Révolution brabançonne
La révolution brabançonne, appelée autrefois révolution belge ou révolution de Belgique ou bien encore première révolution belge, se déroule dans les Pays-Bas autrichiens entre 1787 et 1790, sous le règne de l'empereur Joseph II, à l'époque de la gouvernance de l'archiduchesse Marie-Christine et de son époux le prince Albert de Saxe, duc de Teschen. Ce mouvement débute dès la prise de pouvoir de Joseph II à la suite du décès de Marie-Thérèse en 1780 et se fait ressentir dans toutes les villes et région des États belgiques.
Dessin de gravure de Peltro William Tomkins, Providence, Bibliothèque de l'Université de Brown, 1790.
Date |
– (3 ans, 11 mois et 2 jours) |
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Lieu | Pays-Bas autrichiens |
Casus belli | Insatisfaction généralisée à l’égard de la centralisation des réformes libérales de l’empereur Joseph II |
Issue | Victoire autrichienne |
Saint-Empire romain germanique | États belgiques unis |
Joseph II Léopold II Albert de Saxe-Teschen |
Jean-André van der Mersch Jean-François Vonck Henri van der Noot |
40 000 hommes | 20 000 hommes |
Batailles
Turnhout — Quatre journées de Gand — Falmagne
Cette révolution entraîne le rejet des réformes de Joseph II qui voulait supprimer nombre de lois et règlements au profit d'une politique centralisatrice imposée depuis Vienne. Mais une partie des chefs révolutionnaires professaient des principes démocratiques analogues à ceux qui étaient, au même moment, appliqués par la Révolution française. L'autre partie des chefs révolutionnaires voulaient, au contraire, restaurer les principes de gouvernement qui, en leur temps, avaient représenté une avancée contre la féodalité en arrachant à celle-ci un certain nombre de privilèges au profit des pouvoirs locaux, mais tout en maintenant le pouvoir de la noblesse et des nombreux autres corps privilégiés des villes.
Provisoirement unis malgré leurs différends, les révolutionnaires parviennent, en 1790, à vaincre l'armée impériale à la bataille de Turnhout. Ceci entraîne la disparition du pouvoir impérial en Belgique et la proclamation des États belgiques unis. Mais ceux-ci ne vont durer qu'un an. Namur sera la première ville reprise par la force autrichienne. Le drapeau de la Belgique indépendante sera l'héritage des États Belgiques de 1789-1790 tout comme la devise nationale : « L'Union fait la force ».
Causes de la révolution
modifierLa structure administrative et politique des Pays-Bas autrichiens
modifierPour chaque état, ou province, l'ensemble des privilèges accordés par les souverains est à chaque fois consigné dans une charte appelée Joyeuse Entrée et renouvelée à chaque changement de souverain.
La Joyeuse Entrée des provinces de Brabant et du Limbourg de Joseph II
modifierLa Joyeuse Entrée du Brabant est un recueil de 59 articles d'anciens privilèges[1], dont le souverain, lors de son inauguration, promet, sous serment l'observation. L'État de Limbourg est uni au Brabant depuis la conquête de Jean I, duc de Brabant, en 1288. Cette union est confirmée par le Traité du [2]. Les dispositions de la Joyeuse Entrée sont donc communes aux deux États.
Les réformes de Joseph II
modifierL' empereur Joseph II est élu empereur en 1780, à la suite du décès de sa mère l'impératrice Marie-Thérèse (1740-1780). Empereur élu du Saint-Empire, il est aussi à titre héréditaire le souverain des États qui composent les Pays-Bas Belgiques (duché de Brabant, comté de Flandre, comté de Hainaut, comté de Namur, duché de Luxembourg, Loos, Limbourg, duché de Gueldre, Malines). Despote éclairé, il tente de leur imposer de nombreuses réformes centralisatrices et laïques, mais sans passer par la procédure habituelle : la consultation des États généraux. Ces mesures finissent par provoquer une vive opposition, tant pour des raisons de fond que de forme.
Le , les gouverneurs des Pays-Bas autrichiens signent une ordonnance conforme à l'édit de tolérance publié par Joseph II, qui reconnaît la liberté de culte et permet aux protestants et aux juifs d'accéder aux fonctions publiques.
Le , l'empereur édite une ordonnance pour la suppression de quelques couvents religieux, à savoir les maisons religieuses, couvents ou hospices des chartreux, des religieux de l'ordre des Camaldules, des Ermites ou des Frères du bois, mais aussi des carmélites, des religieuses de Sainte-Claire, des capucines et des religieuses de l'ordre de Saint-François.
De plus il fait confisquer leurs biens pour utiliser l'argent récolté à la construction d'hôpitaux et d'écoles.
Il resserre davantage le contrôle de l’État sur l’Église. Malgré l'opposition des évêques et du cardinal de Frankenberg, il remplace les séminaires diocésains par son propre grand séminaire à Louvain. Le clergé ne peut plus censurer l’État, et les évêques doivent prêter un serment civil.
L'empereur déclare, par son décret du , que le mariage est un acte civil. De plus il abolit la notion de crime d'hérésie. Joseph II établit la liberté de conscience et autorise la fréquentation des écoles de confession non catholique.
L'ordonnance du instaure la lecture de tous les édits par les curés dans les églises, lors des prônes du dimanche.
Sur le plan économique
modifierIl supprime les règlements des corporations relatifs à l'embauche.
L'Edit éternel de 1786 impose la libre circulation des grains. Mais cette mesure tombe mal car elle coïncide avec une terrible carence frumentaire, accentuée ainsi par des exportations spéculatives.
Il fait baisser les redevances féodales, supprime les corvées et les droits banaux.
Sur les plans administratif et judiciaire
modifierEn 1787, Joseph II bouleverse toute la structure administrative et judiciaire héritée du Moyen Âge : il supprime les trois Conseils collatéraux et crée le Conseil général du gouvernement des Pays-Bas, présidé par un ministre dépendant de l’empereur. Les anciennes provinces sont remplacées par 9 cercles, eux-mêmes divisés en 64 districts.
Joseph II abolit la peine de mort, ainsi que le servage et le droit qu’avaient les nobles de punir leurs sujets. La noblesse et le clergé furent soumis à l'impôt, créant ainsi à l'État de nouvelles sources de revenus. Joseph II abolit encore la censure et permit la liberté d'expression.
Les juridictions existantes (seigneuriales, urbaines et ecclésiastiques) sont également supprimées et remplacées par une organisation hiérarchisée : des tribunaux de première instance dans les Cercles et deux cours d'appel, l’une à Bruxelles et l’autre à Luxembourg, le tout étant chapeauté par un Conseil souverain de justice, à Bruxelles.
C'est cette réforme drastique des institutions traditionnelles du pays, décidée « d'en haut » et sans concertation avec les États, qui met le feu aux poudres et qui déclenche la révolution brabançonne.
Sur le plan géopolitique
modifierJoseph II essaie de rétablir la circulation sur l’Escaut en la libérant du contrôle des Néerlandais mais sa tentative échoue.
Les tendances internes dans les Pays-Bas autrichiens
modifierSous le gouvernorat d'Albert et de son épouse Marie-Christine, une partie de la bourgeoisie s'irrite devant le maintien des privilèges féodaux qui privilégient la noblesse et les hauts fonctionnaires impériaux aux postes clefs de l'administration, en dépit de la décision de Joseph II de les abolir.
Cette tendance est défendue par Jean-François Vonck, avocat au Conseil de Brabant, Jean-Baptiste Verlooy et Jacques-Dominique t'Kint.
La création des États belgiques unis et sa reconquête
modifierNotes et références
modifier- Pierre Auguste Florent Gérard Essai sur les causes de la révolution brabançonne.
- Jean-Baptiste Chrystin Les délices des Pays-Bas, Volume 1.
- Observations philosophiques sur les principes adoptés par l'Empereur dans les matières ecclésiastiques 1785
Bibliographie
modifier- De brabantse omwenteling : La révolution brabançonne : 1789-1790 (catalogue bilingue de l'exposition), Bruxelles, Musée royal de l'armée et de l'histoire militaire, , 270.
- Chronique des révolutions belgiques et liégeoises 1789-1790 : Recueil intégral des articles du moniteur universel sur les événements survenus dans les provinces belgiques et le pays de liège entre le 24 novembre 1789 et le 18 janvier 1791 - précédé d'articles extraits de la presse française, du 8 août au 23 novembre 1789, Beauvechain, Bernard Coppens, , 407 p. (ISBN 2-87261-005-7, présentation en ligne)
- Bruno Bernard et Robert Maskens (préf. Anne Vandenbulcke), La Révolution brabançonne et les États Belgiques Unis, Bruxelles, Musée de la Ville de Bruxelles, coll. « Historia Bruxellæ », , 63 p.
- L. Delplace, S. J., Joseph II et la révolution brabançonne, étude historique, Beyaert-Storie, Éditeur, Bruges, 1891.
- Luc Dhondt, Ancien Régime, Verlichte Monarchie en Revolutie: een institutionele en historische procesanalyse van politiek, instellingen en ideologie in de Habsburgse, de Nederlandse en de Vlaamse politieke ruimte (1700/1775-1790), Bruxelles, Archives générales du Royaume, 2002, 6 v.
- Georges-Henri Dumont, « Les origines religieuses de la Révolution brabançonne », La Revue Générale, (ISSN 0770-8602, lire en ligne)
- Pierre Auguste Florent Gérard, Essai sur les causes de la révolution brabançonne (1787), Anvers, , 46. (lire en ligne)
- Jean-Jacques Heirwegh, « La Révolution brabançonne : Révolution ou dernier sursaut? », La Revue générale, (ISSN 0770-8602, lire en ligne)
- Théodore Juste, Histoire du règne de l'empereur Joseph II et de la révolution belge de 1790, Bruxelles, 1845.
- Théodore Juste, La République belge (1790), Bruxelles, A.N. Lebègue et Cie, s.d., 354.
- Henri Pirenne et Jérôme Vercruysse, Les États Belgiques Unis : Histoire de la révolution belge 1789-1790, Paris, Duculot, , 187. (ISBN 2-8011-1024-8)
- Suzanne Tassier, Les démocrates belges de 1789. Étude sur le Vonckisme et la révolution brabançonne, Bruxelles, Maurice Lamertin, Libraire Éditeur, 1930.
- Suzanne Tassier, Figures révolutionnaires (XVIIIe siècle), Bruxelles, La Renaissance du livre, Collection notre passé.
- Site internet : http://www.histoire-des-belges.be/les-belges-leur-histoire