Fernando Villavicencio

journaliste et homme politique équatorien

Fernando Villavicencio
Illustration.
Fernando Villavicencio en 2023.
Fonctions
Député équatorien

(2 ans et 3 jours)
Élection 7 février 2021
Circonscription Nationale
Biographie
Nom de naissance Fernando Alcibiades Villavicencio Valencia
Date de naissance
Lieu de naissance Alausí (Équateur)
Date de décès (à 59 ans)
Lieu de décès Quito (Équateur)
Nature du décès Assassinat
Nationalité Équatorienne
Parti politique Pachakutik (1995-2017)
Mouvement de coalition
(2018-2021)
Mouvement construire (2023)
Diplômé de Université coopérative de Colombie
Profession Journaliste
Syndicaliste

Fernando Alcibiades Villavicencio Valencia, né le à Alausí et mort assassiné le à Quito, est un journaliste et homme politique équatorien.

Après avoir été dirigeant syndical dans l'entreprise publique Petroecuador, il travaille comme journaliste d'enquête dans plusieurs médias du pays. Il se fait notamment connaître en dénonçant des scandales de corruption sous les présidences de Rafael Correa et Lenín Moreno.

En 2021, il est élu membre de l'Assemblée nationale de l'Équateur sous les couleurs de l'Alliance de l'honnêteté, composée du Mouvement de la concertation et du Parti socialiste équatorien. Il détient ce mandat jusqu'en 2023.

Figure de la lutte contre la corruption, il est candidat de la coalition centriste Construire à l'élection présidentielle de 2023. Il fait partie des favoris jusqu'à son assassinat lors d'un rassemblement politique, à onze jours du premier tour.

Biographie modifier

Origines et formation modifier

Fernando Villavicencio naît le dans le canton d'Alausí, dans la province de Chimborazo, en Équateur.

Il étudie le journalisme et la communication sociale à l'Université coopérative de Colombie[1]. Alors qu'il travaille comme conseiller de Cléver Jiménez, à l'Assemblée nationale équatorienne, il rencontre sa future épouse Verónica Sarauz[2],[3].

Carrière professionnelle modifier

Il rejoint l'entreprise Petroecuador en 1996, d'abord en tant que communicant social puis comme syndicaliste jusqu'en 1999, année où il est limogé par le gouvernement de Jamil Mahuad[4],[5]. Comme il s'agit d'un licenciement irrégulier, Villavicencio reçoit un double règlement : le premier en indemnité, dont le montant s'élève à 448 942 886 sucres ; le second pour les salaires, qui totalisent 462 499 396 sucres. Les deux montants équivalent respectivement à 26 408 $ et 27 205 $. Avec cet argent, il ouvre la pizzeria El Leñador avec l'un de ses frères[6],[7].

Par la suite, il travaille comme journaliste au quotidien El Universo et dans le magazine Vanguardia. À son tour, il est l'un des dirigeants de la Coordination des mouvements sociaux. Il dénonce différents gouvernements, parmi lesquels celui de Gustavo Noboa en 2007, qu'il accuse d'avoir cédé le champ pétrolier Palo Azul aux frères Isaías, propriétaires du Groupe Isaías (es)[5]. Rafael Correa accueille la dénonciation mais cède finalement la concession au groupe Petrobras sous la pression de Lula ; dès lors, Villavicencio se trouve dans « le collimateur du corréisme »[8]. Il fonde le portail « Journalisme d'investigation », avec lequel il formule des plaintes concernant principalement la corruption dans la sphère publique. Cependant, ledit portail de recherche est remis en question en raison des accusations de partialité et de son financement douteux[7].

Il devient conseiller législatif de son co-idéaire, Cléver Jiménez, entre 2013 et 2014. Après la révolte policière du 30 septembre 2010, Villavicencio, Cléver Jiménez et le médecin Carlos Figueroa accusent le président Correa d'être le principal responsable des événements et d'avoir ordonné l'incursion armée dans l'hôpital de la police. Leurs accusations sont rejetées et Correa les accuse de diffamation. La Cour nationale de justice conclut à des accusations « malveillantes » : Villavicencio, Jiménez et Figueroa sont condamnés à 18 mois de prison et au paiement de 47 000 dollars à titre de compensation. Ils ne purgent cependant pas leur peine[9].

En octobre 2013, Fernando Villavicencio publie un reportage intitulé « Le dossier Chevron », dans lequel il expose de possibles conflits d'intérêts entre l'État équatorien et le monde pétrolier[8]. Il voit sa demeure perquisitionnée par douze policiers pour des soupçons d'avoir hacker des dossiers du gouvernement[8]. Il se rend à Washington pour demander des mesures conservatoires contre son arrestation auprès de la Cour interaméricaine des droits de l'homme, mais, lorsqu'il rentre au pays, un mandat d'arrêt contre lui a déjà été lancé. C'est ainsi qu'il devient un fugitif de la justice équatorienne en se cachant dans la région amazonienne avec Cléver Jiménez et Carlos Figueroa, jusqu'à l'expiration de sa peine, en mars 2015[10].

En refusant de payer ladite indemnité, Correa l'assigne en insolvabilité en , insolvabilité pour laquelle Villavicencio paye finalement le montant demandé[8]. Après avoir sans succès tenté de se présenter aux élections législatives de 2017 et avoir fui au Pérou, il revient en Équateur pour continuer ses dénonciations, tandis qu'un procès contre lui pour espionnage se poursuit : il est libéré le 22 février 2018 et innocenté[11],[12].

Le , il dépose une nouvelle plainte impliquant Julian Assange, car il y avait une utilisation alléguée de dépenses spéciales, par le Secrétariat du renseignement, pour la sécurité d'Assange, abrité à l'ambassade d'Équateur à Londres[13]. À cela s'ajoute une publication sur un prétendu pacte entre Assange et le régime de Correa pour empêcher la divulgation de documents sur la corruption de ce gouvernement en échange de l'asile à l'ambassade[14].

Carrière politique modifier

Débuts modifier

En 1995, il participe à la fondation du parti politique Pachakutik.

À l'approche des élections législatives de 2017, il tente d'être candidat à l'Alliance pour le changement (Équateur) (es), composée du Mouvement CREO et du Parti SUMA (es), mais le Conseil national électoral (Équateur) (es) l'en empêche après avoir contesté l'affiliation à Pachakutik de Gustavo Baroja[15]. Dès les résultats des élections, il fuit au Pérou, où il demande l'asile politique[8].

Député équatorien modifier

Fernando Villavicencio en 2021.

Lors des élections législatives de 2021, il est élu membre de l'Assemblée nationale sous l'étiquette de l'Alliance de l'honnêteté[16].

Au petit matin du , il est victime d'un attentat, son domicile étant touché par balles. Il reçoit le soutien d'un petit groupe de membres de l'assemblée. L'agression dont il est victime fait l'objet d'une enquête[17].

Il s'oppose à la procédure de destitution visant le président conservateur Guillermo Lasso, mis en cause dans des affaires de corruption, lors de la crise politique équatorienne de 2023[9]. Le , le président Lasso signe le décret exécutif 741, dans lequel il active l'article 148 de la Constitution nationale équatorienne de 2008 (es), appelé «Mort croisée (es)», arguant dans son décret de « grave crise politique et agitation interne », ce qui implique la dissolution de l'Assemblée nationale et la convocation d'élections présidentielle et législatives extraordinaires[18].

Candidature présidentielle modifier

Après l'activation de la « mort croisée », Fernando Villavicencio est le premier à annoncer sa candidature à la présidentielle. Le , il annonce qu'il est en pourparlers avec le Mouvement construire afin d'obtenir son soutien[19].

Début juin, il présente l'écologiste Andrea González comme colistière. Le , le binôme Villavicencio-González enregistre l'acceptation de sa candidature et, le , il enregistre sa candidature auprès du CNE[20]. Le , le CNE ne procède pas à l'enregistrement de la candidature de Villavicencio, faute d'informations[21]. Le 20 juin, après avoir complété les informations manquantes, le CNE approuve sa candidature[22].

Il est donc un des huit candidats à l'élection présidentielle anticipée de 2023[1]. Selon des sondages, dont un effectué par l'institut Cedatos, il figure en deuxième position avec quelque 13 % d'intentions de vote [23],[24].

Le , il affirme avoir fait l'objet de menaces du groupe criminel Los Choneros, lié au trafic de drogue.

Assassinat et conséquences modifier

Fernando Villavicencio est assassiné de trois balles dans la tête à onze jours du premier tour de l'élection présidentielle, le , à l'issue d'un meeting politique se déroulant au nord de Quito[25]. Une semaine avant sa mort, Villavicencio avait dénoncé une série de menaces contre lui et son équipe de travail, par des gangs criminels liés au trafic de drogue[26]. Son assassinat survient dans un contexte d’explosion de la criminalité en Équateur[24].

Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux montre l'organisation criminelle Los Lobos revendiquer l’assassinat[27]. Mais finalement, le gang crie au complot et nie toute implication[28],[29].

Sa mort conduit le gouvernement à décréter l'état d'urgence et trois jours de deuil national, sans toutefois décaler la date de l'élection. Le président Lasso se déclare « indigné et choqué » par cet assassinat, promettant qu'« il ne restera pas impuni »[30].

Le , six inculpés dans l'assassinat de Fernando Villavicencio sont tués lors d'émeutes au sein de la prison de Guayaquil, provoquant une nouvelle crise politique dans le pays[31].

Références modifier

  1. a et b (es) Liz Briceño Basantes et Ana Cristina, « ¿Quién es Fernando Villavicencio, candidato a la presidencia del Ecuador? », GK,‎ (article mis à jour le 9 août 2023, lire en ligne, consulté le )
  2. (es) Redacción 4pelagatos, « "Pedí de rodillas a Fernando que no se entregue" », sur Cuatro Pelagatos, (consulté le )
  3. (en) « ‘Hay que pagarle al Presidente para que ya no moleste a papá’ », sur www.eloriente.com (consulté le )
  4. (es) María Molina Crespo, « Las Mentiras Verdaderas De Fernando Villavicencio, Carta A María Molina », sur Ecuador Noticias, (consulté le )
  5. a et b (es) El Telégrafo, « Fernando Villavicencio insulta a periodistas de Diario El Telégrafo (AUDIO) », El Telégrafo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. (es) « Nombramientos dividen a trabajadores de Petroecuado », sur La Hora (Ecuador), (consulté le )
  7. a et b (es) Daniel Córdova, « Expediente.News | Fernando Villavicencio: El mercenario mayor del Ecuador », sur Noticias de Venezuela, (consulté le )
  8. a b c d et e (es) Fernando Alayo Orbegozo, « Escapando del Ecuador, la historia del periodista Villavicencio », El Comercio,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. a et b « Quién era Fernando Villavicencio, el candidato a la presidencia asesinado en Ecuador », sur RFI, (consulté le )
  10. (es) Cristina Márquez, « Villavicencio, Jiménez y Figueroa están bajo la protección de Sarayaku », sur El Comercio, (consulté le )
  11. (es) Victor Vimos, « Villavicencio salió del país luego de que se conocieron los resultados electorales », El Telégrafo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. (es) « Jiménez y Villavicencio declarados inocentes en caso impulsado desde el régimen de Correa », El Comercio,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. (es) « Fernando Villavicencio denuncia presunto peculado y espionaje internacional en caso Julian Assange », El Universo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  14. (es) « Assange: Asilo y salida pactados - La Fuente », La Fuente,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. (es) El Telégrafo, « Fernando Villavicencio no podrá ser candidato a asambleísta », El Telégrafo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. (es-MX) « La nueva Asamblea tendrá al menos dos bancadas grandes y tres medianas », sur Primicias (consulté le )
  17. (es) « ‘No me van a quebrar’, dice asambleísta Fernando Villavicencio tras denunciar atentado en exteriores de su domicilio », El Universo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. (es) Melissa Velásquez Loaiza, « Guillermo Lasso firma la "muerte cruzada" en Ecuador en medio de su juicio político », sur CNN, (consulté le )
  19. (es) « Villavicencio inicia conversaciones con Construye, el movimiento que lidera María Paula Romo | La República EC », (consulté le )
  20. (es) « Fernando Villavicencio inscribió su candidatura presidencial junto a su binomio », sur www.expreso.ec (consulté le )
  21. (es) « ¿Por qué el CNE negó las candidaturas presidenciales de Luisa González y Fernando Villavicencio? », El Universo, (consulté le )
  22. (es) « CNE aprueba las candidaturas de Fernando Villavicencio y Luisa González », sur El Comercio, (consulté le )
  23. Benjamin Delille, « Assassinat de Fernando Villavicencio, candidat à la présidentielle en Equateur: «C’est la dernière étape de la violence électorale dans le pays» », Libération,‎ (lire en ligne, consulté le )
  24. a et b « Equateur : le candidat à la présidentielle Fernando Villavicencio tué par balle, la date du scrutin maintenue », sur Libération
  25. (es) « Fernando Villavicencio fue asesinado en un ataque armado, según Ministro del Interior », El Telégrafo,‎ (lire en ligne, consulté le )
  26. (es) Agencia AFP, « Ecuador: Candidato presidencial Fernando Villavicencio denuncia amenazas en su contra », El Comercio,‎ (ISSN 1605-3052, lire en ligne, consulté le )
  27. « Présidentielle équatorienne, un candidat assassiné », sur Le Monde diplomatique,
  28. (es) « Dudas sobre la veracidad de un video en que la banda criminal Los Lobos se responsabiliza del asesinato de Fernando Villavicencio », sur infobae.com (consulté le ).
  29. (en) « Ecuador politician murder: Prison gangs in terror reign », sur bbc.com (consulté le ).
  30. « Equateur : le candidat à l'élection présidentielle Fernando Villavicencio tué par balle, l'état d'urgence déclaré dans le pays », sur Franceinfo, (consulté le ).
  31. « Équateur: six Colombiens, inculpés pour l’assassinat de Fernando Villavicencio, tués en prison », RFI,

Liens externes modifier