Claire Denis

scénariste et réalisatrice française

Claire Leboucq[1], dite Claire Denis, née le [2],[3],[4] dans le 14e arrondissement de Paris, est une scénariste et réalisatrice française.

Claire Denis
Description de cette image, également commentée ci-après
Claire Denis lors de la Mostra de Venise 2009.
Nom de naissance Claire Leboucq
Naissance (78 ans)
14e arrondissement de Paris
Nationalité Française
Profession Réalisatrice, scénariste
Films notables Chocolat
Beau Travail
Trouble Every Day
35 Rhums
White Material

Biographie

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Famille et formation

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Née à Paris parce que sa mère voulait accoucher en France, Claire Denis retourne à l'âge de deux mois en Afrique. Elle y grandit et fait sa scolarité primaire dans les écoles mixtes, notamment au Cameroun, en Somalie, en Haute-Volta (actuel Burkina Faso), et à Djibouti[5],[6],[7]. Son père, administrateur civil travaillant dans les colonies françaises d'Afrique, présentait à ses enfants l'indépendance comme une chose positive pour les pays africains[8],[5]. Atteinte de poliomyélite vers l'âge de 12 ans, elle rentre en France pour se faire soigner et poursuit sa scolarité au lycée de Saint-Germain-en-Laye ; c'est là, auprès d'un professeur d'histoire cinéphile, qu'elle découvre le cinéma d'auteur, en particulier japonais[5]. Elle déclare s'être sentie très mal à l'aise en France, n'arrivant pas à s'intégrer, se sentant étrangère, « marginale » et déracinée[8]. Après des études de lettres et une licence de sciences économiques, puis un passage éphémère aux Langues O, Claire Denis ne se plaît pas à la faculté. Mariée en 1969 à un photographe, elle devient son assistante jusqu'au divorce rapide du couple[5]. Elle retourne en Afrique travailler à Télé Niger où elle réalise des films d'animation, puis revient à nouveau en France où elle est employée par le service « Recherche » de l'ORTF[9].

Claire Denis passe le concours d'entrée de l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) en janvier 1969[3]. Elle en sort diplômée en 1972[9]. Durant cette période, elle se sent enfin chez elle à Paris. L'IDHEC constitue surtout pour elle un apport sur le plan « personnel et social », l'école laissant les étudiants assez libres en ce qui concerne la technique[8]. Elle y ressent une filiation avec Louis Daquin[8] et est particulièrement marquée par les cours d'Henri Alekan, dont on sent l'influence dans son court métrage d'étude, une œuvre d'anticipation inspirée de Philip K. Dick[9] . Elle est alors passionnée par la science-fiction et aurait aimé travailler pour la série télévisée La Quatrième Dimension[8].

Son court métrage Le 15 mai est présenté au Festival international du jeune cinéma de Hyères où il attire l'attention de producteurs de Pathé Cinéma. Ce sont eux qui financeront son premier long métrage consacré au « Grand Magic Circus » de Jérôme Savary[9].

Débuts dans le cinéma

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Après ses études, Claire Denis devient assistante réalisatrice. Beaucoup de ceux qui sortent de l'IDHEC entrent alors à l'ORTF, mais elle souhaite éviter de s'engager sur une longue période[10]. Ce travail est un moyen pour elle de gagner sa vie, mais à cette époque, elle croit s'être trompée de chemin en voulant devenir réalisatrice. Elle a aussi des préjugés sur ce que sont les rapports de production et imagine qu'il lui serait trop difficile et douloureux de réaliser dans ce cadre[11]. Elle considère que ce travail ne lui a pas appris à réaliser mais à trouver le moyen de garder sa liberté en le faisant[11].

Elle assiste alors le réalisateur Robert Enrico sur deux films, Le Vieux Fusil (1975) et L'Empreinte des géants (1980). Elle travaille également à cette époque avec Jacques Rivette, qui aura une forte influence sur son travail futur notamment dans l'importance « de ne pas trahir ses personnages[8],[9] » et celle d'avoir une « perspective morale » dans son travail[8]. D'autres grands réalisateurs marqueront ses débuts. En premier lieu Wim Wenders, qui la choisit comme assistante pour Paris, Texas en 1984 (sans doute selon elle parce qu'elle est « le premier nom sur une liste qu'on lui avait donnée[8] ») puis pour Les Ailes du désir en 1987. Pendant le tournage de Paris, Texas (où de nombreux problèmes de production sont résolus au dernier moment), elle entrevoit que, « dans certaines conditions », il lui serait possible de réaliser elle-même « sans trop souffrir de ce [qu'elle croyait] être les rapports de production[11] ». Elle comprend aussi lors de ce tournage l'importance de travailler l'écriture du scénario, se sentant incapable de construire un film en improvisant au jour le jour comme le fait Wenders[8]. Elle rencontre également Agnès Godard, alors assistante caméra du chef opérateur de Wenders, qui l'accompagnera comme directrice de la photographie tout au long de sa carrière. Elle travaille ensuite avec Jim Jarmusch pour Down by Law en 1986. C'est enfin Jean-François Stévenin qui la convainc de devenir réalisatrice et de se lancer dans ses propres projets[9].

Carrière de réalisatrice

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Poussée par ces expériences et encouragée par Wim Wenders, Claire Denis écrit et réalise son premier long métrage, Chocolat, en 1988. Très autobiographique et marqué notamment par son enfance au Cameroun, il sera sélectionné en compétition officielle lors du 41e Festival de Cannes. Selon Jean-Michel Frodon, ce film crée un « malentendu » sur la personnalité de cette réalisatrice : « [Le film] avait plu pour son exotisme sans folklore, ses au-delà suggérés. On lui prédit une carrière vouée à la chronique intime, avec le surcroît de ce qu'on appelle un regard féminin, sans trop savoir ce que ça veut dire[12]. » C'est avec son second long métrage, S'en fout la mort, que son cinéma fait mieux comprendre ses caractéristiques aux yeux de la critique : aussi bien une certaine violence qu'une recherche sur la forme cinématographique et un rapport au corps[12]. Ce film est un échec public, tout comme J'ai pas sommeil qui est pourtant selon Le Monde un grand film politique[12].

Suivront de nombreux films d'auteur, souvent attachés à la description du désir (Beau Travail ou Vendredi soir) et de l'amour dans toute sa violence (Trouble Every Day)[13]. La musique y tient toujours une place importante[14] (collaboration avec Tindersticks ou Dickon Hinchliffe seul). Elle a aussi réalisé le clip de la chanson Incinerate du groupe Sonic Youth, issue de l'album Rather Ripped (2006).

Dans le début des années 1990, Claire Denis refuse deux films à partir de scénarios déjà écrits, ne pouvant s'investir suffisamment dans un projet écrit par d'autres[15]. Il s'agit de La Fille de l'air, réalisé par Maroun Bagdadi en 1992, et Boys Don't Cry qui lui a été proposé par la productrice américaine Christine Vachon, qui sera finalement porté à l'écran par Kimberly Peirce (1999)[15].

Claire Denis en 1991.

Par envie d'utiliser les musiques qu'elle écoutait adolescente, elle accepte en 1994 la proposition d'Arte de réaliser un téléfilm pour la collection Tous les garçons et les filles de leur âge : US Go Home[16]. Elle y découvre celui qui deviendra un de ses acteurs fétiches, Grégoire Colin, ainsi que la jeune Alice Houri. Alors qu'elle a en projet une adaptation de livre après ce téléfilm, elle décide de refaire un film avec eux, car elle sort du tournage avec « l'impression de les avoir à peine découverts[17]. » Elle leur fait donc à nouveau jouer un couple frère-sœur dans Nénette et Boni. Ce thème lui tient à cœur, notamment parce qu'elle a un frère plus jeune et qu'elle voit ces relations comme un amour franc où « on ne se doit rien » et où n'existe pas l'angoisse de la séparation comme dans la relation amoureuse[17].

Claire Denis a aussi réalisé des documentaires, notamment Man No Run sur des musiciens camerounais et Jacques Rivette, le veilleur, un entretien entre Serge Daney et Jacques Rivette, cinéaste avec qui elle a travaillé et avec qui elle est amie[12].

Très influencée par le travail de Wim Wenders, de Jim Jarmusch mais également de Yasujirō Ozu et Hou Hsiao-hsien, Claire Denis déclare en 1995 à propos de son approche cinématographique : « J'ai choisi le camp des cinéastes qui font confiance à l'image[18] », mettant en avant l'importance de la scène, de son cadre et de l'image (qui, selon elle, « parle d'abord »). Dans le cinéma de Claire Denis, les non-dits occupent une place importante. L'usage de dialogues est seulement considéré comme un plus.

Elle a également été intervenante à la Fémis.

Filmographie

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Réalisatrice

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Longs métrages

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Documentaires

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Courts métrages

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  • 1969 : Le 15 mai
  • 1991 : Keep It for Yourself
  • 1991 : Pour Ushari Ahmed Mahmoud
  • 1993 : Monologues (série télévisée épisode La Robe à cerceau)
  • 1995 : À propos de Nice : la suite (segment Nice, Very Nice)
  • 2002 : Vers Nancy
  • 2011 : To the Devil
  • 2014 : Voilà l'enchaînement, sur un scénario de Christine Angot

Actrice

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Assistante réalisatrice

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Distinctions

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Récompenses

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Nomination

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Jurys festivaliers

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Notes et références

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  1. (en) « Encyclopedia of French Film Directors, Volume 1, p. 308 », sur books.google.fr (consulté le )
  2. Extrait de naissance no 14/3398/1946, LES GENS DU CINEMA ©
  3. a et b Annuaire des anciens élèves de l'IDHEC, La Fémis, 1994, p. 252 (ISBN 2-907114-26-3)
  4. BiFi.fr
  5. a b c et d Mal (2008), p. 13-15.
  6. Claire Denis, le tremblement du monde par Jean-Michel Frodon dans les Cahiers du cinéma.
  7. Claire Denis dans l'Encyclopædia Universalis. Page consultée le 29 septembre 2012.
  8. a b c d e f g h et i Serge Kaganski, « Noir Désir, interview de Claire Denis », Les Inrockuptibles, no 57,‎ , p. 70-75
  9. a b c d e et f Mal (2008), p. 16-18.
  10. Laurent Rigoulet, « « Pourrons-nous continuer à faire du cinéma ? » À la question « comment vivez-vous », réponses de Cedric Khan, Claire Denis, Laurence Ferreira Barbosa », Libération,‎ (lire en ligne)
  11. a b et c Thierry Jousse et Frédéric Strauss, « Entretien avec Claire Denis », Cahiers du cinéma, nos 479/480,‎ , p. 25-30
  12. a b c et d Jean-Michel Frodon, « Claire Denis ou l'art du partage », Le Monde,‎ .
  13. Le tabou, autour du charnel, le point obscur au cœur du sexuel font ainsi partie des thèmes de prédilection qu'explore Claire Denis. Voir Vincent Bonnet, « “Politique” du regard : J'ai pas sommeil de Claire Denis », Entrelacs n°9, 2012 [lire en ligne].
  14. « Un film peut naître d'une musique », entretien avec Didier Péron, Libération
  15. a et b Mal 2007, p. 43.
  16. Cécile Maveyraud, « Tous les garçons et les filles », Télérama, no 2337,‎ , p. 90 et 91.
  17. a et b Michel Guilloux, « Claire Denis: de l'amour est passé », L'Humanité,‎ (lire en ligne).
  18. Claire Denis, la vagabonde documentaire de 48 minutes de Sébastien Lifshitz, 1995.
  19. Le Camp de Bredjing, sur teleobs.nouvelobs.com, consulté le 7 avril 2016.
  20. (en) Fiche de Nénette et Boni sur le site du festival de Locarno
  21. Palmarès 1996 du festival de Namur

Voir aussi

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Bibliographie

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Ouvrages

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  • (en) Martine Beugnet, Claire Denis, université de Manchester, 2004 (ISBN 978-0-7190-6481-4)
  • (es) Alvaro Arroba, Claire Denis : Fusión fría, ediciòn Ocho y Medio, Libros de Cine, S.L., 2005 (ISBN 978-8496582101)
  • Cédric Mal, Claire Denis, cinéaste à part, et entière..., Paris, éditions de Verneuil, , 271 p. (ISBN 978-2-906994-80-5) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Sébastien David, Fabrice Fuentes, Paul Gibert et Rémi Fontanel (dir.), Le Cinéma de Claire Denis ou l'Énigme des sens, éditions Aléas, 2008 (ISBN 9782843012105)

Articles et chapitres d'ouvrages

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  • Evelyne Szaryk, « L'esthétique du corps dans l'œuvre de Claire Denis », Initial (e) s, vol. 20,‎ , p. 122-138 (lire en ligne)
  • Fabien Philippe, « Rétrospective Claire Denis : Un cinéma de l’intrusion », 24 images, no 134,‎ , p. 4-5 (lire en ligne)
  • Rémi Fontanel, « « Ouvrir le film » : du générique dans le cinéma de Claire Denis », dans Alexandre Tylski (dir.), Les Cinéastes et leurs génériques, L'Harmattan, (ISBN 978-2-296-05012-9), p. 137-165
  • Sylvie Ngilla et Claire Denis, « Claire Denis et ces corps étrangers qui habitent ses films », Africultures, nos 92-93,‎ , p. 382-389
  • Rémi Fontanel, « La petite musique des objets dans le cinéma de Claire Denis », Écrans, no 11 « Les objets sonnants au cinéma [dir. Martin Barnier, Benjamin Labé, Marylin Marignan] »,‎ , p. 137-152

Documentaire

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Liens externes

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