[réf. nécessaire][2],[3],[4]. Le noyau dirigeant oscillait entre un nationalisme paléo-conservateur canadien-français plutôt hostile au conservatisme classique et certaines inflexions qui pouvaient mener vers le nationalisme blanc américain et européen (l’affirmationnisme blanc).

Positionnement politique et genèse historique modifier

Le Cercle Jeune Nation se revendiquait de la droite dite nationale dans une optique de défense de l'identité blanche canadienne-française. Cercle de réflexion contre l'avortement, l'immigration massive de non-européens, le multiculturalisme canadien et le libéralisme en matière de mœurs. Le Cercle s'inspirait à sa fondation des droites radicales européennes autant par anticommunisme que par antilibéralisme radical. Le mot d’ordre du groupe était : « pas d’ennemis à droite » qui regroupaient autant des indépendantistes que des fédéralistes.

Au tout début, en 1986, le rédacteur de La Lettre de Jeune Nation était François Dumas.

En 1989, Rock Tousignant écrivait dans le mensuel nationaliste Jeune Nation un texte faisant l’éloge du général sudiste (esclavagiste) américain Robert E. Lee.

«( …) Le Sud, lui, nous offre, avec la figure noble et tragique de Robert Edward Lee, l’incarnation d’un type d’homme plaçant l’honneur et la loyauté à la terre de ses père bien plus haut que le gloire et les honneurs. Le Sudiste est d’abord l’homme de la fidélité. (…) (Mensuel nationaliste d’information et de formation politiques Vol. 4 no 4 avril 1989, « Ne rien faire, c’est laisser faire », Jeune Nation, Des livres et des idées p. 7) [5]

À partir de mai 1992, le directeur de la rédaction des Cahiers de Jeune Nation[6] était le catholique traditionaliste de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) Jean-Claude Dupuis. Selon Dupuis, le Cercle Jeune Nation se composait surtout de nationalistes canadiens-français traditionnels, plus ou nostalgiques du Québec duplessiste[7].

Tentative d’infiltration modifier

Une controverse arrive à l’automne 1992. Une crise éclate au sein d’un regroupement nationaliste québécois la Ligue d’Action Nationale sous la direction de Rosaire Morin. Ce qui est appelé à l’époque « l'Affaire Jeune Nation » soulève un malaise au sein de la prestigieuse Ligue d'Action Nationale. Une tentative de noyautage au sein de la Ligue est rapportée dans les médias. Il y a des militants du Cercle Jeune Nation à la Ligue. Selon le journaliste de La Presse Mario Fontaine le groupe d’extrême droite « Jeune Nation » est présent à la Ligue[8].

Le rapport du politique avec la religion dans l'espace public a suscité des divisions à l’interne du Cercle en raison d'une possible stratégie culturelle de type gramscisme de droite qui a été entièrement refusé sous le leadership du disciple de Mgr Lefebvre Jean-Claude Dupuis.

Histoire récente d'anciens du Cercle Jeune Nation modifier

L'historien[9] controversé Jean-Claude Dupuis, catholique traditionaliste de la Fraternité Sacerdotale St-Pie X (FSSPX) retrace récemment son parcours intellectuel dans le Cercle Jeune Nation. Voir dans une publication récente : Au temps de Jeune Nation, Les écrits polémique d'un contre-révolutionnaire tranquille [10]. En juin 2014, Jean-Claude Dupuis a accordé une entrevue au magazine Harfang, publication de la Fédération des Québécois de souche[11],[12]. Il est en faveur de la reconnaissance canonique par Rome de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie Dix (FSSPX) sans exiger en retour de compromission doctrinale[13]. Lors d’une conférence controversée de Jean-Claude Dupuis et Marion Sigaut en banlieue de Québec, le groupe d’extrême droite Atalante Québec[14] s’est vanté d’avoir fait son « service d’ordre » pour l’événement[15].

Il sort, en 2019, une critique virulente de la Révolution tranquille[16].

L’ancien cofondateur de Jeune Nation Rock Tousignant[17],[18] est officiellement depuis 2016 un militant-collaborateur pour la Fédération des Québécois de souche. Le thème du complot juif demeure un narratif important pour un groupe comme la FQS selon le chercheur à l'INRS Frédérick Nadeau[19].

François Dumas vient de rejoindre en 2018 l'équipe de la Fédération des Québécois de souche en étant collaborateur de leur magazine Le Harfang. Il animait auparavant à Radio Ville-Marie à Montréal une émission intitulée Voix orthodoxes[20]. Avant son implication à Radio Ville-Marie, il a été responsable du service de référence comme archiviste[21] de même qu'à la conception graphique au Centre de recherche Lionel-Groulx à Outremont (Montréal, Québec, Canada)[22].

Notes et références modifier

  1. (en) Cede Eller, « A Look At The Catholic Far Right In Quebec », sur Hartford Web Publishing, .
  2. William Audureau, « Etats-Unis : derrière l'« alt-right », cinq grandes mouvances qui convergent », Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  3. « Suprémacistes, nationalistes, alt-right : quelles différences ? », TV5MONDE,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  4. « Enquête. Au cœur de la fachosphère de Trump », Courrier international,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. Rock Tousignant, « Mensuel nationaliste d’information et de formation politiques The Southern Partisan », Jeune Nation,‎ vol.4 no 4 avril 1989, p. 7 (lire en ligne).
  6. « POLITIQUE DE LA REVUE, Cahiers de Jeune Nation », Le Cercle Jeune Nation est un mouvement d’action intellectuelle qui vise à définir et à promouvoir une pensée nationale canadienne-française fondée sur nos traditions politiques, culturelles et religieuses. Nous luttons contre l’idéologie mondialiste qui entend détruire les particularismes nationaux, priver l’humanité des richesses de la diversité des peuples et des cultures et créer un homo oeconomicus américanisé, uniforme, sans idéal social et spirituel. Les Cahiers de Jeune Nation publient des textes de réflexion politique, historique, culturelle ou religieuse en accord avec les principes de la Droite nationale. La revue respecte la liberté d’expression de ses collaborateurs, qui assument la responsabilité de leurs opinions. Nous accueillons avec plaisir les collaborations extérieures. Les textes soumis doivent être dactylographiés à doubles interlignes et ne pas excéder 15 pages pour un article et 4 pages pour en compte rendu.,‎ mai, 1992, p. 44.
  7. Jean-Claude Dupuis, « Au temps de Jeune Nation », Fondation Littéraire Fleurs de Lys,‎ mais 2017, p. 302 (lire en ligne).
  8. Mario Fontaine, « Les mouvements nationalistes ont entrepris une cure de rajeunissement », La Presse,‎ , A17.
  9. « Né en 1961, Jean-Claude Dupuis a étudié au Collège de L’Assomption, au Cégep de Saint-Jérôme, à l’Université de Montréal et à l’Université Laval. Diplômé en histoire, en droit et en pédagogie, il fut procureur de la couronne pendant quelques années avant de faire une maîtrise sur L’Action française de Montréal (1917-1928), sous la direction de Pierre Trépanier, et un doctorat sur Mgr Elzéar-Alexandre Taschereau et le catholicisme libéral au Canada français (1820-1898), sous la codirection de Brigitte Caulier et Nive Voisine. Spécialisé en histoire intellectuelle et religieuse du Québec des XIXe et XXe siècles, boursier du Fonds FCAR et du CRSHC, il a présenté plusieurs communications dans les sociétés savantes et publié des articles dans diverses revues, notamment la Revue d’histoire de l’Amérique française, L’Action nationale, Études d’histoire religieuse et Le Sel de la Terre. Il a remporté le Prix Guy-Frégault (1994), décerné par l’Institut d’histoire de l’Amérique française, pour son article sur “La pensée économique de L’Action française”. Il enseigne présentement l’histoire et la géographie, ainsi que l’éthique et culture religieuse à l’École Sainte-Famille de Lévis (Québec), une institution catholique liée à la Fraternité Saint-Pie X. », Biographie,‎ publiée le 15 mai 2017, p. 1 (lire en ligne).
  10. « Au temps de Jeune Nation. Les écrits polémiques d'un contre-révolutionnaire tranquille », sur Fondation littéraire Fleur de Lys, .
  11. FQS est un groupe nationaliste québécois völkisch (uni par la même origine et le même sang).
  12. « Selon Frédéric Boily, professeur titulaire du Campus St-Jean d'Alberta et chercheur, spécialiste de la droite pan-canadienne (et de l'extrême droite), sur le site de la FQS « on s’aperçoit qu’il y a là un antisémitisme latent ». Voir conférence :Droitisation et extrême droite au Québec : retour sur le passé et regard sur aujourd'hui », CÉFIR,‎ , p. 27:40-48 (lire en ligne).
  13. Canada Fidèle, « Réflexions sur la lettre romaine du 4 avril 2017 », sur Canada fidèle, (consulté le ).
  14. (en) « La Phalange: The rise of a fascist fight club in Canada », Bloody Elbow,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. Philippe Teisceira-Lessard, « Les autorités catholiques se distancient d'une conférence controversée », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. Jean-Claude Dupuis, Historien, « Pour en finir avec le mythe de la Révolution tranquille », Fondation littéraire Fleur de Lys,‎ (lire en ligne).
  17. Université de Montréal, « Rock Tousignant est diplômé de l’université de Montréal. Voir Promotion notariat 1994-1995 », La faculté de droit de l'Université de Montréal et le notariat: 125 ans,‎ , p. 189 (lire en ligne).
  18. Pierre Trépanier, « André Vachon (1933-2003). Les Cahiers des dix, (58), 135–169. », « (...) Merci au notaire Rock Tousignant pour cette référence » Note de bas de page p.141,‎ (lire en ligne).
  19. « Congrès de l’Acfas: l’extrême droite québécoise attire des profils variés », sur Le Devoir (consulté le ).
  20. Radio-Ville Marie, « Voix orthodoxes », Montréal,‎ (lire en ligne).
  21. Jonathan Laveault, Rosaire Morin : Portrait d'un militant nationaliste (1939-1999) (Mémoire de maîtrise en histoire), Université du Québec à Montréal, (lire en ligne), p. 3.
  22. Centre de recherche Lionel-Groulx, « Rapport annuel 2009 », Feuillet,‎ , p. 2, 5 (lire en ligne).

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Jean-Claude Dupuis, Au temps de Jeune Nation. Les écrits polémique d'un contre-révolutionnaire tranquille (Recueil de textes), Lévis, Québec, Fondation littéraire Fleur de Lys, , 298 p. (ISBN 978-2-89612-528-9).
  • Ivan Carel, « Un mouvement de droite nationale contemporain : Jeune Nation », Bulletin d'histoire politique, Association québécoise d’histoire politique - AQHP, vol. 11, no 1,‎ , p. 115-126.