Henri Mondor
Henri Mondor est un médecin français, chirurgien et historien de la littérature né le à Saint-Cernin (Cantal) et mort le à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine).
Président Société des amis de Marcel Proust (d) | |
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Fauteuil 38 de l'Académie française | |
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Médecin écrivain, médecin, chirurgien, historien de la littérature |
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Brillant chirurgien, il est l'auteur d'un fameux Diagnostics urgents de l'abdomen (1928), de notoriété mondiale et constamment réédité jusqu'en 1979. Passionné de littérature, notamment pour le poète Stéphane Mallarmé, il fut également dessinateur, et reconnu pour son savoir en étant élu à quatre académies.
Biographie
modifierOrigines et études
modifierHenri Jean Justin Mondor est originaire de Saint-Cernin dans le Cantal, où son père Jacques Armand Mondor est le directeur de l'école primaire. Sa mère est Jeanne Agnès Vidal[3].
Durant son enfance, il vit dans un milieu familial favorable à l'acquisition des connaissances, à l'apprentissage d'une discipline dans le travail et au culte de la langue française. Ces valeurs sont le fondement de la personnalité d'Henri Mondor, qui les suivra tout au long de sa vie[4].
Il fait ses études au lycée Émile Duclaux à Aurillac, où il excelle dans toutes les disciplines. Après d'excellentes études, il a le choix du parcours professionnel. Rebuté par l'idée de suivre la même voie que son père, et fortement influencé par sa mère qui veut le voir progresser dans l'échelle sociale, il s'oriente vers la médecine[4].
En 1903, Henri Mondor rejoint la capitale pour suivre ses études à la faculté de médecine. C'est là qu'il se lie d'amitié avec un condisciple, Georges Duhamel. En 1906, il est reçu premier au concours de l'externat. En 1909, il est reçu au concours de l'internat des hôpitaux de Paris, en deuxième position dans une promotion de 55 nouveaux internes. En 1913, il est interne médaille d'or en chirurgie[5].
Durant la Première Guerre mondiale, il est engagé volontaire en 1914 comme infirmier de 2e classe. Il fait la guerre à Verdun, en Italie et sur le front de Champagne. Il est reçu docteur en 1915 et termine la guerre comme médecin aide-major[3].
Carrière
modifierEn 1920, il est chirurgien des hôpitaux et agrégé de chirurgie en 1923.
Il est chef de service à l'hôpital Broussais (1932) puis à Bichat (1933), et enfin à l'Hôtel-Dieu (1941)[3]. En 1938, il habite au 92, rue Jouffroy à Paris (1938, Tout Paris, p.439).
Entre les deux guerres, durant plus de vingt ans de pratique, Henri Mondor opère deux ou trois patients par jour. Dans son service, le matin, il enseigne les règles et les gestes de la chirurgie, mais aussi la compréhension et la compassion à l'égard des malades. Il a le souci de tenir compte de la responsabilité médicale[4].
Sous l'Occupation, il est dénoncé comme médecin juif dans une liste publiée par l'hebdomadaire Au Pilori du , sous le titre « Boycottons les salopards »[6]. Il ne dément pas cette accusation pourtant erronée[7], mais la semaine suivante, Au Pilori du signale avoir reçu la réponse de 6 professeurs de cette liste, dont Henri Mondor, déclarant ne pas être juifs[6].
En 1953, il est médecin du centre de traitement des tumeurs à la Salpêtrière.
En 1955, il est professeur honoraire, et en 1956 chirurgien honoraire des hôpitaux.
Il venait régulièrement, en famille, en villégiature à Saint-Honoré-les-Bains. Henri Mondor est mort en , à l'hôpital américain de Paris à Neuilly-sur-Seine. Il est inhumé dans le caveau familial du cimetière Massigoux d'Aurillac[8].
Travaux
modifierChirurgie et médecine
modifierSon œuvre majeure est Diagnostics urgents de l'abdomen qui, par l'écriture et le style, porte la pathologie chirurgicale digestive au niveau d'une œuvre littéraire. C'est un « raisonnement lumineux » allié à un « style alerte et châtié, un sens des situations qui maintient constamment l'intérêt »[9]. La première édition parait en 1928, et celle de 1930 est vendue à 30 000 exemplaires. L'ouvrage connaitra dix éditions jusqu'en 1979[9]. Il est traduit notamment en russe, néerlandais, espagnol… C'est l'un des ouvrages médicaux français du XXe siècle les plus lus et les plus diffusés dans le monde[4].
Son autre livre célèbre est Les avortements mortels publié en 1935. Mondor fait une étude complète et détaillée de toutes les techniques utilisées au cours des avortements clandestins à Paris dans les années 1920-1940, et de toutes les pathologies graves ou mortelles qui en découlent. « C'est par excellence le livre de référence pour toute étude historique sur l'avortement clandestin »[10],[11].
Il est l'auteur d'ouvrages sur l'histoire de la médecine, notamment de biographies sur Dupuytren, Pasteur, Leriche... En 1949, il réalise une histoire conjointe de l'anatomie et de la chirurgie Anatomistes et chirurgiens[9].
Arts et Lettres
modifierHenri Mondor ne fut pas seulement un chirurgien mais aussi un homme de lettres avec une vingtaine de publications sur le monde médical et sur le poète Stéphane Mallarmé. Il fut, au côté de Paul Claudel et d'André Maurois, membre du comité de rédaction de la revue L'Échauguette[4]. Le fonds Mondor (manuscrits, lettres,...) de la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet (Paris) est le fonds mallarméen le plus riche dans le monde.
Également artiste, son don pour le dessin, qui s'exprima dès le lycée, lui a valu des prix. La rose et les coquillages étaient son support de prédilection pour cet art. Il a également illustré des livres de Georges Duhamel et de Paul Valéry[4].
Découvreur de très jeunes talents, c'est sur sa convaincante intervention auprès des parents de Jean Labellie que celui-ci a pu suivre des études d'arts plastiques et devenir un nom connu de la peinture abstraite. Le philosophe Alain lui dédia ses Lettres sur le sujet du Cœur et de l'Esprit (1924). En 1960, il écrit la notice biographique aux œuvres complètes de Céline dans la Pléiade. Truffée d'erreurs, elle reprend parfois mot pour mot les éléments dictés par l'écrivain au cours de leurs échanges épistolaires[12].
Honneurs et distinctions
modifierTitres
modifier- 1930 : secrétaire de l'Association nationale de chirurgie.
- 1939-40 : secrétaire national de l'Académie nationale de chirurgie.
- 1941-1955 : professeur de clinique chirurgicale.
Académies
modifier- 1926 : Académie de Chirurgie.
- 1945 : Académie nationale de médecine.
- 1946 : Académie française.
- 1961 : Académie des sciences.
Décorations
modifier- Grand officier de la Légion d'honneur (1956)
- Commandeur de l'ordre des Palmes académiques
- Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres
- Commandeur de l'ordre de la Santé publique en qualité de « professeur de clinique chirurgicale à la faculté de médecine de Paris. Chirurgien des hôpitaux de Paris, 92 rue Jouffroy, Paris 17e » (1955)[13]
Pour le cinquantenaire de sa disparition, le Musée d'art et d'archéologie d'Aurillac a présenté une exposition-hommage en , Henri Mondor, l'éthique d'une vie.
Hommages
modifierLe nom d'Henri Mondor a été donné à divers hôpitaux :
- le CHU Henri-Mondor de Créteil ;
- l'Institut Mondor de recherche biomédicale de l'INSERM de Créteil[14] ;
- l'établissement hospitalier public d'Aurillac.
Éponymie
modifierHenri Mondor a laissé son nom à[15] :
- Arcade bordante de Mondor : segment artériel reliant la branche descendante de l'artère colique gauche supérieure et la branche ascendante de l'artère sous-jacente ;
- Maladie de Mondor : thrombophlébite en cordon de la paroi thoracique (inflammation douloureuse des veines superficielles) ;
- Signe de Mondor : distension jugulaire intermittente apparaissant en position couchée, lors des plaies du cœur (hémopéricarde compressif).
L'appellation « signe de Mondor » peut aussi désigner[3] :
- l'ecchymose plantaire de la fracture du calcanéum ;
- l'attraction homolatérale de l'utérus dans la torsion tubaire (complication d'une tumeur de l'ovaire, par exemple) ;
- la crépitation sanguine profonde des hématomes spontanés du périnée.
En 2021, le nom d'« Henri Mondor » est donné à un variant du SARS-CoV-2, découvert à l'hôpital et à l'Institut de même nom de Créteil[16].
Publications
modifierPathologie chirurgicale
modifier- Les Ulcères perforés de l'estomac et du duodénum, en collaboration avec G. Lauret, Masson, 1923, 186 p.
- Le Cancer du Rectum, en collaboration avec A. Chalier, Doin, 1923.
- Les Arthrites gonococciques, Masson, 1928.
- Les Diagnostics urgents : Abdomen, Masson, 1928, 846 p.
- Les Avortements mortels, Masson, 1930. 445 p.
- Quelques Vérités premières en chirurgie abdominale, Masson, 1936.
- Radiodiagnostics urgents, en collaboration avec P. Porcher et Cl. Olivier, Masson, 1942.
Histoire littéraire
modifier- Lettre et images pour G. Duhamel, Gallimard, 1937.
- Salut au poète, Darantière, 1938.
- Hommes de qualité, Gallimard, 1939.
- L'Amitié de Verlaine et Mallarmé, Gallimard, 1940.
- Vie de Mallarmé, Gallimard, 1941-1942, 2 vol. Prix d'histoire littéraire de l'Académie française
- Mallarmé plus intime, Gallimard, 1944.
- Les Premiers temps d'une amitié (Valéry et Gide), Éditions du Rocher, 1947.
- Mallarmé, Cailler, 1947.
- Entretien au bord d'un fleuve, avec Georges Duhamel, Éditions du Rocher, 1947.
- Trois Discours pour Paul Valéry, Gallimard, 1948.
- L'heureuse rencontre de Valéry et Mallarmé, La Guilde du Livre, 1948.
- Histoire d'un Faune, Gallimard, 1948.
- L'Affaire du Parnasse : Stéphane Mallarmé et Anatole France, Éditions Fragance, 1951.
- Eugène Lefébure : sa vie, ses lettres à Mallarmé, Gallimard, 1951.
- Œuvres complètes de Mallarmé, Gallimard, 1945.
- Alain, Gallimard, 1953.
- Mallarmé lycéen, Gallimard, 1954.
- Rimbaud ou le génie impatient, Gallimard, 1955.
- Propos familiers de Paul Valéry, Grasset, 1957.
- Claudel plus intime, Gallimard, 1960.
- Autres précisions sur Mallarmé et inédits, Gallimard, 1961.
Histoire de la médecine et de la chirurgie
modifier- Paul Lecène, Masson, 1931.
- Grands médecins presque tous, Corréa, 1943.
- Pasteur, Corréa, 1945, 187 p.
- Dupuytren, Gallimard, 1945, 313 p.
- Anatomistes et Chirurgiens, Fragrance, 1949, 530 p.
- René Leriche, chirurgien, Ventadour, 1956.
Autres
modifier- J. Bourguignon, Henri Mondor et Jean Porcher (avant-propos d'André Maurois), Hommage au docteur Lucien Graux, six eaux-fortes par Marcel Roche et André Clot, une lithographie par Robert Wehrlin, 210 exemplaires numérotés, Manuel Bruker, Paris, 1947.
- La Main gauche, in ouvrage collectif A la gloire de la main, eaux-fortes de Christine Boumeester, Roger Chastel, Pierre Courtin, Jean Fautrier, Marcel Fiorini, Albert Flocon, Henri Goetz, Germaine Richier, Jean Signovert, Raoul Ubac, Roger Vieillard, Jacques Villon, Gérard Vulliamy, aux dépens d'un amateur, Paris, 1949.
Illustrations
modifier- Lettre et Images pour G. Duhamel, Gallimard ;
- Salut au Poète, Darantière ;
- Paul Valéry, L'Homme et la Coquille, Gallimard ;
- F. Mazade, La Rose ;
- R. Lannes, Argelès, Janin ;
- Geneviève de Louvencourt, Indolences, P. Ardent ;
- Anne Fontaine, Nausicaa, Egloff.
Iconographie
modifier- Constant Le Breton, Portait d'Henri Mondor, 1957, estampe, musée d'Art moderne de la ville de Paris.
Notes et références
modifier- « https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/POG/FRAN_POG_05/p-45rr78434--1m0rpfdhytyvg »
- « https://calames.abes.fr/pub/bljd.aspx#details?id=FileId-302 »
- Françoise Huguet, Les professeurs de la faculté de médecine de Paris, dictionnaire biographique 1794-1939, Paris, INRP - CNRS, , 753 p. (ISBN 2-222-04527-4), p. 327-329.
- Claude Hamonet, « Henri Mondor raconté aux étudiants, un chirurgien humaniste », p. 10-24.
- Cette médaille est attribuée chaque année, sur concours, à un interne en chirurgie et à un interne en médecine en fin d'internat.
- Bruno Halioua, Blouses blanches, étoiles jaunes : l'exclusion des médecins juifs en France sous l'Occupation, Paris, Liana Levi, , 285 p. (ISBN 2-86746-316-5), p. 59-60.
- Henri Nahum, La médecine française et les Juifs, 1930-1945, L'Harmattan, coll. « Racisme et eugénisme », , 412 p. (ISBN 978-2-7475-9851-4, lire en ligne)
- Cimetières de France et d'ailleurs
- Alain Bouchet, « Henri Mondor », Histoire des Sciences médicales, , p. 243-244. (lire en ligne)
- E. Hervet, « Avortement clandestin - avortement légal », La Revue du Praticien, vol. XXIV, no 9, , p. 637-641.
- Selon E. Hervet 1974, op. cit., les chiffres donnés par Mondor dans les années 1930, sont encore utilisés dans le débat français qui précède la loi Veil (1975 ) : « Des chiffres fantaisistes sont donnés aujourd'hui par ceux qui continuent à agiter le spectre mondoresque [sic] de cet avortement clandestin pour faire peur aux pouvoirs publics ».
- Voir la présentation en ouverture de la publication des lettres de Céline à Mondor dans Louis-Ferdinand Céline, Lettres à Henri Mondor. Édition établie, présentée et annotée par Cécile Leblanc, Gallimard, Paris, 2013.
- « Bulletin officiel des décorations, médailles et récompenses n°14 du 06 juillet 1955 - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
- « IMRB – Institut Mondor de Recherche Biomédicale de Créteil » (consulté le )
- Manuila, Dictionnaire français de médecine et de biologie, Masson, 1970-1975.
- « Découverte d’un nouveau variant du SARS-CoV-2 à l’hôpital Henri-Mondor AP-HP », sur Salle de presse | Inserm, (consulté le )
Annexes
modifierBibliographie
modifier- « Henri Mondor », Revue de la Haute-Auvergne, t.37, 63e année, avril-.
- « Hommage à Henri Mondor », Revue de la Haute-Auvergne, t.38, 65e année, avril-..
- 14 photographies d'Henri Mondor, don du professeur Jacques Huguier, musée d'Art et d'Archéologie d'Aurillac.
- Centre-Presse, .
- Centre-Presse, .
- La Montagne, .
- La Montagne, .
- Les archives personnelles d'Henri Mondor sont conservées aux Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine, sous la cote 675AP : (Inventaire du fonds 675AP).
Articles connexes
modifier- Hôpital Henri-Mondor de Créteil.
- Place Henri-Mondor à Paris, près de l'École de médecine.
Liens externes
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- Ressource relative à la littérature :
- Ressource relative à la santé :
- Ressource relative à la recherche :
- Ressource relative à la vie publique :
- Ressource relative aux beaux-arts :
- Denise Bourdet, Henri Mondor, dans: Pris sur le vif, Paris, Plon, 1957.
- Notice biographique sur le site de l’Académie française.