« Utilisateur:Albinflo/Brouillon » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Albinflo (discuter | contributions)
Albinflo (discuter | contributions)
Aucun résumé des modifications
Ligne 1 :
=== '''Un modèle anonyme qui suscite bien des fantasmes d’identité''' ===
Aucune source historique ne documente les circonstances de la réalisation du tableau par [[Gustave Courbet|Courbet]]. Celui-ci n’en fait nulle part mention dans sa correspondance<ref name=":2">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Petra Ten-Doesschate Chu|titre=Édition commentée de la Correspondance de Gustave Courbet|passage=|lieu=Paris|éditeur=Flammarion|date=1996|pages totales=635|isbn=978-2080117649|lire en ligne=}}</ref>, et les témoignages de ses contemporains, qui sont rares et parcellaires, n’apportent aucune certitude formelle sur l’identité du modèle. Pour autant, les spéculations sont allées bon train, amplifiées depuis que le tableau est entré dans les collections publiques, comme si l’anonymat du modèle était particulièrement insupportable et/ou un puissant stimulant de fantasmes pour les enquêteurs. C’est ainsi qu’une multitude d’hypothèses, plus ou moins sérieuses et étayées, ont voulu donner un nom, et surtout un visage, à ce sexe anonyme.
 
==== Une fausse piste durable ====
Ligne 6 :
Fichier:Jo, La Belle Irlandaise MET DT1909.jpg|Courbet, ''[[Jo, la belle irlandaise]]'' (1866).
Fichier:Whistler.white.393pix.jpg|Whistler, ''{{lien|trad=Symphony in White, No. 1: The White Girl|fr=Symphonie en bland n°1|texte=Symphonie en blanc {{n°}}1}}'' (1862).
</gallery>L’une d’elle, longtemps en vogue, a affirmé qu’il s’agissait de [[Joanna Hiffernan|Johanna (dite « Jo ») Hiffernan]], une irlandaise muse modèle et maîtresse du peintre [[James Abbott McNeill Whistler|James McNeill Whistler]] qui la décrit ainsi à [[Henri Fantin-Latour|Fantin-Latour]] : « C’est des cheveux les plus beaux que tu n’aies jamais vu ! d’un rouge non pas doré mais ''cuivré'', comme tout ce qu’on a rêvé de Vénitienne<ref name=":3">{{Ouvrage|langue=anglais|auteur1=|titre=The Correspondence of James McNeill Whistler, 1855-1903|passage=lettre de janvier-juin 1861, GUW 08042. C’est Whistler qui souligne.|lieu=University of Glasgow|éditeur=Margaret F. MacDonald, Patricia de Montfort et Nigel Thorp (éd.)|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=http://www.whistler. arts.gla.ac.uk/correspondence}}</ref> ! » En dépit de l’aporie faisant d’une irlandaise connue pour être une vraie rousse, la propriétaire de la toison noire de ''L’Origine du Monde'', cette version s’est diffusée à l’envi jusqu’à culminer le 7 février 2013 avec le tapage médiatique causé par l’improbable découverte d’un fragment de tableau complétant ''L’Origine du Monde'' identifié comme la tête de Jo<ref name=":4">Pour la reconstitution détaillée du dossier, voir la postface de la nouvelle (5<sup>ème</sup>) édition de ''L’Origine du Monde'' de Thierry Savatier, Paris, Bartillat 2019, p. 265-304.</ref>, un scoop « fantaisiste » selon le [[Musée d'Orsay|Musée d’Orsay]], qui depuis a fait long feu<ref name=":5">{{Lien web|langue=Français|titre=Communiqué de presse du Musée d’Orsay « L'Origine du monde n'a pas perdu sa tête... »|url=https://www.musee-orsay.fr/fileadmin/mediatheque/integration_MO/PDF/CP/CP_L_Origine_du_monde.pdf|site=musee-orsay.fr|périodique=|date=8 février 2013|consulté le=26 mai 2019}}</ref>.
 
La première mention selon laquelle [[Joanna Hiffernan]] avait ‘‘probablement’’ servi de modèle à ''L’Origine'' remonte à 1978, par l’historienne de l’art Sophie Monneret. [[Jean-Jacques Fernier]] reprit l’hypothèse dans le catalogue de l’exposition « Les Yeux les plus secrets » qu’il organisa en 1991 à Ornans, où le tableau, qui appartenait alors à [[Sylvia Bataille]], fut pour la première fois présenté au public français. Cette version devint, en 2000, le pivot du scénario développé par [[Christine Orban]] dans un roman : ''J’étais l’origine du monde'' (Albin-Michel)<ref name=":6">{{Lien web|langue=français|auteur1=Thierry Savatier|titre=De qui « L’Origine du monde » est-elle le nom ?|url=http://savatier.blog.lemonde.fr/2013/02/14/de-qui-lorigine-du-monde-est-elle-le-nom/|site=lemonde.fr|périodique=|date=14 février 2013|consulté le=26 mai 2019}}</ref><ref name=":7">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Antoinette Le Normand-Romain, Isolde Pludermacher, Thierry Savatier (éd.)|titre=Cet obscur objet de désirs – Autour de L’Origine du monde|passage=|lieu=Paris|éditeur=Liénard|date=2014|pages totales=175|isbn=978-2359061147|lire en ligne=}}</ref>. Le succès de dernier a contribué à diffuser la légende tenace selon laquelle la rousse irlandaise aurait été non seulement le modèle, mais de surcroît la maîtresse de Courbet, et le tableau l’objet de rupture entre elle et son amant Whistler. Une version romancée largement répandue<ref name=":8">C’est d’ailleurs la version qui figura dans l’encyclopédie libre Wikipédia, depuis la création de la page le 13 janvier 2005, jusqu’au 10 juin 2019 et que de nombreux ouvrages historiques ont colporté telle une vulgate.</ref> et qu’une enquête historique minutieuse a récemment permis de démentir définitivement, en montrant que Johanna Hiffernan n’était pas à Paris au moment où la toile a été peinte, que la rupture entre Jo et Whistler date de 1872 et que la prétendue jalousie amoureuse de ce dernier est pure invention romanesque<ref name=":9">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Yves Sarfati|titre=L’Anti-Origine du Monde|passage=|lieu=|éditeur=Les Presses du Réel|date=2017|pages totales=460|isbn=978-2840668336|lire en ligne=}}</ref>. Bien au contraire, c’est Whistler qui invita Courbet à peindre le visage de Jo, en 1865, à Trouville, en un portrait intitulé « [[Jo, la belle irlandaise|Jo, la Belle Irlandaise]] » qui rend honneur à la splendeur de sa chevelure rousse. Tout indique que leurs relations se soient arrêtées là<ref name=":10">Pour un récit circonstancié de l’histoire du trio : Yves Sarfati, ''L’Anti-Origine du Monde'', Les presses du réel, 2017</ref><ref name=":11">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Thierry Savatier|titre=L’Origine du Monde|passage=p. 54-64|lieu=|éditeur=Bartillat|date=2019 (5ème édition)|pages totales=322|isbn=978-2841006670|lire en ligne=}}</ref>.
 
==== Autres spéculations ====
Ligne 15 :
Fichier:Melle Queniaux opéra (ballet) par Nadar (1820-1910).jpg|Photographie de {{Mlle}} Queniaux par [[Nadar]], v.1860.
Fichier:Cora Pearl (A).jpg|Photographie de [[Cora Pearl]] par [[Eugène Disdéri]], v.1860
</gallery>D’autres noms ont circulé visant à abolir l’anonymat de ''L’Origine du Monde''. Ainsi, celui de deux femmes, parmi les plus prisées à Paris en 1866, deux fameuses courtisanes, à la fois maîtresses du [[Napoléon-Jérôme Bonaparte|prince Napoléon]] (proche cousin de [[Napoléon III]]), et de [[Khalil Chérif Pacha|Khalil-Bey]], le propriétaire de la toile : [[Comtesse de Loynes|Jeanne de Tourbey]]<ref name=":12">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Michèle Haddad|titre=Gustave Courbet, Peinture et Histoire|passage=p. 142|lieu=Paris|éditeur=Presses du Belvédère|date=2007|pages totales=243|isbn=978-2884190855|lire en ligne=}}</ref> (surnommée « La dame aux violettes ») et [[Cora Pearl]]<ref name=":13">{{Ouvrage|langue=anglais|auteur1=Klaus Herding|titre=Courbet, A Dream of Modern Art|passage=p. 34|lieu=Francfort|éditeur=Hatje Cantz|date=2010|pages totales=304|isbn=978-3775726290|lire en ligne=}}</ref> (surnommée ‘’La grande horizontale’’). Une troisième maîtresse de Khalil Bey, [[Constance Quéniaux]], tient la corde de nos jours, depuis que Claude Schopp, spécialiste d’[[Alexandre Dumas]], a restitué le sens corrompu d’une lettre de ce dernier à [[George Sand]] où il écrit : « On ne peint pas de son pinceau le plus délicat et le plus sonore l’intérieur de M<sup>lle</sup> Queniault (sic) de l’Opéra »<ref name=":14">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Claude Schopp|titre=L’Origine du Monde, vie du modèle|passage=|lieu=Paris|éditeur=Phoebus|date=2018|pages totales=160|isbn=|lire en ligne=}}</ref>. Ajoutant du crédit à cette hypothèse, la chevelure intensément brune de Constance Quéniaux s’accorde, elle, bien avec la toison de ''L’Origine''.
 
S’il ne semble pas absurde que le modèle ait pu appartenir au « sérail » de Khalil Bey, « le Turc des Boulevards » destinataire du tableau, collectionneur de nus et amateur de femmes, il semble en revanche très improbable qu’un modèle ait pu tenir longtemps la pose exigée par le tableau de Courbet. Ce dernier argument est avancé pour suggérer le rôle intermédiaire qu’a pu jouer la photographie dans la fabrication de la toile<ref name=":0">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Thierry Savatier|titre=L'Origine du Monde|passage=p. 67-69|lieu=|éditeur=Bartillat|date=2019 (5ème édition)|pages totales=322|isbn=978-2841006670|lire en ligne=}}</ref>.
 
==== Le rôle de la photographie ====
Il existe plusieurs mentions, sous la plume de Courbet et de ses correspondants, de son utilisation de photographies pour peindre des nus<ref name=":15">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Fried Michael|titre=Le Réalisme de Courbet|passage=p. 352|lieu=Paris|éditeur=Gallimard|collection=NRF Essais|date=1990|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref><ref name=":16">Lettre de [[Théophile Silvestre]] à [[Alfred Bruyas]], 8 avril 1873, Paris, Bibliothèque d’Art et d’Archéologie, fonds Jacques Doucet, ms. 216</ref>. Il conservait du reste plusieurs centaines de clichés de nus dans son atelier d’[[Ornans]], dont certains par [[Julien Vallou de Villeneuve|Vallou de Villeneuve]], par [[Auguste Belloc|Joseph-Auguste Belloc]] et par les frères [[Louis-Auguste Bisson|Louis-Auguste]] et [[Auguste-Rosalie Bisson]]<ref name=":17">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Valérie Bajou|titre=Courbet|passage=p. 318|lieu=Paris|éditeur=Adam Biro|date=2007|pages totales=304|isbn=978-2876603752|lire en ligne=}}</ref>. Le cadrage de ''L’Origine du Monde'' reprend à l’identique celui d’épreuves conçues pour le [[stéréoscope]] par Belloc, dont le modèle, s’il faut absolument un nom, s’appelait Augustine Legaton<ref name=":1">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Laurence des Cars, Dominique de Font-Réaulx, Gary Tinterow, Cathryn Calley Galitz, Michel Hilaire et Sylvain Amic (éd.), avec Bruno Mottin, Bertrand Tillier et Dominique Lobstein|titre=Gustave Courbet|passage=p. 378-384|lieu=Paris|éditeur=Réunion des musées nationaux|date=2007|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref>. Pour un grand nombre d’historiens de l’art contemporains parmi les plus sérieux et avec les meilleurs arguments, la photographie pornographique est source, à la fois, de l’iconographie et de la composition de l’''Origine''. On compte [[Linda Nochlin]]<ref name=":18">Linda Nochlin, « Living with Courbet », dans ''Courbet à neuf !'' Sous la Direction de Mathilde Arnoux, Dominique de Font-Réaulx, Laurence des Cars, Stéphane Guégan et Scarlett Reliquett – ''Courbet à Neuf !'' – Editions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2010, p . 16</ref>, Valérie Bajou<ref name=":19">{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Valérie Bajou|titre=Courbet|passage=p. 344|lieu=Paris|éditeur=Adam Biro|date=2007|pages totales=304|isbn=978-2876603752|lire en ligne=}}</ref>, Thierry Savatier<ref name=":0" />, [[Laurence des Cars]] et Dominique de Font-Réaulx<ref name=":1" /> parmi les partisans de cette dernière interprétation.
 
 
==='''Un modèle anonyme qui suscite bien des fantasmes d’identité'''===
Aucune source historique ne documente les circonstances de la réalisation du tableau par [[Gustave Courbet|Courbet]]. Celui-ci n’en fait nulle part mention dans sa correspondance<ref name=":2" />, et les témoignages de ses contemporains, qui sont rares et parcellaires, n’apportent aucune certitude formelle sur l’identité du modèle. Pour autant, les spéculations sont allées bon train, amplifiées depuis que le tableau est entré dans les collections publiques, comme si l’anonymat du modèle était particulièrement insupportable et/ou un puissant stimulant de fantasmes pour les enquêteurs. C’est ainsi qu’une multitude d’hypothèses, plus ou moins sérieuses et étayées, ont voulu donner un nom, et surtout un visage, à ce sexe anonyme.
 
==== Une fausse piste durable ====
<gallery caption="Portrait de [[Joanna Hiffernan|Johanna (dite « Jo ») Hiffernan]]">
Fichier:Jo, La Belle Irlandaise MET DT1909.jpg|Courbet, ''[[Jo, la belle irlandaise]]'' (1866).
Fichier:Whistler.white.393pix.jpg|Whistler, ''{{lien|trad=Symphony in White, No. 1: The White Girl|fr=Symphonie en bland n°1|texte=Symphonie en blanc {{n°}}1}}'' (1862).
</gallery>L’une d’elle, longtemps en vogue, a affirmé qu’il s’agissait de [[Joanna Hiffernan|Johanna (dite « Jo ») Hiffernan]], une irlandaise muse modèle et maîtresse du peintre [[James Abbott McNeill Whistler|James McNeill Whistler]] qui la décrit ainsi à [[Henri Fantin-Latour|Fantin-Latour]] : « C’est des cheveux les plus beaux que tu n’aies jamais vu ! d’un rouge non pas doré mais ''cuivré'', comme tout ce qu’on a rêvé de Vénitienne<ref name=":3" /> ! » En dépit de l’aporie faisant d’une irlandaise connue pour être une vraie rousse, la propriétaire de la toison noire de ''L’Origine du Monde'', cette version s’est diffusée à l’envi jusqu’à culminer le 7 février 2013 avec le tapage médiatique causé par l’improbable découverte d’un fragment de tableau complétant ''L’Origine du Monde'' identifié comme la tête de Jo<ref name=":4" />, un scoop « fantaisiste » selon le [[Musée d'Orsay|Musée d’Orsay]], qui depuis a fait long feu<ref name=":5" />.
 
La première mention selon laquelle [[Joanna Hiffernan]] avait ‘‘probablement’’ servi de modèle à ''L’Origine'' remonte à 1978, par l’historienne de l’art Sophie Monneret. [[Jean-Jacques Fernier]] reprit l’hypothèse dans le catalogue de l’exposition « Les Yeux les plus secrets » qu’il organisa en 1991 à Ornans, où le tableau, qui appartenait alors à [[Sylvia Bataille]], fut pour la première fois présenté au public français. Cette version devint, en 2000, le pivot du scénario développé par [[Christine Orban]] dans un roman : ''J’étais l’origine du monde'' (Albin-Michel)<ref name=":6" /><ref name=":7" />. Le succès de dernier a contribué à diffuser la légende tenace selon laquelle la rousse irlandaise aurait été non seulement le modèle, mais de surcroît la maîtresse de Courbet, et le tableau l’objet de rupture entre elle et son amant Whistler. Une version romancée largement répandue<ref name=":8" /> et qu’une enquête historique minutieuse a récemment permis de démentir définitivement, en montrant que Johanna Hiffernan n’était pas à Paris au moment où la toile a été peinte, que la rupture entre Jo et Whistler date de 1872 et que la prétendue jalousie amoureuse de ce dernier est pure invention romanesque<ref name=":9" />. Bien au contraire, c’est Whistler qui invita Courbet à peindre le visage de Jo, en 1865, à Trouville, en un portrait intitulé « [[Jo, la belle irlandaise|Jo, la Belle Irlandaise]] » qui rend honneur à la splendeur de sa chevelure rousse. Tout indique que leurs relations se soient arrêtées là<ref name=":10" /><ref name=":11" />.
 
==== Autres spéculations ====
<gallery>
Fichier:Madame de Loynes.jpg|Jeanne de Tourbey, future [[comtesse de Loynes]], peinte par [[Amaury-Duval]]
Fichier:Melle Queniaux opéra (ballet) par Nadar (1820-1910).jpg|Photographie de {{Mlle}} Queniaux par [[Nadar]], v.1860.
Fichier:Cora Pearl (A).jpg|Photographie de [[Cora Pearl]] par [[Eugène Disdéri]], v.1860
</gallery>D’autres noms ont circulé visant à abolir l’anonymat de ''L’Origine du Monde''. Ainsi, celui de deux femmes, parmi les plus prisées à Paris en 1866, deux fameuses courtisanes, à la fois maîtresses du [[Napoléon-Jérôme Bonaparte|prince Napoléon]] (proche cousin de [[Napoléon III]]), et de [[Khalil Chérif Pacha|Khalil-Bey]], le propriétaire de la toile : [[Comtesse de Loynes|Jeanne de Tourbey]]<ref name=":12" /> (surnommée « La dame aux violettes ») et [[Cora Pearl]]<ref name=":13" /> (surnommée ‘’La grande horizontale’’). Une troisième maîtresse de Khalil Bey, [[Constance Quéniaux]], tient la corde de nos jours, depuis que Claude Schopp, spécialiste d’[[Alexandre Dumas]], a restitué le sens corrompu d’une lettre de ce dernier à [[George Sand]] où il écrit : « On ne peint pas de son pinceau le plus délicat et le plus sonore l’intérieur de M<sup>lle</sup> Queniault (sic) de l’Opéra »<ref name=":14" />. Ajoutant du crédit à cette hypothèse, la chevelure intensément brune de Constance Quéniaux s’accorde, elle, bien avec la toison de ''L’Origine''.
 
S’il ne semble pas absurde que le modèle ait pu appartenir au « sérail » de Khalil Bey, « le Turc des Boulevards » destinataire du tableau, collectionneur de nus et amateur de femmes, il semble en revanche très improbable qu’un modèle ait pu tenir longtemps la pose exigée par le tableau de Courbet. Ce dernier argument est avancé pour suggérer le rôle intermédiaire qu’a pu jouer la photographie dans la fabrication de la toile<ref name=":0" />.
 
==== Le rôle de la photographie ====
Il existe plusieurs mentions, sous la plume de Courbet et de ses correspondants, de son utilisation de photographies pour peindre des nus<ref name=":15" /><ref name=":16" />. Il conservait du reste plusieurs centaines de clichés de nus dans son atelier d’[[Ornans]], dont certains par [[Julien Vallou de Villeneuve|Vallou de Villeneuve]], par [[Auguste Belloc|Joseph-Auguste Belloc]] et par les frères [[Louis-Auguste Bisson|Louis-Auguste]] et [[Auguste-Rosalie Bisson]]<ref name=":17" />. Le cadrage de ''L’Origine du Monde'' reprend à l’identique celui d’épreuves conçues pour le [[stéréoscope]] par Belloc, dont le modèle, s’il faut absolument un nom, s’appelait Augustine Legaton<ref name=":1" />. Pour un grand nombre d’historiens de l’art contemporains parmi les plus sérieux et avec les meilleurs arguments, la photographie pornographique est source, à la fois, de l’iconographie et de la composition de l’''Origine''. On compte [[Linda Nochlin]]<ref name=":18" />, Valérie Bajou<ref name=":19" />, Thierry Savatier<ref name=":0" />, [[Laurence des Cars]] et Dominique de Font-Réaulx<ref name=":1" /> parmi les partisans de cette dernière interprétation.