Francis de Noyelle
Francis de Noyelle est un diplomate français, né le à Paris où il est mort le . Il est notamment ambassadeur de France au Népal entre 1980 et 1984.
Ambassadeur de France au Népal | |
---|---|
- | |
François de Testa (d) Lionel de Warren (d) |
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Nom de naissance |
Francis Deloche de Noyelle |
Nationalité | |
Formation | |
Activités |
Conflit | |
---|---|
Sport | |
Distinctions |
Pendant la Seconde Guerre mondiale, après deux années passées dans le cabinet du préfet de l'Hérault, Francis de Noyelle joue un rôle important dans la résistance intérieure française, notamment en Isère et à Paris. Membre du réseau Goélette, sa mission est de recruter des partisans et de trouver des adresses pour stocker l'ensemble des documents volés aux nazis pendant l'Occupation. Il reçoit plusieurs distinctions pour ses actes de résistance.
Après la guerre, il entame une carrière diplomatique qui va s'étendre sur 40 ans. Alors secrétaire à l'ambassade de New Delhi, il est membre[a] de la célèbre expédition française de 1950 menée par Maurice Herzog qui conquiert l'Annapurna[b]. Par la suite, Francis de Noyelle alterne entre des postes à l'administration centrale du ministère des Affaires étrangères et des fonctions aux ambassades de France en Tchécoslovaquie, au Maroc, au Canada et, enfin, au Népal.
Après avoir été décoré de la Légion d'honneur et de l'ordre national du Mérite, il est, au moment de sa mort en 2017, le dernier survivant de son expédition en Himalaya.
Biographie
modifierJeunesse et Résistance intérieure (1919–1945)
modifierFrancis Deloche de Noyelle, né le dans le 16e arrondissement de Paris[1], est fils de diplomates : André Deloche de Noyelle, ministre plénipotentiaire, et Jeanne née de Geer[1],[2]. Il grandit au 1, rue de Traktir, juste à côté du restaurant Prunier[3]. Il étudie au lycée Janson-de-Sailly, puis aux facultés des lettres et de droit de Paris, Poitiers, Montpellier et Grenoble[1].
Entre 1941 et 1942, il est chef adjoint du cabinet du préfet de l'Hérault[1]. Durant la Seconde Guerre mondiale, il participe à la Résistance en Isère[2]. Depuis , alors que sa couverture consiste à se faire passer pour un étudiant et scout grenoblois, il assure le bon fonctionnement d'un petit réseau, Goélette (partie intégrante du Bureau central de renseignements et d'action), qui s'étend jusqu'à Valence[2],[3]. Sous les ordres du général de Gaulle, il est chargé d'agrandir le réseau[3]. Sa mission consiste également à trouver des adresses de « dépôt »[c], où il est possible de stocker tous les renseignements obtenus (photographies, plans et documents volés) avant qu'ils ne soient envoyés au service de renseignements du général de Gaulle situé à Londres[3]. Après avoir recruté des membres de la famille Jackson (Phillip, Toquette et Sumner), il établit chez eux au 11, avenue Foch, une base de la Résistance à Paris[d],[3],[5]. Après la libération de Grenoble en , il devient « interprète officier de liaison du commandant bataillon de tête des troupes libératrices »[2].
Carrière diplomatique et ascension de l'Annapurna (1945–1985)
modifierÀ la sortie de la guerre, Francis de Noyelle travaille au ministère des Affaires étrangères, en tant qu'administrateur à la direction d'Asie-Océanie (1946–1948)[1],[6].
Alors second secrétaire à l'ambassade de New Delhi depuis 1948[1],[7], il part trois jours en reconnaissance au Népal en 1949, dans l'optique d'une possible expédition française en Himalaya[8]. Après avoir négocié avec les autorités népalaises pour obtenir les autorisations[8], il participe, en tant que chargé de liaisons, à l'expédition de 1950 menée par Maurice Herzog, qui a conquis l'Annapurna, premier des 14 sommets de 8 000 mètres ayant été gravis dans le monde[2],[9]. Sa mission consiste à faciliter le transfert de matériel, à recruter les porteurs népalais et à obtenir les bulletins météo[10],[11]. Il participe à l'ascension mais ne va pas plus loin que le deuxième camp[12], situé à 5 600 m d'altitude[10],[13]. En cours d'ascension, il est le seul à effectuer des essais de masque à oxygène, dans un but uniquement médical[13],[14]. Outre le cinéaste de l'expédition Marcel Ichac, Francis de Noyelle tourne également des images — en format Super 8 — de la grimpée[e],[15] ; il enregistre près de 40 minutes de film[13]. À leur retour en France, Francis de Noyelle et ses compagnons alpinistes sont reçus à la salle Pleyel (8e arrondissement de Paris) puis au palais de l'Élysée[16] pour célébrer leur exploit ; le président de la République Vincent Auriol, cinq ministres et toutes les personnalités du sport et de l'alpinisme sont présents[17].
Après l'expédition, il intègre le service de la direction de la presse de l'administration centrale consacré aux questions américaines[1]. Deux ans plus tard, en 1952, il rejoint l'ambassade en Tchécoslovaquie et y devient deuxième puis premier secrétaire[1],[2]. En 1955, il accède au poste de chef adjoint de cabinet à la résidence générale de France au Maroc[1]. Il reste jusqu'en 1958 à Rabat et y est nommé premier secrétaire de l'ambassade[1],[2]. Il revient collaborer à l'administration centrale, plus particulièrement dans la section de la direction des affaires économiques spécialisée dans les questions relatives au continent africain[1]. En 1966, il part pour Ottawa où il exerce ses fonctions de conseiller à l'ambassade française au Canada jusqu'en 1969[1],[2], date à laquelle il part intégrer le service du courrier et de la valise diplomatique de l'administration centrale[1]. Il est promu sous-directeur de ce service en 1971[1]. Francis de Noyelle est nommé haut fonctionnaire de défense en 1978[1]. Après avoir rédigé un rapport de fin de mission pour le ministère[18], il est nommé ambassadeur au Népal le [1],[2],[10],[19],[20] et remplace ainsi François de Testa[21]. Alors que son mandat au Népal doit expirer le [22], il est remplacé à partir du par Lionel de Warren[23] et prend sa retraite l'année suivante[1].
Retraite et fin de vie (1985–2017)
modifierAprès avoir été admis à faire valoir ses droits à la retraite, Francis de Noyelle est chargé de mission à la Croix-Rouge française pendant quatre ans (1985–1989). Il est parallèlement nommé juge assesseur à la Commission des recours des réfugiés (1986–1998)[1].
En 2000, il participe à la célébration du cinquantenaire de l'ascension française de l'Annapurna[24].
Alors qu'il est le dernier survivant de son expédition en Himalaya, Francis de Noyelle meurt le , à l'âge de 97 ans[2]. Ses obsèques sont célébrées le suivant, au temple protestant de l'Étoile (17e arrondissement de Paris)[13],[25].
Vie privée et engagement associatif
modifierDepuis son très jeune âge, Francis de Noyelle a pour passions le tennis et le ski, deux sports qu'il pratique jusqu'à la fin de sa vie — respectivement jusqu'à ses 85 et 90 ans[2].
Sa femme Odette-Juliette, née Petit-Delrieu le à Strasbourg (Bas-Rhin)[26] et morte le 9 décembre 2009[27], est également diplomate[1]. Ensemble, ils ont trois enfants : Luc, Guy et Marc[1]. Ils vivent à Paris[15] et séjournent une partie de l'année dans leur chalet situé à Saint-Nicolas-de-Véroce (Saint-Gervais-les-Bains, Haute-Savoie)[28].
Il est membre de la Société des explorateurs français[29], du Cercle du mardi[1] et du comité scientifique de la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM)[30]. C'est en tant que membre de la FFCAM qu'il contribue notamment à la création du musée international de la montagne, situé dans la vallée de Pokhara[30].
Distinctions
modifierDécorations
modifier- Chevalier de la Légion d'honneur (décret de 1966)[1],[31]
- Médaille militaire[1]
- Officier de l'ordre national du Mérite[1]
- Croix de guerre –[1],[2]
- Médaille de la Résistance française (décret du 6 septembre 1945)[1],[32]
- Chevalier de l'ordre protestant de Saint-Jean[1]
Prix
modifier- Prix Virginie-Hériot (1950)[33]
Notes et références
modifierNotes
modifier- Il joue le rôle de « chargé de liaisons ».
- L'Annapurna est officiellement le premier des 14 sommets de plus de 8 000 mètres ayant été gravis sur Terre.
- (en) « drop boxes »
- Cet emplacement est situé à côté du 1, rue Traktir, où Francis de Noyelle passe son enfance. Il s'agit d'un endroit stratégique puisque le siège de la Gestapo et plusieurs appartements d'officiers nazis sont situés tout le long de l'avenue Foch[4].
- Maurice Herzog est également en possession d'une caméra au moment de l'ascension, mais la perd dans une crevasse lors de la redescente du sommet[15].
Références
modifier- Lafitte et Taylor 2003.
- « Décès de Francis de Noyelle, diplomate et héros de l'Annapurna avec Herzog », sur Le Parisien, (consulté le ).
- Kershaw 2015, p. 87.
- Kershaw 2015, p. XV.
- Kershaw 2015, p. 89.
- Georges-Henri Soutou (dir.), Documents diplomatiques français : 1947, t. 2, Bruxelles/Bern/Berlin etc./Paris, Peter Lang, , 1040 p. (ISBN 978-90-5201-099-1, ISSN 1377-8773, lire en ligne), p. 1031.
- Michel Raspaud, L'aventure himalayenne : les enjeux des expéditions sur les hautes montagnes du monde, 1880-2000, Presses universitaires de Grenoble, coll. « Sports, cultures, sociétés », , 213 p. (ISBN 978-2-7061-1120-4), p. 62.
- Sylvia Depierre, « Cette année-là - L'invité : Francis de Noyelle » [radio], sur YouTube, France Bleu Pays de Savoie, (consulté le ).
- René Girard (dir.) et al., Club Alpin Français : Bulletin de la Section du Sud-Ouest et du Ski-Club Bordelais, Bordeaux, s.n. (no 71), (lire en ligne), p. 36.
- Véronique Laroche-Signorile, « Le 3 juin 1950 l'Annapurna est conquis par Herzog et Lachenal », sur Le Figaro, (consulté le ).
- Lucien Devies, « Himalaya 1950 », La Montagne, no 347, , p. 3 (lire en ligne).
- Roberts 2013.
- Françoise Guais et Vincent Habran, « Dernier témoin de l'expédition Annapurna, l'alpiniste Francis de Noyelle est décédé » [vidéo], sur France Info, France 3 Auvergne-Rhône-Alpes, (consulté le ).
- Maurice Herzog et Marcel Ichac, Regards vers l'Annapurna : album de photographies, B. Arthaud, coll. « Belles pages, belles couleurs », , 2e éd., 96 p., p. 93.
- Bleuette Dupin, « Annapurna : les images du dernier témoin de l'expédition de 1950 », sur France Bleu, France Bleu Pays de Savoie, (consulté le ).
- « 50e anniversaire de l'ascension de l'Annapurna » [vidéo], sur YouTube, Institut national de l'audiovisuel et France 3, (consulté le ).
- O. M., « Les vainqueurs de l'Annapurna ont reçu l'hommage des Parisiens », sur Le Monde, (consulté le ).
- Société d'éditions scientifiques, L'Histoire, Numéros 102 à 106, Société d'éditions scientifiques, , p. 26.
- « Les Ambassadeurs », sur Ambassade de France au Népal (consulté le ).
- Lucien Devies (dir.), « Le nouvel ambassadeur de France au Népal », La Montagne & Alpinisme, no 123, , p. 38 (lire en ligne).
- « Décret du 10 septembre 1980 », Journal officiel de la République française, , p. 2178 (lire en ligne).
- (en) Nepal Press Digest, vol. 23, Regmi Research Project (no 1–53), (lire en ligne), p. 101.
- « Décret du 15 février 1984 », Journal officiel de la République française, , p. 632 (lire en ligne).
- Pierre Jullien, « L'Annapurna, premier « 8 000 » français », sur Le Monde, (consulté le ).
- « Francis Deloche de Noyelle », sur avis-de-deces.net, (consulté le ).
- « 28, rue Julien-Lacroix et 62-64, rue des Couronnes », Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, , p. 2577 (lire en ligne).
- « Avis de décès et d'obsèques de Mme Francis DELOCHE DE NOYELLE », sur Avis de decès (consulté le ).
- A. C., « Mort de Francis de Noyelle, vétéran de l’Annapurna », sur Le Dauphiné, (consulté le ).
- « Les sociétaires », sur Société des explorateurs français (consulté le ).
- « Décès de Francis de Noyelle », sur Fédération française des clubs alpins et de montagne (consulté le ).
- Antoine Chandellier, « Francis de Noyelle, le "naïf" de l’Annapurna », sur Le Dauphiné, (consulté le ).
- « Décret du 6 septembre 1945 portant attribution de la médaille de la Résistance française », Journal officiel de la République française, , p. 5683 et 5689 (lire en ligne).
- « Prix Marie-Christine Ubald-Bocquet », sur Académie des sports (consulté le ).
Annexes
modifierBibliographie
modifier: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Maurice Herzog, Annapurna, premier 8000, Paris, Arthaud, , 381 p. (ISBN 978-2-08-125076-5)
- (en) Alex Kershaw, Avenue of Spies : A True Story of Terror, Espionage, and One American Family's Heroic Resistance in Nazi-Occupied Paris, Crown/Archetype, , 320 p. (ISBN 978-0-8041-4005-8, lire en ligne).
- Jacques Lafitte et Stephen Taylor, Who's Who in France : Dictionnaire biographique de personnalités françaises vivant en France, dans les territoires d’Outre-Mer ou à l'étranger, et de personnalités étrangères résidant en France, Jacques Lafitte, , 35e éd., 2171 p. (ISBN 2-85784-042-X, lire en ligne), p. 613.
- (en) David Roberts, True Summit : What Really Happened on the Legendary Ascent on Annapurna, Simon and Schuster, , 240 p. (ISBN 978-1-4767-3787-4, lire en ligne).
Articles connexes
modifierLiens externes
modifier
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :