Jacques Pelegrin (archéologue)

personne médaillée du CNRS

Jacques Pelegrin (1955-) est un préhistorien français, spécialiste des technologies lithiques internationalement reconnu. Il s'intéresse aux techniques de taille des outils préhistoriques et protohistoriques, y compris en regard de leur place dans le développement des capacités cognitives au cours de l'hominisation.

Jacques Pelegrin
Description de cette image, également commentée ci-après
Démonstration de débitage par pression avec une béquille abdominale longue, 14 janvier 2011, université du Mirail, Toulouse

Naissance (69 ans)
Nationalité France
Domaines archéologie, Préhistoire
Institutions

Unité « Préhistoire et technologie », CNRS / Univ. de Paris X - Nanterre

Unité Mixte de Recherche «Technologie et Ethnologie des Mondes Préhistoriques », CNRS / Univ. de Paris Nanterre
Formation • doctorat en médecine (1982)
• doctorat d'ethnologie préhistorique (1986)
Renommé pour spécialiste de technologie lithique

Compléments

Formation, carrière

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Jacques Pelegrin est né le 6 novembre 1955[2].

Il obtient un doctorat en médecine[1] en 1982, puis un doctorat d'ethnologie préhistorique de l'université de Paris X - Nanterre en 1986[2].

Dès 1986 il entre au CNRS comme chercheur dans l'équipe « Préhistoire et technologie » (université Paris-Nanterre / CNRS). Il est promu directeur de recherche en 2002 selon certains[2], mais selon le CNRS ce directorat dure de 2009 à 2013[1].

Il reçoit la médaille d'argent du CNRS en 2017[1].

Recherches et fouilles

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Connu internationalement dans le monde de la Préhistoire comme spécialiste sur les techniques de taille et les savoir-faire des sociétés préhistoriques, Jacques Pelegrin est particulièrement renommé pour son étude de l'apparition et la diffusion de la pression pour le débitage des lames et des lamelles[1].

Très tôt dans sa carrière il met l'accent sur la pratique de l'expérimentation. Il aborde le concept des « chaînes opératoires »[3], originellement proposé par André Leroi-Gourhan et développé par des anthropologues[4] ; travaillant conjointement avec Éric Boëda il détermine expérimentalement que la position du tailleur de pierres (debout, assis ou accroupi) génère des concentrations de formes différentes (le même type de matériel lithique concentré à proximité immédiate d'une station de travail, présente des caractéristiques différentes selon la position du tailleur)[5].

Dans les années 1960 l'américain Don Crabtree travaille sur les techniques mésoaméricaines de fabrication de lames d'obsidienne ; il crée - ou recrée - une béquille pectorale et un système de blocage du nucléus. La béquille pectorale sert à débiter des outils lithiques par pression (sur le nucléus). Elle est raccourcie pour le débitage de lamelles, assouplie ou lestée pour accroître la puissance appliquée. J. Pelegrin privilégie la béquille souple (elle permet d'accumuler et donc de libérer davantage d'énergie lors du mouvement d'arrachement de la lame) et améliore le calage des nucléus, mettant au point des systèmes offrant plus de stabilité et de polyvalence. Ses travaux permettent des avancées notables dans ce domaine[6].

Il détermine et définit cinq modalités de débitage par pression, par taille croissante des produits laminaires[7] :
Les modes 1 à 3 sont utilisés pour le débitage de lamelles[6].
Le mode 4 correspond à une pression debout à l'aide d'une béquille pectorale ; avec du silex de bonne qualité mécanique, il permet d'obtenir des lames d'environ 20-21 mm de largeur avec une béquille pectorale équipée d'une pointe en bois de cervidé, et de 22-23 mm avec une pointe en cuivre[6].
Le mode 5 utilise un système de levier, qui accroît la force appliquée par le tailleur. Les lames de silex ainsi obtenues peuvent atteindre jusqu'à 60 mm de largeur[8],[9],[6].

Il mène aussi des investigations dans ce domaine pour la période moderne et la protohistoire en Europe, en Amérique latine et en Asie[1].

Son intérêt et son expertise à ce titre l'amènent à intervenir, étudier ou réétudier l'industrie lithique pour de nombreux sites.
Ainsi de 1992 à 1998 il étudie plus particulièrement les productions de l'atelier de taille de silex de Vassieux-en-Vercors (Drôme)[10], dans le cadre plus vaste d'un projet collectif de recherche sur les ateliers néolithiques du Vercors[11],[12].
De 1995 à 1998, avec Randall White il fouille la partie sud du talus de l'abri Castanet (Sergeac, Dordogne)[13].
Étudiant les objets du site de Khao Sam Kaeo (province de Chumphon, Thaïlande péninsulaire), en verre taillé de la même façon que des pierres, il définit une technique de taille indienne originale, la « technique de Cambay », comme une taille par percussion indirecte par contrecoup[14],[15].

Il s'intéresse aussi à la question du développement des capacités cognitives au cours de l'hominisation, pour montrer la modernité des réalisations techniques de Homo erectus et des Hommes de Neandertal[1].

en 2005 avec Jean-Michel Geneste,Serge Maury, Hélène Roche et Boris Valentin il proteste contre le manque de rigueur scientifique du documentaire à succès de Jacques Malaterre « Homo sapiens »[16].

Publications

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Il est auteur de cinq ouvrages et de plus de 50 articles[2].


Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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Notes et références

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Références

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  1. a b c d e f et g Jacques Pelegrin, sur cnrs.fr.
  2. a b c d et e Jacques Pelegrin, Serge Maury, Jean-Michel Geneste et Pascal Magontier, « Œuvres candidates au prix Roberval », sur prixroberval.utc.fr, Prix Roberval (consulté en ).
  3. Pelegrin et al. 1988.
  4. [Audouze & Karlin 2017] Françoise Audouze et Claudine Karlin, « La chaîne opératoire a 70 ans : qu'en ont fait les préhistoriens français », Journal of Lithic Studies, vol. 4, no 2 « La notion de « chaîne opératoire » dans le monde : 50 ans d'études technologiques en Préhistoire »,‎ , p. 5-73 (ISSN 2055-0472, DOI 10.2218/jls.v4i2.2539, lire en ligne [PDF] sur core.ac.uk, consulté en ).
  5. [Audouze 2009] Françoise Audouze, « De l'archéologie des bouts de ficelles au Géoradar, 25 ans de fouilles au "Buisson Campin", Verberie (Oise) », Supplément à la Revue archéologique de Picardie « Hommage à Marc Durand »,‎ , p. 15-32 (lire en ligne [sur persee]), p. 27, note 10.
  6. a b c et d [Vosges 2019] Jérémie Vosges, « Débitages expérimentaux par pression à la béquille pectorale, nouvelles perspectives », sur archeorient.hypotheses.org, (consulté en ).
  7. Pelegrin 2012. Cité dans Vosges 2019.
  8. [Volkov & Guiria 1991] Pavel Valerievich Volkov et E.I. Guiria, « Recherche expérimentale sur une technique de débitage », dans 25 ans d'études technologiques en préhistoire (XIe Rencontres Internationales d'Archéologie et d'Histoire d'Antibes), Juan-les Pins, éd. APDCA, , p. 379-390. Cité dans Vosges 2019.
  9. Pelegrin 2006. Cité dans Vosges 2019.
  10. Clappier et al. 2018, paragr. 5.
  11. Pelegrin, Riché & Malenfant 1999.
  12. Malenfant & Pelegrin 2004.
  13. [White 2007] Randall White (responsable d'opération), « Sergeac – Abri Castanet » (Compte-rendu annuel de fouilles (Date de l'opération : 2005)), AdlFI,‎ (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté en ), paragr. 3 .
  14. Pelegrin 2000. Cité dans Bellina & Silapanth 2005, p. 620.
  15. [Bellina & Silapanth 2005] Bérénice Bellina et Praon Silapanth, « Première campagne de fouilles à Khao Sam Kaeo (province de Chumphon, Thaïlande péninsulaire) », Bulletin de l'École française d'Extrême-Orient, no 92,‎ , p. 612-627 (lire en ligne [sur persee]), p. 620.
  16. Jean-Michel Geneste, Serge Maury, Jacques Pelegrin, Hélène Roche et Boris Valentin, « « Homo sapiens » pouvait être plus savant », sur liberation.fr, (consulté en ).