Pierre Porcon de La Barbinais

capitaine de vaisseau malouin autour duquel on a écrit en 1824 le récit d'une mort exemplaire
Pierre Porcon de la Barbinais
Biographie
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Pierre Porcon de La Barbinais, surnommé le Regulus malouin, est un personnage probablement imaginaire qui, d'après un récit datant de 1824, serait né à Saint-Malo le et serait mort décapité à Alger en 1681.

Biographie, entre réalité et légende modifier

Pierre Porcon de La Barbinais, capitaine de frégate, est fait prisonnier par le dey d'Alger. Celui-ci l'envoie négocier avec le roi Louis XIV le traitement des captifs français en Algérie et les accords de paix. Le roi refusa les propositions, et le comte fut décapité.

En 1665, les armateurs malouins confièrent le commandement d'une frégate de 36 canons à Pierre Porcon de La Barbinais pour protéger leurs navires qui naviguaient en Méditerranée contre les attaques des Algériens. Il a d'abord été heureux dans l'exécution de son expéditions, mais les Algériens ayant réuni une flotte nombreuse contre lui, il est devenu le prisonnier du dey d'Alger.

Au moment de la préparation d'une expédition d'une escadre de Louis XIV contre Alger pour faire cesser les actes de piraterie, le dey d'Alger l'a chargé de porter à Louis XIV des propositions de paix, à la condition qu'il reviendrait prendre ses fers si la négociation échouait. La vie de 600 Français prisonniers du dey d'Alger dépendait du respect de cette dernière condition.

Les propositions de paix du dey d'Alger ayant été jugées inacceptables, il est revenu à Alger après être passé à Saint-Malo pour mettre en ordre ses affaires. Le dey d'Alger, mécontent de ce refus du roi, lui a fait trancher la tête en 1681.

Critiques de la légende modifier

Cette histoire apparaît pour la première fois dans le livre de François Gilles Pierre Barnabé Manet, Biographie de Malouins célèbres publiée en 1824, p. 76-78 (lire en ligne). Cette histoire a été reprise ensuite dans plusieurs livres dont l' Histoire de France, tome 113, p. 293, d'Henri Martin, en 1847 (lire en ligne). Elle a inspiré un tableau de George Louis Poilleux Saint-Ange, Exécution de Porçon de la Barbinais, 1881.

Cette histoire édifiante a été critiquée par les historiens qui ont fait remarquer qu'aucun texte du XVIIe siècle ne mentionne cette histoire et qu'elle n'est pas conforme au déroulement des faits connus.

Les faits, à Alger, entre 1680 et 1688 modifier

En , les corsaires barbaresques se sont emparés de plusieurs navires français sans déclaration de guerre. Le , le dey d'Alger Baba Hassan déclare officiellement la guerre à la France. Le , il annonce au consul de France, Jean Le Vacher, le début des hostilités. Un mois plus tard, 29 navires français avaient été pris et 300 hommes faits prisonniers. La fureur de Louis XIV ne connut plus de borne quand il apprit la capture d'un bâtiment de la marine royale et que son capitaine, le chevalier de Beaujeu, avait été vendu comme esclave par Ali-Raïs, capitaine général des vaisseaux d'Alger. Il a donné l'ordre à Abraham Duquesne d'aller bombarder la ville d'Alger. Impatient devant la lenteur de l'exécution de son ordre il rappelle à l'ordre Duquesne le qu'il doit l'« exécuter sans réplique »[1]. Duquesne quitte Toulon le à la tête de onze vaisseaux et de cinq galiotes à bombes. Le se sont ajoutées les 15 galères commandées par le duc de Mortemart (1679-1688), général des galères. Le , l'escadre française est devant Alger. Le bombardement d'Alger commence en août. Le dey d'Alger envoie Le Vacher à Duquesne pour négocier, mais en septembre les mauvaises conditions météorologiques vont amener Duquesne à retourner à Toulon.

Au printemps 1683, Duquesne reprend la mer avec une escadre plus importante qu'en 1682 pour un nouveau bombardement de la ville d'Alger. Le second bombardement commence dans la nuit du 26 au . Le dey d'Alger accepte de libérer 546 captifs français. Un chef de parti, Hadj Hussein Mezzomorto, prend le commandement et tue le dey. Le bombardement reprend, et pour venger les pertes, le , les assiégés attachent à bouche de leurs canons le consul Jean Le Vacher et 16 prisonniers français. Le nouveau dey refuse de signer la paix avec Duquesne, vieillard qui a « épousé la mer et que l'ange de la mort avait oublié » ! La paix est finalement signée le entre le dey et Tourville.

Les activités des corsaires algérois, Louis XIV a ordonné un troisième bombardement de la ville d'Alger en 1688 pour faire respecter le traité de paix signé en 1684. Le successeur de Mezzomorto, Hadj Chabane, nomme un ambassadeur à Versailles, Mohamed el Amin, pour négocier une paix durable qui est conclue dès 1690. En fait, la piraterie algéroise n'a cessé qu'après la colonisation de l'Algérie par la France en 1830.

À aucun moment Pierre Porcon de La Barbinais apparaît dans le déroulement des faits à Alger entre 1680 et 1688.

Marcel Emerit fait remarquer qu'il est étonnant qu'un capitaine français soit resté seize ans prisonnier sans avoir été échangé ou libéré après le paiement d'une rançon. Par ailleurs, en 1666, Louis XIV a envoyé à Alger le commissaire de marine Trubert accompagné du marchand marseillais Arnault pour négocier la paix et obtenir la libération des captifs. L'accord signé, Trubert est revenu à Alger le 1er septembre pour régler les détails. Il est convenu que les échanges commerciaux doivent être repris ainsi que l'installation d'un consul de France. Le dey accepte de libérer deux captifs français contre un captif turc. Un mémoire de indique que 565 chrétiens ont été rapatriés. Il est peu probable qu'il n'y ait pas eu Pierre Porcon de La Barbinais parmi les chrétiens libérés s'il avait été à Alger en 1665. En 1681, les Français ayant refusé de libérer les Turcs, les corsaires algériens reprennent la chasse des bateaux français. Un navire malouin est pris mais le consul Le Vacher ne cite par Porcon de La Barbinais.

Un autre de La Barbinais modifier

Si aucun Porcon de La Barbinais n'est cité dans des négociations entre le dey d'Alger et le royaume de France, il existe un Luc Trouin de La Barbinais, esclave au Maroc, envoyé en par le sultan du Maroc, Ismaïl ben Chérif, pour négocier avec la France un échange de prisonnier. Sa mission a réussi et n'est probablement jamais retourné au Maroc. Il a été le successeur de son père comme consul à Malaga et est rentré en France en 1689 au début de la guerre de la Ligue d'Augsbourg pour devenir un des armateurs les plus actifs de Saint-Malo. Il a été anobli par Louis XIV en 1709.

Conclusion modifier

Si l'histoire de Pierre Porcon de La Barbinais, Régulus malouin tué par le dey d'Alger en 1681, ne semble correspondre à des faits réels, il a existé Luc Trouin de La Barbinais, esclave du sultan du Maroc, négociateur pour un échange de prisonniers, en 1689.

Famille modifier

  • Pierre Porcon, sieur de la Barbinais, marié en 1578 à Thomase Chertier,
    • Guillaume Porcon (1579- )
    • René Porcon (1582- )
    • Pierre Porcon (1586- ) marié à Jeanne Richomme
      • Jean Porcon de la Barbinais (†1675) est marié en 1639 à Roberde Le Saulnier :
        • Pierre Porcon de la Barbinais (1639-1681?), "Régulus malouin",
        • Guillaume Porcon de la Barbinais (1642-1689)
        • Jean Porcon du Verger (1644-1687) marié en 1674 avec Jeanne Binet
          • Laurent Porcon de la Barbinais (1679-1721) marié à Janne Rose de Portier de La Villebonnier,
            • Guillemette Porcon de la Barbonnais (1706-1785) mariée en 1727 avec Nicolas-Joseph Truchot de la Chesnays (1696-1762)
              • Rose Jeanne Julienne Truchot de la Chesnays (1746-1825) mariée en 1764 avec Charles-Joseph-Ange Surcouf (1739- ), seigneur du Boisgris, de La Douainière
        • Michel Porcon de la Barbinais (1648-1708)
    • Guillemette Porcon (1588- ) mariée à Étienne Trouin
      • Étienne Trouin (1615- ) marié à Guillemette Macé
        • Luc Trouin (1637-1687) marié en 1664 à Marguerite Boscher (1635-1705), écuyer, sieur de la Barbinais,consul à Malaga,capitaine de vaisseau en 1706, capitaine général garde des côtes maritimes et quartiers de la capitainerie de Dol,
          • Luc Trouin, sieur de la Barbinais, (1666-1737), consul à Malaga après son père en 1688, capitaine général garde des côtes maritimes et quartiers de la capitainerie de Dol, chevalier de Saint-Louis, anobli par lettres patentes du par Louis XIV,
          • Charlotte Trouin (1668- )
          • René Trouin sieur du Guay (1673-1736)
          • Étienne Trouin (1677-1696), corsaire ;
          • Nicolas Trouin (1682-1704), capitaine du vaisseau La Valeur, tué en au cours d'un combat ;
          • Marguerite Guyonne Trouin (1684-1765)
        • Jeanne Trouin (1645-1706) mariée en 1673 avec Nicolas Daniel (1640- )

Hommages modifier

  • rue Porcon de La Barbinais, à Saint-Malo[2],
  • rue Porcon de La Barbinais, à Rennes,
  • rue Porcon de La Barbinais, à Dinan.

Notes et références modifier

  1. Charles de La Roncière, Histoire de la marine française, tome 5, p. 714-721 (lire en ligne)
  2. Dans la séance du conseil municipal du 16 novembre 1809, M. Thomas, maire de Saint-Malo, a proposé de donner le nom du "Regulus" malouin, Porcon de La Barbinais, à une rue de Saint-Malo (Eugène Herpin, Une famille d'Armateurs malouins, aux XVIIe et XVIIIe siècle, dans Annales de la Société historique et archéologique de l'arrondissement de Saint-Malo, 1925-1926, note p. 100)

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • Prosper Levot, Biographie bretonne. Recueil de notices sur tous les bretons qui se sont fait un nom, Cauderan libraire-éditeur, Vannes, 1857, p. 643 (lire en ligne) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • « Pierre Porcon de La Barbinais », dans Charles Cunat, Saint-Malo illustré par ses marins, précédé d'une notice sur cette ville depuis sa fondation jusqu'à nos jours, imprimerie de F. Péalat, Rennes, 1857, p. 81-82 (lire en ligne)
  • Prosper Levot, A. Doneaud, Les gloires maritimes de la France. Notices biographiques sur les plus célèbres marins, Arthus Bertrand éditeur, Paris, 1866, p. 407 (lire en ligne)
  • Charles de la Roncière, Histoire de la marine française, Librairie Plon, Paris, 1899, tome 6, Le crépuscule du grand règne. L'apogée de la guerre de course, p. 16-17 (lire en ligne)
  • Marcel Emerit, Une édifiante légende, Le Regulus breton, Porcon de la Barbinais, dans Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, 1966, no 73-2, p. 283-286 (lire en ligne) Document utilisé pour la rédaction de l’article
  • Gilles Foucqueron, Saint-Malo 2000 ans d'histoire, 1999, Foucqueron, Saint-Malo, 1999, (ISBN 978-2-9500304-5-0) ; 2 vol., 1661 p.

Lien externe modifier