Dakar-Matin (1961-1970) est un ancien quotidien sénégalais fondé à Dakar un an après l'indépendance du Sénégal proclamée en 1960. Proche du pouvoir, en situation de quasi-monopole, ce fut le plus important titre de la presse sénégalaise au cours des années 1960. En 1970 il fut remplacé par Le Soleil, un quotidien d'information qui paraît toujours.

Histoire

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Succédant à Paris-Dakar (1933-1961) fondé par Charles de Breteuil et qui était destiné à la population française de Dakar, Dakar-Matin est lancé en 1961 par un proche du président Senghor, Daniel de Bergevin, surnommé « Bergo », à la fois journaliste et rédacteur en chef.

Quotidien de pure information, Dakar-Matin fait partie du groupe détenu par une famille française, celle de Charles de Breteuil, qui avait déjà lancé Paris-Dakar et qui contrôle par ailleurs les titres les plus élaborés de la presse francophone d'Afrique subsaharienne, tels que Abidjan-Matin, La Presse du Cameroun ou Bingo[1].

La transformation du journal en 1961 s'accompagne d'une « sénégalisation » significative de l'information[2]. Désormais 80 % des nouvelles concernent le Sénégal et à peine 15 % la France, une proportion totalement inversée par rapport à son prédécesseur Paris-Dakar.

Pour mener à bien cette évolution, Dakar-Matin dispose d'un réseau d'environ 15 correspondants locaux dans des villes autres que la capitale, une logistique qui contribua sans doute à sa relative longévité, par comparaison avec Abidjan-Matin par exemple[3].

Sa ligne est modérée, généralement favorable à la politique du président Senghor et à ses liens avec la France. Une revue de presse universitaire[4], consacrée à la crise constitutionnelle qui opposa en 1962 le Premier ministre Mamadou Dia à Senghor, met en évidence le conformisme du journal : véritable porte-parole du parti dominant, l'UPS, il donne peu d'informations factuelles sur les événements eux-mêmes, reproduit les discours officiels et, au lendemain de la crise, célèbre sans détours la victoire de Senghor :

« Dakar s'est réveillé hier matin dans la joie et dans l'espérance. Depuis quelques jours, en dépit du vent et de l'air frais, les gens étaient comme oppressés. Aujourd'hui ils respirent à pleins poumons l'air de la liberté[5]. »

De fait la famille de Breteuil s'était d'abord montrée très prudente : au plus fort de la crise, le journal avait cessé de paraître pendant quelques jours[2].

En 1962 son tirage est d'environ 21 000 exemplaires[6]. Cependant, au milieu de la décennie il chute à 18 000 exemplaires[7]. À la fin de la décennie, notamment lors de la crise sociale de , le quotidien semble se départir de sa modération habituelle (« son style discret de mensonge par omission »[8]) et s'implique dans le débat, à tel point que l'Union nationale des travailleurs sénégalais (UNTS) lui reproche, au lendemain de la grève du , de s'être livré à « une campagne systématique d'accusations calomnieuses et de dénigrement des dirigeants syndicaux »[8].

En parallèle le pays poursuit son émancipation, notamment dans le domaine de la presse écrite. Dakar-Matin, supprimé, cesse de paraître le , remplacé par Le Soleil, qui échappe désormais à la famille de Breteuil et dont la rédaction se compose exclusivement de Sénégalais[2], dont des journalistes issus du Dakar-Matin comme Eugénie Rokhaya Aw N’diaye[9].

Notes et références

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  1. (en) Rosalynde Ainslie, The Press in Africa: communications past and present, Gollancz, 1966, p. 132-135-137-223-241
  2. a b et c (fr) Gerti Hesseling, Histoire politique du Sénégal : institutions, droit et société (traduction Catherine Miginiac), Karthala, 2000, p. 338 (ISBN 2865371182)
  3. (en) Martin Ochs, The African press, American University in Cairo, Le Caire, 1986, p. 87 (ISBN 977-424-128-2)
  4. (en) Elizabeth Fink, The Radical Road Not Taken: Mamadou Dia, Léopold Sédar SEnghor and the Constitutional Crisis of December 1962, 13 avril 2007, p. 10-11 [1]
  5. (fr) Dakar-Matin, 19 décembre 1962
  6. (fr) Afrique (Société internationale de publications commerciales, culturelles et artistiques), 1962, no 14-19, p. 36
  7. (en) William A. Hachten, Muffled drums : the news media in Africa, Iowa State University Press, Ames, 1971, p. 194 (ISBN 0-8138-1195-3)
  8. a et b (fr) Moussa Paye, « La presse et le pouvoir », in Momar-Coumba Diop (dir.), Sénégal. Trajectoires d’un État, Codesria, Dakar, 1992 [2]
  9. Bassératou Kindo, « Eugénie AW Rokhaya, Directrice du centre d’étude des sciences et technique de l’information de Dakar (Sénégal) : J’ai fait la prison deux fois dans l’exercice de mon métier », LeFaso.net,‎ (lire en ligne)

Voir aussi

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Bibliographie

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Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • B. Bartaud, « De Dakar-Matin au Soleil : les avatars de la page littéraire d'un quotidien national », in Revue de l'Institut de sociologie, 1990-1991, p. 183-190
  • (en) Andrew F. Clark et Lucie Colvin Phillips, « Dakar Matin », in Historical Dictionary of Senegal, The Scarecrow Press, Metuchen (N. J.) et Londres, 1994 (2e éd.), p. 105 Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Mamadou Koume, L'évolution de la presse quotidienne au Sénégal : "Paris-Dakar" (1937-1961), "Dakar-Matin" (1961-1970), Université de Paris 2, 1991 (thèse de doctorat de Sciences de l'information)
  • Hadji Ahamat Sidimi, "Dakar Matin" et "Le Soleil" face aux coups d’État militaires en Afrique occidentale depuis 1965, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1984, 66 p. (Mémoire de DEA)

Articles connexes

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Liens externes

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