Maison des esprits
La maison des esprits (thaï : ศาลพระภูมิ, litt. Pavillon du maître des lieux) est la manifestation d'un culte animiste très vivace en Thaïlande[1] et dans les pays bouddhistes environnants (Birmanie, Vietnam, Cambodge, Laos et aussi Malaisie, Indonésie et Philippines).
Origine de la croyance
modifierLe culte des esprits remonte aux sources de l'histoire des peuples indochinois. En Thaïlande, les pra phum (thaï : พระภูมิ ou พระภูมิเจ้าที่, langue formelle) ou chao thi (thaÏ : เจ้าที่, langue populaire) sont des génies, gardiens du sol, des champs, des arbres, des maisons, etc. Protecteurs, ils sont distincts des phi (thaï : ผี), esprits plus ou moins malveillants et voyageurs, sortes de fantômes. Les chao thi (เจ้าที่« seigneurs du lieu, maître des lieux ») sont justement chargés de tenir à distance les phi qui sans cela amèneraient malheurs et désolation dans leur environnement[2].
Ainsi, pour s'assurer de la protection du chao thi les habitants d'un lieu construisent une petite résidence, contenant des figurines représentant les génies, devant leur maison, leur magasin, ou à la campagne devant leur rizière, afin de fixer l'esprit du lieu qui les protègera. La petite résidence placée sur un pilier est une maison en miniature. Le culte consiste à offrir, avant 11h, des fleurs, de l'encens et de la nourriture qui doivent rendre le chao thi collaborateur et reconnaissant.
Cette pratique animiste n'entre pas en conflit avec le bouddhisme, celui-ci n'ayant pu faire disparaître cette croyance, l'a récupérée en plaçant les chao thi à un niveau intermédiaire entre les hommes et les dieux hindous intimement mêlés au bouddhisme syncrétique theravâda et en les considérant comme des serviteurs de Bouddha.
La Maison des esprits
modifierEn Thaïlande et au Laos, la présence d'une maison des esprits (sanphraphum) est pratiquement obligatoire pour chaque construction privée ou publique.
Elle est d'une richesse proportionnelle à la demeure qu'elle protège, pour que le chao thi ne soit pas jaloux de l'humain. Dans le cas des bâtiments importants (banques, immeubles), elle est associée à un petit temple dédié à Brahma aux quatre visages. La maison des esprits doit être placée à hauteur du regard, à l'extérieur du bâtiment, près de la porte principale, orientée au Nord ou faute de mieux au Sud. L'ombre du bâtiment ne doit pas la toucher. On en trouve également près des grands arbres, des terrains de football... Dans ces conditions, et avec une attention régulière en offrandes et petites prières quotidiennes, le chao thi repoussera les phi et même les voleurs.
Quand la maison est trop vieille, ou qu'une modification urbanistique modifie les propriétés, les maisons ne doivent pas être détruites, elles sont regroupées dans des lieux isolés et abandonnées là pour ne pas laisser le génie sans demeure.
Autrefois construite artisanalement en bois à l'image de la maison thaïe traditionnelle, elle est maintenant souvent produite en série, fabriquée en ciment et prend la forme d'une reproduction de temple[3].
Galerie
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Yangon, Birmanie
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Bangkok, Thaïlande
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Sukhothaï, Thaïlande
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Près de Bang Dung, Thaïlande
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Ko Chang, Thaïlande
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Savannaket, Laos
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Palais royal, Phnom Penh, Cambodge
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Philippines
Notes et références
modifier- Raymond Vergé, « Le saviez-vous ? Saan Phra Phoum ou la maison des esprits », Gavroche Thaïlande, no 160, , p. 30 (lire en ligne [PDF])
- Marie Laureillard et Vincent Durand-Dastès, Fantômes dans l'extrême-orient d'hier et d'aujourd'hui - Tome 2, Presse de l'Inalco, , 453 p. (ISBN 978-2-85831-250-4, lire en ligne), Amour, vengeance, mort : les fantômes dans la littérature et le cinéma contemporains thaïlandais (par Theeraphong Inthano) / Love, revenge, death: ghosts in Thai contemporary literature and cinema / ความรัก ความแค้น ความตาย : ผีในวรรณกรรมและภาพยนตร์ไทยร่วมสมัย note 3 et paragraphe 1
- Gabriel Bertrand et Siriwat Khamsap, « Fabriquant de "maisons des esprits", un métier pas comme les autres », Gavroche Thaïlande, no 267, , p. 14 et 15 (lire en ligne [PDF])
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Pornpimol Senawong, "Les Liens qui Unissent les Thaïs", Editions Gope, 2010 (ISBN 978-2-95355-381-9)
Articles connexes
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