Cipa Godebski

écrivain français, membre des Apaches
Cipa Godebski
Cipa Godebski debout sur le pont de l'Aimée, photographié par Pierre Bonnard (1905).
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Cyprien Xavier Léonard GodebskiVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Activités
Père
Conjoint
Ida Godebska (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Parentèle
Misia Sert (sœur consanguine)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Archives conservées par

Cyprien Xavier Léonard Godebski dit Cipa Godebski, né le à Varsovie et mort en à Vulaines-sur-Seine, est un salonnier français d'origine polonaise, appartenant à la famille Godebski.

Biographie modifier

Cipa Godebski, par Toulouse-Lautrec, 1896, collection privée.
La famille de Cipa Godebski, par Pierre Bonnard, vers 1902
Édouard Vuillard, Le Petit Restaurant (la famille Godebski à table), 1902, Musée d'art de Dallas.
Réunion de musiciens chez M. Godebski par Georges d'Espagnat, 1910, Bibliothèque-musée de l'Opéra, tableau qui pourrait s'appeler « Cipa et ses amis Apaches »[2].

Fils du sculpteur Cyprien Godebski et de Mathilde Marie Madeleine Rosen (1837-1887), Cipa est le demi-frère de Misia Sert.

Il épouse Ida Caroline Philippine Kasparek, fille de Franciszek Kasparek, le 16 juillet 1898 à Cracovie[3]. D'abord seul, puis avec Ida, Cipa va participer à toutes les batailles menées par Misia pour défendre Ubu roi en 1896, Le Sacre du printemps en 1913, et Parade en 1917.

Installé à Paris, le couple tient un salon fréquenté par les artistes, dont le cercle des Apaches où on a vite surnommé Cipa « Père Ubu », et celui de la Revue Blanche dirigée par les frères Natanson (Alexandre, Thadée et Louis-Alfred)[4].

Cipa compte parmi ses amis les plus proches les peintres Vuillard et Bonnard, le musicien Maurice Ravel[5], le poète Paul Valéry. Ils se retrouvent dans son salon parisien rue Saint-Florentin, puis rue de Chartres à Neuilly, et enfin rue d'Athènes. Les mêmes profitent aux beaux jours de sa maison de campagne des bords de Seine à Valvins, la Grangette, où Vuillard et Bonnard ont peint de nombreux tableaux, où Toulouse-Lautrec fait de longs séjours et où Ravel a composé deux pièces pour piano, À la manière de[6]. À deux pas se trouve la maison de leur grand ami Stéphane Mallarmé, depuis transformée en musée.

Il fréquente les Natanson lors de leurs villégiatures à Villeneuve-sur-Yonne, du temps où Misia vivait avec Thadée ; là se retrouvent également des Nabis, dont Félix Vallotton, et l'écrivain Romain Coolus[7]. Après son divorce avec Thadée, Misia se remarie début 1905 avec le magnat de la presse Alfred Edwards. Il fait construire pour elle un yacht conçu pour la navigation sur les canaux, baptisé L'Aimée[8]. Misia y invite sa famille et ses amis pour une croisière de deux mois au cours de l'été. Sont à bord Cipa (voir photo) et Ida, Pierre Bonnard, qui peint et photographie avec ardeur, Renoir, Pierre Laprade et Maurice Ravel, que Misia veut consoler de son échec au prix de Rome et qui dispose d'un piano[9].

Pendant la guerre, le salon évolue : le groupe des Apaches s'est quelque peu disloqué ; son dernier haut fait est le soutien inconditionnel apporté à Igor Stravinsky lors des premières auditions de L'Oiseau de feu et du Sacre du printemps[10]. De nouveaux invités apparaissent : Jean Cocteau, Erik Satie[11] et Jean Hugo (qui deviendra plus tard un ami proche de Jean Godebski en Camargue[12]). Et surtout, Cipa accueille de jeunes musiciens qui vont former le Groupe des Six, dont Francis Poulenc qui dédiera une mélodie à Ida[13].

En villégiature estivale à Carantec (Finistère) de 1908 à 1915 puis de 1918 à 1923[14], les Godebski reçoivent André Gide, Paul Valéry, Alexandre Benois, Florent Schmitt et y sont rejoints par Igor Stravinsky et sa famille à l'été 1920, tandis que l'ami Pablo Picasso vient lui à Dinard à partir de 1922[15].

Cipa est le père de Jean et Mimi, dédicataires de Ma mère l'Oye de Maurice Ravel, qui dédicace également à Ida et Cipa sa Sonatine pour piano (1905)[16],[17]. Il faut savoir que pour Maurice Ravel, les Godebski étaient véritablement devenus sa famille d'adoption[18]. Mimi, qui a épousé Aimery Blacque-Belair en 1925, explique que Ravel et Cipa se sont tout de suite entendus à merveille : « Les deux hommes avaient l'un pour l'autre une amitié rare, faite d'admiration réciproque et d'entente profonde »[19]. Et c'est toute la famille que Ravel a adoptée. Mimi et son frère Jean jouent avec lui et l'écoutent raconter des histoires : « C'était Laideronnette, la Belle et la Bête, et surtout les aventures d'une pauvre souris qu'il avait inventées pour moi », écrit Mimi[19]. Seule déception : les deux enfants ont dû renoncer à créer la version pour piano à quatre mains de Ma mère l'Oye, trop difficile pour eux[20]. Continuation des liens établis : en 1934, le beau-frère de Mimi, Hubert Blacque-Belair, épouse la fille de l'apache Déodat de Séverac, qui avait lui-même dédié une œuvre à Cipa et une autre à Mimi[21].

La crise de 1929 a contraint les Godebski à fermer leur salon parisien. Ils se sont alors retirés à Valvins où ils ont fini leurs jours.

Œuvres dédiées ou liées modifier

Musique modifier

  • Maurice Ravel, Sonatine pour piano (1905), dédiée à Cipa et Ida
  • Maurice Ravel, Ma mère l'Oye (1910), pour piano à quatre mains, dédiée à Jean et Mimi
  • Maurice Ravel, À la manière de (Chabrier et Borodine), pour piano (1912), dédié à Cipa et Ida
  • Désiré-Émile Inghelbrecht, Quatre mélodies russes (1905), la troisième dédiée à Ida
  • Maurice Delage, Trois mélodies (1909), une est dédiée à Ida
  • Déodat de Séverac, Pippermint-Get (1907), valse brillante pour piano, dédiée à Cipa
  • Déodat de Séverac, En vacances (1911), huit petites pièces enfantines pour piano à quatre mains, dont une dédiée à Mimi (Mimi se déguise en marquise)
  • Manuel de Falla, Sept chansons populaires espagnoles (1922), dédiées à Ida
  • Erik Satie, Trois mélodies (1916), dont Daphénéo écrite sur un texte de Mimi
  • Francis Poulenc, Huit chansons polonaises (1934), la première dédiée à Ida, la deuxième à Misia

Arts plastiques modifier

Bibliographie (ordre chronologique) modifier

  • Marie [Mimi] Godebska Blacque-Belair, « Quelques souvenirs intimes sur Ravel », La Revue musicale, no 187,‎ , p. 189-191
  • Jean Mycinski, « Rue d’Athènes », RIMF, no 22,‎ , p. 81-86 (ISSN 0244-2957)
    Sur le salon des Godebski 22, rue d’Athènes à Paris
  • Jean Godebski, « Mon Ravel », RIMF, no 24,‎ , p. 50-57 (ISSN 0244-2957)
    Propos recueillis par son neveu Jean Mycinski
  • Natalie Morel Borotra, « Ravel et le groupe des Apaches », Musiker. Cuadernos de música, no 8,‎ , p. 145-158 (ISSN 1137-4470, lire en ligne)
  • Philippe Rodriguez, « De l'Apachie et des Apaches », Maurice Delage ou La solitude de l'artisan, Drize, Éditions Papillon,‎ , p. 11-35 (ISBN 2-940310-08-4, BNF 38913259)
  • Laurent de Freitas, « Apachamicalement… Petits-mots d’Apaches adressés à Léon-Paul Fargue », Ludions, no 6,‎ 2002-2003, p. 175-180 (ISSN 1621-4714, BNF 37130596)
    Contient la transcription et facsimlé d'1 lettre de Cipa Godebski à Léon-Paul Fargue du 10 décembre 1919
  • Déodat de Séverac, La Musique et les Lettres : correspondance rassemblée et annotée par Pierre Guillot, Sprimont, Mardaga, (BNF 38885264)
  • Malou Haine, « Cipa Godebski et les Apaches », Revue belge de musicologie, no 60,‎ , p. 221-266 (ISSN 0771-6788, BNF 34459732, lire en ligne)
  • Philippe Champy et Jean-Claude Huvé, s.j., Les Blacque-Belair : Ascension sociale et plongée dans la culture, Paris, Guénégaud, , 144 p. (ISBN 978-2-85023-130-8, BNF 41191913)
  • Maurice Ravel, L'intégrale : Correspondance (1895-1937), écrits et entretiens : édition établie, présentée et annotée par Manuel Cornejo, Paris, Le Passeur Éditeur, , 1769 p. (ISBN 978-2-36890-577-7 et 2-36890-577-4, BNF 45607052)
    Contient 40 correspondances de Ravel à Cipa et 4 de Cipa à Ravel, 110 correspondances de Ravel à Ida et 5 d'Ida à Ravel, 1 correspondance de Ravel à Jean et 2 de Jean à Ravel, 2 de Ravel à Mimi et 1 de Mimi à Ravel, 4 correspondances de Ravel à Misia

Notes et références modifier

  1. « ark:/36937/s005afeaa5edd799 », sous le nom GODEBSKI M. et Mme Cyprien Xavier (consulté le )
  2. Haine 2006, p. 263.
  3. data.bnf.fr.
  4. Haine 2006, p. 221-266.
  5. (BNF 39823571).
  6. Haine 2006, p. 243.
  7. [PDF] « Villeneuve », extraits de correspondance entre Natanson, Vuillard, Misia..., Études de Lettres : revue de la Faculté des lettres de l'Université de Lausanne, 8 | 1975.
  8. jeu de mots sur les initiales de Misia Edwards
  9. Gold et Fizdale, Misia, Gallimard, Folio, p. 123 à 129
  10. Haine 2006, p. 254-255.
  11. En dehors de la participation de la famille à la bataille de Parade, il faut noter que la fille de Cipa, Mimi, est l'auteur d'un texte impérissable mis en musique par Satie, Daphénéo : « Dis-moi, Daphénéo, quel est donc cet arbre dont les fruits sont des oiseaux qui pleurent ? Cet arbre, Chrysaline, est un oisetier. Ah, je croyais que les noisetiers donnaient des noisettes !...»
  12. Marié à Marie-Thérèse de Bernis, Jean Godebski a vécu à Nîmes dans l'hôtel de Bernis et dans un mas camarguais où il s'était mis comme Jean Hugo à la culture de la vigne
  13. Haine 2006, p. 266.
  14. Maurice Ravel, L'intégrale : correspondance (1895-1937), écrits et entretiens, (ISBN 978-2-36890-577-7 et 2-36890-577-4, OCLC 1065415909, lire en ligne)
  15. La correspondance avec la famille Godebski est aux Archives nationales [1]. Elle indique, entre autres, que des liens ont été maintenus après la guerre de quarante avec Jean Godebski, que Picasso rencontrait quand il venait à la feria de Nîmes. Les Godebski avaient fait la connaissance de Picasso au moment de la création de Parade
  16. (BNF 39580007).
  17. Haine 2006, p. 242-244.
  18. Champy 2007, p. 90.
  19. a et b Blacque-Belair 1938, p. 189-191.
  20. Champy 2007, p. 91.
  21. Haine 2006, p. 251.
  22. Base RMNGP
  23. voir en ligne sur Étude Osenat

Liens externes modifier

Sur les autres projets Wikimedia :