Magnétar
Un magnétar, une étoile magnétique, ou une magnétoile selon la dénomination officielle en France[1], est une étoile à neutrons dont le champ magnétique est extrêmement intense et qui émet un rayonnement électromagnétique de haute énergie (rayons X et rayons gamma).
Histoire
modifierL'existence des magnétars est postulée en 1992 par les astronomes Robert Duncan (en) et Christopher Thompson (de), qui établissent un lien entre la théorie des champs magnétiques intenses et les observations des sources gamma[2]. Dans la décennie qui suit, elle est acceptée comme explication plausible des sursauteurs gamma mous et des pulsars X anormaux.
L'explosion du magnétar SGR 1806-20 est enregistrée en 2004. L'énergie libérée a affecté l'atmosphère supérieure de la Terre, alors que celle-ci se trouvait à 50 000 années-lumière de l'explosion (ce qui veut dire que l'explosion a eu lieu il y a environ 50 000 ans).
En 2023, l'une des deux étoiles du système binaire HD 45166 est identifiée comme une étoile Wolf-Rayet ayant une masse de 2 masses solaires et un champ magnétique de 43 kG : selon les modèles d'évolution stellaire elle explosera en supernova et laissera comme résidu un magnétar. Cette étoile Wolf-Rayet fortement magnétique résulte plausiblement de la fusion de deux étoiles à hélium de masse inférieure[3].
Formation
modifierLorsqu'une supernova devient une étoile à neutrons, l'intensité de son champ magnétique croît. Duncan et Thompson calculèrent que celui-ci, normalement déjà de 108 teslas, pouvait dépasser dans certaines conditions 1011 teslas (1015 gauss)[4]. Une telle étoile magnétique est alors nommée magnétar.
En 2001, il est estimé qu'une supernova sur dix donne naissance à un magnétar[2] plutôt qu'à une autre étoile à neutrons ou à un pulsar. Les prérequis sont une rotation rapide et un champ magnétique intense avant l'explosion. Ce champ magnétique serait créé par un générateur électrique utilisant la convection de matière nucléaire durant les dix premières secondes environ de la vie d'une étoile à neutrons. Si cette dernière tourne suffisamment rapidement, les courants de convection deviennent globaux et transfèrent leur énergie au champ magnétique. Lorsque la rotation est trop lente, les courants de convection ne se forment que dans des régions locales.
Au centre du magnétar la pression est si forte que les baryons Delta pourraient constituer jusqu'à 10 % du cœur[5],[6].
Genèse des sursauteurs gamma mous
modifierDes tensions provoquant des tremblements d'étoile se produisent parfois dans les couches externes des magnétars[2],[7], constituées de plasma d'éléments lourds (principalement de fer). Ces vibrations très énergétiques produisent des bouffées de rayons X et gamma. Une telle étoile est nommée soft gamma repeater (SGR), soit sursauteur gamma mou[2].
Illustration de leur intensité magnétique
modifierLes magnétars ont un champ magnétique bien supérieur à 10 gigateslas. Ce champ magnétique serait suffisant pour démagnétiser (et donc rendre inutilisables) toutes les cartes de paiement à bande magnétique de la Terre depuis la moitié de la distance qui la sépare de la Lune, et serait fatal à une distance de 1 000 km[8].
En comparaison, le champ magnétique terrestre est d'environ 50 microteslas.[réf. souhaitée]
Exemples
modifierCulture populaire
modifier- Dans la deuxième saison de la série télévisée Another Life, un magnétar révèle la faiblesse de la race des Achaïas, et permet à l'humanité de remporter une importante victoire contre eux.
Notes et références
modifier- « magnétoile », sur FranceTerme (consulté le ), Journal officiel de la République française du .
- Kevin Hurley, « Les magnétoiles », sur Pour la science, (consulté le ).
- (en) Tomer Shenar, Gregg A. Wade, Pablo Marchant, Stefano Bagnulo, Julia Bodensteiner et al., « A massive helium star with a sufficiently strong magnetic field to form a magnetar », Science, vol. 381, no 6659, , p. 761-765 (DOI 10.1126/science.ade3293).
- « Magnétar : qu'est-ce que c'est ? », sur futura-sciences.
- S. B., « Des particules exotiques au cœur des magnétars », Pour la science, no 541, , p. 14.
- (en) K. D. Marquez, M. R. Pelicer, S. Ghosh, J. Peterson, D. Chatterjee et al., « Exploring the effects of Δ baryons in magnetars », Physical Review C, vol. 106, , article no 035801 (DOI 10.1103/PhysRevC.106.035801).
- Chryssa Kouveliotou, Robert Duncan et Christopher Thompson, « Les Magnétars », sur Pour La Science, (consulté le ).
- (en) « Cosmic Explosion Among the Brightest in Recorded History », sur NASA (consulté le ).
- Roberto Taverna, Roberto Turolla, Fabio Muleri, Jeremy Heyl, Silvia Zane, Luca Baldini, Denis González-Caniulef, Matteo Bachetti, John Rankin, Ilaria Caiazzo, Niccolò Di Lalla, Victor Doroshenko, Manel Errando, Ephraim Gau, Demet Kırmızıbayrak, Henric Krawczynski, Michela Negro, Mason Ng, Nicola Omodei, Andrea Possenti, Toru Tamagawa, Keisuke Uchiyama, Martin C. Weisskopf, Ivan Agudo, Lucio A. Antonelli, Wayne H. Baumgartner, Ronaldo Bellazzini, Stefano Bianchi, Stephen D. Bongiorno, Raffaella Bonino, Alessandro Brez, Niccolò Bucciantini, Fiamma Capitanio, Simone Castellano, Elisabetta Cavazzuti, Stefano Ciprini, Enrico Costa, Alessandra De Rosa, Ettore Del Monte, Laura Di Gesu, Alessandro Di Marco, Immacolata Donnarumma, Michal Dovčiak, Steven R. Ehlert, Teruaki Enoto, Yuri Evangelista, Sergio Fabiani, Riccardo Ferrazzoli, Javier A. Garcia, Shuichi Gunji, Kiyoshi Hayashida, Wataru Iwakiri, Svetlana G. Jorstad, Vladimir Karas, Takao Kitaguchi, Jeffery J. Kolodziejczak, Fabio La Monaca, Luca Latronico, Ioannis Liodakis, Simone Maldera, Alberto Manfreda, Frédéric Marin, Andrea Marinucci, Alan P. Marscher, Herman L. Marshall, Giorgio Matt, Ikuyuki Mitsuishi, Tsunefumi Mizuno, Stephen C.-Y. Ng, Stephen L. O’Dell, Chiara Oppedisano, Alessandro Papitto, George G. Pavlov, Abel L. Peirson, Matteo Perri, Melissa Pesce-Rollins, Maura Pilia, Juri Poutanen, Simonetta Puccetti, Brian D. Ramsey, Ajay Ratheesh, Roger W. Romani, Carmelo Sgrò, Patrick Slane, Paolo Soffitta, Gloria Spandre, Fabrizio Tavecchio, Yuzuru Tawara, Allyn F. Tennant, Nicholas E. Thomas, Francesco Tombesi, Alessio Trois, Sergey S. Tsygankov, Jacco Vink, Kinwah Wu, Fei Xie https://www.science.org/doi/10.1126/science.add0080, https://www.science.org/ (par Leah Crane https://www.newscientist.com/article/2345521-a-weird-dead-star-may-have-a-solid-like-surface-made-of-iron-crystals/, https://www.newscientist.com/ (New Scientist))
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier- (en) Robert C. Duncan, Université du Texas à Austin : 'Magnetars', Soft Gamma Repeaters & Very Strong Magnetic Fields
- (en) NASA Astrophysics Data System (ADS): Duncan & Thompson, Ap.J. 392, L9) 1992
- (en) NASA ADS, 1999: Discovery of a Magnetar Associated with the Soft Gamma Repeater SGR 1900+14
- (en) Chryssa Kouveliotou, Robert Duncan, and Christopher Thompson, « Magnetars, » Scientific American, Feb. 2003, pp. 34-41[PDF]
- (en) Robert C. Duncan and Christopher Thompson, « Formation of Very Strongly Magnetized Neutron Stars: Implications for Gamma-Ray Bursts, » Astronomical Journal, vol. 392, no. 1 (June 10, 1992), pp. L9?L13.
- Loïc Villain, « Magnétar : un tsunami électromagnétique frappe le système solaire », Futura-sciences, .
- « Magnétar : l’aimant dans le placard », La Science, CQFD, France Culture, 18 septembre 2023.