Fête de l'âne
La Fête de l'âne est une cérémonie burlesque que l'on peut classer parmi les drames liturgiques du Moyen Âge.
Histoire
modifierCette invention paraliturgique n'est qu'un épisode plus ou moins développé de la Fête des Fous, épisode qu'on pourrait appeler musical. Son rituel est décrit précisément dans les offices canoniaux. Cette représentation des scènes bibliques prend des développements spectaculaires et si profanes que l'Église la bannit progressivement de la liturgie mais elle perdure jusqu'au XVIIe siècle. Ces drames sont alors relégués sur les parvis de l'Église où ils sont joués sous la forme de mystères[1].
Déroulement
modifierÀ Beauvais, par exemple, le de chaque année, une jeune fille, montée sur un âne et tenant un enfant dans ses bras, pour représenter la fuite en Égypte, se rendait de la cathédrale à l'église Saint-Étienne. La jeune fille portait une chape d'or. L'âne était magnifiquement caparaçonné. Le clergé les introduisait en pompe dans le sanctuaire, et, pendant l'office, les chants se terminaient toujours par ce cri trois fois répété : Hi ! Han !. Après l'épître, on chantait la prose de l'âne, dont le refrain était :
Hez, sire Ane, car chantez
Belle bouche rechignez,
Vous aurez du foin assez
Et de l'avoine à plantez (en abondance).
Un chant liturgique composé par Pierre de Corbeil, archevêque de Sens, était récité in januis ecclesiae (aux portes de l'église) par la foule le jour de la Circoncision du Christ[2],[3] :
Orientis partibus
Adventavit Asinus
Pulcher et fortissimus
Sarcinis aptissimus.
Hez ! Sire asne, hez !
Hic in collibus Sichen
Iam nutritus sub Ruben,
Transiit per Jordanem
Saliit in Bethleem.
Hez ! Sire asne, hez !
Saltu vincit hinnulos
Dammas et capreolos,
Super dromedarios
Velox Madianeos.
Hez ! Sire asne, hez !
Aurum de Arabia,
Thus et myrrham de Saba,
Tulit in ecclesia
Virtus asinaria.
Hez ! Sire asne, hez !
Dans le premier chapitre de l'ouvrage princeps de Nietzsche, « Par-delà le bien et le mal », le philosophe cite les deux vers «adventavit asinus, pulcher et fortissimus » pour ironiser sur la recherche de la vérité par les philosophes socratiques.
Autre part, la fête avait lieu en l'honneur de l'ânesse de Balaam à Noël. Dans la procession du clergé se trouvaient les Prophètes, David, etc. Balaam, avec une immense paire d'éperons, était monté sur un âne de bois renfermant un homme qui parlait. Il y avait six Juifs et six Gentils. Le poète Virgile y paraissait comme prophète et traducteur des oracles sibyllins, et débitait pendant la cérémonie des vers latins.
À Rouen, la fête se célébrait le .
À Suarce, le comité des fêtes organise tous les ans la Fête de l'âne le [4]
Sources
modifier- Louis Charles Dezobry et Théodore Bachelet, Dictionnaire de Biographie et d’Histoire, Paris, [détail de l’édition], t.1, p. 89
Notes et références
modifier- Régis Bertrand, La Nativité et le temps de Noël: XVIIe – XXe siècle, Publications de l'Université de Provence, , p. 74.
- Conservé dans le ms. 46 de la Bibliothèque Municipale de Sens.
- Eugène Chartraire, « La sculpture du grand portail de la cathédrale de Sens », Bulletin archéologique du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques, , p. 508
- Fête de l'âne à Suarce