Décharge corollaire

copie des signaux moteurs adressée aux systèmes sensoriels

Copie efférente

En neurosciences, une décharge corollaire (ou copie efférente) est une copie des signaux moteurs (les signaux neuronaux envoyés aux muscles ou à d'autres organes capables d'une action physique ou chimique) adressée aux systèmes sensoriels, ce qui leur permet de prévoir les effets de cette action sur l'environnement et de réagir en conséquence (notamment, en les ignorant au profit de ceux dus à d'autres causes)[1].

Histoire

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Les termes de copie efférente et de décharge corollaire apparaissent en 1950[2],[3] mais la reconnaissance de ce phénomène remonte à 1613, quand François d'Aguilon affirme que l'âme possède la faculté de percevoir le mouvement des yeux[4]. Le thème est ensuite développé par Johann Georg Steinbuch en 1811 et Hermann von Helmholtz en 1854[4] : dès qu'un animal bouge, il crée une version miroir de sa propre volonté, qu'il utilise pour prévoir les conséquences sensorielles de ses actions[1].

Exemples

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Les poissons-éléphants[a] disposent de trois types d'électrorécepteurs, chargés de détecter les signaux électriques émis respectivement par le poisson lui-même, les autres poissons-éléphants et les proies potentielles : les décharges corollaires permettent aux récepteurs des 2e et 3e types d'ignorer les signaux électriques auto-produits[5],[6].

Les décharges corollaires permettent aux grillons qui stridulent d'ignorer le son de leurs propres appels[7], aux poissons de ressentir les flux générés par d'autres poissons sans les confondre avec les leurs et aux vers de terre de ramper sur le sol sans se recroqueviller comme ils le font quand ils sont touchés par un animal ou un instrument[1].

Chez l'Homme, les décharges corollaires sont responsables de différents ressentis considérés comme normaux mais en fait paradoxaux : quand on tourne la tête on ressent le paysage comme fixe (au contraire de l'observation d'un panoramique au cinéma, par exemple), on n'arrive pas à se chatouiller soi-même, etc. Le bulbe olfactif émet aussi des signaux différents, pour un même stimulus, selon qu'on inspire ou qu'on expire[1].

Troubles

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Une étude de 2013 met en relation la schizophrénie avec un dysfonctionnement des décharges corollaires, qui seraient notamment la cause des hallucinations auditives et des illusions de passivité[8],[b].

Notes et références

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  1. Les poissons-éléphants sont les premiers organismes qui ont permis de commencer à comprendre le phénomène des décharges corollaires[1].
  2. Par exemple, plus les schizophrènes sont sévèrement atteints, plus ils sont sensibles à leur propre chatouillement[9].

Références

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  1. a b c d et e Ed Yong (trad. Corinne Smith), Un monde immense : Comment les animaux perçoivent le monde [« An Immense World: How Animal Senses Reveal the Hidden Realms Around Us »], Les Liens qui libèrent, (1re éd. 2022), 445 p. (ISBN 979-10-209-2470-4), p. 383-386.
  2. (de) Erich von Holst et Horst Mittelstaedt, « Das Reafferenzprinzip », Naturwissenschaften, vol. 37,‎ , p. 464-476 (DOI 10.1007/BF00622503).
  3. (en) R. W. Sperry, « Neural basis of the spontaneous optokinetic response produced by visual inversion », Journal of Comparative and Physiological Psychology (en), vol. 43, no 6,‎ , p. 482-489 (DOI 10.1037/h0055479).
  4. a et b (en) Otto-Joachim Grüsser (de), « Early concepts on efference copy and reafference », Behavioral and Brain Sciences, vol. 17, no 3,‎ , p. 262-265 (DOI 10.1017/S0140525X00034415).
  5. (en) Nathaniel B. Sawtell, « Neural Mechanisms for Predicting the Sensory Consequences of Behavior: Insights from Electrosensory Systems », Annual Review of Physiology (en), vol. 79,‎ , p. 381-399 (DOI 10.1146/annurev-physiol-021115-105003 Accès libre).
  6. (en) Matasaburo Fukutomi et Bruce A. Carlson, « A History of Corollary Discharge: Contributions of Mormyrid Weakly Electric Fish », Frontiers in Integrative Neuroscience (en), vol. 14,‎ (DOI 10.3389/fnint.2020.00042 Accès libre).
  7. (en) J. F. A. Poulet et B. Hedwig, « A Corollary Discharge Mechanism Modulates Central Auditory Processing in Singing Crickets », Journal of Neurophysiology, vol. 89, no 3,‎ , p. 1528-1540 (DOI 10.1152/jn.0846.2002 Accès libre).
  8. (en) Laura K. Pynn et Joseph F.X. DeSouza, « The function of efference copy signals: Implications for symptoms of schizophrenia », Vision Research, vol. 76,‎ , p. 124-133 (DOI 10.1016/j.visres.2012.10.019 Accès libre).
  9. (en) Evridiki Asimakidou, Xavier Job et Konstantina Kilteni, « The positive dimension of schizotypy is associated with a reduced attenuation and precision of self-generated touch », Schizophrenia, vol. 8,‎ , article no 57 (DOI 10.1038/s41537-022-00264-6 Accès libre).

Voir aussi

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