Khâsekhemouy

pharaon égyptien

Khâsekhemouy serait le dernier souverain de la IIe dynastie thinite. Il aurait succédé à Sekhemib (qui pourrait être identique à Péribsen) et précéda son fils Djéser de la IIIe dynastie. Manéthon le nomme Kheneres. Le papyrus de Turin lui compte vingt-sept ans, deux mois, et un jour de règne.

Khâsekhemouy
Image illustrative de l’article Khâsekhemouy
Statue de Khâsekhemouy - Ashmolean Museum d'Oxford (AN1896-1908 E.517).
Période Période thinite
Dynastie IIe dynastie
Fonction roi
Prédécesseur Haute-Égypte : Sekhemib (= Péribsen ?)
Basse-Égypte : houdjefa (signifiant « lacune ») ?
Dates de fonction XXVIIIe siècle / XXVIIe siècle AEC[note 1]
Successeur Djéser (probablement) ou Sanakht
Famille
Conjoint Nimaâthâpy
Enfant(s) Djéser
Hétephernebty
Sépulture
Nom Tombe V
Type tombeau
Emplacement Abydos, nécropole d'Oumm el-Qa'ab, tombe V
Fouilles Émile Amélineau
1901 : William Matthew Flinders Petrie
Objets Vaisselle en bronze et cuivre,
sceptre en sardoine bagué d'or,
vases de pierre et vases en céramique remplis de grains et de fruits,

petits objets laqués,
perles de cornaline,
outils en silex et en cuivre,
vannerie,
et une grande quantité de sceaux au nom de Khâsekhemouy.

Attestations

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Attestations contemporaines

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Le dernier roi de la IIe dynastie a porté au cours de son règne deux noms principaux, parfois accompagné d'une épithète (Hotep-Netjerouy-Imef, « Celui grâce à qui les Deux Dieux sont satisfaits ») pour le second ; ce changement serait dû à un évènement politique marquant, peut-être une réunification du pays[1] :

  • le premier nom était le nom d'Horus Khâsekhem (le serekh est surmonté du faucon Horus couronné de la couronne blanche hedjet, symbole de la Haute-Égypte), attesté sur les documents suivants :
    • un vase en porphyre découvert dans l'une des galeries VI et VII sous la pyramide de Djéser (no 18 de Lacau et Lauer)[2],
    • des vases en granit et travertin découverts dans le temple d'Horus à Nekhen ; tous ces vases montrent une inscription figurant la déesse Nekhbet (la déesse tutélaire de la Haute-Égypte) debout sur un anneau à l'intérieur duquel se trouve le mot « rebelle » (bš̤) et accompagnée d'une légende indiquant « l'année de combattre l'ennemi du nord »[2],[3],
    • une statuette en calcaire et une statuette en siltite, découvertes à Nekhen également ; ces statuettes montrent des ennemis défaits dans des positions contorsionnées, légendés comme « 47 209 ennemis du nord »[4],[3],
    • une stèle fragmentaire en quartzite verdâtre foncé découverte à Nekhen également ; elle montre un captif sur une plateforme et une tête coupée surmontée du signe de l'arc, permettant d'écrire le nom de la Nubie, Ta-Séty ; l'inscription au-dessous indique « humilier le pays étranger »[4],[5],
    • et tête de hache en cuivre sans provenance connue et se trouvant aujourd'hui dans une collection privée[4],
  • le second était le nom d'Horus et de Seth Khâsekhemouy (le serekh est surmonté du faucon Horus portant la double-couronne pschent, symbole des Haute et Basse-Égypte unifiée, et de l'animal séthien portant lui aussi le pschent), attesté sur les documents suivants :
    • un fragment de vase en brèche découvert dans la zone d'un temple égyptien à Byblos, portant l'inscription « Khâsekhemouy, vie offerte » ; inhabituellement, l'animal séthien porte la couronne rouge decheret, symbole de la Basse-Égypte[4],
    • un montant de porte découvert dans la zone du temple d'Horus à Nekhen, dont l'une des faces, ultérieurement arasée, a été décorée avec une scène du roi pendant une cérémonie de fondation en compagnie de la déesse Seshat, d'autres blocs ont également été découverts, dont un bloc endommagé avec une liste de pays étrangers et des nombres (aujourd'hui endommagés) associés à chacun d'entre eux, renvoyant peut-être à des tributs ou des ennemis tués[6],[7],
    • des reliefs fragmentaires découverts dans une construction en brique nommé le « Fort » de Nekhen, qui est peut-être un enclos funéraire[8],
    • un bloc de granit découvert dans la ville voisine d'El Kab appartenant probablement à un bâtiment important[8],
    • dans le complexe funéraire de Djéser, des empreintes de sceaux dans les galeries des magasins situés dans le secteur nord-ouest du complexe et une empreinte de sceau dans la galerie VII sous la pyramide, ainsi qu'un vase en diorite découvert dans le tombeau sud (no 95 de Lacau et Lauer)[4],[9],
    • une empreinte de sceau dans la tombe S3043 à Saqqarah[8],[10],
    • une empreinte de sceau dans la tombe K1 de Beit Khallaf, avec une autre de Djéser[11],[12],[13],
    • sa tombe V dans la nécropole d'Oumm el-Qa'ab à Abydos, dans laquelle ont été découverts deux stèles funéraires en granit à son nom (des fragments de la première ont été découverts au sud de la tombe tandis que la seconde, brisée, a été découverte hors contexte à deux kilomètres à l'est), un précieux sceptre, des vases en pierre calcaire dolomitique avec couvercles en feuille d'or, de la vaisselle en bronze et cuivre, et des empreintes de sceaux du roi avec celles de Djéser[14],[15],[16],
    • son enclos funéraire, nommé aujourd'hui Shunet El Zebib et situé à plus d'un kilomètre à louest de la tombe, près de la limite du désert et dans lequel ont été découvertes des empreintes de sceaux du roi avec celles de Djéser[14],[15],[17].

Il est à noter que des reliefs situés à Gebelein et provenant du temple d'Hathor local sont attribués à Khâsekhemouy d'après leur style[8],[10], ainsi qu'une tête de statuette, aujourd'hui à Boston et ressemblant fortement aux deux statuettes découvertes à Nekhen et sans provenance connue.

Attestations ultérieures

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Le roi est mentionné au début du cinquième registre du recto de la pierre de Palerme ; seules les six dernières années pleines et la dernière année, incomplète car partagée avec son successeur, sont inscrites sur le fragment de Palerme, le reste étant perdu[18],[19]. Ces années sont les suivantes :

  • année du 6e recensement,
  • année de « l'apparition du roi » et la construction d'un bâtiment en pierre nommé « La déesse perdure » (Mn-Nṯr.t),
  • année du 7e recensement,
  • année de la création d'une statue en cuivre nommée « Grand est Khâsekhemouy »,
  • année du 8e recensement,
  • année du 4e rituel « atteindre le mur » (rituel inconnu par ailleurs), activité de construction navale entreprise,
  • mort du roi lors du vingt-troisième jour du deuxième mois de sa dernière année de règne.

Le dernier roi de la IIe dynastie est présent sur les listes royales ramessides sous un nom différent, le nom écrit étant corrompu par le temps :

Concernant les listes manéthoniennes, le dernier roi de la dynastie selon Africanus est nommé Kheneres et aurait régné trente ans[21].

Généalogie

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Il épouse Nimaâthâpy, ou Nimaâtapis, une princesse du nord et a deux enfants : Djéser qui sera le fondateur de la IIIe dynastie et qui épouse sa sœur Hétephernebty (ou Hotepphirnebty)[22],[23].

Comme l'indique la Pierre de Palerme, le roi est décédé lors du vingt-troisième jour du deuxième mois de sa dernière année de règne, année qui suit le 8e recensement. En admettant un rythme biannuel de recensement, le rois serait mort lors de sa dix-septième année de règne (si le premier recensement a eu lieu lors de sa première année de règne) ou lors de sa dix-huitième année de règne[24].

La situation politique du royaume égyptien à cette époque reculée, depuis la fin du règne de Ninetjer jusqu'à l'avènement de Khâsekhemouy, est floue. Il semble que le royaume était divisée et que Khâsekhemouy a commencé son règne en contrôlant le sud de l'Égypte seulement, bien que la frontière nord de ce territoire ne soit pas connue. En effet, plusieurs documents (statuettes assises, vases de Nekhen) portant le nom Khâsekhem mentionnent la lutte contre des ennemis du nord, et les attestations de ce même Khâsekhem proviennent tous de la région de Nekhen, à l'exception d'un vase découvert dans les galeries du Complexe funéraire de Djéser et déposé pendant le règne de ce dernier. De plus, le nom d'Horus du roi est surmontée du faucon Horus portant la couronne blanche hedjet de la Haute-Égypte, et non le pschent, couronne de l'Égypte unifiée. Si, pour la Haute-Égypte, Khâsekhemouy a semble-t-il succédé à Sekhemib, à moi que ce roi soit identique à Péribsen (ceci ne fait pas l'unanimité), il a été suggéré que le roi (ou les rois) ayant précédé Khâsekhemouy en Basse-Égypte soit représenté par la lacune (écrit houdejfa en égyptien) précédent immédiatement le nom de Khâsekhemouy dans la table de Saqqarah et le Canon royal de Turin. Il semble par ailleurs que le roi ait mené une campagne contre les Nubiens au sud avant d'avoir réunifié l'Égypte, car une stèle fragmentaire découverte à Nekhen figure une captif et une tête coupé sous le signe de l'arc servant à écrire le nom de la Nubie, Ta-Séty et mentionne la formule suivante « humilier le pays étranger ».[1].

À un moment donné, le roi a changé sa titulature pour Khâsekhemouy et a surmonté son nom par le faucon Horus, cette fois couronné du pschent, et de l'animal séthien portant lui aussi la couronne pschent. Il est possible que ce changement soit dû à une réunification réalisée par le roi. Toujours est-il que si la région de Nekhen est toujours le lieu où le plus grand nombre d'attestations du roi a été trouvé, le roi est attesté plus au nord, que ce soit à Abydos, avec la construction de sa tombe et de son enclos funéraire, à Beit Khallaf avec une empreinte de sceau dans la tombe K1, et à Saqqarah, avec une empreinte de sceau dans la tombe de fonctionnaire S3043 et des empreintes de sceaux dans le complexe funéraire de son fils Djéser, dont la présence pourrait signifier que le roi avait mis en place quelque chose sous son règne[25],[9].

Concernant les relations internationales, elles semblent atteindre un nouveau niveau, comme l'attestent la première mention de l'histoire égyptienne du titre « surveillant des pays étrangers » (jmj-rȝ ḫȝst), suggérant l'imposition de l'hégémonie égyptienne sur des territoires étrangers (il pourrait s'agir d'un territoire nubien d'après la stèle fragmentaire découverte à Nekhen suggérant une campagne militaire), ainsi que la découverte à Byblos d'un fragment de vase portant son nom, suggérant un certain niveau de relations commerciales entre cette ville et l'Égypte sous son règne, bien que ce vase ait pu atteindre ce lieu à une date ultérieure[4].

Concernant les réalisations architecturales, Khâsekhemouy est le roi de la Période thinite dont les réalisations architecturales sont les plus impressionnantes. Dans la région de Nekhen, des reliefs découverts dans la ville de Nekhen semblent indiquer que le roi est le commanditaire d'un temple d'Horus ; le « Fort », situé sur le côté nord du Grand Ouadi de Nekhen, est une importante construction en brique équivalente à l'enclos funéraire du roi situé à Abydos ; des reliefs sur des blocs de pierre découverts à El Kab (en face de Nekhen), ville de Nekhbet, et à Gebelein, dans le temple d'Hathor local, indiquent suggèrent également d'importantes constructions cultuelles sur ces sites. Il est à noter que la case de la Pierre de Palerme qui suit celle du 6e recensement indique que le roi entreprit la construction d'un bâtiment en pierre nommé « La déesse perdure » (Mn-Nṯr.t), cette construction pourrait être le temple de Nekhbet d'El Kab ou le temple d'Hathor de Gebelein[26],[27]. Enfin, à Abydos, les constructions funéraires du roi sont les plus importantes du site, avec sa tombe V de 88 × 20 mètres minimum (il s'agit des dimensions des infrastructures) dans la nécropole d'Oumm el-Qa'ab et l'enclos funéraire Shunet El Zebib de 137 × 77 mètres, accompagné d'une flotte de bateaux funéraires[18],[28].

Une autre facette du règne est l'artisanat : en effet, non seulement, de nombreux vases à son onm ont été découverts, mais aussi des statuettes et de nombreux éléments de son trousseau funéraire, dont de la vaisselle en bronze et cuivre, un sceptre en sardoine bagué d'or et des vases en pierre fermés par des couvercles en feuilles d'or. La Pierre de Palerme indique dans l'année qui suit celle du 7e recensement a été nommée « création d'une statue en cuivre (nommée) "Grand est Khâsekhemouy" » ; il s'agit de la plus ancienne attestation de telles statues, les plus anciennes retrouvées datant de la VIe dynastie. Quant à l'année qui suit celle du 8e recensement, une activité de construction navale a été entreprise[18],[29].

À sa mort, la IIe dynastie prend fin et la IIIe dynastie commence. Cependant, il ne s'agit pas d'un changement de lignée : en effet, Khâsekhemouy a probablement pour successeur direct son fils Djéser[30],[31],[17],[32], bien que Sanakht soit aussi évoqué[33].

Sépulture

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Sa sépulture a été retrouvée à Abydos en Haute-Égypte. Cette tombe (référencée par la lettre V), unique en son genre, est la plus vaste et la plus complexe de la nécropole d'Oumm el-Qa'ab. De forme trapézoïdale, d'une longueur de soixante-dix mètres et d'une largeur variant de dix-sept à dix mètres d'une extrémité à l'autre, elle possède une chambre funéraire édifié en pierre à peu près en son centre[18],[29].

Elle est fouillée par Émile Amélineau durant ses fouilles dans la nécropole ayant eu lieu entre 1894 et 1898, puis par William Matthew Flinders Petrie en 1901, dont les fouilles de la nécropole datent de 1899 à 1903[34]. Elle contenait de la vaisselle en bronze et cuivre, un sceptre en sardoine bagué d'or, des vases de pierre et des vases en céramique remplis de grains et de fruits. Il y avait aussi de petits objets laqués, des perles de cornaline, des outils en silex et en cuivre, de la vannerie et une grande quantité de sceaux à son nom. Elle a livré également un certain nombre d'artefact provenant du viatique funéraire du roi[18],[35].

À un kilomètre environ de la tombe, dans le désert d'Abydos, se trouve le Shunet El Zebib, vaste structure de briques qui dessine un rectangle de 137 × 77 mètres. Ses murs, avec leur articulation en façade de palais, mesurent jusqu'à cinq mètres d'épaisseur et vingt mètres de hauteur. On ignore la fonction exacte de cet édifice semblable à une forteresse. Les fouilles ont révélé l'existence de constructions internes compliquées. Le monument était peut-être associé aux réserves faite pour le ka du roi dans la tombe située à proximité[18],[28].

Titulature

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Notes et références

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  1. En termes de chronologie absolue, la détermination de dates exactes de début et de fin de règne est un exercice périlleux du fait de l'ancienneté du règne, plusieurs chercheurs ont fait chacun des propositions, même si la recherche récente donne une fourchette allant de 2691 à 2625 AEC ; on trouve par exemple :

Références

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  1. a et b Wilkinson 1999, p. 91-92.
  2. a et b Wilkinson 1999, p. 91.
  3. a et b Dodson 2021, p. 53-54.
  4. a b c d e et f Wilkinson 1999, p. 92.
  5. Dodson 2021, p. 53 & 54.
  6. Wilkinson 1999, p. 92-93.
  7. Dodson 2021, p. 56-58.
  8. a b c et d Wilkinson 1999, p. 93.
  9. a et b Cwiek 2008, p. 93 & 95.
  10. a et b Dodson 2021, p. 56.
  11. Wilkinson 1999, p. 95-97.
  12. Baud 2002, p. 18-21 & 81-82.
  13. Dodson 2021, p. 64 & 67.
  14. a et b Wilkinson 1999, p. 95.
  15. a et b Baud 2002, p. 60.
  16. Dodson 2021, p. 59-60 & 64.
  17. a et b Dodson 2021, p. 64.
  18. a b c d e et f Wilkinson 1999, p. 93-94.
  19. Dodson 2021, p. 56-57 & 115.
  20. a b et c Dodson 2021, p. 106.
  21. Dodson 2021, p. 173.
  22. Dodson et Hilton 2004, p. 48.
  23. Baud 2002, p. 80-83.
  24. Dodson 2021, p. 57.
  25. Wilkinson 1999, p. 92-94.
  26. Wilkinson 1999, p. 94.
  27. Dodson 2021, p. 56-57.
  28. a et b Dodson 2021, p. 58-60 & 171.
  29. a et b Dodson 2021, p. 57-60.
  30. Wilkinson 1999, p. 94-95.
  31. Baud 2002, p. 60-61 & 80.
  32. Cwiek 2008, p. 87-103.
  33. Incordino 2007, p. 965.
  34. Wilkinson 1999, p. 4-5.
  35. Dodson 2021, p. 58-60.

Bibliographie

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  • (en) Toby Alexander Howard Wilkinson, Early dynastic Egypt, Londres, New-York, Routledge, , 436 p. (ISBN 978-0415186339) ;
  • Michel Baud, Djéser et la IIIe dynastie, Paris, Pygmalion, , 301 p. (ISBN 978-2857047797) ;
  • (en) Aidan Mark Dodson, The First Pharaohs: Their Lives and Afterlives, Barnsley, The American University in Cairo Press, , 224 p. (ISBN 978-1649030931) ;
  • (en) Aidan Dodson et Dyan Hilton, The Complete Royal Families of Ancient Egypt, Londres, Thames & Hudson, , 320 p. (ISBN 978-0500051283) ;
  • (en) Andrzej Cwiek, « History of the Third Dynasty, another update on the kings and monuments », dans Hana Vymazalovâ, Miroslav Barta, Chronology and Archeology in Ancient Egypt (the third millennium B.C.), Prague, Czech Institute of Egyptology, Faculty of Arts, (ISBN 978-80-7308-245-1), pp. 87-103 ;
  • (en) Illaria Incordino, « The third dynasty: A chronological hypothesis. », dans Jean Claude Goyon, Christine Cardin, Proceedings of the Ninth International Congress of Egyptologists, (lire en ligne), pp. 961-968.

Liens externes

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