Louis Henri François de Marcé

général français

Louis de Marcé
Naissance
Chinon
Décès (à 62 ans)
Paris
Origine Français
Allégeance Drapeau du royaume de France Royaume de France (1745-1791)
Drapeau du Royaume de France Royaume de France (1791-1792)
Drapeau de la France République française (1792-1793)
Arme Infanterie
Grade Général de division
Années de service 17441794
Conflits Guerre de Sept Ans
Guerres de la Révolution française
Guerre de Vendée
Faits d'armes 1re Bataille de Chantonnay
Bataille de Pont-Charrault
Distinctions Chevalier de Saint-Louis

Louis Henri François de Marcé , né le à Chinon et mort le à Paris, est un général de division de la Révolution française.

Battu à la bataille de Pont-Charrault, au début de la guerre de Vendée, il est condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire et guillotiné.

Biographie modifier

Famille modifier

Louis de Marcé naît à Chinon le [1]. Le il épouse à Chinon Catherine Louise Le Roy de la Sauvagère.

Carrière sous l'Ancien Régime modifier

Il commence sa carrière comme lieutenant en second dans le régiment de Crillon devenu de la Tour du Pin à l'âge de 13 ans[1]. Il devient premier lieutenant en 1745, puis capitaine en 1746[1].

Il quitte le régiment et combat en Allemagne, de 1757 à 1762, pendant la guerre de Sept Ans[1]. Il est major du bataillon des prisonniers de guerre en 1759, puis major des grenadiers royaux d'Argentré-Chantilly[1]. Il en devient le lieutenant-colonel en 1766[1].

En 1770, il est employé par le lieutenant général Pierre Joseph de Bourcet à la reconnaissance des frontières du Dauphiné pour en dresser la carte topographique complète[1]. Il est élevé à cette occasion au grade de colonel[1]. Il passe ensuite aide maréchal-des-logis en 1786, puis maréchal de camp en 1788[1]. À la fin des années 1780, il est employé en Corse[1].

Il est titulaire de la croix de chevalier de Saint-Louis. Sur la feuille des états de service de Louis de Marcé, il est noté en 1788 : « Bon officier, instruit, a de l'esprit, a servi utilement et avec zèle »[1].

Carrière pendant la Révolution française modifier

En 1791, Marcé réside à Agen et s'occupe de l'organisation des premiers bataillons de volontaires[1]. Il sert pendant quinze mois dans la 20e division militaire[2]. En mars 1792, il prend le commandement de la 12e division militaire, basée à Nantes, en remplacement du Dumouriez[2]. Il s'occupe alors de l'embarquement des troupes pour Saint-Domingue[2]. Retenu par la goutte, il passe cependant un assez long séjour à Paris[2].

Le , Marcé est promu au grade de lieutenant général[2], renommé ensuite en « général de division ». À cette époque, il signe sous le nom de « Demarcé »[2].

En juin 1792, il demande au ministre de la guerre le commandement de la 20e division militaire, en remplacement du général de Verteuil, mais ce dernier obtient de ne pas être mis à la retraite et la ville de Nantes s'oppose à son départ[2]. En septembre, le conseil général de la Loire-Inférieure déclare alors qu'il tient à « rendre justice au civisme manifesté par M. De Marcé, [...] à son activité et à son zèle pour le bien public, et à ses talents militaires »[3]

Guerre de Vendée modifier

Le , au commencement de la guerre de Vendée, le général Marcé arrive à La Rochelle avec 900 hommes rassemblés à Rochefort[4]. Le lendemain, il sort de La Rochelle avec une colonne de 1 100 à 1 200 hommes et quatre canons et s'engage sur la route de Nantes[5],[6],[4]. Le 16 mars, il arrive à Sainte-Hermine[7]. Le 17, il reprend la ville de Chantonnay après un combat contre les insurgés[7]. Il reçoit ensuite des renforts et annonce son intention de poursuivre sa marche à travers le territoire insurgé et de se porter jusqu'à Nantes[8].

Le 19 mars, désormais à la tête de 2 300 hommes, Marcé se remet en mouvement[8]. Mais après avoir dépassé Saint-Vincent-Sterlanges, ses troupes sont surprises et mises en déroute par les forces vendéennes menées par Charles de Royrand[8]. Le lendemain, Marcé est destitué à Sainte-Hermine par les représentant en mission Niou, Trullard, Auguis et Carra[6],[9]. La fuite de l'armée de s'arrête qu'à La Rochelle, malgré de vaines tentatives des officiers pour les rallier[7]. Marcé est parmi les derniers à rentrer[7].

Condamnation à mort et exécution modifier

Après avoir été destitué, le général Marcé est arrêté le soir du et incarcéré à l'hôtel de ville de La Rochelle sur ordre des représentants en mission[10],[11],[12]. Il est remplacé par son second, le colonel Henri de Boulard, du 60e régiment d'infanterie[13],[11],[12],[14]. Le , Niou et Trullard rédigent leur rapport et rejettent la responsabilité de la défaite sur le général Marcé qu'ils accusent d'inaction[15],[11],[16]. Dans ce rapport, Niou affirme avoir conseillé à Marcé de quitter la position occupée par les républicains avant l'attaque des Vendéens[6],[7],[16]. Cependant la version des représentants est contredite par Boulard qui, dans son rapport rédigé le pour le ministre de la guerre[17] et dans sa déposition du devant les commissaires du district et de la commune de La Rochelle[18], affirme que le représentant en mission a cru en l'arrivée de renforts patriotes et a défendu d'ouvrir le feu[6],[7],[18],[Note 1]. Niou et Trullard se bornent à parler d'une défaite « bien étrange et bien cruelle »[15], cependant les représentants en mission Auguis et Carra vont plus loin[15]. Ayant assisté à la déroute des troupes alors qu'ils étaient à Sainte-Hermine[13],[20], ils accusent Marcé de « la plus lâche impéritie » ou de « la plus lâche trahison »[15],[21],[20]. Ils font également arrêter son fils aîné[6], âgé de 18 ans[22], en affirmant avoir de bonnes raisons de croire qu'ils ont tous deux trempé dans le complot du marquis de La Rouërie[23],[15],[20]. Le , Auguis et Carra font un rapprochement avec la trahison en Belgique du général Dumouriez en affirmant que la date de sa trahison à la bataille de Neerwinden est la même que celle de la défaite de Marcé[24],[25],[26] et en ajoutant que Dumouriez a servi comme maréchal de camp en Vendée de 1791 à 1792[21]. Ils concluent qu'il n'y a « plus de doute sur un complot général, Marcé et Dumouriez étaient d'accord »[21],[24],[26].

La nouvelle de la déroute du Pont-Charrault arrive à Paris le et provoque la stupeur des députés de la Convention nationale qui jugent incompréhensible la défaite de troupes de ligne face à des paysans et ne l'expliquent que par une trahison[27]. Le député Lecointe-Puyraveau évoque une conspiration anglaise[27]. Tallien déclare que Marcé ne peut être qu'« un imbécile ou un traître »[27]. Barère demande que Marcé soit jugé par une cour martiale à La Rochelle[27]. Mais Robespierre intervient et insiste pour que le général passe en jugement à Paris, devant le Tribunal révolutionnaire[28]. Le , la Société des amis de la liberté et de l'égalité de La Rochelle adresse également une dénonciation au tribunal révolutionnaire de Paris : « Le traître Marcé a sacrifié les troupes de la République. […] Deux mois ont passé depuis sa trahison et il respire encore ! Enfin le tribunal révolutionnaire doit le juger, et, pour l'intérêt de la Révolution, pour l'intérêt de la justice nationale, nous espérons que sa punition sera terrible[29]. »

Marcé est écroué en mai à la prison de l'Abbaye[26]. Il est traduit devant le tribunal révolutionnaire le et mis en jugement le [13]. Le général tente de se défendre en assurant que la défaite n'est que le résultat malheureux de la panique d'un bataillon[29]. Mais, dans son réquisitoire, Fouquier-Tinville accuse le général d'avoir « méchamment et à dessein, trahi les intérêts de la République […] en favorisant le progrès des armes des brigands sur son territoire »[13],[30]. Le tribunal porte quant à lui dans son jugement des griefs de trahison, de négligence et d'indignité en reprochant à l'officier de ne pas avoir ordonné « une retraite devenue nécessaire » et d'avoir abandonné « par une fuite lâche et criminelle, les troupes en désordre et l'artillerie exposée ; ce qui a fait perdre à la République de généreux défenseurs et a procuré aux révoltés des progrès monstrueux »[13]. Condamné à mort, Marcé est guillotiné le [25],[29].

La thèse du complot n'est pas retenue par les historiens[29],[31]. Ainsi, pour Jean-Clément Martin, « [a]ussi grave qu'il a pu être, l'échec de Marcé est simplement dû à la médiocrité des moyens militaires des révolutionnaires et à leur manque de volonté. Les troupes de ligne dont dispose la région qui s'étend de Nantes à La Rochelle sont peu nombreuses. L'obsession d'un débarquement anglais sur les côtes oblige le stationnement permanent de troupes dans les ports, ainsi que dans les îles, qui commandent la côte[31]. »

Postérité modifier

Une rue porte son nom dans l'ancienne commune de Saint-Philbert-du-Pont-Charrault, aujourd'hui rattachée à Chantonnay (Vendée).

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. « A quatre heures, l'arınée entière [...] se trouvant entre les deux ponts, formée en colonne, plusieurs personnes ayant examiné le local sur lequel elle était, le trouvèrent extrêmement dangereux ; car c'était un chemin dominé par des hauteurs, couvertes de bois fort épais, et borné à ses extrémités par deux petites rivières, dont il fallait garder les ponts. D'après ces considérations, et la journée étant trop avancée, le citoyen Niou, par ordre de la Commission à la suite de l'armée, proposa de la faire retirer au-dessus de Saint-Vincent, où le pays était plus plat, et plus découvert ; le général ne jugea pas à propos de se rendre à cet avis.

    Une heure après, c'est-à-dire à cinq heures, à peu près, on annonça l'ennemi, et, en effet, il parut, formant une grosse colonne qui remplissait le chemin, sur une hauteur de bois épais, située à environ deux lieues du second pont. La retraite faite avec ordre jusqu'à la plaine de Saint-Vincent, où on pouvait déployer toutes les forces de l'armée, diriger l'artillerie, fut vainement proposée par le citoyen Niou au général Marce.

    Les rebelles ne bougeant pas, quelqu'un crut que le rassemblement qu'on apercevait pouvait être les troupes nationales qu'on attendait de Nantes. Le général se décida, d'après cela, à envoyer vers eux un trompette et deur aides de camp, qui revinrent bientôt, ayant été poursuivis par plusieurs cavaliers. Ne pouvant plus douter que les hommes qui étaient sur la hauteur ne fussent l'armée rebelle, on leur tira quelques coups de canon, qui ne leur firent aucun mal, étant hors de portée; mais on s'aperçut que la colonne filait dans les bois, et que l'armée pouvait être enveloppée. On avait déjà engagé le général, puisqu'il s'obstinait à garder son mauvais poste, à faire au moins des dispositions de défense; il s'était borné à envoyer quelques tirailleurs dans les bois. Niou avertit encore le général de la nécessité de prendre des mesures, il n'en resta pas moins dans l'inaction, et ce ne fut que lorsque les cris des rebelles annoncèrent leur grande proximité, que le général s'occupa de faire passer de forts détachements dans deux clairières adjacentes, pour couvrir ses flancs. Ce mouvement, fait avec précipitation, occasionna du désordre, donna de l'inquiétude. Enfin, les rebelles attaquèrent par une fusillade à laquelle nos détachements ripostèrent[16]. »

    — Rapport des représentants en mission Niou et Trullard adressé à la Convention nationale, le .

    « Vers les deux heures après midi, la totalité de l'armée s'étant réunie, on avait marché vers le second pont; qu'arrivé sur ce lieu on avait commencé à le rétablir, ce qui pouvait employer, de l'aveu de l'ingénieur géographe, un terme de trois quarts d'heure; que le pont à peu près achevé, les ennemis ayant paru sur la crète de la montagne opposée et dans la grande route qui conduit à Saint-Fulgent, le général Marcé avait ordonné de suspendre les travaux, et avait fait tirer deux coups de canon du calibre de 8 sur la colonne ennemie, qui paraissait éloignée de la position de l'armée de 1,000 à 1,200 toises; que le commissaire Niou, étant survenu, avait désapprouvé cette hostilité, disant que, s'il y avait été, il n'aurait pas souffert que l'on eût tiré, étant très persuadé, d'après ce qu'il venait d'entendre dire par diverses personnes dans la colonne, que la troupe qui était en face de l'armée de la République n'était pas celle des brigands, mais que c'etait celle de la légion nantaise, qui venait se réunir à ses frères d'armes. Le déposant lui observa que, depuis deux jours qu'il était en présence des brigands, il reconnaissait parfaitement leurs vedettes; il lui demanda cependant s'il avait des avis que cette réunion dût s'opérer. Il lui répondit que non. Cependant ledit commissaire insista dans sa croyance, d'après celle où il était d'entendre prononcer à la troupe qui était le sujet de la discussion, le cri chéri de tout bon républicain. Dans cette incertitude, quelqu'un proposa d'envoyer un officier, accompagné d'un trompette, pour aller à la reconnaissance. Et il fut enjoint à l'aide de camp Dardillouze d'y aller très posément, afin d'annoncer de loin sa mission. Quant il fut parvenu à une centaine de pas de la troupe ennemie, il fit sonner une fanfare; à ce signal, deux hommes à cheval et quelques hommes à pied vinrent en courant sur eux. Craignant que ce ne fût pour les arrêter, ils trouvèrent prudent de se retirer à une plus grande distance; ce qu'ils exécutèrent fort lestement. Ils s'arrètèrent de nouveau, et voyant qu'ils n'étaient pas poursuivis, ils y retournèrent, espérant pouvoir obtenir un parlementaire; mais ils reçurent pour toute réponse un cri général de : Vive le roi! vive le clergé! Ils revinrent rendre compte de leur mission. Alors, on ne douta plus que ce ne fût l'armée des Brigands[18]. »

    — Déposition d'Henri de Boulard devant les commissaire du district et de la commune de La Rochelle, le .

    « A lui demandé pourquoi il n'avait pas pris les précautions nécessaires pour s'assurer de la présence de l'ennemi, ce qui a mis souvent l'armée dans le doute, et qui lui a fait croire qu'au lieu de l'ennemi ce pouvait être l'armée nantaise; ce doute a donné lieu à des lenteurs qui ont donné le temps à l'ennemi de s'embusquer dans les bois,

    A répondu que ce doute est précisément ce qui l'a le plus contrarié, étant lui général tres persuadé que c'était l'armée des rebelles qui occupait les hauteurs vis-à-vis du pont que l'on réparait, et où le général et le commissaire Niou n'arrivèrent qu'à trois heures après midi; que le colonel Boulard était du même avis, mais que le commissaire Niou et la majeure partie de l'armée étaient persuadés que ce pouvait être l'armée nantaise. On perdit beaucoup de temps à délibérer, à reconnaître la troupe qui était devant nous, et nous fûmes obligés de recevoir le combat dans la position où nous étions.

    A lui observé que, puisqu'il était assuré que c'était l'ennemi, il était inutile d'envoyer pour le reconnaître.

    A répondu que c'était son opinion à lui général et au colonel Boulard, mais que cette opinion était balancée et même repoussée par celle du Commissaire national, dont lui général devait respecter les avis, et même y déférer sans réplique[19]. »

    — Extrait de l'interrogatoire du général Marcé par le juge Antonin Roussillon, en présence de l'accusateur public Fouquier-Tinville, le .

Références modifier

  1. a b c d e f g h i j k et l Chassin, t. II, 1892, p. 340.
  2. a b c d e f et g Chassin, t. II, 1892, p. 363-364.
  3. Chassin, t. II, 1892, p. 365.
  4. a et b Chassin, t. III, 1892, p. 455-456.
  5. Valin 2010, p. 177-178.
  6. a b c d et e Gérard 2013, p. 33-34.
  7. a b c d e et f Gabory 2009, p. 118-120.
  8. a b et c Martin 2014, p. 41.
  9. Chassin, t. III, 1892, p. 473.
  10. Gérard 2013, p. 20-21.
  11. a b et c Gras 1994, p. 27.
  12. a et b Dupuy 2005, p. 105.
  13. a b c d et e Gabory 2009, p. 121.
  14. Savary, t. I, 1824, p. 115-116.
  15. a b c d et e Gérard 1999, p. 99.
  16. a b et c Chassin, t. III, 1892, p. 475.
  17. Savary, t. I, 1824, p. 116-119.
  18. a b et c Chassin, t. III, 1892, p. 476-479.
  19. Chassin, t. III, 1892, p. 497-498.
  20. a b et c Chassin, t. III, 1892, p. 479-480.
  21. a b et c Martin 2014, p. 44-45.
  22. Gérard 2013, p. 32.
  23. Martin 2014, p. 43-44.
  24. a et b Gérard 2013, p. 35.
  25. a et b Gérard 1999, p. 100.
  26. a b et c Chassin, t. III, 1892, p. 491-492.
  27. a b c et d Martin 2014, p. 42.
  28. Martin 2014, p. 43.
  29. a b c et d Gérard 1993, p. 117-118.
  30. Chassin, t. III, 1892, p. 502.
  31. a et b Martin 2014, p. 46.

Bibliographie modifier