Observations sur les écrits modernes

revue littéraire française

Les Observations sur les écrits modernes est une revue littéraire parue à Paris de mars 1735 à aout 1743.

Observations sur les écrits modernes
Tome vingtième.
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Date de parution
Date de fin
Lieu de publication
Pays
Éditeur
Chaubert (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
ISSN
2496-9826Voir et modifier les données sur Wikidata

Historique

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Succédant au Nouvelliste du Parnasse, lancé en décembre 1730 et publié jusqu’en mars 1732, cette revue a été fondée par Guyot Desfontaines[1], et co-rédigée avec François Granet[2]. Considéré comme le fondateur de la nouvelle critique littéraire et du journalisme en France[3], Desfontaines s’est livré à une critique esthétique et morale des ouvrages, au lieu de se borner à les résumer ou à en reproduire de longs extraits[4]. Faisant preuve d’une grande liberté de pensée dans sa critique, Desfontaines défendait, entre autres, les nouveautés littéraires d’Angleterre, notamment son genre romanesque, qui connaissait alors un essor qui devait s’exporter vers la France[5], nonobstant les critiques qu’il pouvait susciter à l’époque[6].

Lors de la sortie de Paméla ou la Vertu récompensée, de Samuel Richardson en 1740, après avoir souligné la pertinence du genre épistolaire et défendu le choix d’une personne de petite condition pour la vraisemblance de l’œuvre, il salue la nouveauté de ce roman qui est, selon lui, « un excellent traité de morale en action, où les ombres du vice font ménagées avec un jugement admirable, qui fait briller la vertu dans tout son éclat[7]. », égratignant au passage des romans français au style plus soigné et élégant mais moins naturel, comme La Vie de Marianne, lorsqu’il écrit que « Pamela n’est pas une babillarde qui raisonne sans fin sur un ruban ou sur un cheveu[7]:366. »

La critique littéraire est également prétexte à un commentaire politique discret, comme la critique du système de censure en cours en France :

« La lecture de Pamela est capable de former le cœur des jeunes gens de l’un et de l’autre sexe. Il est assez surprenant qu’en Angleterre, où le Gouvernement ne défend, ni de penser, ni d’écrire ce qu’on veut, il paraisse des Ouvrages qui renferment une morale si épurée, et qu’on n’y imprime jamais de livres licencieux, quoique la Presse y soit libre ; tandis que parmi nous, nos livres les plus chastes, en fait de Romans, font ceux où le vice est mieux voilé sous les charmes d’une ingénieuse fiction et sous les agrément d’un style voluptueusement délicat[7]:367. »

Desfontaines faisait preuve de la même liberté de pensée dans sa critique et n’entendait se sentir tenu par aucune dette personnelle lorsqu’il s’agissait de critiquer les auteurs. Voltaire connu pour son extrême sensibilité à toute forme de critique[8], à qui Desfontaines devait la liberté et peut-être la vie[9], en a notamment fait les frais lorsque, après avoir publié les Éléments de la philosophie de Newton, Desfontaines s’est critiqué à une attaque en règle de l’ouvrage[10],[11], allant jusqu’à se moquer de l’âge avancé du patriarche de Ferney[a]. Lorsque, piqué au vif, Voltaire réplique en adressant, en novembre 1738, à Desfontaines Le Préservatif, ce dernier contre-attaque immédiatement avec la Voltairomanie, ou Lettre d’un jeune avocat, en forme de mémoire en réponse au libelle du sieur de Voltaire, intitulé le Préservatif[12]. Ces querelles avec Voltaire feront la célébrité de Desfntaines jusqu’à sa redécouverte par l’érudition moderne[12]:17.

Les Observations sur les écrits modernes ont paru jusqu’à leur suppression par un arrêt du Conseil en date du [13]. Desfontaines les a relancées, en mars 1744 sous le titre de Jugements sur quelques ouvrages nouveaux[2].

Notes et références

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  1. Voltaire a alors, 44 ans, et Desfontaines, en a dix de plus que lui.

Références

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  1. Louis Paris et Ulysse Robert, Le Cabinet historique, t. 26, Paris, Alphonse Picard, , 29 vol. in-8º (OCLC 145338194, lire en ligne), p. 185.
  2. a et b Malcolm Cook et Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval, Critique, critiques au 18e siècle, Oxford, Peter Lang, , 308 p., in-8º (ISBN 978-3-03910-537-3, OCLC 77482353, lire en ligne), p. 64.
  3. Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France : avec une introduction historique sur les origines du journal et la bibliographie générale des journaux depuis leur origine, t. 1, Paris, Poulet-Malassis et de Broise, , xxxii-475 p., 8 vol. ; in-16 (OCLC 1673428, lire en ligne sur Gallica), xvi.
  4. Max Spatzier, Der Abbé Desfontaines, ein Kritiker Voltaires, Leipzig, Emil Glausch, , 71 p., in-8º (OCLC 8997583, lire en ligne), p. 29.
  5. Ian P. Watt, The Rise of the Novel : studies in Defoe, Richardson, and Fielding, Berkeley, University of California Press, Berkeley, , 319 p. (OCLC 609519123, lire en ligne), p. 11.
  6. Georges May, Le Dilemme du roman au XVIIIe siècle : étude sur les rapports du roman et de la critique (1715-1761), New Haven, Yale University Press, , 294 p. (OCLC 1006471777, lire en ligne sur Gallica).
  7. a b et c Pierre-François Guyot Desfontaines, « Pamela : t. xxix. des Obs., 1742, р. 70-206 », dans Joseph de La Porte (éd.), L’Esprit de l'abbé Desfontaines : ou, Reflexions sur differens genres de science et de litterature avec des jugemens sur quelques auteurs & sur quelques ouvrages tant anciens que modernes, t. 4, Paris, Duchesne,‎ , 490 p., 4 vol. ; in-12 (OCLC 505088670, lire en ligne), p. 364.
  8. Christiane Mervaud, Voltaire et Frédéric II : une dramaturgie des lumières : 1736 - 1778, Oxford, The Voltaire Foundation, , xiv, 617 p., 24 cm (ISBN 978-0-72940-324-5, OCLC 1023956482, lire en ligne), p. 62.
  9. Nicolas de Condorcet, Vie de Voltaire : suivie des Mémoires de Voltaire, écrits par lui-même, Kehl, Société littéraire typographique, , 374 p., in-8º (lire en ligne sur Gallica), p. 47.
  10. (en) Charles Coulston Gillispie, The Edge of Objectivity : An Essay in the History of Scientific Ideas, Paris, Princeton University Press, , 562 p. (ISBN 978-0-69102-350-2, lire en ligne), p. 157.
  11. (en) John Bennett Shank, The Newton Wars and the Beginning of the French Enlightenment, University of Chicago Press, , illustr. ; 24 cm (ISBN 978-0-226-74947-1, OCLC 176979921, lire en ligne)
  12. a et b Thelma Morris, L’Abbé Desfontaines et son rôle dans la littérature de son temps, Genève, Institut et musée Voltaire, , 390 p., in-8º (OCLC 13898069, lire en ligne), p. 59.
  13. Conseil d'État, Arrêt du conseil d'état portant révocation du privilège accordé pour l'impression de l'ouvrage intitulé "Observations sur les écrits modernes", Paris, Imprimerie royale, , 2 p., in-4º (lire en ligne sur Gallica).

Liens externes

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