Mary Wigman

danseuse, chorégraphe et pédagogue allemande

Mary Wigman est une danseuse allemande, née Marie Wiegmann à Hanovre le et morte à Berlin le .

Mary Wigman
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Elisabeth Wiegmann (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Vue de la sépulture.

Biographie

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Ses parents sont fabricants de vélos et l'encouragent à découvrir les arts qui l'attirent. Elle étudie tout d'abord à Hellerau, avec Émile Jaques-Dalcroze mais ressent sa méthode comme un carcan qui étouffe l'inspiration. Elle part alors travailler à l'école de l'art du mouvement d'Ascona, auprès de Rudolf Laban et du groupe de la Monte Verità, jusqu'en 1919[1].

Mary Wigman, à gauche (Berlin, 1959).

Puis elle se lance dans une carrière de danseuse, chorégraphe et pédagogue. En 1919, elle crée des solos, tels Danses extatiques, Danses hongroises, ou, quelques mois plus tard, Danses de la nuit. En 1920, elle ouvre à Dresde une école pour enseigner sa technique de danse libre, et y fonde une compagnie. Parmi ses premiers élèves figurent Hanya Holm, Harald Kreutzberg, Hanna Berger, Gret Palucca ou encore Dhimah et, plus tard, Pola Nireńska. Les tournées de sa compagnie sont des succès, notamment aux États-Unis. Hanya Holm quitte d'ailleurs Dresde pour créer à son tour une école à New York en 1931[1].

Rudolf Laban et Mary Wigman se retrouvent, sollicités l'un et l'autre par Joseph Goebbels, à participer à l'organisation des Jeux olympiques d'été de 1936, à Berlin[2],[3]. Rudolf Laban construit une chorégraphie avec une masse de mille exécutants venus de trente villes. Mary Wigman choisit de présenter sa Danse de mort. L’œuvre ne plaît pas au ministre Goebbels. Son expressionnisme et son exaltation de l'individu paraissent suspects aux dignitaires nazis. Son école à Dresde est mise sous tutelle. Mais elle reste en Allemagne, s'installe à Leipzig[4]. Elle y reprend l'enseignement et continue à inscrire son art dans un expressionnisme violent[1]. Sa proximité avec le régime nazi est régulièrement pointée[5],[6].

En 1950, elle s'installe à Berlin-Ouest, y enseigne et continue à créer, apparaissant quelquefois sur scène. Elle se retire en 1968, et meurt cinq ans plus tard[1]. Elle est inhumée au cimetière de l'Est d'Essen.

Théorie et techniques

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En Allemagne, où la danse n'est pas enclavée, dans l'entre-deux-guerres, par une forte tradition académique, le corps condense toutes les formes produisant de la musique et la musique productrice de gestes. Mary Wigman est l'élève du chorégraphe Rudolf Laban en 1914, lors des séminaires de Monte Verità, une communauté avant-gardiste proche des dadaïstes. La technique qu'elle se forge est basée sur la respiration, le travail du torse et du bassin, l'alternance de la tension et du relâchement. Elle est spécialiste de solos, mais pratique aussi les créations collectives, et l'improvisation collective. Elle est remarquable par l'utilisation de l'espace et par le rythme qu'elle imprime à ses chorégraphies[4].

Elle réduit pourtant l'orchestre à la percussion, ou danse sans musique, cherchant avant tout l'expression tragique du sentiment. « L'œuvre doit être le résultat d'un processus organique ». Ses chorégraphies ne seront accompagnées de musique, autre que des percussions, qu'après la guerre (Gluck et Carl Orff, le compositeur se disant particulièrement impressionné[7] par le caractère "élémentaire" et très musical, par le physique, de sa danse).

La danse de la sorcière

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La danse de la sorcière (Hexentanz) est un solo de danse réalisé par Mary Wigman en 1914, et est une de ses œuvres les plus connues. Une danse rompant la tradition classique avec des gestes brusques, un rapport au sol, un corps courbé et des bras tendus. Avec l'accompagnement de percussions, fond sonore que Mary Wigman préférait à la musique, elle apparaît comme possédée. Ce solo est le premier composé et interprété par une femme. Elle veut y montrer son « soi » intérieur. Elle veut ressentir sa danse de l'intérieur et non pas comme une succession de mouvements[8].

Filmographies

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Arte a diffusé un documentaire sur Mary Wigman le .

Bibliographie

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  • Sarah Nouveau Le corps wigmanien d'après Adieu et Merci (1942), Univers de la danse, Éditions L'Harmattan, 2011, (ISBN 9782296462069) 158 pages, Extraits
  • Judith Mackrell, « Mary Wigman: a dance pioneer with an awkward past », sur the Guardian, (consulté le )
  • Mary Wigman, Le Langage de la danse, trad. française de Jacqueline Robinson, Paris, Chiron, 1990.

Notes et références

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  1. a b c et d Jacqueline Robinson, « Wigman Mary », dans Philippe Le Moal (dir.), Dictionnaire de la danse, Éditions Larousse, , p. 455-456
  2. Dominique Frétard, « La danse contemporaine est obsédée par la guerre et la barbarie », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  3. (en) Susan Manning, Ecstasy and the Demon: Feminism and Nationalism in the Dances of Mary Wigman, University of California Press,
  4. a et b Marcelle Michel, « Mary Wigman, Kurt Jooss, Pina Bausch : une danse naturelle et organique », Le Monde,‎
  5. Gaby Levin : "The german dancer who stepped too close to the nazis", 8 mars 2016 [1]
  6. Judith Mackrell, "Mary Wigman: a dance pioneer with an awkward past ... fallen in step with the Nazis", 22 mai 2013, The Guardian : "Wigman was far more complicit with the Third Reich than her fellow choreographer Kurt Jooss, who left Germany in 1933 (her mentor Rudolf Laban also cut links, but not until 1938). While her early choreography was not to official taste, she was sufficiently in step with the early Volk-inspired philosophy of the Reich to receive a commission to choreograph a mass Olympic Youth dance for the 1936 Berlin Olympic Games. And while she was privately sympathetic to Jewish students in her Dresden school, she didn't rebel against orders to remove Jewish dancers from her company. However the 1937 edict by Goebbels that dance "must be cheerful and show beautiful female bodies and have nothing to do with philosophy" put a halt on her career. While she seems to have been personally protected by her relationship with a prominent arms manufacturer, Wigman's company was closed, and when her protector died in 1942, so was her school." [2]
  7. Lilo Gersdorf, Carl Orff in Selbstzeugnissen und Bilddokumenten, Rowohlt, coll. « Rowohlts Monographien », (ISBN 978-3-499-50293-4)
  8. « Le premier solo : Mary Wigman »

Liens externes

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