Penny dreadful

genre littéraire d'histoires vendues pour un penny aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, pendant le XIX° siècle

Un penny dreadful (aussi appelé penny horrible, penny awful[1], penny number ou penny blood) était un genre littéraire surtout populaire au Royaume-Uni pendant le XIXe siècle. Il s'agissait d'histoires macabres inspirées plus ou moins de faits divers réels et publiées sur plusieurs semaines, elles étaient vendues sous la forme de petits fascicules à 1 penny chacun. Le terme en est venu à englober différents genres littéraires fictifs à sensation. Les petits livres étaient publiés sur du papier de qualité médiocre (semblable aux dime novel ou au pulp magazine américains) et visaient les adolescents de la classe ouvrière[2].

Page couverture d'un penny dreadful (vers 1860-1870) : Black Bess; or, The knight of the road. Un récit romancé de la vie de Dick Turpin, un sujet de fiction populaire au Royaume-Uni pendant le XIXe siècle.

Origines modifier

La Grande-Bretagne de l’époque victorienne connait des changements sociaux qui entraînent une augmentation du taux d’alphabétisation. Avec la montée du capitalisme et de l’industrialisation, les Britanniques commencent à dépenser plus d’argent pour se divertir, ce qui contribue à la popularisation du roman. Les améliorations de l’imprimerie rendent possible la production de journaux tels que The Spectator, de Joseph Addison, et Tatler de Richard Steele, et l’Angleterre commence à reconnaître la lecture comme une forme de loisir ; elle est, en elle-même, une nouvelle industrie. Parmi d’autres changements significatifs, la capacité de déplacement se développe grâce à l’invention des rails, de la locomotive, et grâce au réseau de chemins de fer correspondant (la première ligne de chemin de fer, Stockton and Darlington Railway, ouvre en 1825). Ces changements créent à la fois un marché dédié à la littérature populaire bon marché, et la possibilité de la faire circuler à grande échelle. Les premiers feuilletons de penny fiction sont publiés en 1836 afin de répondre à cette demande[3],[4]. Entre 1830 et 1850, il y a jusqu'à 100 éditeurs de penny fiction, en plus des nombreux magazines qui adoptent le genre[5]. Le prix des premiers feuilletons est décidé de façon à ce qu’ils ne soient pas trop chers pour la classe ouvrière. Ils sont considérablement moins chers que les romans publiés en feuilletons par des auteurs tels que Charles Dickens, qui coûtent un shilling (douze pennies) par livret[6].

Héritage modifier

Littérature modifier

  • Dans le roman Un singulier garçon : Le mystère d'un enfant matricide à l'époque victorienne paru en 2016, l'écrivaine et journaliste Kate Summerscale restitue un fait divers londonien de 1895 : un matricide impliquant deux frères, Robert et Nathaniel Coombes. La raison du meurtre commis par le plus âgé des frères serait la lecture de penny dreadfuls[7], souvent considérés comme violents et de mauvaise influence sur leurs jeunes lecteurs. L'auteure expose la crainte croissante de criminalité de la société victorienne face à l'alphabétisation des classes ouvrières et la large diffusion de cette littérature à sensation[8].

Arts visuels modifier

Comédie musicale et film modifier

Sweeney Todd, « le Diabolique Barbier de Flee Street » assassinant une victime. Illustration extraite de l'édition en roman du penny dreadful The String of Pearls parue en 1850.

Des personnages populaires ont émergé des penny dreadfuls. Le personnage fictif de Sweeney Todd, apparu pour la première fois dans un penny dreadful de James Malcolm Rymer et Thomas Peckett Prest (en) publié de 1846 à 1847 et nommé The String of Pearls (en)[9], est entre autres le sujet d'une comédie musicale à succès de Stephen Sondheim (1979) et d'un film de Tim Burton (2007).

Série télévisée modifier

Annoncée en janvier 2013, Showtime et Sky signent une série télévisée de trois saisons intitulée Penny Dreadful et réalisée par John Logan et Sam Mendes. La série revisite des contes racontés dans les penny dreadfuls en intégrant certains de leurs personnages, créatures et intrigues qui se passent dans le Londres victorien. Elle est projetée pour la première fois sur écran lors du festival South by Southwest, le 9 mai 2014. La première saison contient 8 épisodes diffusés du 11 mai au 29 juin 2014 avec notamment Reeve Carney dans le rôle de Dorian Gray, Eva Green dans celui de Vanessa Ives, Timothy Dalton en tant que Malcom Murray et Josh Hartnett dans le rôle de Ethan Chandler. Les deuxième et troisième saisons contiennent respectivement 10 épisodes, sortis du 3 mai au 5 juillet 2015, et 9 épisodes, sortis du 1 mai au 19 juin 2016[10],[11].

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • (en) Michael Anglo, Penny Dreadfuls and Other Victorian Horrors, Londres, Jupiter, , 124 p. (ISBN 0-904041-59-X).
  • (en) Kevin Carpenter, Penny Dreadfuls and comics : English periodicals for children from Victorian times to the present day, Londres, Bethnal Green Museum of Childhood, , 124 p. (ISBN 0-905209-47-8).
  • (en) Christopher Casey, « Common Misperceptions : The Press and Victorian Views of Crime », Journal of Interdisciplinary History, Cambridge, MIT Press, vol. 41, no 3,‎ , p. 367–391.
  • (en) G. K. Chesterton, A Defence of Penny Dreadfuls, Londres, The Daily News, (lire en ligne).
  • (en) Peter Haining, The Penny dreadful : or, Strange, horrid and sensational tales !, Londres, Victor Gollancz, , 382 p. (ISBN 0-575-01779-1).
  • (en) Louis James, Fiction for The Working Man 1830–1850, Harmondsworth, Penguin, , 261 p. (ISBN 978-0-14-060037-7).
  • (en) Sally Powell, « Black Markets and Cadaverous Pies : The Corpse, Urban Trade and Industrial Consumption in the Penny Blood », dans Andrew Maunder et Grace Moore (dir.), Victorian Crime Madness and Sensation, Burlington, VT, Ashgate, (ISBN 0-7546-4060-4).

Notes et références modifier

  1. « Language Log » Horribles and terribles », sur upenn.edu (consulté le ).
  2. (en) Louis James, Fiction for the working man 1830–50, Penguin University Books, Harmondsworth, 1974. (ISBN 0-14-060037-X)
  3. (en) Ernest Sackville Turner, Boys Will be Boys, Harmondsworth, Penguin, (ISBN 0-14-004116-8), p. 20
  4. (en) Judith Flanders, The Invention of Murder: How the Victorians Revelled in Death and Detection and Created Modern Crime, New York, Thomas Dunne Books, (ISBN 978-1-250-04853-0), p. 59
  5. (en) Judith Flanders, « Penny Dreadful », sur British Library (consulté le )
  6. (en) « Was Dickens Really Paid By The Word? », sur UC Santa Cruz (consulté le )
  7. (en-GB) Kathryn Hughes, « The Wicked Boy by Kate Summerscale review – why a 13-year-old killed his mother », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  8. John Springhall, « 'Pernicious Reading'? 'The Penny Dreadful' as Scapegoat for Late-Victorian Juvenile Crime », Victorian Periodicals Review, vol. 27, no 4,‎ , p. 326–349 (ISSN 0709-4698, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) James Malcolm Rymer et Thomas Peckett Prest, The String of Pearls, United Kingdom, Edward Lloyd, 1846–47 (lire en ligne)
  10. « PENNY DREADFUL : l’univers de la série d’horreur décrypté | ScreenReview » (consulté le )
  11. « Penny Dreadful (2014) » Accès libre, sur The Movie Database,

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Liens externes modifier