Le Lion et le Moucheron

fable de La Fontaine

Le Lion et le Moucheron
Image illustrative de l’article Le Lion et le Moucheron
Gravure de Étienne Fessard d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759

Auteur Jean de La Fontaine
Pays Drapeau de la France France
Genre Fable
Éditeur Claude Barbin
Lieu de parution Paris
Date de parution 1668
Chronologie

Le Lion et le Moucheron est la neuvième fable du livre II de Jean de La Fontaine situé dans le premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668. Cette œuvre a été choisie pour le Brevet 2022

Illustration de Grandville (1838-1840)

Iconographie modifier


Texte modifier

LE LION ET LE MOUCHERON

Illustration de François Chauveau (1613-1676)
Illustration de André Hellé (1946)

[Ésope[1]]

Illustration de Benjamin Rabier (1906)

" Va-t-en, chétif Insecte, excrément de la terre ! " (1)

           C'est en ces mots que le Lion

            Parlait un jour au Moucheron.

            L'autre lui déclara la guerre.

" Penses-tu, lui dit-il, que ton titre de roi

            Me fasse peur ni me soucie (2) ?

            Un bœuf est plus puissant que toi,

            Je le mène à ma fantaisie. "

           À peine il achevait ces mots

            Que lui-même il sonna la charge,

            Fut le trompette et le héros.

            Dans l'abord (3) il se met au large,

            Puis prend son temps (4), fond sur le cou

            Du Lion, qu'il rend presque fou.

Le Quadrupède écume, et son œil étincelle ;

Il rugit, on se cache, on tremble à l'environ ;

            Et cette alarme universelle

            Est l'ouvrage d'un Moucheron.

Un avorton de Mouche en cent lieux le harcèle :

Tantôt pique l'échine, et tantôt le museau,

            Tantôt entre au fond du naseau.

La rage alors se trouve à son faîte montée.

L'invisible ennemi triomphe, et rit de voir

Qu'il n'est griffe ni dent en la bête irritée

Qui de la mettre en sang ne fasse son devoir.

Le malheureux Lion se déchire lui-même,

Fait résonner sa queue à l'entour de ses flancs,

Bat l'air qui n'en peut mais (5) ; et sa fureur extrême

Le fatigue, l'abat : le voilà sur les dents (6).

L'Insecte du combat se retire avec gloire :

Comme il sonna la charge, il sonne la victoire,

Va partout l'annoncer, et rencontre en chemin

            L'embuscade d'une araignée :

            Il y rencontre aussi sa fin.

 

Quelle chose par là nous peut être enseignée ?

J'en vois deux, dont l'une est qu'entre nos ennemis

Les plus à craindre sont souvent les plus petits ;

L'autre, qu'aux grands périls tel a pu se soustraire,

            Qui périt pour la moindre affaire.


Vocabulaire

(1) La Fontaine s'inspire sans doute d'un vers de Malherbe composé contre le Maréchal d'Ancre (titre donné à Concini, dont Louis XIII commanditera l'assassinat) : " Va-t-en à la malheure, excrément de la terre " (Prophétie du Dieu de Seine)

(2) m'inquiète. A l'époque, le verbe n'était pas seulement pronominal comme maintenant

(3) dans la façon d'aborder, d'attaquer

(4) choisit son moment

(5) qui n'en peut plus, qui n'y peut rien. "Mais" vient du latin magis

(6) On dit que le grand travail a mis quelqu'un sur les dents pour dire qu'il est las et fatigué, qu'il n'en peut plus (dictionnaire de Furetière)

Notes et références modifier

  1. (fr + grk) Ésope (trad. Émile Chambry), « LE COUSIN ET LE LION », sur archive.org,

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