Ménas (saint)

martyr et saint chrétien
(Redirigé depuis Saint Menas)

Saint Ménas (également Minas, Mina, Mena, Mennas) (285 – 309) (grec ancien : Ἂγιος Μηνάς [Agios Ménas, « saint Ménas »], copte : Ⲁⲃⲃⲁ Ⲙⲏⲛⲁ [Abba Mina « père, abbé Mina »]), ermite, martyr et thaumaturge originaire du delta du Nil, près de Memphis en Égypte, est un soldat romain. Il est « un des saints les plus connus » de l'Église orthodoxe copte[1]. Sa tombe se trouve à Abou Mena.

Ménas
Image illustrative de l’article Ménas (saint)
Saint Ménas. Peinture de Dičo Zograf, 1855. Cathédrale des Saints Cyrille et Méthode, Tetovo.
ermite, mégalomartyr
Naissance 285
Nikiou, Égypte
Décès 309  (env. 24 ans)
Phrygie
Nationalité romain
Vénéré par Église copte orthodoxe
Église orthodoxe
Églises des trois conciles
Église catholique romaine
Fête 11 novembre (calendrier julien, Églises catholique romaine, orthodoxe et orthodoxes orientales)
15 Hathor (Église copte orthodoxe)
Attributs homme aux mains coupées et aux yeux arrachés, homme avec deux chameaux
Saint patron personnes accusées à tort, colporteurs, marchands ambulants

Cependant, selon N. Patterson Svecenko, Saint Ménas ne doit pas être confondu avec l'abbé Ména qui vécut, lui, au Ve siècle, et qui est représenté à côté du Christ dans la célèbre icône du Christ et de l'abbé Ména[2],[Note 1].

Sources modifier

De nombreuses sources en grec ancien, copte, vieux nubien, ge'ez, latin, syriaque, et arménien) attestent de l'existence de Ménas et nous renseignent sur sa personne, sa vie et sa mort. Mais les éléments fournis par ces sources sont contradictoires[3].

Hagiographie modifier

Naissance miraculeuse modifier

Ménas est né en Égypte en 285 dans la ville de Nikiou (Niceous), qui se trouvait dans les environs de Memphis. Ses parents étaient des chrétiens ascétiques mais qui n'avaient toujours pas d'enfants, malgré de longues années de mariage. Son père s'appelait Eudoxios et sa mère, Euphémie. Voilà qu'en la fête de la Vierge Marie, mère de Jésus, Euphémie était en train de prier devant une icône de Marie, avec des larmes pour que Dieu lui donne un fils béni. Un son lui parvint de l'icône, et Euphémie entendit le mot « Amen ». Et quelques mois plus tard, elle donnait naissance à un garçon qu'elle appela Ménas, nom souvent donné comme un anagramme du mot amen[4]. Cependant, en ce qui concerne ce dernier point, Pierre du Bourguet relève[5] que « le nom de Ména est typiquement égyptien, car il a toutes les chances de dériver de celui porté par de nombreuses personnalités de l'Égypte pharaonique, notamment le détenteur d'une tombe célèbre de la XVIIIe dynastie à Abd el-Gournah dans la vallée thébaine. Il reste en rapport avec le saint honoré à Abou Mina dans le désert de Mariout et était commun parmi les chrétiens et les moines, à Baouit comme ailleurs. »

Carrière militaire modifier

Le père de Ménas, Eudoxios, chef de l'une des divisions administratives de l'Égypte, meurt quand Ménas a quatorze ans. Un an plus tard, Ménas rejoint l'armée romaine et reçoit un rang élevé en raison de la réputation de son père. La plupart des sources affirment qu'il sert à Cotyaeus en Phrygie[1] (aujourd’hui Kütahya en Turquie). Trois ans plus tard, il quitte l'armée, désirant consacrer sa vie au Christ, et se dirige vers le désert pour vivre une vie différente.

Vie d'ermite modifier

Après avoir vécu cinq ans en ermite, Ménas a une vision d'anges ceignant de couronnes glorieuses des martyrs, et il désire les rejoindre. Il entend alors une voix qui lui dit : « Béni es-tu, Ménas, parce que tu as été appelé à la vie pieuse dès ton enfance. Tu recevras trois couronnes immortelles : une pour ton célibat, une autre pour ton ascétisme et une troisième pour ton martyre. » Ménas se précipita ensuite vers le chef[pas clair], déclarant sa foi chrétienne[6], foi qu'il ne renia pas et pour laquelle il fut décapité au cours de la persécution ordonnée par l'empereur Dioclétien, en l'an 300, à Alexandrie.

Martyre et sépulture modifier

Après le martyre de Ménas, son corps est recueilli par des fidèles et chargé sur des chameaux qui, parvenus à un certain endroit au bord du lac Mariout, refusent d'aller plus loin. Voyant là un signe de Dieu, les fidèles décident de l'enterrer à cet endroit même, autour duquel se développa progressivementla ville de Abou Mena.

De nombreuses ampoules à eulogie représentant Ménas entre deux chameaux, distribuées aux pèlerins et parvenues jusqu'à nous, témoignent de la vigueur de cette croyance.

Iconographie modifier

Ampoule à eulogie. Saint Ménas flanqué de deux dromadaires. Argile brun rouge pale. Provient d'Alexandrie (entre 500 et 700). Musée du Louvre[7].

Saint Ménas est souvent représenté en prière entre deux dromadaires. Cette scène se retrouve fréquemment sur les ampoules à eulogie (récipients destinés à recevoir de l'huile sainte ou de l'eau bénite)[4]. On peut aussi la voir sur une peinture murale de l'ermitage des Kellia, mais où les chameaux ont disparu, peinture conservée au Louvre[8].

Ampoule à eulogie: saint Ménas entre deux dromadaires (entre 400 et 640)[9]

L’icône du monastère de Baouit (numéro d'inventaire E 11565) conservée au Louvre représente le Christ et l'abbé Ména[Note 2], ceint de l'auréole du saint traditionnellement vénéré dans la tradition chrétienne[10].

Postérité modifier

Fête modifier

Le monastère à Abou Mena,

L'Église copte fête le saint le 15 Hatur dans le calendrier copte[3], le dans le calendrier julien[11].

Patronage modifier

La ville d'Abou Mena (nommée d'après le saint), située à 45 kilomètres au sud-ouest d'Alexandrie, devient un centre de pèlerinage très important à partir du Ve siècle. Un nouveau monastère inauguré par le patriarche Cyrille VI y attire encore des foules nombreuses.

Icône de St. Ménas. Cathédrale Agios Minas, Héraklion.

De nombreuses églises sont consacrées à Saint Ménas. comme l'église Saint-Ménas de Štava en Serbie et l'église Saint-Ménas de Dryopída, dans les Cyclades. En outre, il est saint patron de la ville d'Héraklion, en Crète. Durant l'occupation ottomane de l'île, les tensions religieuses entre Crétois et Turcs conduisirent à des affrontements entre musulmans et chrétiens. La tradition veut[réf. nécessaire] que le dimanche de Pâques 1826, lorsque les chrétiens se rassemblèrent à l'église pour assister à la célébration liturgique de la Résurrection, des musulmans voulurent les massacrer. Un officier âgé, monté à cheval, intervint alors, calmant et dispersant la foule. Les chrétiens virent dans l'apparition du cavalier un miracle de saint Ménas, et crurent que c'était lui qui était apparu aux Turcs. Depuis lors, saint Ménas a été représenté dans l'iconographie crétoise comme un général romain à cheval, et il est honoré comme le saint patron de cette ville, et la cathédrale Agios Minas, élevée entre 1862 et 1895, est aussi placée sous son patronage.

Spiritualité modifier

En Occident, Saint Ménas bénéficie d'une certaine notoriété du fait de l'icône conservée au musée du Louvre à laquelle il est associé[Note 2]. La communauté de Taizé en a fait une partie centrale de sa spiritualité, y voyant un témoignage de l'amitié de Jésus pour les hommes (Jean 15,15):

« Il y a ici une icône qui exprime cela, l’icône de l’amitié. Elle est du sixième siècle et vient d’Afrique du Nord, de l’Égypte. Nous y voyons le Christ mettre sa main sur l’épaule de son ami pour marcher avec lui, pour l’accompagner. Tous, nous pouvons nous reconnaître dans cet ami du Christ. Si, ressuscité, le Christ est invisible à nos yeux, nous pouvons pourtant nous confier à sa présence. Il accompagne chaque être humain sans exception. Regarder cette icône, c’est déjà une prière qui nous unit à Dieu. »

— Méditation du Frère Aloïs[12]

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. De son côté, Pierre du Bourguet, dans L'art copte, Paris, Albin Michel, 1968, distingue dans l'index, p. 235, deux entrées différentes , l'une pour « Ména (moine) » (avec renvoi aux p. 39, 43, 117, 132), l'autre pour « Ménas (saint) » (avec renvoi aux p. 81, 90). Il traite donc de ces personnages de façon tout à fait indépendante. // Par ailleurs, une recherche Google « Louvre Ménas » conduit à cette page (intitulée « Saint Menas ») d'où l'icône du Christ et de l'abbé Ména est absente. Cette dernière figure en revanche dans les résultats de la recherche « Louvre abbé Ména » (pages consultées le 18 mai 2024).
  2. a et b On a déjà relevé (Note 1) que Saint Ménas ne doit pas être confondu avec l'abbé Ména qui est représenté sur cette icône. (Voir l'introduction de l'article.)

Références modifier

  1. a et b (en) Hagiography of Blessed Manas, Site officiel de l'Église orthodoxe copte, consulté le 11-11-2017.
  2. (en) Nancy Patterson Svecenko, « 497. Icon of Christ and Abbot Menas », dans Kurt Weitzmann (Ed.), Age of Spirituality: Late Antique and Early Christian Art, Third to Seventh Century; Catalogue of the Exhibition at the Metropolitan Museum of Art, Nov. 19, 1977 – Feb. 12, 1978, New York, Metropolitan Museum of Art, Publication, in Assoc. with Princeton University Press, , xviii + 735 p. (ISBN 978-0-870-99179-0, lire en ligne), p. 552-553
  3. a et b Krause 1991
  4. a et b Alfredo Tradigo, Icônes et saints d'orient, p. 285.
  5. Pierre du Bourguet, L'art copte, Paris, Albin Michel, , 240 p., p. 132
  6. (en) « Saint Mina Coptic Orthodox Church », (consulté le )
  7. « Ampoule à eulogie MN1469 », sur collections.louvre.fr (consulté le )
  8. « Peinture murale », sur www.louvre.fr (consulté le )
  9. « Ampoule à eulogie - E 24445 », sur collections.louvre.fr (consulté le )
  10. « Le Christ et l'abbé Ména - E 11565 », sur www.louvre.fr (consulté le )
  11. Francis Mershman, « St. Menas », The Catholic Encyclopedia , Vol. 10, New York, Robert Appleton Company, 1911. [lire en ligne (page consultée le 18 mai 2024)]
  12. Méditation du Frère Aloïs à la rencontre de Nairobi, Site officiel de la Communauté de Taizé, consulté le 11-11-2017.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Georgios L. Arvanitakis, « Sur Saint Ménas », Bulletin de l'institut égyptien, vol. 5,‎ , p. 161-188 (lire en ligne)
  • Hippolyte Delehaye, « L'invention des reliques de saint Menas à Constantinople », Analecta Bollandiana,‎ , p. 117-150
  • (en) James Drescher, « "More about St. Menas", 12 (1942), », Annales du Service des antiquités de l'Egypte, no 12,‎ , p. 53-70 (lire en ligne)
  • (en) James Drescher, Apa Mena. A selection of Coptic texts relating to St. Menas, Le Caire, Société d'Archéologie Copte, coll. « Publications de la Société d’Archéologie Copte. Textes et Documents », , xxxvi - 187 p.
  • (en) Martin Krause, « Menas the Miracle Maker, Saint », dans Aziz S. Atiya (Ed.), the Coptic Encyclopedia, vol. 5, New York, MacMillan, , p. 1589b-1590b
  • Maggy Rassart-Debergh, « Compte-rendu: Zsolt Kiss, Les ampoules de saint Menas découvertes à Kôm el- Dikka (1961-1981) », L'antiquité classique, vol. 61,‎ , p. 772-773 (lire en ligne)
  • Michel Quenot, L'Icône : Fenêtre sur le Royaume, Paris, Le Cerf, , 2e éd., 208 p. (ISBN 2-204-06848-9, présentation en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Alfredo Tradigo (trad. Dominique Férault), Icônes et saints d'orient : repères iconographiques [« Icone e Santi d'Oriente »] [« Icônes et saints d'orient »], Paris, Hazan, coll. « Guide des arts », , 384 p. (ISBN 978-2-7541-0419-7, présentation en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • (en) Warren T. Woodfin, « An Officer and a Gentleman: Transformations in the Iconography of a Warrior Saint », Dumbarton Oaks Papers, vol. 60,‎ , p. 111-143 (lire en ligne Accès payant)
  • (en) Nader Alfy Zekry, « The Iconography of St. Menas in the Coptic Art », Journal of the Faculty of Tourism and Hotels-University of Sadat City, vol. 1, no 2/",‎ , p. 37-52 (lire en ligne)

Articles liés modifier

Liens externes modifier

Sur les autres projets Wikimedia :