Monorhaphis chuni

espèce d’éponges

Monorhaphis chuni est une espèce d'éponges siliceuses de la famille des Monorhaphididae.

Monorhaphis chuni
Description de cette image, également commentée ci-après
Spicule de Monorhaphis chuni.
Classification
Règne Animalia
Sous-règne Radiata
Embranchement Porifera
Classe Hexactinellida
Sous-classe Amphidiscophora
Ordre Amphidiscosida
Famille Monorhaphididae
Genre Monorhaphis

Espèce

Monorhaphis chuni
Schulze, 1904[1]

Synonymes

  • Hyalonema fruticosum Schulze, 1893[2]
  • Monorhaphis dives Schulze, 1904[2]
  • Monorhaphis intermedia Li Jinhe, 1987[2]

Description

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Monorhaphis chuni est une éponge siliceuse marine. D'une longueur pouvant atteindre 3 m, ce métazoaire sessile possède un corps spongieux de forme cylindrique (jusqu'à 12 cm de diamètre), développé autour d'un spicule (tige siliceuse d'environ 1 cm de section) qui le prolonge et permet une fixation permanente sur le sol marin[3],[4].

Découverte

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Dans les années 1870, l'expédition du H.M.S. Challenger, mission d'études océanographiques parcourant tous les océans terrestres, collecte sur les fonds marins divers spécimens d'éponges siliceuses, dont la description est effectuée, plus tard, par Franz Eilhard Schulze, zoologiste et anatomiste allemand, dans l'un des volumes composant le compte rendu scientifique de l'expédition[4]. Au tournant du siècle (1898 - 1899), l'expédition Valdivia (en), conduite par le biologiste allemand Carl Chun, permet d'élargir la connaissance des éponges de mer grâce aux nouvelles espèces qu'elle rapporte. Parmi celles-ci, Schulze décrit, en 1904, Monorhaphis chuni — l'épithète spécifique du nom de l'espèce : « chuni », rend hommage à Carl Chun, à l'origine de la découverte de l'holotype, quelques années plus tôt, à 1 644 m de profondeur, au large de la Somalie — et Monorhaphis dives, deux espèces formant le genre Monorhaphis[4]. En 1987, le professeur Jinhe Li de l'institut d'océanologie de l'Académie chinoise des sciences ajoute au genre l'espèce Monorhaphis intermedia[5], découverte en 1981, au large de l'île japonaise d'Okinawa. Au début des années 2000, les trois espèces sont reconnues comme une seule et même espèce : Monorhaphis chuni[4],[5].

Habitat

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Monorhaphis chuni prospère sur les fonds marins, en zone bathyale, de 516 à 1 920 m de profondeur[4].

Distribution

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Monorhaphis chuni se rencontre dans l'Ouest de l'océan Pacifique (Okinawa, Philippines, Indonésie, Nouvelle-Calédonie) et la partie occidentale de l'océan Indien (côte est africaine, sud-est de la péninsule arabique et Sud de l'Inde)[6].

Utilisation

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Le spicule géant de Monorhaphis chuni est une longue fibre de verre — verre naturel appelé « biosilice » — élaborée par biominéralisation de composés du silicium, puisés dans l'eau de mer. Sa structure composite, solide et flexible, et sa synthèse enzymatique à température ambiante intéressent la recherche biotechnologique[7],[3].

En 1986, un spécimen de Monorhaphis chuni, de 2 m de long et pesant 10 kg, est ramassé, à 1 110 m de profondeur, dans l'Est de la mer de Chine méridionale[8],[3]. Des scientifiques ont évalué l'âge de l'animal à environ 11 000 ans[9],[3],[10]. En 2017, l'âge de nouveaux spécimens, collectés en mer de Chine (entre 1 110 et 2 100 m), a été estimé à 17 000 ans, grâce à l'analyse chimique de leur spicule géant, long de plusieurs mètres[8]. Du fait de cette longévité plus que dix fois millénaire, des scientifiques utilisent le spicule géant de Monorhaphis chuni comme « archive paléo-environnementale », couvrant la période géologique de l'Holocène, dont l'ouverture remonte à 11 700 ans. L'étude chimique d'un spicule de Monorhaphis chuni leur permet de dater, sur plusieurs millénaires, les modifications de température et de composition chimique de l’eau de mer, et d'apprécier les changements climatiques[8],[3]. La durée de vie plurimillénaire de cette éponge de verre marine résulte d'une prolifération cellulaire continue de ses cellules souches totipotentes[3].

Références

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  1. Integrated Taxonomic Information System (ITIS), www.itis.gov, CC0 https://doi.org/10.5066/F7KH0KBK, consulté le 20 avril 2019
  2. a b et c World Register of Marine Species, consulté le 20 avril 2019
  3. a b c d e et f (en) Stéphane La Barre (dir.) et Stephen S Bates (dir.), Blue biotechnology : production and use of marine molecules, vol. 1, Weinheim, Wiley-VCH, , 484 p. (ISBN 978-3-527-34138-2, lire en ligne), chap. 27 (« Marine Biominerals with a Biotechnological Future (box 21.1 Monoraphis chuni (Schulze, 1904): making a very long story short) »).
  4. a b c d et e (en) Kwang W. Jeon (dir.), Xiaohong Wang, Heinz C. Schröder et Werner E. G. Müller, The International Review of Cell and Molecular Biology [« Revue internationale de biologie cellulaire et moléculaire »], vol. 273, Academic Press, , 368 p. (ISBN 978-0-12-374804-1 et 0123748046, OCLC 674688211), « Giant siliceous spicules from the Deep-Sea (glass sponge Monorhaphis chuni) », p. 73-75.
  5. a et b (en) Werner E. G. Müller, Alexandra Boreiko, Ute Schlossmacher, Xiaohong Wang, Carsten Eckert, Klaus Kropf, Jinhe Li et Heinz C. Schröder, « Identification of a silicatein(-related) protease in the giant spicules of the deep-sea hexactinellid Monorhaphis chuni », The Journal of Experimental Biology, The Company of Biologists (d), vol. 211, no Pt 3,‎ , p. 300-309 (ISSN 0022-0949 et 1477-9145, OCLC 1754580, PMID 18203984, DOI 10.1242/JEB.008193, lire en ligne).Voir et modifier les données sur Wikidata.
  6. (en) John N. A. Hooper (dir.), Rob W. M. Van Soest (dir.), Konstantin R. Tabachnick et Larisa L. Menshenina, Systema Porifera : A Guide to the Classification of Sponges, vol. 1, New York, Kluwer academic, Plenum publishing, , 1707 p. (ISBN 978-0-306-47260-2 et 0306472600, lire en ligne), p. 1264-1268.
  7. Thierry De Swaef (préf. Gauthier Chapelle), Homo imitator : La surprenante histoire du biomimétisme, Jourdan, , 196 p. (ISBN 978-2-39009-336-7 et 2390093361, OCLC 1080433585, lire en ligne), « Des gratte-ciel prennent de la hauteur en s'inspirant d'une éponge des profondeurs ».
  8. a b et c Simon Galas, « Palourdes Ming, éponges de verre, quand le vivant traverse les millénaires », The Conversation, (consulté le ).
  9. Liz Langley, « Quel est l'animal qui vit 11 000 ans ? », National Geographic, (consulté le ).
  10. (en) Madhumita Venkataramanan, « Oldest animal doubles as a thermometer » [« Le plus vieil animal, utile comme thermomètre »], Wired UK, (consulté le ).

Liens externes

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