Pierre-François Guyot Desfontaines

jésuite, journaliste, critique, professeur de rhétorique, traducteur, directeur de revue et vulgarisateur historique français
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Pierre-François Guyot Desfontaines
Gravure de l’abbé Desfontaines par Charles Devrits.
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Pierre-François Guyot Desfontaines, né le à Rouen et mort le à Paris, est un ecclésiastique, journaliste, critique, traducteur et vulgarisateur historique français.

Surtout connu aujourd’hui pour ses querelles avec Voltaire, l’abbé Desfontaines peut être considéré comme le fondateur de la nouvelle critique littéraire et du journalisme en France, dans la mesure où il a cherché à faire la critique esthétique et morale des ouvrages au lieu de se borner à les résumer ou à en reproduire de longs extraits[réf. nécessaire].

Biographie modifier

Élève des Jésuites, l’abbé Desfontaines entra dans leur ordre et enseigna la rhétorique à Bourges. Au bout de quinze ans, il s’ennuya de cette dépendance, les quitta en 1715, et, avec la protection du cardinal de La Tour d'Auvergne, obtint la cure de Thorigny, en Normandie.

À sa sortie des Jésuites, le cardinal de La Tour d'Auvergne, qui aimait les gens de lettres, le garda quelque temps chez lui. L’obligation de dire la messe et de lire tous les jours son bréviaire parut à Desfontaines une nouvelle dépendance aussi lourde que la première. Bientôt son amour pour la liberté et un goût très vif pour les lettres l’empêchèrent de remplir ses devoirs de pasteur. Alors il se démit de son bénéfice, pour se consacrer exclusivement aux lettres, ne voulant pas en toucher les revenus, sans le desservir.

Son début dans la carrière des lettres est modeste. Alors qu’il était de coutume de se signaler dans le Parnasse par une tragédie et souvent même par un poème épique, Desfontaines rédigea une simple ode Sur le mauvais usage qu’on fait de sa vie. En 1724, il devint collaborateur du Journal des sçavans et s’efforça d’introduire de l’agrément dans le style de ses articles, en évitant la sécheresse et le pédantisme.

Il publia ensuite, avec divers collaborateurs tels qu’Élie Fréron, Granet, l’abbé Destrées, de La Chenaye-Aubert, des recueils périodiques de critique : Le Nouvelliste du Parnasse (1731-1734, 5 vol.), Observations sur les écrits modernes (1735 et suiv., 34 vol. in-12). Ces périodiques, composés hâtivement, se signalaient surtout par la vivacité de leurs critiques et leur partialité. En 1724, le critique Jean-Jacques Bel a publié une Apologie de M. Houdar de La Motte, suivie d’un Examen de la tragédie d’Inès, censée défendre La Motte contre les critiques de l’abbé Desfontaines, mais qui constitue, en réalité, une nouvelle critique accablante[1].

Desfontaines a notamment attaqué les œuvres dramatiques de Voltaire, qui l’avait pourtant aidé à le libérer lorsque l’abbé, accusé de sodomie[a], avait séjourné quelque temps en prison en 1724 et avait également usé de son influence pour l’aider à revenir à Paris dont il avait été un temps exilé. Voltaire répliqua par un pamphlet intitulé Le Préservatif, ou critique des Observations sur les écrits modernes (). Desfontaines répondit anonymement la même année par un libelle intitulé La Voltairomanie, qui compilait toutes les anecdotes scandaleuses qui couraient alors contre Voltaire. Ce dernier intenta une action en diffamation qu’il n’abandonna qu’après que Desfontaines eut désavoué l’ouvrage dans la Gazette d'Amsterdam du . La guerre continua pendant plusieurs années, si bien qu’aujourd’hui le souvenir de Desfontaines n’est plus entretenu que par les épigrammes de Voltaire, ainsi que par celles de Piron, pour une fois d’accord avec Voltaire, qui promit à l’abbé de lui apporter une épigramme tous les matins et tint parole pendant cinquante jours.

« Il semble que la Providence, en le faisant naître en Normandie, dans le pays de la chicane, et d’un père conseiller au Parlement, l’ait destiné à devenir quelque jour un suppôt de Thémis, ou, au pis-aller, un membre de la corporation hargneuse des procureurs. Néanmoins, elle permit qu’il embrassât la profession de critique, apparemment parce que cette profession s’éloignait le moins des deux autres, et que le besoin de chamailler trouve aussi bien à se satisfaire au moyen de la plume dans les feuilles d’un journal, qu’au moyen de la parole sous les voûtes d’une chambre de justice[3]. »

— Désiré Nisard

Œuvres modifier

  • Apologie du caractère des Anglois et des François, 1725.
  • Dictionnaire neologique a l’usage des beaux esprits du siécle : avec l’Eloge historique de Pantalon-Phoebus. Par un avocat de province, Paris, Philippe-Nicolas Lottin, , xviii-143, in-12 (lire en ligne).
  • Lettre d’un rat calotin, a Citron Barbet, au sujet de l’Histoire des chats : Relation de ce qui s’est passé au sujet de l’illustre Mathanasius à l’Académie françoise, Ratopolis [Paris], Maturin Lunard, imprimeur & libraire du Regiment de la Calotte, 1727. avec approbation, & privilege de l’etat major du régiment, 30 p., in-12 (lire en ligne sur Gallica).
  • Entretiens sur les Voyages de Cyrus, Nancy, , 127 p., in-8o (lire en ligne sur Gallica).
  • Nouvelle Histoire de France par demandes et par réponses, 1730.
  • Le Nouveau Gulliver, 1730.
  • Nouvelle Histoire de France, 1730.
  • Observations sur les écrits modernes, 1735-1743.
  • La Voltairomanie : ou Lettre d’un jeune avocat, en forme de mémoire. En réponse au libelle du sieur de Voltaire, intitulé : Le préservatif, &c, [s.l.], [s.n.], , 48 p., in-12 (lire en ligne sur Gallica).
  • Histoire des Ducs de Bretagne et des Différentes Révolutions arrivées dans cette province, à Paris, chez Rollin, avec approbation et privilège du Roy, 1739.
  • Racine vengé : ou examen des remarques de l’abbé d’Olivet sur les œuvres de Racine, Avignon, , 152 p. (lire en ligne sur Gallica).
  • Traduction en prose des poèmes de Virgile, 1743.
  • Lettre d’un comédien françois, au sujet de l’Histoire du théâtre italien : écrite par M. Riccoboni, dit Lelio... / [par l’abbé P.-F. Guyot Desfontaines], Paris, Vve Noël Pissot ; Alexis Mesnier, , 72 p., in-12 (lire en ligne sur Gallica).

Traductions modifier

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. « L’abbé Duval des Fontaines attire chez lui des jeunes gens pour les corrompre, et il en fait souvent coucher avec lui. Si on veut s’informer exactement de sa conduite, on trouvera qu’il n’a point ou peu de religion, qu’il fait gras sans nécessité les jours maigres, et qu’il est en commerce avec de petits et jeunes libertins, avec lesquels il fait des parties de débauche. Il loge rue de l’Arbre-Sec, à Notre-Dame-de-Lorette, au 2e étage, sur le devant, en chambre garnie. Il mange tantôt à l’hôtel d’Uzès, rue Jean-Tison, tantôt à l’hôtel du Saint-Esprit, rue Saint-Germain ; mais on peut le regarder comme une peste publique, et il sera bon de le faire servir d’exemple, quand on aura vérifié ces faits et le sieur Haymier le fera très aisément[2]. »

Références modifier

  1. Jean-Jacques Bel, Apologie de M.Houdart de La Motte : suivi d’un Examen de la tragédie d’Inès, Paris, Vve Moreau, , 174 p., in-8o (OCLC 492655292, lire en ligne).
  2. François Ravaisson, Archives de la Bastille, t. 12, Paris, A. Durand et Pedone-Lauriel, , 508 p., in-8o (OCLC 715051691, lire en ligne), p. 102-3.
  3. Charles Nisard, Les Ennemis de Voltaire : l’abbé Desfontaines, Fréron, La Beaumelle, t. 9, Paris, Amyot, , 408 p., in-8o (OCLC 562736649, lire en ligne), p. 3.

Bibliographie modifier

  • Benoit Léger, « Voyages de Desfontaines dans la Romancie : le Nouveau Gulliver (1730) », Préfaces romanesques, Peeters, Leuven et Paris, collection « La République des Lettres », 23, p. 219-231.
  • Benoit Léger « Le Médecin observateur : paratexte et traduction idéologique de L’État de la médecine de Francis Clifton par Desfontaines (1742) », Annie Cointre, La traduction de textes non romanesques au XVIIIe siècle, Série 2003, no 5, Université de Metz, Centre d’études de la traduction p. 215-231.
  • Benoit Léger, « Nouvelles aventures de Gulliver à Blefuscu : traductions, retraductions et rééditions des Voyages de Gulliver sous la monarchie de Juillet » (« Histoire de la traduction et traduction de l’histoire ») Meta, 49, 3, p. 526-543.
  • Hugues Plaideux, « L’Abbé Desfontaines : un adversaire de Voltaire à la cure de Torigni (1732-1734) », Revue de la Manche, t. 40, fasc. 158, , p. 31-37.

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