« Deux cents familles » : différence entre les versions

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{{Sources à lier|date=décembre 2015}}
[[Fichier:Maîtres et valet. Contre les 200 familles vive l'Union du Front populaire.JPG|thumb|<center>''Maîtres et valet. Contre les 200 familles, vive l'Union du [[Front populaire (France)|Front populaire]] !''<br>Affiche de propagande du [[parti communiste français]] dépeignant la « finance internationale », les régimes [[Troisième Reich|nazi]] et [[Fascisme|fasciste]] ainsi que [[Francisco Franco|Franco]] subventionnant censément les grands groupes industriels français, la [[Cagoule (OSARN)|Cagoule]] et les ténors politiques de [[Droites en France|droite]], notamment [[François de La Rocque]] et le [[Parti social français|PSF]]<br>(Paris, [[Bibliothèque nationale de France|BnF]], [[Département des estampes et de la photographie de la Bibliothèque nationale de France|département Estampes et photographie]], 1936).</center>]]
Les '''deux cents familles''' sont une expression politique de l’entre-deux-guerres qui désigne les deux cents plus gros actionnaires de la Banque de France. A travers eux, l’expression, qui est avant tout utilisée par la gauche de l'entre-deux-guerres, dénonce le petit nombre de familles qui tiendraient en main la majorité des leviers économiques de la France, contrôlant ainsi les destinées politiques du pays.<br>
Pour certains historiens, les deux cents familles constituent un "mythe politique"{{note|groupe=n|{{citation|Tous les travaux cités (...) ont eu pour premier bienfait, il va sans dire, de rompre avec l'atmosphère de suspicion systématique qui entourait toute observation du patronat au temps des « 200 familles » et qu'ont alors « illustrée » les livres d'[[Emmanuel Beau de Loménie|E. Beau de Loménie]] et d'[[Augustin Hamon|A. Hamon]]<ref>{{Article |prénom1=Jean-Pierre|nom1=Rioux |lien auteur1= Jean-Pierre Rioux|titre= Les élites en France au {{s-|XX|e}}. Remarques historiographiques|périodique= Mélanges de l'École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes|tome= 95|année= 1983|pages= 13-27 |passage= 20, {{n.}}23|lire en ligne=http://www.persee.fr/doc/mefr_0223-5110_1983_num_95_2_5196}}.</ref>}}.}}{{,}}{{note|groupe=n|{{citation|Que n’a-t-on écrit {{incise|et ce dès les années trente}} sur la subordination du pouvoir politique à la toute-puissance des milieux d’affaires ? Les mythes ont couru sur « les dynasties bourgeoises », « la synarchie », les trusts et le Comité des Forges<ref>{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Sylvain |nom1=Schirmann|préface= [[Raymond Poidevin]]|titre= Les relations économiques et financières franco-allemandes, 24 décembre 1932-{{1er}} septembre 1939|lieu=Paris|éditeur=Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, Comité pour l'histoire économique et financière de la France|collection=Histoire économique et financière de la France| série= Études générales|année= 1995|pages totales={{XI}}-304|isbn=2-11-087835-5|lire en ligne=http://books.openedition.org/igpde/2186|numéro chapitre={{XVIII}}|titre chapitre=Vers le « Munich économique »}}.</ref>.}}.}}{{,}}{{note|groupe=n|{{citation|En France, les études publiées sur le patronat ont avant tout visé à mettre au jour les pratiques de l'ombre entre organisations patronales et institutions politiques, avec une dimension journalistique ou militante davantage qu’historique . Ceci est parfois le fait de polémistes  (Cf. les mythologies affairistes, des « banquiers juifs cosmopolites » aux « 200 Familles » ou au « Mur d’argent ». Très significatif à ce sujet est [[Emmanuel Beau de Loménie|Beau de Loménie (E.)]], ''Les responsabilités des dynasties bourgeoises'', Paris, Denoël, 1943.), mais les études historiennes scientifiques sont aussi marquées par le prisme de « la réalité d’une oligarchie patronale, finalement assez restreinte, qui détient les leviers de l’influence. Cette oligarchie des affaires s’est évidemment transformée, adaptée, modernisée au fil du temps », et ce serait là l’objet de l’analyse. On l’a compris, le couple patron/politique a généré des représentations négatives, et ce sont d’abord ces dernières {{incise|les « affaires », les complots }} qui ont été travaillées, plus que ne l’ont été les passages et les passeurs, c’est-à-dire les engagements directs des patrons dans l’arène électorale<ref>{{Article |prénom1=Philippe|nom1=Hamman |titre= Patrons et milieux d'affaires français dans l'arène politique et électorale ({{s mini-|XIX|e}}-{{s-|XX|e}}s)|sous-titre= quelle historiographie ?|périodique= [[Politix]]|lieu= Paris|éditeur= Armand Colin|numéro= 84|titre numéro= Hommes d’affaires en politique |année= 2008|pages= 35-59 |passage= {{n.}}13|lire en ligne=http://www.cairn.info/revue-politix-2008-4-page-35.htm}}.</ref>.}}.}} selon lequel un petit nombre de familles tiendrait en main la majorité des leviers économiques de la France, contrôlant ainsi les destinées politiques du pays. Cette théorie trouve son origine dans les deux cents plus gros [[actionnaire]]s (sur près de {{unité|40000}}) qui constituaient autrefois l'Assemblée générale de la [[Banque de France]].
 
Dans la continuité de représentations négatives comme le « {{citation|[[mur d'argent »]]}}, les deux cents familles sont dénoncéesstigmatisées en tant que symbole de « {{citation|l'argent-roi »}}, de la « {{citation|féodalité financière »}} et des « {{citation|gros contre le peuple}} »par des polémistes de diverses tendances politiques. Elles sont particulièrementnotamment évoquées durant l'[[entre-deux-guerres]] par lesla partisanspropagande dudes [[Parti politique|partis]] composant ou soutenant le [[Front populaire (radicaux-socialistes,France)|Front socialistespopulaire]]<ref>{{Article|prénom1=Louis |nom1=Trotabas|lien auteur1=Louis Trotabas|titre=Les nouveaux statuts de la Banque de France|périodique=Revue critique de législation et communistes)de jurisprudence|tome=56|lieu=Paris |éditeur=Librairie générale de droit et de jurisprudence|année=1936|passage=331|lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6258538q/f342}}.</ref>.
 
Le {{date|24|juillet|1936}}, le [[Gouvernement Léon Blum (1)|gouvernement]] de [[Léon Blum]] vote une loi réformant les statuts de la Banque de France<ref>{{Article|titre=Loi du 24 juillet 1936 tendant à modifier et à compléter les lois et statuts qui régissent la Banque de France|périodique=[[Journal officiel de la République française]]|numéro=173, {{68e}} année |lieu= |éditeur= |jour=25 |mois=juillet |année=1936|passage=7810-7811|lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6550655t/f2}}.</ref>. L'expressionLe mythe politique des deux cents familles perd alorsensuite progressivement sa {{citation|capacité mobilisatrice}} au profit d'autres représentations négatives comme "grandes{{citation|la fortunes", "multi[[technocratie]]-milliardaires", "[[CACÉcole 40nationale d'administration (France)|énarchie]]"}} ou {{citation|l'[[establishment]]<ref>{{Article|prénom1=Jack |nom1=Hayward|lien auteur1=|titre=N. Mayer, P. Perrineau : ''Le Front national à découvert'' [compte rendu]|périodique=Revue française de science politique|volume=40|numéro=2|lieu=Paris |éditeur=Presses de Sciences Po|mois=avril|année=1990|lire en ligne=http://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-2950_1990_num_40_2_394478 |passage=275}}.</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Birnbaum|2012|p=266-278}}.</ref>.}}
 
== Historique ==
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=== NaissanceMythe de l'expressiondes « deux cents familles » ===
 
Sous le [[Second Empire]], le [[journaliste]] [[Pierre-Joseph Proudhon|proudhonien]] [[Georges Duchêne]] dénonce l'éviction des petits porteurs d'actions au sein des conseils d'administration en évoquant une {{citation|féodalité}} financière dans laquelle {{citation|les 20 milliards de valeurs mobilières sont à la discrétion de 200 nababs, qui n'y ont pas engagé 200 millions. L'antiquité ne fournit pas d'exemple d'oligarchie aussi concentrée<ref>[[Georges Duchêne]], ''L'Empire industriel. Histoire critique des concessions financières et industrielles du Second Empire'', Paris, Librairie centrale, 1869, {{p.|299}}, [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5773155v/f304.image lire en ligne].</ref>.}}
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{{citation bloc|Ce sont deux cents familles qui, par l'intermédiaire des Conseils d'administration, par l'autorité grandissante de la banque qui émettait les actions et apportait le crédit, sont devenues les maîtresses indiscutables, non seulement de l'économie française mais de la politique française elle-même. Ce sont des forces qu'un État démocratique ne devrait pas tolérer, que [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]] n'eût pas tolérées dans le royaume de France<ref name="m" />. L'empire des deux cents familles pèse sur le système fiscal, sur les transports, sur le crédit. Les deux cents familles placent leurs mandataires dans les cabinets politiques. Elles agissent sur l'opinion publique car elles contrôlent la presse<ref>{{harvsp|Birnbaum|2012|p=65-66}}.</ref>.}}
[[Fichier:200 familles L'Humanité 21 janvier 1936.jpg|vignette|<center>La série « Et voici les 200 familles... » d'[[Augustin Hamon]], publiée dans le quotidien communiste ''[[L'Humanité]]'', {{n°|13549}}, {{date|21|janvier|1936}}.<br>(Paris, [[Bibliothèque nationale de France|BnF]]).</center>]]
Dans le contexte de la [[Grande Dépression]] économique des [[années 1930]], le slogan des « 200 familles » a été très largement repris, parfois par des milieux politiques aussi opposés :que l'[[Ligue d'extrême droite|extrême droite]] largement antisémite, des anti-fascistes tels les [[anarchiste]]s, le [[Front populaire (France)|Front populaire]] avant tout, et même [[Léon Trotsky]], qui écrit {{citation|Dans le cadre du régime bourgeois, de ses lois, de sa mécanique, chacune des « deux cents familles » est incomparablement plus puissante que le gouvernement Blum}} (''Où va la France ?'', 1936). [[Jacques Doriot]], transfuge du [[Parti communiste français|PCF]] et fondateur du [[Parti populaire français]] (PPF, extrême-droite), affirme ainsi, en 1937, qu'il faut lutter {{citation|contre les deux cents familles capitalistes et contre l'état-major communiste, parfois complices contre le pays<ref>« À Saint-Denis, le PPF fera la paix du monde. », éditorial de [[Jacques Doriot]], ''[[L'Émancipation nationale|L'Émancipation]]'', 5 août 1937, cité dans {{Article |langue= fr|prénom1=Jean-Paul |nom1=Brunet|lien auteur1= Jean-Paul Brunet|titre= Un fascisme français |sous-titre= le Parti populaire français de Doriot (1936-1939)|périodique= Revue française de science politique|lieu= Paris|éditeur= Presses de la Fondation nationales des sciences politiques|volume= 33|numéro= 2|mois= avril|année= 1983|pages= 260 |url texte=http://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-2950_1983_num_33_2_394065}}.</ref>.}}
 
Le leader communiste [[Maurice Thorez]] fournit également le même type d'{{citation|explication simple}} à la crise économique persistante en France en dénonçant {{citation|les deux cents familles<ref>{{Article |langue= fr|prénom1=Jean-Jacques |nom1=Becker|lien auteur1= Jean-Jacques Becker|titre= La perception de la puissance par le parti communiste|périodique=[[Revue d'histoire moderne et contemporaine]]|lieu= Paris|éditeur= Presses de la Fondation nationales des sciences politiques|tome= {{XXXI}}|mois= octobre-décembre|année= 1984|pages= 637 |url texte=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54461980/f103.item}}.</ref>.}} Produit par le parti communiste français et réalisé par [[Jean Renoir]], le film de propagande ''[[La vie est à nous (film)|La vie est à nous]]'' ([[1936 au cinéma|1936]]) fustige les grandes fortunes par le biais d'un personnage instituteur, interprété par le comédien [[Jean Dasté]], qui lance la réplique suivante : {{citation|La France n'est pas aux Français, car elle est à deux cents familles. La France n'est pas aux Français, car elle est à ceux qui la pillent<ref>{{Article |prénom1=Pascal |nom1=Laborderie|lien auteur1= |titre= Voix-off et film-fable |sous-titre= le cinéma d’éducation populaire à l’épreuve du parlant|périodique= Cahiers de Narratologie |numéro= 20 |titre numéro= Voix off et narration cinématographique|année= 2011 |lire en ligne=http://narratologie.revues.org/6332}}.</ref>.}}
[[Fichier:Le Crapouillot - Les 200 familles.jpg|vignette|<center>« Les 200 familles », ''[[Le Crapouillot]]'', mars 1936.</center>]]
Durant l'[[entre-deux-guerres]], le périodique satirique ''[[Le Crapouillot]]'' contribue également {{citation|à asseoir}} le thème. Sous la [[Quatrième République (France)|Quatrième République]], la nouvelle formule du magazine de [[Jean Galtier-Boissière]] {{citation|recens[era] ''Les Gros'', ceux qui détenaient la fortune nationale, cette reviviscence du mythe des "deux cents familles"<ref>{{Ouvrage|prénom1=Florent|nom1=Brayard|lien auteur1=Florent Brayard|préface=[[Pierre Vidal-Naquet]]|titre=Comment l'idée vint à M. Rassinier| sous-titre= naissance du révisionnisme|éditeur=Fayard|collection= Pour une histoire du {{s-|XX|e}}|lieu=Paris|année=1996|pages totales=464|présentation en ligne=http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/homso_0018-4306_1996_num_120_2_3482|isbn= 2-213-59507-0}}, {{lire en ligne|lien=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54470645/f175|texte=présentation en ligne}}.</ref>.}}
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