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[[Image:Cap Blanc-Nez Cliff Line 800x600.jpg|vignette|Falaises du [[Cap Blanc-Nez]] (Pas-de-Calais, France).]]
 
historiques conduisent à la réouverture de quelques carrières.
La '''craie''' est une [[roche sédimentaire]] [[calcaire]] blanche marine de type [[Micrite|biomicrite]], de texture [[Classification de Dunham|mudstone à packstone]], à grain généralement très fin, tendre, marquante, poreuse et perméable, et assez pure contenant presque exclusivement du [[carbonate de calcium]] CaCO{{Ind|3}} (90 % ou plus) et un peu d'[[argile]]. Formée dans des mers chaudes et peu profondes, elle est constituée essentiellement<ref>Le [[Matrice (géologie)|ciment]] de [[calcite]] microcristalline est peu abondant.</ref> par l'accumulation d'algues planctoniques (surtout des [[coccolithe]]s), auxquelles s’ajoutent en quantité variable des fragments d'[[Inoceramus|inocérames]], d'[[échinoderme]]s ou de [[bryozoaire]]s, ainsi que des [[foraminifère]]s<ref>{{ouvrage|auteur=[[Alain Foucault]], Jean-François Raoult, Fabrizio Cecca, Bernard Platevoet|titre=Dictionnaire de Géologie|éditeur=Dunod|date=2014|passage=96|lire en ligne={{Google Livres|82CeAwAAQBAJ}}}}.</ref>. Les principales accumulations de craie en Europe datent du [[Crétacé]], [[période géologique]] à laquelle la craie a donné son nom.
 
La craie est un [[calcaire]] souvent très pur, elle peut cependant être [[marne (roche)|marneuse]] (lorsque le taux d'argile atteint des proportions plus élevées), glauconieuse (si elle contient de la [[glauconie]]), dolomitique (si elle contient des recristallisations de [[dolomite]] comme dans la craie de [[Vernon (Eure)|Vernon]]), à [[silex]], etc. La craie contient fréquemment des niveaux de [[silex]] interstratifiés.
Le [[tuffeau]] est de la craie [[mica]]cée ou sableuse à grain fin, de couleur blanche ou crème parfois jaunâtre, contenant quelques paillettes de mica blanc ([[muscovite]]).
 
== Origine et formation ==
[[Fichier:Coccolithus pelagicus.jpg|vignette|Coquille de ''Coccolithus pelagicus'', une espèce actuelle de [[coccolithophoridé]] de l'Atlantique, les plaques dont cette coquille est constituée sont les [[coccolithe]]s.]]
La craie s'est formée dans des mers de profondeur moyenne ({{Unité|300|m}} environ ou moins, tels que les [[plateau continental (géophysique)|plateaux continentaux]], les bassins sédimentaires), sous climat chaud. Une intense activité du [[phytoplancton]] a provoqué la [[sédimentation]] d'une boue [[micrite|micritique]] (constituée de débris microscopiques, entre 0,1 et 10 µm) de squelettes calciques issus des mues de microorganismes marins : ce sont essentiellement des [[coccolithe]]s, plaques constituant les coquilles des [[coccolithophoridé]]s, qui constituent la craie, mais aussi un peu de [[foraminifère]]s planctoniques et des [[Spicule (biologie)|spicules]] d'éponges <ref>http://documentation.lutecia.fr/spip.php?article9</ref>. On peut y trouver aussi quelques macro-fossiles d'organismes marins comme des petits coquillages, mais aussi des coquilles d'[[oursin]]s, des rostres de [[bélemnite]], des [[Ammonoidea|ammonites]] et plus rarement des poissons et des reptiles marins. La craie est un calcaire à cimentation modérée et qui n'a pas subi de compression ou déformation très importante au cours des temps géologiques après sa formation. Les formations de craie sont connues seulement du [[Mésozoïque]] (à partir de - 250 Ma) mais tout particulièrement au [[Crétacé]], époque à laquelle la craie a donné son nom. À ce titre, la craie est comme tous les calcaires le produit d'un ancien [[puits de carbone]] géologique, et elle joue aussi un rôle important pour le cycle du calcium. Au cours du [[Crétacé]] supérieur (entre -100 et -65 millions d'années), d'importantes couches de craie se sont déposées sur l'actuel [[Bassin parisien]] qui était alors une mer intérieure sous climat tropical.
 
== Pétrographie ==
La craie typique correspond à un calcaire généralement blanc, moyennement dense et compact, poreuse (10 à 40 % de porosité totale<ref>Sa porosité au moment du dépôt atteint 70 à 80 %, puis elle décroît au cours de la [[diagenèse]].</ref> mais rarement plus de 1 % de porosité efficace). Les fossiles de grande taille entiers ou en débris (spicules de {{lien|fr=silicisponges|lang=en|trad=Siliceous sponge}}, fragments de [[bryozoaire]]s, prismes d'[[inocérame]]s), forment une partie non négligeable à laquelle s'associent de nombreux [[microfossiles]] ([[ostracode]]s, [[foraminifère]]s) et de [[nanofossile]]s ([[Nannoconus]], [[coccosphère]]s et [[coccolithe]]s)<ref>{{ouvrage|auteur=Claude Cavelier, Jacqueline Lorenz|titre=Aspect et évolution géologiques du Bassin parisien|éditeur=Association des Géologues du Bassin de Paris|date=1987|passage=216}}.</ref>.
 
Elle ne montre pas normalement de [[stratification]] évidente, sauf lorsque cette dernière est soulignée par des [[Nodule (géologie)|nodules]] de [[silex]]<ref>{{ouvrage|auteur=Bernard Hoyez|titre=Les Falaises du Pays de Caux: lithostratigraphie des craies turono-campaniennes|éditeur=Publications des Universités de Rouen et du Havre|date=2008|passage=18}}.</ref>.
 
Au point de vue pétrophysique, sa forte porosité (réseau dense de pores généralement de 1 à {{Unité|5|µm}}) associé à une faible [[Perméabilité (fluide)|perméabilité]] font que la craie constitue une [[Roche-mère (géologie)|roche-réservoir]] de première importance en termes de ressource en eau, mais aussi d'hydrocarbures<ref>[http://aapgbull.geoscienceworld.org/content/gsaapgbull/86/4/557/F2.large.jpg?width=800&height=600&carousel=1 Coupe géologique de la mer du Nord montrant les gisements de gaz et de pétrole]. Source : {{en}} G. H. Isaksen, R. Patience, G. van Graas, A. I. Jenssen, « Hydrocarbon System Analysis in a Rift Basin with Mixed Marine and Nonmarine Source Rocks: The South Viking Graben, North Sea », The American Association of Petroleum Geologists, 2002</ref> (gaz, pétrole)<ref>{{ouvrage|auteur=Alain Perrodon|titre=Géodynamique pétrolière: genèse et répartition des gisements d'hydrocarbures|éditeur=Masson|date=1985|passage=116}}.</ref>, notamment en Europe septentrionale et occidentale<ref>[http://b.hoyez.free.fr/wp-content/uploads/mer_de_la_craie3.jpg La mer de la craie de l'Europe occidentale et les terres émergées, au Crétacé]</ref>.
 
== Utilisations ==
 
=== Pierre à bâtir ===
 
La craie a été exploitée à grande échelle pour produire des pierres de taille, servant à la construction des villes et de nombreux et prestigieux monuments du nord de la France<ref>Guide de la géologie en France, éditions Belin, 2008, chapitres "Picardie" et autres</ref>, dans une grande partie des [[Hauts-de-France]] et dans la moitié nord-est de la [[Normandie]], et ce depuis l'époque gallo-romaine.
 
La craie est une roche blanche, tendre, assez légère, avec un grain fin et homogène. Elle est très facile à travailler, à scier et à sculpter. Elle autorise ainsi beaucoup de fantaisies et elle encourage les structures et les sculptures les plus élaborées et aériennes de l'art gothique de ces régions. Son usage sera poussé jusqu'aux dernières limites de ses possibilités techniques. Les carriers ont assez souvent su sélectionner les bancs les plus durs et de bonne qualité pour la construction. Mais cette pierre étant plus ordinairement fragile et très peu résistante face à l'érosion, [[gélivité|gélive]], beaucoup de monuments ont dû payer un lourd tribut au temps lorsque la craie utilisée n'était pas d'assez bonne qualité.
 
Elle a servi au Moyen Âge pour l'[[architecture romane]] comme en témoignent encore les abbayes de [[Abbaye de Jumièges|Jumièges]] et de [[Abbaye Saint-Georges de Boscherville|Boscherville]], le [[Château Gaillard (Les Andelys)|Château Gaillard]], et la collégiale Saint-Omer de [[Lillers]]. Mais c'est surtout avec l'[[architecture gothique]] que la craie va connaitre ses heures de gloire architecturale. Les monuments les plus notables sont les cathédrales de [[Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais|Beauvais]] et d'[[Cathédrale Notre-Dame d'Amiens|Amiens]], mais aussi à [[Église Saint-Vulfran d'Abbeville|Abbeville]], [[Abbatiale de Saint-Riquier|Saint-Riquier]], [[Basilique Saint-Quentin|Saint-Quentin]], [[cathédrale Notre-Dame de Saint-Omer|Saint-Omer]], [[cathédrale Notre-Dame d'Évreux|Évreux]], [[Collégiale Notre-Dame de Vernon|Vernon]], [[Collégiale Notre-Dame des Andelys|les Andelys]], [[Église Notre-Dame de Caudebec-en-Caux|Caudebec-en-Caux]], les nombreuses églises de [[Rouen]] dont [[cathédrale Notre-Dame de Rouen|la cathédrale]], ou encore les cathédrales gothiques disparues de [[Ancienne cathédrale Notre-Dame de Cambrai|Cambrai]], [[Ancienne cathédrale Notre-Dame-en-Cité d'Arras|Arras]] et [[Histoire de Thérouanne|Thérouane]]. La "pierre de [[Vernon (Eure)|Vernon]]" a été exportée jusqu'à Rouen, Paris et Chartres, où elle a surtout servi aux dentelles et sculptures les plus fines du gothique flamboyant. La "pierre d'Avesnes", des carrières souterraines des environs d'[[Avesnes-le-Sec]], proches de l'[[Escaut]], a également été exportée vers les Flandres et les Pays-Bas depuis le Moyen-Âge, en particulier pour la sculpture architecturale décorative, s'accordant bien avec la brique. La craie a encore été très utilisée pour l'architecture de la Renaissance et des périodes baroque et classique de ces régions, comme les maisons du centre-ville d'[[Arras]] ainsi que son [[abbaye Saint-Vaast]], les maisons baroques et classiques et les églises de [[Lille]] (pierre des carrières d'Haubourdin et des [[catiche]]s du sud de l’agglomération lilloise, situées dans une petite avancée des gisements de craie au sein de la plaine de Flandre), ainsi qu'à [[Cambrai]] dont l'[[Cathédrale Notre-Dame de Grâce de Cambrai|actuelle cathédrale]], les monuments du [[Le Cateau-Cambrésis|Cateau-Cambrésis]], mais aussi pour les abbayes de [[Abbaye de Valloires|Valloires]], [[Abbaye de Saint-Amand|Saint-Amand-les-Eaux]] et du [[Abbaye Notre-Dame du Bec|Bec-Hellouin]].
 
Mais jugée trop fragile et altérable, la craie utilisée comme pierre à bâtir tombe en désuétude dans le nord de la France au cours du {{s-|XIX|e}}, quand le développement du transport ferroviaire et fluvial va permettre d'importer massivement le [[calcaire lutétien]] (la pierre typique de la région parisienne, issue des bassins carriers autour de Paris, notamment de l'[[Oise (département)|Oise]]) dans ces régions, jugé plus résistant et plus noble pour la construction par rapport à la craie, considération renforcée par le centralisme parisien et l'exportation du modèle haussmannien, aux formes plus massives et exigeantes en gros blocs que ne peut fournir la craie. Les grands monuments et les nombreux immeubles de l’[[ère industrielle]] du Nord de la France utilisent donc le calcaire lutétien et non plus la craie, et dans la première moitié du {{s-|XX|e}} il se répandra même l'usage du béton peint en blanc comme vague imitation de la craie. C'est ainsi que le potentiel particulier et la connaissance des meilleures craies comme pierre à bâtir tombent dans l’oubli, jusqu'à ce que les besoins d'authenticité sur les chantiers de restauration des monuments historiques conduisent à la réouverture de quelques carrières.
 
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