Royaume de Koush
Le royaume de Koush est l'appellation que les Égyptiens antiques ont donnée au royaume qui s'établit au sud de leur pays dès l'Ancien Empire. Ce royaume a eu une longévité peu commune, et trouve ses origines dans les cultures néolithiques qui se sont développées dans le couloir nilotique du Soudan actuel et de la Nubie égyptienne.
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XXVe siècle – XVIe siècle av. J.-C.
VIIIe siècle av. J.-C. – IVe siècle apr. J.-C.
Capitale | Kerma (XXVe — XVIe siècle av. J.-C.)Napata (VIIIe — IVe siècle av. J.-C.)Méroé (IVe siècle av. J.-C.—IVe siècle apr. J.-C.) |
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Langue(s) | MéroïtiqueNubien |
Religion | Religion de l'Égypte antique |
(1er) -1900 | Kaa |
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(Der) IVe siècle | Reine Lakhideamani |
Entités précédentes :
Études récentes
modifierOn a longtemps considéré cette culture à l'aune de la civilisation égyptienne, et, de ce fait, peu d'études ont été faites à son sujet, la reléguant alors soit au stade d'une principauté dépendante du royaume des pharaons, soit à celui d'un avatar de cette civilisation, ne lui reconnaissant donc aucune spécificité[1].
Koush est aussi un personnage de la Bible hébraïque, l'Ancien Testament chrétien, dans la Genèse et au début du premier Livre des Chroniques[2], outre ses évocations plus directes de pharaons koushites de la XXVe dynastie ultérieure, comme Taharqa[3] voire peut-être Piânkhy[4].
Depuis les années 1950 et notamment la campagne de sauvetage des monuments nubiens menacés par la mise en eau de la région comprise entre la première et la seconde cataracte, à la suite de l'édification du haut barrage d'Assouan, un regain d'intérêt des égyptologues pour cette région nous permet aujourd'hui d'affirmer que ce royaume, tant à ses débuts au troisième millénaire avant notre ère que jusqu'aux conquêtes éthiopiennes du IVe siècle, est une culture et une civilisation indépendante et qui réussit la synthèse des différents apports culturels de ses voisins, y compris ceux de l'Égypte, dont il représente l'ultime évolution aux alentours de l'ère chrétienne, alors que Rome domine l'ensemble des cultures de l'antiquité méditerranéenne.
Sur le plan des données archéologiques disponibles, la culture Koushite est à l'origine de l'édification de plus d'un millier de pyramides dont 250 sont encore débout aujourd'hui. La production de poterie décorée remonte au 8e millénaire avant notre ère, ce qui devance les céramiques retrouvées en Egypte de près de 3000 ans[1].
Histoire
modifierRoyaume de Kerma
modifierGénéralités
modifierLe royaume de Kerma formé à partir du site éponyme, qui en devient la capitale, est un royaume assez puissant pour inquiéter son voisin du nord, l'Égypte de l'Ancien Empire qui organise déjà des expéditions vers le cœur de l'Afrique, et de ce fait doit nécessairement passer par les terres contrôlées par les Nubiens. C'est principalement de ces sources égyptiennes que nous tenons les informations sur ce peuple. Il est ainsi présenté comme belliqueux ou, en tout cas, comme un peuple qui n'entend pas céder sa place dans le contrôle des routes commerciales qui sillonnent la région. Ces routes relient les grandes régions de l'Afrique centrale et australe au reste du continent en évitant — et c'est un point non négligeable — les routes harassantes du Sahara. Déjà, à cette haute époque, le Sahara est atteint par une désertification intense et définitive, le dromadaire n'étant utilisé pour le transport que tardivement et surtout à partir de l'époque romaine[1].
On distingue trois périodes pour ce royaume, qui couvre mille ans ou plus de développement et de civilisation. N'étant pas une civilisation de l'écrit, il est donc assez ardu de restituer son histoire et les grands personnages qui la constituent.
De ce fait, et à l'inverse des autres civilisations antiques, c'est essentiellement l'archéologie de cette civilisation qui permet de la restituer dans son ensemble, et comme nous ne possédons pas d'écrits propres à ce peuple, nous en sommes réduits à faire des hypothèses sur son évolution culturelle à partir des vestiges qu'il nous a transmis, notamment au travers des innombrables sépultures qui attestent que cette civilisation est une civilisation urbaine, son peuple s'étant regroupé autour de grands centres cultuels et commerciaux.
Des preuves linguistiques indiquent que les peuples du royaume de Kerma parlent des langues afro-asiatiques de la branche couchitique[5],[6]. Le nobiin (nubien) contient aujourd'hui un certain nombre de mots-clés liés au pastoralisme qui sont d'origine couchitique orientale, tels que les termes brebis / peau de chèvre, poule / coq, enclos d'élevage, beurre et lait. Ceci suggère que les populations du kerma — qui, avec la culture du Groupe C, habitent la vallée du Nil juste avant l'arrivée des premiers locuteurs nubiens — parlent des langues couchitiques[7].
Premier royaume de Kerma
modifierPériode : du XXVe au XXIe siècle av. J.-C.
Sous la dénomination Kerma ancien, on entend réunir l'ensemble des cultures couchitiques du Soudan moyen, qui se regroupent par chefferies autour d'un puissant monarque, qui a donc sa capitale à Kerma, site du cours moyen du Nil soudanais. La population de cette époque est en effet constituée d'un ensemble de peuplades différentes. On assiste déjà à un développement de la métallurgie (cuivre mais aussi bronze) et des arts : ébénisterie, ivoire, céramique, dont on a retrouvé beaucoup de témoignages dans les sépultures de l'époque. Les rites d'inhumation sont apparentés à ceux de la culture du Groupe C.
Les tombes acquièrent alors leur forme définitive : une fosse circulaire contenant le défunt inhumé en position contractée et la tête à l'orient, avec un matériel funéraire constitué essentiellement de céramique pour les plus humbles, l'ensemble étant recouvert d'un tumulus autour duquel les offrandes alimentaires sont déposées et les sacrifices funéraires opérés.
Les sépultures royales sont beaucoup plus imposantes (les tumuli royaux à cette époque dépassent alors un diamètre honorable de quarante à soixante mètres) et comportent outre un riche mobilier funéraire, des tombes subsidiaires destinées à l'aristocratie d'alors, tandis que l'entourage immédiat du roi est « sacrifié » le jour de ses funérailles et reçoit donc le « privilège » d'accompagner son souverain dans l'au-delà. Le site de Kerma est en plein essor et de nombreuses constructions attestent l'existence d'une monarchie organisée à laquelle l'ensemble de la région voue une certaine déférence.
Au nord de cette région, la Nubie demeure dominée par des peuplades, que l'on rassemble sous le terme de « Groupe C », qui interdisent l'accès au sud, en contrôlant drastiquement le commerce, voire en pillant les convois depuis ou vers l'Égypte. À l'Ancien Empire, cette situation devient critique pour les Égyptiens, qui ont besoin de cet accès pour obtenir des biens précieux et rares en provenance de l'Afrique centrale.
Avec le temps, le Groupe C semble avoir peu à peu pacifié ses relations avec son voisin égyptien, allant jusqu'à fournir des mercenaires aux troupes des pharaons de la VIe dynastie. En retour, l'Égypte lui garantit une relative sécurité, aussi bien sur le plan militaire qu'économique, notamment en palliant les périodes de famines par l'envoi de grain aux peuples de la région. Les débouchés sur les mines d'or du désert oriental y sont certainement déjà pour quelque chose.
En revanche, le lointain royaume de Kerma représente toujours un danger pour les expéditions commerciales qui entrent alors sans doute en concurrence avec le jeune royaume à l'influence grandissante. Deux groupes de population et de culture distinctes occupent donc toute la vallée du Nil soudanais jusqu'aux environs de la cinquième cataracte, et forment alors deux puissantes civilisations proto-urbaines avec lesquelles il faut compter. On assiste en effet sur tout le long de la vallée à la sédentarisation progressive des peuples et à l'établissement de villages qui peu à peu deviennent de grosses bourgades. Kerma est alors déjà une cité étendue.
Deuxième royaume de Kerma
modifierPériode : du XXIe au XVIIIe siècle av. J.-C.
À dater de l'époque du Kerma moyen, on assiste au développement du royaume et de sa culture notamment des pratiques funéraires ; les défunts sont toujours inhumés en position fœtale la tête à l'est avec un riche mobilier funéraire et on peut suivre à travers l'évolution de ces pratiques et le développement des tumuli une hiérarchisation de plus en plus marquée de la société. Une véritable classe aristocratique voit donc le jour et préfigure la puissance du royaume à la période suivante. De rares contacts directs ont lieu avec les voisins du nord mais le commerce est florissant et atteste la stabilité de la région. On retrouve des traces de son réseau commercial sur les terres de Shilluk au sud de la vallée du Nil et jusque dans les montagnes du Tibesti.
Au nord du pays, le Groupe C domine toujours la vallée jusqu'à ce que les pharaons du Moyen Empire annexent littéralement la région jusqu'au Batn el-Haggar. On assiste alors à une réaction du royaume de Kerma qui protège ses cités derrière des remparts et, signe des temps, les défunts masculins sont alors inhumés avec leurs armes de manière systématique.
Troisième royaume de Kerma
modifierPériode : du XVIIIe au XVIe siècle av. J.-C.
Le royaume de Koush, durant le Kerma classique, étend son territoire de la première cataracte, aux environs d'Assouan, jusqu'à la quatrième cataracte à la suite de l'alliance des peuples nubiens et du royaume de Kerma qui en devient alors la capitale. Les relations avec le voisin du nord sont au début pacifiques, et le commerce est florissant avec toute la vallée du Nil et l'Afrique centrale.
La situation permet un bond de l'agriculture et de l'urbanisation de la région : grandes constructions dans la capitale et nécropoles royales avec tumuli colossaux, dont certains dépassent les cent mètres de diamètre. Sur le plan culturel, on assiste à un maintien des coutumes et traditions locales, bien que certains éléments architecturaux ou décoratifs soient empruntés à la culture égyptienne qui reste assez présente au nord du royaume. Des relations diplomatiques prouvées entre Kerma et les dynastes Hyksôs du delta du Nil attestent que les deux puissances ont cherché à passer alliance afin de contrer la montée en puissance d'une dynastie rivale située à Thèbes. L'un de ces souverains, Kamosé reprend alors l'avantage sur le royaume de Kerma, repoussant sa frontière au sud d'Éléphantine. Son successeur Ahmôsis Ier poursuit cette conquête des territoires du Soudan.
Domination égyptienne
modifierPériode : du XVIe au XIIe siècle av. J.-C.
Les pharaons du Nouvel Empire étendent leur domination jusqu'à la IVe cataracte (Nubie égyptienne). Le royaume de Kerma est détruit par Ahmôsis Ier, lequel contrôle ensuite les routes commerciales ainsi que les mines d'or du désert oriental.
De cette période date la construction des sites et monuments suivants :
- en Nubie égyptienne :
- en Nubie soudanaise et au Soudan :
- Faras,
- Aksha,
- Bouhen,
- Semna,
- Ouronarti,
- Koumma,
- Amara,
- Saï,
- Sédeinga,
- Jebel Dosha,
- Temple d'Amon de Soleb,
- Sésébi,
- Pnoubs,
- Argo,ville située sur l'île d'Argo,
- Kaoua,
- Napata (Gebel Barkal),
- Kourgous.
La région subit une égyptianisation affichée :
L'indépendance, XIe – Xe siècles
modifierAu XIe siècle, avec la fin de la domination égyptienne sur le Soudan, à la suite de l'éclatement de l'Égypte en plusieurs royaumes rivaux, la Nubie devient indépendante, autour du vice roi de Koush dont le dernier représentant attesté est Panéhésy (règne de Ramsès XI). Cela permet ainsi, de nouveau, le développement des chefferies et des principautés, au Soudan, qui semblent coexister pacifiquement, notamment au sud du pays.
Au Xe siècle, on assiste alors à la constitution d'une principauté autour d'une dynastie locale à Napata (Gebel Barkal). Cette dynastie trouverait ses origines dans la lointaine Méroé, alors encore simple place commerciale. Peu à peu, l'influence de la principauté s'étend sur l'ensemble des royaumes du Soudan, et constitue un puissant royaume au cœur de l'Afrique occidentale et centrale. Puis, c'est le règne de six souverains à peu près inconnus. Au IXe siècle, à la suite d'une guerre civile qui plonge la Thébaïde dans le chaos, une partie du clergé de Karnak se réfugie à Napata, sous la protection des princes de Koush.
Royaume de Napata
modifier(VIIIe au IVe siècle av. J.-C.)
Avec le règne du prince Alara, puis celui du roi Kachta le Koushite, on assiste à la conquête de la Basse Nubie, puis de la Haute-Égypte. On peut alors considérer cette période comme l'apogée du royaume de Napata, dont la dynastie réclame l'héritage de l'Égypte. En effet, devant l'anarchie qui y règne, Piyé (Piânkhy), puis après lui ses successeurs, interviennent et montent sur le trône d'Égypte, fondant la XXVe dynastie. Leur royaume s'étend alors de la VIe cataracte, aux environs de Khartoum, confluent du Nil bleu et du Nil blanc, jusqu'à la mer Méditerranée.
Pharaons de la XXVe dynastie issue de Napata :
Tous règnent sur le royaume de Koush et d'Égypte.
Cependant, on considère en général que le début réel de la XXVe dynastie correspond au règne de Chabaka, qui après une nouvelle conquête de l’Égypte installe sa capitale à Memphis. En effet, la conquête de Piânkhy, en l'an 21 de son règne, n'est pas suivie d'une installation durable en Égypte, puisqu'après sa victoire, il rentre à Napata.
De même, Taharqa est considéré comme le dernier vrai roi nubien en Égypte : après une première moitié de règne prospère, il est défait par les Assyriens, et se retire dans le sud (en Nubie ou à Thèbes), où il meurt après vingt-six ans de règne, en -664. Tanoutamon, après une ultime reconquête de l’Égypte, est de nouveau défait par les troupes assyriennes, en -663. On parle souvent du saccage de la ville de Thèbes, lors de cette dernière défaite, mais ce fait n'est pas encore prouvé par l'archéologie[8].
De cette époque date la construction des temples napatéens de la Nubie actuelle et du Soudan.
Cet empire prend fin à la seconde moitié du VIIe siècle, avec la conquête de l'Égypte par les Assyriens. Le royaume, qui conserve Napata comme capitale, retrouve alors ses frontières originelles.
Royaume de Méroé
modifier(IVe au IVe siècle apr. J.-C.)
À la fin du IVe siècle, les rois de Nubie font face à une invasion venue du Nord, quittent Napata et se réfugient plus au sud, à Méroé. La culture méroïtique se développe dans toute la vallée du Nil, et les relations commerciales sont étroites, avec le royaume lagide d'Égypte. Des conflits éclatent entre les deux puissances, qui trouvent leur paroxysme lors de la conquête romaine au Ier siècle.
Règne des rois de Méroé :
- Arkamani Ier (-275 à –250) il construit de grandes pyramides à Méroé,
- Arnékhamani (en) (-235 à –218),
- Adikhalamani (en),
- Arkamani II,
- Candace (reine) Shanakdakhete (-170 à –150),
- Tanéyidamani (en) (-110 à -90),
- Téritéqas,
- Candace Amanirenas,
- Candace Amanishakhéto (-35 à -20),
- Candace Nawidemak
- Natakamani,
- Candace Amanitore (-12 à +12),
- Chorkarer,
- Candace Amanikhatashan (62 à 85),
- Candace Maleqorobar (266 à 283).
Construction des sites et monuments :
- Philæ,
- Kalabchah,
- Temple de Dakka (en),
- Qasr Ibrim,
- Tabo,
- Napata,
- Méroé,
- Musawwarat es-Sofra,
- Naqa,
- Wad Ben Naga
- Basa (en),
- El-Hassa,
- Hosh-Ben-Naga,
- Djebel Qeili,
- Soba,
- Khartoum.
Le royaume continue d'honorer le panthéon égyptien bien après que celui-ci fut tombé en désuétude en Égypte même[10].
Développement des cultes des dieux soudanais : Dédoun le premier de Nubie, Apédémak le grand dieu du sud, Arsénouphis et Mandoulis.
Nécropole de pyramides royales à Méroé. Bien qu'on assiste au IIIe siècle à un bref retour de la nécropole royale à Napata, qui doit correspondre à une reprise d'influence de la région du nord du Soudan par le royaume de Koush (probablement au moment où les lagides perdent leur suzeraineté sur la Haute-Égypte), celle-ci est en fait officiellement à Méroé.
Lors de la découverte des nécropoles royales de Méroé, au XIXe siècle, une véritable chasse au trésor a pour effet la destruction systématique des pyramides, dans l'espoir de découvrir dans leur maçonnerie des caches et chambres secrètes abritant les trésors des rois soudanais.
Excepté le trésor de la candace Amanishakhéto, découvert enveloppé dans des linges dans un chaudron en bronze (oublié par les pillards ?), cette campagne de destruction systématique a peu de résultats, la plupart des tombes royales ayant été pillées à la fin de l'antiquité, et laisse les nécropoles royales en ruine.
Les pyramides de Méroé sont conçues de la même manière que celles de Napata : une sépulture aménagée dans le sous-sol du monument, le plus souvent formé d'une seule pièce, dans laquelle est inhumé le royal défunt, avec son mobilier funéraire le jour de ses funérailles. Alors seulement, la pyramide est édifiée par les héritiers du défunt. Ces monuments ont pour seul but de signaler la sépulture royale, ainsi précédée d'une chapelle funéraire avec un petit pylône, hérité de l'architecture religieuse égyptienne, qui le plus souvent porte une représentation du roi ou de la reine massacrant rituellement les ennemis du royaume. Cette chapelle de culte, adossée au monument funéraire pyramidal, comporte une représentation d'Osiris, en ronde-bosse, qui finit par disparaître à la fin de la période méroïtique.
Cette époque est troublée par de nombreux conflits avec les tribus et peuplades nomades des déserts occidental et oriental qui, poussées par la désertification inexorable de la région, cherchent de nouvelles terres pour s'installer. Les rois et reines de Méroé doivent ainsi sans cesse repousser ces incursions, abandonnant parfois le contrôle de la Nubie, puis le reprenant, assimilant à nouveau ces cultures dans son orbite d'influence.
Les relations avec l'Égypte lagide sont inégales, en fonction de la puissance de cette dernière. Ainsi, au début de la prise de pouvoir des premiers Ptolémées, les deux royaumes entretiennent des échanges commerciaux et culturels qui favorisent le développement économique de la Nubie. Des temples et des chapelles sont construits conjointement, notamment à Kalabchah, en l'honneur du dieu Mandoulis, et à Philæ, en l'honneur d'Arsénouphis.
En revanche, au IIe siècle, avec l'affaiblissement de la monarchie d'Alexandrie, la zone frontière semble dominée par les souverains koushites, qui poussent peut-être leur avantage en aval de la première cataracte. Dans tous les cas, la Thébaïde échappe au contrôle des Ptolémées pendant près de vingt ans : un petit royaume s'y forme, sans doute soutenu par son puissant voisin du sud.
Ptolémée V finit par réduire cette sédition de la Haute-Égypte, et pousse son expédition jusqu'à Napata. Il doit cependant rebrousser chemin, sans doute devant l'hostilité permanente des populations locales, comme autrefois le Grand roi des Perses Cambyse II a échoué dans cette voie. Le royaume de Méroé reste invaincu, et à nouveau la frontière est fixée à Assouan. Les relations commerciales reprennent jusqu'à la fin de l'époque lagide en Égypte, lors de l'invasion romaine et le suicide de Cléopâtre VII, en -30.
En -24, Philæ et Assouan sont conquises par la candace Amanishakhéto. Les Romains qui ont conquis la Nubie sont stoppés par la reine : traité de paix entre Rome et Méroé en -21, dit « traité de Sámos ». La frontière est fixée à Maharraqa, et, à dater de cette époque, les deux empires entretiennent des relations commerciales florissantes. De nouveaux programmes architecturaux sont engagés en Nubie, conjointement contrôlée pendant les premiers siècles de notre ère. Cependant, les relations sont parfois tendues pour des raisons essentiellement économiques (mines d'or notamment).
Néron, par exemple, organise une expédition sans lendemain vers Méroé, sans qu'on sache les motifs de l'arrêt de l'expédition. De son côté, le royaume de Méroé organise des expéditions vers le nord, dans le but de garantir l'accès à ses lieux de cultes.
Durant la seconde moitié du IVe siècle, des incursions répétées du royaume d'Aksoum entament le royaume de Méroé. C'est à cette époque que l'on situe traditionnellement sa chute, sous les coups des rois Ella-Amida et Ezana d'Éthiopie. La dernière sépulture royale méroïtique découverte est datée des environs de l'an 350, ce qui démontre que malgré ces assauts de l'histoire, la civilisation de Méroé n'a pas été totalement anéantie par le royaume chrétien d'Éthiopie.
Royaumes post-méroïtiques
modifier(IVe au VIe siècle)
Éclatement du royaume de Méroé en trois royaumes :
- en Basse-Nubie, le royaume de Nobatie,
- en Haute-Nubie, celui de Makurie,
- la région de Méroé devenant le royaume d'Aloua, ou Alodie.
En 450, les Nobades et les Blemmyes s'allient contre Rome, pour la défense de leurs lieux de cultes, dont l'île de Philæ demeure le principal sanctuaire. En 453 est signé un traité de paix entre les belligérants, autorisant les Soudanais à pratiquer leur culte d'Isis librement. On construit les sépultures royales d'El-Hobagi, et les nécropoles de Qoustoul (en) et Ballana (en).
Vers 540, les royaumes nubiens se christianisent.
Représentations dans la fiction
modifier- La romancière française pour la jeunesse Odile Weulersse évoque le royaume de Koush et la Nubie dans Disparition sur le Nil, le troisième roman de sa trilogie égyptienne, paru en 2006. La trilogie se déroule à la fin de la Deuxième Période intermédiaire, sous le règne d'Ahmôsis Ier.
- Le royaume de Koush est présent en tant que civilisation jouable, dans le jeu vidéo de stratégie 0 A.D., développé par Wildfire Games, depuis 2001.
- Le royaume de Koush est également présent en tant que civilisation jouable, dans le jeu vidéo de stratégie Total War: Rome II de Creative Assembly.
- Les deux conductrices de char, Toutunafer et Niphéniafer, présentes dans Astérix et la Transitalique, sont originaires de ce royaume.
Documentaire
modifier- Le royaume perdu des pharaons noirs de David Starkey.
Notes et références
modifier- (en) Zeinab Badawi, An African History of Africa: From the Dawn of Humanity to Independence, Ebury Publishing, (ISBN 978-0-7535-6015-0, lire en ligne), p. 64-97
- 1Ch 1,8-10, où ici transcrit Cusch.
- 2R 19 voire 18.
- 2R 17,4.
- Marianne Bechaus-Gerst et Roger Blench, The Origins and Development of African Livestock: Archaeology, Genetics, Linguistics and Ethnography – "Linguistic evidence for the prehistory of livestock in Sudan" (2000), Routledge, , 453–457 p. (ISBN 1135434166, lire en ligne).
- Peter Behrens, Libya Antiqua: Report and Papers of the Symposium Organized by Unesco in Paris, 16 to 18 January 1984: "Language and migrations of the early Saharan cattle herders: the formation of the Berber branch", Unesco, (ISBN 92-3-102376-4, lire en ligne), p. 30.
- Roger Blench, Kevin MacDonald (ed.) Marianne Bechaus-Gerst, The Origins and Development of African Livestock: Archaeology, Genetics, Linguistics and Ethnography: "Linguistic evidence for the prehistory of livestock in Sudan" (2000), Routledge, , 568 p. (ISBN 978-1-135-43416-8 et 1-135-43416-6, lire en ligne), p. 453.
- N. Grimal, Histoire de l'Égypte ancienne, 1988, p. 431-456.
- Sur le site de L'UNESCO
- Vincent Noyoux, « Soudan, sur les traces des pharaons noirs », Le Figaro Magazine, , p. 80-87 (lire en ligne).
Bibliographie
modifier- (fr + en) Guillemette Andreu-Lanoë (dir.) et Fleur Morfoisse, Sésostris III et la fin du Moyen Empire (actes du colloque, Louvre-Lens et Palais des beaux-arts de Lille, 12-13 décembre 2014), Villeneuve-d'Ascq, Université de Lille,, , 202 p. (ISBN 978-2-9525870-7-5).
- Charles Bonnet (dir.), Dominique Valbelle (avec la collaboration de) et Louis Chaix et Béatrice Privati (Contributions de) ([édité par la] Mission archéologique de l'Université de Genève à Kerma), Édifices et rites funéraires à Kerma, Paris, Errance, , 207 p., 30 cm (ISBN 2-87772-189-2)
- Charles Bonnet (dir.) et Dominique Valbelle (avec la collaboration de) (Mission archéologique de l'Université de Genève au Soudan), La ville de Kerma : Une capitale nubienne au sud de l'Egypte, Lausanne : Favre, , 267 p., 30 cm (ISBN 978-2-87772-189-9 et 2-87772-189-2)
- La cité de Kerma, capitale du premier royaume de Nubie, Vincent Charpentier et Charles Bonnet, dans Le Salon Noir sur France Culture (, 30 minutes), Inrap, consulté le
- Nicolas Grimal, Histoire de l'Égypte ancienne [détail des éditions]
- Jacques Reinold (dir.), Catherine Berger-El Naggar, Francis Geus, Brigitte Gratien (avec la collaboration de) et al. (exposition, Karthoum, 2000), Archéologie au Soudan : Les civilisations de Nubie, Paris, Errance, , 144 p., 29 cm (ISBN 2-87772-186-8)
- Dominique Valbelle (dir.), Jean-Michel Yoyotte (dir.) et al. (hommage à Charles Bonnet, publié à la suite du colloque éponyme, organisé en 2007 par Dominique Valbelle et Charles Bonnet, patronné par la Société française d'égyptologie, et l'Université Paris-Sorbonne), Statues égyptiennes et kouchites démembrées et reconstituées, Paris, Paris : PUPS, coll. « Les institutions de l'Égypte ancienne », , 95 p., 28 cm (ISBN 978-2-84050-712-3, lire en ligne) (en ligne : présentation)
- Dietrich Wildung (dir.) (exposition itinérante 1996-1998, exposition tenue à l'Institut du monde arabe en 1997), Soudan : royaumes sur le Nil, Paris, Institut du monde arabe : Flammarion, , 428 p., 32 cm (ISBN 2-906062-98-7, 2-08-010216-8 et 2-08-010215-X)