Maboula Soumahoro

angliciste, universitaire et militante afro-féministe française

Maboula Soumahoro, née le à Paris, est une angliciste franco-ivoirienne. Maîtresse de conférences en civilisation américaine à l'université de Tours, elle inscrit son champ de recherche dans le cadre des « French diaspora studies ». Elle travaille notamment sur les diasporas africaines aux États-Unis et est engagée dans les causes antiraciste et afroféministe.

Biographie modifier

Origine familiale et jeunesse modifier

Maboula Soumahoro naît dans une famille ivoirienne[1]. Ses parents sont arrivés de Côte d’Ivoire à la fin des années 1960 pour étudier et travailler en France[2].

Elle grandit dans un quartier populaire du Kremlin-Bicêtre[3], dans une fratrie de six frères et sœurs.

Études modifier

Elle fait des études d'anglais, d'abord à l'université de Créteil, où elle passe quatre ans[4]. En 1999, elle y obtient une maîtrise, son mémoire s'intitulant The Creation of the State of Liberia[5].

Elle part ensuite à l'université de Jussieu, mais fait aussi plusieurs séjours aux États-Unis, où elle étudie à l'université Columbia à New York[3] ; elle y est d'ailleurs recrutée comme chercheuse invitée (2002, 2003) et comme enseignante (2008-2009[6]).

Après un DEA elle s'inscrit en doctorat à l'université François-Rabelais de Tours, sous la direction de la professeure Claudine Raynaud. En 2008, elle soutient sa thèse[7] intitulée La couleur de Dieu ? Regards croisés sur Nation of Islam et le Rastafarisme, 1930-1950[8].

Vers cette période[9] elle est également reçue au CAPES d'anglais[10] avant d'être nommée maîtresse de conférences à l'université de Tours[11].

Recherches modifier

En 2013, elle est nommée par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault membre du Comité national pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage[12].

En 2020, elle publie Le Triangle et l’Hexagone, dans lequel elle s'intéresse à « l'identité noire en France »[13]. L'ouvrage qui se situe entre l'essai et l'autobiographie, est le récit d’une chercheuse qui déclare vouloir remettre en question « la distance dite critique et l’illusion de l’objectivité scientifique », faisant d’elle-même son propre objet d’étude[14].

Séverine Kodjo-Grandvaux du Monde, tout en reconnaissant que l'ouvrage « est riche d’enseignements et amène à réflexion sur le processus de racialisation », dit « regretter parfois une argumentation fragile, des formules provocatrices ou un manque d’explicitations pour qui ne connaît pas dans le détail les événements évoqués », par exemple lorsque Maboula Soumahoro « affirme sans autre explication qu’en France, pour les hommes musulmans "qui portent trop grande atteinte à la sûreté de l’État, la peine de mort est presque automatiquement prononcée en dehors de tout tribunal" »[14].

Géraldine Mosna-Savoye se demande quant à elle : « Maboula Soumahoro a-t-elle voulu être juste du côté de l'anecdote ? Ça, c'est un peu la limite. Non, on voit bien qu'il y a quelque chose qui, en creux, se dessine très fort : c'est le rapport à l'autre »[15].

Pour Joseph Confavreux, « c'est un livre sérieux qui a même des moments assez drôles (...), qui ne s'interdit pas l'ironie et la légèreté. On est sur des questions très personnelles, très dures parfois, et des questions très politiques. Mais il y a un ton qui parfois tombe très juste »[15].

Engagements et militantisme modifier

En 2016, elle soutient la tenue d'un événement nommé « camp d'été décolonial », auquel elle-même assiste. Les détracteurs affirment que le camp était « interdit aux Blancs », ce que Maboula Soumahoro réfute lors d'un débat télévisé sur LCI, arguant que des « femmes blanches voilées » y ont participé[16].

En 2017, elle fait une brève apparition dans le film afroféministe Ouvrir la voix réalisé par Amandine Gay[17].

Se définissant elle-même comme « afropéenne »[18], elle défend l'usage de ce terme qui permet de révéler « une réalité aujourd’hui souvent invisibilisée »[19].

Black History Month modifier

En 2012, elle co-fonde l'association Black History Month[20] — dont elle est présidente —, qui organise les Journées Africana dont le but est de promouvoir « la connaissance et la passion pour les mondes noirs ». Avec l’association, elle défend la nécessité de valoriser l'histoire des Noirs de France[20] et de « mettre la République française face à la réalité de son histoire »[21]. Selon elle, un festival consacré à «l'histoire noire» permet de faire exister « une offre culturelle qui propose de faire découvrir des sujets peu connus[22]. » Le festival est reproduit chaque année jusqu'en 2016[23].

Publications modifier

Participations modifier

Notes et références modifier

  1. [entretien] Sonya Faure et Balla Fofana, « Maboula Soumahoro : “C’est aux Etats-Unis que je suis enfin devenue noire” », Libération,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  2. upian, « binge.audio », sur binge.audio (consulté le ).
  3. a et b « Maboula Soumahoro : un melting-pot à elle toute seule », La Nouvelle République,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  4. Cf son interview par Warda Mohamed « La question raciale structure tout », sur le site EHKO : « Je suis allée à Créteil assez déçue, en me disant que c’était dégueulasse, loin, une fac de banlieue alors que je voulais une fac prestigieuse… Finalement, je m’y suis fait et les facs de banlieue sont souvent plus ouvertes intellectuellement, moins classiques que les parisiennes. J’y ai passé 4 ans. »
  5. Cf. notice SUDOC
  6. Cf. interview Africultures.
  7. Il s'agit d'une thèse pour « obtenir le grade de : Docteur de l'université François-Rabelais », comme indiqué sur la première page
  8. Maboula Soumahoro, La couleur de Dieu ? : Regards croisés sur la Nation d'Islam et le rastafarisme 1930-1950, Tours, Université François Rabelais, , 445 p. (lire en ligne [PDF]).
  9. Cf interview EHKO : « À la fin de ma thèse, j’ai passé le CAPES, sachant que d’un point de vue légal, je n’avais pas besoin d’être titulaire du CAPES ou de l’Agrégation pour devenir maîtresse de conférences, mais pour être recrutée, il vaut mieux être au moins certifiée, agrégée. »
  10. [entretien] Pénélope Dechaufour, « Trois questions de Pénélope Dechaufour, à Maboula Soumahoro », Africultures, vol. 99-100, nos 3-4,‎ , p. 270-275 (lire en ligne, consulté le ).
  11. Université de Tours, « Laboratoire ICD - Liste des membres », sur icd.univ-tours.fr.
  12. « Version électronique authentifiée publiée au JO n° 0108 du 11/05/2013 », sur legifrance.gouv.fr (consulté le ).
  13. Olivia Gesbert, « Maboula Soumahoro, l’identité augmentée ? », sur franceculture.fr, (consulté le ).
  14. a et b Séverine Kodjo-Grandvaux, Livre : Maboula Soumahoro explore la « charge raciale », lemonde.fr, 2 février 2020
  15. a et b « La France telle qu’elle est de Laurent Mucchielli /Le Triangle et l’Hexagone de Maboula Soumahoro », sur franceculture.fr, (consulté le ).
  16. Marie-Estelle Pech, « Quand un antiracisme dévoyé s'immisce dans l'éducation », Le Figaro, samedi 25/dimanche 26 novembre 2017, page 11.
  17. « Amandine Gay, portrait d’une afro-féministe qui ne veut plus se taire », Les Inrocks,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. « Maboula Soumahoro, angliciste, civilisationniste et spécialiste des diasporas africaines », sur franceinter.fr (consulté le ).
  19. « Afropéen [adj.] : qualifie le fait d'être noir et né en Europe », Libération.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  20. a et b Samba Doucouré, « Le Black History Month fait sa première symbolique en France », sur streetpress.com, (consulté le ).
  21. « Pourquoi n’y a-t-il pas de "Black History Month" en France ? », Slate.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  22. « Du Black History Month aux Journées Africana avec Maboula Soumahoro - Totem », Totem,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  23. « Programme 2016 du Black History Month », sur bhm-africana.org (consulté le ).

Liens externes modifier