Craniométrie

partie de la morphométrie

La craniométrie est une discipline qui s'est développée au XIXe siècle et qui étudie les mensurations du crâne des « races humaines », selon la définition de l'Histoire des sciences (1957)[1]. Elle est une sous-discipline de la craniologie[2]. Elle est encore utilisée pour justifier et donner une caution scientifique au racisme[3].

Un crâne humain et un appareil de mesure de 1902.

Histoire

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Historiquement, elle se distingue de la phrénologie, ou cranioscopie, qui était une tentative ancienne de localiser des fonctions cérébrales (en fait des traits de caractère, des vices et des vertus) dans le cerveau, et de la physiognomonie, qui est l'étude des traits du visage. Ces trois disciplines ont toutes prétendu pouvoir prédire l'intelligence d'un individu et, en ce qui concerne la craniométrie, en se basant sur une corrélation, fausse autant sur le plan évolutif que sur le plan individuel, entre capacité crânienne et performances cognitives (les capacités cognitives n'étant pas corrélése à la taille du cerveau mais plutôt au nombre de synapses dans le cerveau[4],[5],[6]). Malgré les preuves scientifiques de l'erreur de cette théorie, la physiognomonie est toujours utilisée par certains cabinets de recrutement.

Eva Justin procédant à des mesures anthropométriques d'une femme Rom, dans le cadre de travaux sur l'hygiène raciale financés par le Troisième Reich.
photo : Avril 1938.

La craniométrie relève de l'anthropométrie ; elle a été utilisée par certains scientifiques qui voulaient déterminer des différences objectives et mesurables entre les différentes "races" humaines[7]. Elle a également été explorée dans l'étude des différences entre les sexes ; au XIXe siècle, des anthropologues comme Paul Broca[8] ou son élève comme Gustave Le Bon[9], se fondant sur des calculs qui donnaient le cerveau de l'homme, après correction pour la taille du corps, plus lourd que celui de la femme de 100 g de plus[10] en moyenne, ces savants y ont vu une preuve objective d'une prétendue infériorité intellectuelle de la femme, idée qui a perduré tout au long du XXe siècle[citation nécessaire] avant d'être infirmée dans les années 1980 avec le développement de l'imagerie médicale qui permet les premières études sérieuses sur les différences structurales entre le cerveau de l'homme et de la femme[11]. Plusieurs instruments de mesure de la craniométrie — comme le goniomètre par exemple[12] — ont été inventés par Paul Broca qui souhaitait la systématiser et lui donner plus de rigueur mathématique[13].

La craniométrie se base donc sur des théories aujourd'hui démenties par de nombreuses recherches scientifiques.

Notes et références

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  1. « CRANIOMÉTRIE : Définition de CRANIOMÉTRIE », sur www.cnrtl.fr (consulté le ). «À la fin du XVIIIe siècle, la science de l'homme avait donc vraiment pris corps, l'anthropologie physique était née, l'étude des caractères physiques de l'homme en général, de leurs variations, celle des races humaines avaient pris un développement considérable, l'anthropométrie et la craniométrie avaient apporté une base précise, mathématique, aux observations qui étaient restées jusque-là dans le domaine de la description». Histoire de la Science (dir. Maurice Daumas), 1957, p. 1365
  2. Nadine Fresco, «Aux beaux temps de la craniologie», La science face au racisme (dir. Charles Frankel), 1986, p.10è-116, lire en ligne
  3. Carole Reynaud-Paligot, Anthropologie raciale et savoirs biologiques, L’émergence d’une science dans un contexte d’essor des sciences naturelles, (lire en ligne)
  4. Roth, G., & Dicke, U., « Evolution of the brain and intelligence », Trends in cognitive sciences, vol. 9(5),‎ , p. 250–257
  5. Pietschnig, J., Penke, L., Wicherts, J. M., Zeiler, M., & Voracek, M., « Meta-analysis of associations between human brain volume and intelligence differences: How strong are they and what do they mean? », Neuroscience and biobehavioral reviews, no 57,‎ , p. 411–432
  6. « Neuromythe #3 : la taille du cerveau influence l’intelligence | Cortex Mag – Cerveau, cognition et neurosciences pour tous », sur www.cortex-mag.net (consulté le )
  7. Sarga Moussa, L'idée de « race » dans les sciences humaines et la littérature : XVIIIe – XIXe siècles, éditions L'Harmattan, , p. 3489.
  8. Broca écrit en 1861 dans Sur le volume et la forme du cerveau suivant les individus et suivant les races que « la femme étant plus petite que l'homme, et le poids du cerveau variant avec la taille, on s'est demandé si la petitesse du cerveau de la femme ne dépendait pas exclusivement de la petitesse de son corps. Pourtant il ne faut pas perdre de vue que la femme est en moyenne un peu moins intelligente que l'homme ; différence qu'on a pu exagérer, mais qui n'en est pas moins réelle. Il est donc permis de supposer que la petitesse relative du cerveau de la femme dépend à la fois de son infériorité physique et de son infériorité intellectuelle ». Source : Françoise Collin, Le Sexe des sciences : les femmes en plus, Éditions Autrement, .
  9. Gustave Le Bon écrit en 1879 que chez la femme « l'infériorité de l'intelligence est trop évidente pour être contestée » et que « tous les psychologistes qui ont étudié l'intelligence des femmes ailleurs que chez les romanciers et chez les poètes reconnaissent aujourd'hui qu'elles représentent les formes les plus inférieures de l'évolution humaine et sont beaucoup plus près des enfants et des sauvages que de l'homme adulte civilisé ». Source : Pierre Karli, Le cerveau et la liberté, Odile Jacob, .
  10. (en) C. Davison Ankney, « Sex differences in relative brain size : The mismeasure of woman, too ? », Intelligence, vol. 16, no 3,‎ , p. 329-336.
  11. (en) M. Burgaleta, K. Head, J. Álvarez-Linera, K. Martínez, S. Escorial, R. Haier et R. Colom, « Sex differences in brain volume are related to specific skills, not to general intelligence », Intelligence, vol. 40, no 1,‎ , p. 60-68.
  12. Bruno Jacomy, « « Sur mesure, les 7 unités du monde », exposition au musée des Arts et Métiers », Artefact. Techniques, histoire et sciences humaines, no 9,‎ , p. 305–316 (ISSN 2273-0753, DOI 10.4000/artefact.3602, lire en ligne, consulté le )
  13. Pascal Blanchard, Le corps dans tous ses états: Regards anthropologiques, CNRS Éditions via OpenEdition, (ISBN 978-2-271-07833-9, lire en ligne)

Voir aussi

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Bibliographie

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  • Gilles Boëtsch. «Craniométrie». Le dictionnaire du Corps en sciences humaines et sociales, CNRS Editions, pp.115-116, 2006. ⟨halshs-00009332⟩
  • Dominique Chevé, Gilles Boëtsch, « Craniométrie et constitution des normes », dans : Gilles Boëtsch éd., Corps normalisé, corps stigmatisé, corps racialisé. Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, « Hors collection », 2007, p. 35-55. DOI : 10.3917/dbu.boets.2007.01.0035. URL : https://www.cairn-int.info/corps-normalise-corps-stigmatise-corps-racialise--9782804155506-page-35.htm
  • Claude Blanckaert, « « Les vicissitudes de l’angle facial » et les débuts de la craniométrie (1765–1875) », Revue de synthèse, vol. 108, no 3,‎ , p. 417–453 (ISSN 1955-2343, DOI 10.1007/BF03189070, lire en ligne, consulté le )

Articles connexes

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Liens externes

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