« Génocide arménien » : différence entre les versions
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Le '''Génocide arménien''' ({{lang|hy|Հայոց ցեղասպանություն}} : ''{{lang|hy-Latn|Hayots tseghaspanoutyoun}}'' en [[arménien]], ''{{lang|tr|Ermeni Soykırımı}}'' en [[turc]]) est un [[génocide]] perpétré d'avril [[1915]] à juillet [[1916]], voire [[1923]]<ref group=Note>L'historiographie récente considère que le génocide se conclut par la signature du traité de Lausanne le 23 juillet 1923, en raison des massacres qui se sont déroulés sur la période 1920-1923. De même, l'estimation du nombre de victimes se fait souvent sur la période 1915-1923.</ref>, au cours duquel les deux tiers des [[Arméniens]] qui vivent alors sur le territoire actuel de la [[Turquie]] périssent du fait de [[déportation]]s, [[famine]]s et [[massacre]]s de grande ampleur. Il est planifié et exécuté par le parti au pouvoir à l'époque, le Comité Union et Progrès (CUP), plus connu sous le nom de « [[Jeunes-Turcs]] », composé en particulier du [[Trois Pachas|triumvirat d'officiers]] [[Talaat Pacha]], [[Ismail Enver|Enver Pacha]] et [[Djemal Pacha]], qui dirige l'[[Empire ottoman]] alors engagé dans la [[Première Guerre mondiale]] aux côtés des [[Triplice|Empires centraux]]. Il coûte la vie à environ un million deux cent mille Arméniens d'[[Anatolie]] et d'[[Arménie occidentale]]<ref group=Note>Ce chiffre est celui généralement admis par la communauté des historiens ; mais le bilan des massacres et déportations des Arméniens ne fait cependant pas l'unanimité. Anahide Ter Minassian écrit : « si nul ne conteste aujourd'hui le caractère meurtrier des déplacements forcés ni les massacres qui les ont accompagnés, la controverse porte depuis 1919 sur le nombre de victimes ({{formatnum:1500000}} selon les Arméniens, {{formatnum:600000}} à {{formatnum:800000}} selon les [autorités] turques), sur la cause des déportations […], sur le partage des responsabilités […] » dans « Les Arméniens au {{20e}} siècle », ''[[Vingtième Siècle. Revue d'histoire]]'', 2000, volume 67, numéro 1, {{p.|140}}. {{Lire en ligne|lien=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xxs_0294-1759_2000_num_67_1_4602}}</ref>.
Les déportations et massacres sont préparés et organisés depuis [[Constantinople]], alors capitale de l'Empire, et mis en œuvre à l'échelle locale par les responsables des divers districts et provinces. Chaque responsable local est chargé de rassembler ses administrés arméniens, puis les soldats et gendarmes ottomans escortent les convois jusqu'au désert dans des «
Sa [[Reconnaissance politique du génocide arménien|reconnaissance politique]] à travers le monde fait encore l'objet de débats et de controverses, à cause de la [[Négation du génocide arménien|négation de ce génocide]], notamment en [[Turquie]]. En [[octobre 2015]], le génocide est reconnu par les parlements de vingt-neuf pays.
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=== Violences antérieures au génocide ===
==== Massacres hamidiens, 1894-1896 ====
[[Image:Sultan Hamid.jpg|vignette|Caricature du Sultan [[Abdülhamid II]].|alt=Un homme portant un fez et des babouches, un poignard sanglant à la bouche, se retrousse les manches. Derrière lui, un écriteau annonce «
{{article détaillé|Massacres hamidiens}}
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Le 15 septembre 1915, le ministre de l'intérieur [[Talaat Pacha]] envoie un télégramme à la direction du parti [[Jeunes-Turcs]] à [[Alep]] : {{citation|Le gouvernement a décidé de détruire tous les Arméniens résidant en Turquie. Il faut mettre fin à leur existence, aussi criminelles que soient les mesures à prendre. Il ne faut tenir compte ni de l'âge ni du sexe. Les scrupules de conscience n'ont pas leur place ici}} ; puis, dans un second télégramme : {{citation|Il a été précédemment communiqué que le gouvernement a décidé d’exterminer entièrement les Arméniens habitant en Turquie. Ceux qui s’opposeront à cet ordre ne pourront plus faire partie de l’administration. Sans égard pour les femmes, les enfants et les infirmes, si tragiques que puissent être les moyens d’extermination, sans écouter les sentiments de la conscience, il faut mettre fin à leur existence<ref>[http://books.google.fr/books?id=pb5W48jBtIcC&pg=PA31&f=false Sociétés réconciliées?] des peuples à la recherche d'un compromis entre passion et raison : actes du colloque du GRIC conciliation-réconciliation, tenu à l'université du Havre les 7 et 8 décembre 2008. Cité dans les [[Documents Andonian]].</ref>}}.
Des prisonniers de droit commun sont libérés afin d'assister les forces armées ottomanes dans l'exécution des massacres. Ils seront regroupés sous une entité militaire secrète nommée {{Citation|[[Organisation spéciale (Empire ottoman)|Organisation spéciale]]}}. Créée en juillet [[1914]] par le comité central du [[Jeunes-Turcs|Comité Union et Progrès (CUP)]] avec la coopération du ministère de l'Intérieur et de celui de la Justice<ref>{{Harvsp|Dadrian|1996|id=dadrian1996}}.</ref>, l'«
[[Fichier:Armenian genocide3.jpg|thumb|upright=1.3|left|Déportation de populations arméniennes avec le [[Chemin de fer Berlin-Bagdad|chemin de fer de Bagdad]]<ref group=Note>Photographie prise par le directeur allemand du chemin de fer, Franz J. Günther en 1915. Photo qu'il accompagne du commentaire {{Citation|Je vous envoie cette petite image ci-jointe qui illustre la mission d'ambassadeur de la culture en Turquie du chemin de fer d'Anatolie. Ce sont nos wagons dits "wagons à moutons". Ce train transporte par exemple 880 êtres humains dans 10 voitures.}} ({{Article |langue= |auteur1=Gaïdz Minassian |titre= Le Bagdadbahn |sous-titre= L'illusoire destin impérial allemand |lien titre= |traduction titre= |périodique= [[Le Monde]] |lieu= |éditeur= |série=Hors-série |volume= |titre volume= |numéro=49 |titre numéro=Empires |jour= |mois=octobre-décembre |année= 2015 |pages= 33 |isbn=978-2-36804-044-7}})</ref>.|alt=Des wagons en bois, transportant des personnes y compris sur le toit.]]
Dans le reste de l'Empire, le programme prend les formes d'une déportation, conduite par chemin de fer sur une partie du parcours, les familles restant parfois réunies. Les convois de déportés — environ {{formatnum:870000}} personnes<ref name="imprescriptible : populations déplacées"/> — convergent vers [[Alep]], en [[Syrie]], où une Direction générale de l'installation des tribus et des déportés les répartit selon deux axes : au sud, vers la [[Syrie]], le [[Liban]] et la [[Palestine]] — une partie survivra ; à l'est, le long de l'[[Euphrate]], où des camps de concentration, véritables mouroirs<ref>{{article|auteur=Raymond H. Kévorkian |titre=L’extermination des déportés arméniens ottomans dans les camps de concentration de Syrie-Mésopotamie (1915-1916). La deuxième phase du génocide |périodique=Revue d’Histoire arménienne contemporaine |volume=ii |année=1998 |pages=117-118}}.</ref>, sont improvisés. Les déportés sont peu à peu poussés vers [[Deir ez-Zor]]. Là, en juillet 1916, ils sont envoyés dans les déserts de [[Mésopotamie]] où ils sont tués par petits groupes ou meurent de soif<ref>{{harvsp|texte=Ternon 2007|id=Ternon 2007|p=533}}.</ref>. Les derniers regroupements de déportés le long du [[Chemin de fer Berlin-Bagdad|chemin de fer de Baghdad]], à Ras-ul-Aïn, à Intilli sont, eux aussi, exterminés en juillet 1916. Seul survit un tiers des Arméniens : ceux qui habitaient [[İstanbul|Constantinople]] et [[İzmir|Smyrne]], les personnes enlevées, les Arméniens du [[vilayet de Van]], sauvés par l'avancée de l'armée russe, soit deux cent quatre-vingt-dix mille survivants<ref name="imprescriptible : populations déplacées"/>.
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{{Article détaillé|Reconnaissance politique du génocide arménien}}
[[Fichier:Vladimir Putin, Tsitsernakaberd memorial complex RA.jpg|thumb|left|Le président russe [[Vladimir Poutine]] s'inclinant devant la mémoire des victimes du génocide arménien, [[Tsitsernakaberd]], en 2013.|alt=Un homme qui s'incline devant une gerbe de fleurs.]]
Les pays ou chambres nationales ayant reconnu le génocide arménien sont au nombre de vingt-neuf en juin 2016<ref group=Note>Ne sont comptées que les reconnaissances parlementaires impliquant le vote d'une loi ou d'une résolution.</ref> : l'[[Uruguay]]<ref>Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République sur la proposition de loi ({{n°|3030}}) de M. Didier Migaud et de plusieurs de ses collègues, complétant la loi {{n°|2001-70}} du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915, par M. Christophe Masse, député, 16 mai 2006, {{p.|8}} {{lire en ligne|lien=http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r3074.pdf|date=31 mars 2008}}.</ref>, la chambre des représentants de [[Chypre (pays)|Chypre]]<ref name="Mutafian">[[Claude Mutafian]], ''Le génocide des Arméniens, 90 ans après'', CCAF, 2005, « L'avalanche des reconnaissances du génocide » {{lire en ligne|lien=http://www.imprescriptible.fr/brochure/b26.htm|date=31 mars 2008}}.</ref>, la [[Chambre des représentants des États-Unis]]<ref>{{en}} US House of Representatives Joint Resolution 247, 12 septembre 1984 {{lire en ligne|lien=http://www.genocide-museum.am/U.S._House_of_Representatives_Joint_Resolution_247.html|date=31 mars 2008}}.</ref>, la [[Douma]] [[Russie|russe]], le parlement [[Grèce|grec]], le sénat de [[Belgique]]<ref>« Proposition de résolution relative au génocide des Arméniens de Turquie en 1915 », ''Annales parlementaires'', Sénat, session 1996-97, 8 octobre 1997 {{lire en ligne|lien=http://www.senate.be/www/?MIval=/publications/viewPub.html&COLL=S&LEG=1&NR=736&VOLGNR=1&LANG=fr|date=31 mars 2008}} ; adoption par le Sénat le 26 mars 1998 : ''Annales parlementaires'', Sénat, session 1997-98, 26 mars 1998 {{lire en ligne|lien=http://www.senate.be/www/?MIval=/Registers/ViewReg&COLL=H&PUID=16780404&TID=16784751&POS=1&LANG=fr|date=31 mars 2008}}.</ref>, le parlement de [[Suède]]<ref name="Mutafian"/>, le parlement [[liban]]ais, le [[Vatican]]<ref name="Mutafian"/>,
Certaines institutions internationales et régionales ont également reconnu le génocide : c'est le cas du [[Tribunal permanent des peuples]], du [[parlement européen]], du [[Conseil de l'Europe]], du [[Mercosur]], du [[Parlement latino-américain]] et du [[Conseil œcuménique des Églises]]. En ce qui concerne l'[[ONU]] le [[rapport Whitaker]] avait préconisé à la sous-commission de l'Organisation des Nations unies pour la prévention des droits de l'homme et la protection des minorités de reconnaître le caractère génocidaire de plusieurs massacres dont celui contre les arméniens<ref>{{en}} UN Sub-commission on prevention of discrimination and protection of minorities, {{38e}} session, E/CN.4/Sub.2/1985/6, 2 juillet 1985 {{lire en ligne|lien=http://www.armenian-genocide.org/Affirmation.169/current_category.6/affirmation_detail.html|texte=extraits pertinents|date=31 mars 2008}}.</ref> Toutefois, la question a donné lieu à des controverses, qui ont abouti ''de facto'' à ce qu'aucun massacre antérieur à 1948 ne pourra être qualifié de génocide par l'ONU.
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