« Amérindien (catégorisation ethnique) » : différence entre les versions

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{{Article non neutre|date=avril 2022}}
{{Autre4|le fait de catégoriser des personnes ou des groupes comme « Amérindiens »|ces groupes eux-mêmes|Autochtones d'Amérique}}
 
'''Amérindien''', un synonyme d''''Indien d'Amérique''', désigneest le nom colonial donné par erreur uneaux personnepersonnes ayant habité l'[[Amérique]] avant la [[Colonisation européenne des Amériques|colonisation européenne]], ou considéréeaux commepersonnes descendantedescendantes dedes [[Autochtones d'Amérique|premiers peuples dedes l'AmériqueAmériques]]. L'identification des Amérindiens varie considérablement selon les époques, les lieux, les locuteurs. Les critères permettant de déterminer qui est « amérindien » sont jugés par plusieurs sociologues comme incertains, changeants et difficiles à définir, et le mot lui-même, très utilisé en français, pose des problèmes lexicographiques liés à l'inclusion ou l'exclusion desde certains peuples arctiques (dont les [[Inuits]], les [[Yupiks]] et, aules [[CanadaAléoutes]]) et, souvent, à sa [[connotation]].
 
Les personnes ainsi catégorisées préfèrent généralement employer pour s'autodésigner le nom spécifique de leur [[Liste des peuples indigènes des Amériques|groupe d'appartenance]] ; elles se qualifient de plus en plus par le terme « autochtone », associé à des revendications juridiques, dans un contexte de lutte pour la reconnaissance de leurs [[Droit des peuples autochtones|droits]] qui a commencé dans les années 1970. Les institutions internationales comme l'[[Organisation des Nations unies|ONU]] ont consacré depuis quelquesla décennies[[Déclaration_et_programme_d'action_de_Vienne#Les_populations_autochtones|Déclaration de Vienne]] en 1993 l'expression « [[Peuple autochtone|peuples autochtones]] » (en anglais « ''{{langue|en|indigenous peoples}}'' », en espagnol « ''{{langue|es|pueblos indígenas}}'' »), qui suppose une auto-identification, et a des implications politiques. L'[[anthropologie]] qui s'est longtemps vouée à l'étude des [[ethnie]]s a accompagné ces évolutions en accordant de plus en plus d'attention aux différentes formes de domination subies par les autochtones, et aux moyens de mobiliser les énergies dans le but de créer un rapport de forces plus favorable à ces peuples.
 
== Aspects lexicographiques ==
 
=== « Indien » ===
« Indien » préserve de manière littérale une erreur d'identification commise par des [[Colonisation espagnole de l'Amérique|colonisateurs espagnols]] de la fin du {{s|XV}}, qui croyaient avoir débarqué enatteint l'[[Inde]]<ref>{{lien web|url=https://www.herodote.net/12_octobre_1492-evenement-14921012.php|titre=12 octobre 1492
Christophe Colomb atteint le Nouveau Monde|site=herodote.net|consulté le=3 avril 2022|citation=Après une difficile traversée, le 31 mars, c'est l'entrée triomphale à Palos puis à Séville, où les habitants se pressent pour voir et toucher les sept Taïnos que Colomb a ramené des îles et que l'on qualifie aussitôt d'« Indiens » (car chacun croit que leur terre d'origine fait partie des Indes).}}</ref>. C'est la raison pour laquelle il peut être perçu aujourd'huiau {{s|XXI}} comme [[ethnocentrisme|ethnocentrique]]<ref>«Le terme « Indien » pose évidemment un problème majeur d’ethnocentrisme (et fondé sur une erreur radicale d’appréciation !)», Jean-Marc Serme, « Études amérindiennes : le poids des plumes », ''Amnis'', [http://journals.openedition.org/amnis/158 lire en ligne] ; DOI : https://doi.org/10.4000/amnis.158</ref>. Le mot a pris, dans certains contextes, une connotation offensante ou négative, voire [[péjoratif|péjorative]] :
* selon ''[[L'Encyclopédie canadienne]]'', {{citation|le terme « Indien » est désormais considéré comme obsolète et offensant ; toutefois, on y a historiquement eu recours pour désigner les peuples autochtones en Amérique du Sud, centrale et du Nord. Au Canada, ce terme est la plupart du temps utilisé pour faire référence à des identités définies par la loi<ref>{{Lien web |titre=Indien {{!}} l'Encyclopédie Canadienne |url=https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/indien |site=www.thecanadianencyclopedia.ca |consulté le=2021-09-26}}.</ref>}}. {{citation|Les membres des Premières Nations sont souvent désignés par d’autres noms tels qu’Indiens ou Amérindiens. Ces appellations peuvent être problématiques, car certaines ont une connotation négative et d’autres (Indien en particulier) ont un sens juridique particulier au Canada<ref>{{Lien web |titre=Premières Nations : Terminologie|url=https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/premieres-nations |site=thecanadianencyclopedia.ca|consulté le=2022-04-01}}</ref>.}} ;
* en [[anglais américain]], « Indian » est associé selon {{langue|en|''{{lien|trad=The American Heritage Dictionary of the English Language}}''}}{{note|groupe=alpha| Dictionnaire créé à la fin des années 1960 en réaction à la troisième édition du [[Dictionnaire Webster]] international.}} à des stéréotypes stigmatisants comme la sauvagerie, la cruauté (« ''wild Indians'' »){{refsou}} ;
* en [[Amérique latine]], « ''Indio'' » peut être utilisé comme un terme injurieux. Le journaliste et écrivain [[Christian Rudel]], {{citation|spécialiste de l’Amérique latine<ref>{{lien web|url=https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2012/07/27/deces-du-journaliste-christian-rudel-specialiste-de-l-amerique-latine_5990862_3222.html|auteur= Paulo A. Paranagua|titre=Décès du journaliste Christian Rudel, spécialiste de l’Amérique latine
|date=27 juillet 2012|site=lemonde.fr|consulté le=2 avril 2022}}.</ref>}}, note dans l'introduction de son ouvrage ''Réveils amérindiens. du Mexique à la Patagonie'' (2009) : {{citation|Le terme « indien » fut appliqué indifféremment aux [[Indiens des Plaines|habitants des Grandes Plaines]] des actuels États-Unis et à ceux des forêts tropicales amazoniennes, en passant par ceux des hauts plateaux mexicains et andins. Les intéressés se sont rebellés contre cette habitude, d'autant plus que « ''indio'' » {{incise|indien, en espagnol}} était rapidement devenu un terme péjoratif, et même une insulte, et ils ont revendiqué leurs anciennes dénominations, et ont en partie obtenu gain de cause<ref>{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Christian|nom1=Rudel|titre=Réveils amérindiens: du Mexique à la Patagonie|éditeur=KARTHALA Editions|date=2009|isbn=978-2-8111-0039-1|lire en ligne=https://books.google.fr/books?hl=es&lr=&id=r4ICBJ7ulCMC&oi=fnd&pg=PA9|passage=9|consulté le=2022-04-02}}</ref>}} <ref name="Bird" />.
C'est la raison pour laquelle certains mouvements qui veulent réhabiliter les cultures autochtones en Amérique se disent « indiens », manière de retourner le stigmate, et d'assumer fièrement une identité méprisée<ref>« De nombreux mouvements indiens de revendication culturelle qui ont émergé de nos jours sur tout le continent américain demandent à être appelés Indiens. C'est un mouvement semblable à celui des [[Mouvement américain des droits civiques|Noirs aux États-Unis]] qui réclamaient d'être appelés [[Nègre]]s, ou à celui des [[Chrétien#Utilisation ancienne du terme|premiers chrétiens]] qui s'assumaient comme tels pour contrer le mépris dont ce mot était teinté. On assiste ici à la prétention à se nommer, exprimée dans un environnement où la parole de l'autre est toujours prépondérante : la seule solution consiste alors à se réapproprier délibérément les termes qui lui étaient jusqu'alors imposés. Cet acte linguistique volontaire et indépendant met fin aux connotations négatives provenant d'un équilibre social ainsi remis en cause», Sybille de Pury-Toumi, « Capítulo 1. ¿Indios para quién? Historia de una palabra» In: ''De palabras y maravillas: Ensayo sobre la lengua y la cultura de los nahuas, Sierra Norte de Puebla'' . Mexico: Centro de estudios mexicanos y centroamericanos, 1997, {{ISBN|9782821827905}}. DOI: https://doi.org/10.4000/books.cemca.1749.</ref>.
 
{{lien|lang=en|Jack D. Forbes}}{{note|groupe=alpha|Jack D. Forbes (1934-2011), {{citation|universitaire, écrivain, enseignant et activiste politique, est né aux États-Unis de parents [[Powhatans|Powatan-Renápe]] et [[Lenapes|Lenape]]. Après avoir étudié l’histoire, l’anthropologie et la philosophie, il rejoint le {{lien|trad=Red Power movement|fr=Mouvement Red Power|texte=Red Power movement}}, au sein duquel il milite activement […]. À la fin des années 1960, il crée à l’université de Californie le premier département étatsunien d’études amérindiennes. Il est à ce titre l’un des initiateurs des ''{{lien|trad=Native American Studies}}''<ref>{{lien web|url=https://www.lepassagerclandestin.fr/auteurs/jack-d-forbes/|titre=Jack D. Forbes|site=lepassagerclandestin.fr|consulté le=8 avril 2022}}.</ref>.}}}} relève que le problème est aujourd'huidésormais compliqué par l'existence aux États-Unis d'une importante population originaire d'[[Inde]] dont les membres, qui utilisent la même combinaison des termes ''Indian'' et ''American'' {{incise|se dénommant « Indian », « Indo-American » et « Indian American » (dans la tradition des « Italian American » ou « German American »{{etc}})}}, peuvent revendiquer le statut de {{citation|vraie}} communauté indienne. Il note, par ailleurs : {{citation|Les {{langue|en|''Indigenous American''}} essaient depuis longtemps de trouver de meilleurs noms pour eux-mêmes, comme lorsque les personnes qui utilisent le [[peyotl]] dans les cérémonies religieuses se sont constituées en ''{{lien|trad=Native American church}}'' au début de ce siècle{{note|groupe=alpha|L'article, ''The Use of Racial and Ethnic Terms in America'', de Jack D. Forbes étant publié en 1995, il s'agit du début du {{s-|XX}}.}}. Plus récemment, des termes tels que « aboriginal », « indigenous » et « native » sont de plus en plus utilisés, ainsi que des noms nouveaux et quelque peu encombrants tels que « First Nations people » et « sovereign American nation people ». […] De nombreux autochtones d'Amérique du Sud sont également « [[Abya Yala]] », un nom [[Kuna (peuple)|cuna]] pour l'Amérique<ref>{{article|langue=en|titre=The Use of Racial and Ethnic Terms in America|sous-titre=Management by Manipulation|auteur=Jack D. Forbes|périodique=Wicazo Sa Review|année=1995|volume=11|numéro=2|passage=53-65|jstor=1409097}}.</ref>}}.
 
=== « Amérindien » ===
« Amérindien » dérive de l'[[anglais américain]] ''{{lang|en|Amerindian}}'', qui était à l'origine la forme adjectivale du substantif ''{{lang|en|Amerind}}'', [[mot-valise|contraction]] de ''{{lang|en|American Indian}}'' forgée par des anthropologues américains à la fin du {{s|XIX}} et renvoyant de manière générique à tout membre des peuples autochtones d'Amérique, [[Inuits]] inclus<ref name=Nature/>{{,}}<ref name=Anthropologie/>{{,}}<ref name="bdlp">{{Lien web |titre=Base de données lexicographiques panfrancophone, -{{Lien web |titre=amérindien, ienne |url=https://www.bdlp.org/fiche/252 ?rubrique=orig|site=www.bdlp.org |consulté le=2021-09-26}}</ref>.
 
Le terme ''{{lang|en|Amerind}}'' est proposé au congrès de la société anthropologique de Washington en 1899 pour désigner ce qu'un compte-rendu américain d'époque appelle les {{citation|aborigènes américains}}<ref name=Nature>{{article|langue=en|titre=''Amerind'' — A Suggested Designation for American Aborigines|périodique=Nature|volume=60|numéro=1547|date=22 juin 1899|passage=188-189|url texte=https://archive.org/details/nature601899lock/page/188/mode/1up}}.</ref> et un compte-rendu français, tantôt les {{citation|anciennes populations américaines}} et tantôt les {{citation|tribus américaines indigènes}}<ref name=Anthropologie>{{article|titre=Nouvelle dénomination des anciennes populations indigènes|périodique=L'Anthropologie|année=1899|volume=10|numéro=6|passage=500-501|url=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9793273h/f518}}.</ref>. Les tenants de cette proposition estiment que le terme ''Américain'' {{citation|ne signifie rien}}, que le terme ''Indien'' {{citation|ne fait que perpétuer l'erreur et la confusion}} et que les expressions ''Sauvages d'Amérique'' et ''Peaux-Rouges'' ne sont pas {{citation|satisfaisantes}}<ref name=Anthropologie/>. Ils jugent en particulier ces dernières comme connotées et non adaptées à une utilisation {{citation|strictement dénotative}}<ref name=Nature/>{{,}}<ref name="bdlp" />. Ce néologisme suscite toutefois une controverse au Congrès des Américanistes à New York en 1902<ref>{{lien web|format=pdf|langue=en|url=https://timesmachine.nytimes.com/timesmachine/1902/10/22/118482945.pdf|auteur=New York Times|titre=Americanists in dispute|sous-titre=Lively contoversy over coining the word « Amerind »|site=timesmachine.nytimes.com|date=22/10/1902|consulté le=29/10/2021}}</ref>{{,}}<ref>{{ouvrage|langue=en|auteur=Mary McVicker|titre=Adela Breton|sous-titre=A Vicotrian Artist Amid Mexico's Ruins|éditeur=University of New Mexico Press|lieu=Albuquerque|année=2005|passage=84|url=https://www.google.fr/books/edition/Adela_Breton/7TSs-hmJYYIC?hl=fr&gbpv=1&pg=PA84}}</ref>, l'anthropologue [[Franz Boas]] le qualifiant notamment de {{citation|monstre}}<ref>{{article|titre=Le Congrès de New-York|périodique=Journal de la Société de Américanistes|auteur=L. Lejeal|année=1903|volume=1|numéro=1|url texte=https://www.persee.fr/doc/jsa_0037-9174_1903_num_1_1_3392}}.</ref>{{,}}<ref>{{article|langue=en|titre=International Congress of Americanists at New York|auteur=Alexander Chamberlain|périodique=Science|année=1902|columevolume=16|numéro=414|jstor=1628580}}.</ref>.
 
Les mots anglais ''{{lang|en|Amerind}}'' et ''{{lang|en|Amerindian}} ''ne se sont guère imposés dans l'usage. En français, c'est très différent. « Amérindien » entre dans les dictionnaires dans les années 1960 ([[Dictionnaires Le Robert|Robert]], [[Éditions Larousse|Larousse]], etc.)<ref name="bdlp" />, il y est donné comme synonyme d'« Indien d'Amérique » ; cette relation d'équivalence explique le fait que « Amérindien » en français a un sens étroit qui exclut les Inuits : en effet, selon la [[Base de données lexicographiques panfrancophone]]<ref>« {{citation|Le fait quque ''Amérindien'' ne soit pas devenu un générique au Canada s'explique par divers facteurs, dont sa ressemblance avec ''Indien'', lequel ne renvoie jamais à un Inuit, sauf chez de rares anthropologues […]. LesOutre cela, on peut penser que les lexicographes français ont également joué un rôle dans l'établissement de cet usage parce qu'ils associent l'appellation ''Amérindien'' exclusivement aux Indiens d'Amérique, à l'exclusion des Inuits, depuis son introduction dans les dictionnaires, en 1960 (v. [[Dictionnaire Larousse|Larousse]] 1960, [[Petit Robert]] 1967-1995 et [[Petit Larousse|PLar]] 1968-1993 »}}, {{Lien web |titre=Base de données lexicographiques panfrancophone - amérindien, ienne |url=https://www.bdlp.org/fiche/252 ?rubrique=orig|site=www.bdlp.org |consulté le=2021-09-26}}</ref>, « Indiens » ne renvoie jamais aux [[Inuits]], peuple issu d'un mouvement migratoire distinct et plus récent. La situation est identique au [[Québec]] même si, à la suite de l'anthropologue [[Jacques Rousseau (botaniste)|Jacques Rousseau]], dans les années 1950-1960, le terme est employé au sens large (comprenant les Inuits)<ref name="bdlp" />. « Amérindien » tendant à l'emporter sur « Indien » dans l'usage<ref>[https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Am%C3%A9rindiens/124931 « Amérindiens ou Indiens »], article de l'encyclopédie Larousse en ligne.</ref>, il se trouve encore aujourd'hui dans les dictionnaires sans mention de rareté ni de désuétude, et généralement sans mention d'un caractère péjoratif.
 
Des remaniements terminologiques importants sont intervenus au [[Canada]] ces dernières décennies, affectant les désignations des peuples premiers. « Amérindien » se substitue à « Indien » mais à son tour, il est parfois mal perçu et tend à être écarté dans les années 2010<ref name=bdl>Office québécois de la langue française, {{Lien web |titre=Banque de dépannage linguistique - Désignations de peuples autochtones |url=http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp?id=5335 |site=bdl.oqlf.gouv.qc.ca |consulté le=2021-09-26}}</ref>. {{passageLa inédit|ContrairementBase auxde dictionnairesdonnées ylexicographiques comprispanfrancophone canadiens}},et la Banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement du Canada le présenteprésentent comme « vieilli » enau mêmeCanada<ref temps que son équivalent anglaisname="bdlp"/>{{,}}<ref>{{Lien web |prénom=Travaux publics et Services gouvernementaux Canada |nom=Gouvernement du Canada |titre=AMERINDIEN [1 fiche] - TERMIUM Plus® — Recherche - TERMIUM Plus® |url=https://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alpha-fra.html?lang=fra&i=1&index=alt&srchtxt=AMERINDIEN |site=www.btb.termiumplus.gc.ca |date=2009-10-08 |consulté le=2021-09-26}}</ref>. Au sens étroit, qui exclut les Inuits et les [[Métis (Canada)|Métis]], « Amérindien » tend à être remplacé depuis les années 1980<ref>«En 1980, des centaines de chefs se réunissent à Ottawa et utilisent pour la première fois le terme « Premières Nations » dans la Déclaration des Premières Nations. En 1982, la Fraternité nationale des Indiens devient l’Assemblée des Premières Nations, la voix politique des membres des Premières Nations au Canada», {{Lien web |titre=Premières Nations {{!}} l'Encyclopédie Canadienne |url=https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/premieres-nations |site=www.thecanadianencyclopedia.ca |consulté le=2021-09-26}}</ref> par « [[Premières Nations]] »<ref>« Les membres des [[Premières Nations]] sont souvent désignés par d’autres noms tels qu’''Indiens'' ou ''Amérindiens''. Ces appellations peuvent être problématiques, car certaines ont une connotation négative », {{Lien web |titre=Premières Nations {{!}} l'Encyclopédie Canadienne |url=https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/premieres-nations |site=www.thecanadianencyclopedia.ca |consulté le=2021-09-26}}</ref>, sauf dans un contexte administratif, où « Indiens » a un sens technique bien précis. « Amérindiens » au sens large, incluant les Inuits et les [[Métis (Canada)|Métis]], est supplanté par « Autochtones »<ref>« Le mot Indien tend à être remplacé par Amérindien, puis, plus récemment, par membre d'une Première Nation ou par le générique Autochtone », {{Lien web |nom=Dictionnaire de l'Université de Sherbrooke |titre=Usito |url=https://usito.usherbrooke.ca/définitions/indien |site=Usito |consulté le=2021-09-26}}</ref>. Indépendamment des extensions qu'elle peut prendre, la désignation « Amérindiens » est controversée en raison des possibles [[Dénotation et connotation|connotations]] qui lui sont associées : pour le dictionnaire de l'Université de Sherbrooke, elle est « considérée inexacte, voire péjorative » dans certains contextes<ref>{{Lien web |nom=Dictionnaire de l'Université de Sherbrooke |titre=Usito |url=https://usito.usherbrooke.ca/définitions/amérindien_1 |site=Usito |consulté le=2021-09-26}}</ref> ; le terme est retiré de certains manuels scolaires à la suite d'une décision gouvernementale en 2018<ref name=ledroit>{{Lien web |langue=fr |titre=Le mot «Amérindiens» retiré de manuels d’histoire |url=https://www.ledroit.com/actualites/societe/le-mot-amerindiens-retire-de-manuels-dhistoire-b3cf8ea67bdcab5ca7f11de8a6090b9a |site=Le Droit |date=2018-09-17 |consulté le=2021-09-26}}</ref>. Cette dernière mesure s'inspire des recommandations de la [[Commission de vérité et réconciliation du Canada]], créée en 2008 dans le but de faire la lumière sur les torts subis par les [[Autochtones du Canada]], et de sensibiliser l'opinion à ce sujet<ref name=ledroit/>. La [[Banque de dépannage linguistique]] du Québec inscrit l'abandon progressif de « Amérindien » dans une évolution générale de la terminologie relative aux [[Autochtones du Canada]] : {{citation|de nos jours, certaines appellations anciennes ou jugées [[Péjoratif|péjoratives]] sont devenues moins fréquentes dans l’usage, étant parfois remplacées par des appellations issues de langues autochtones. On a ainsi vu, depuis les années 1970, le nom ''[[Esquimaux]]'' être progressivement remplacé par ''[[Inuits]]''. Plus récemment, on a vu ''[[Premières Nations]]'' se substituer à ''Amérindiens'', qui avait lui-même remplacé ''Indiens'' dans l’usage. C’est également dans cet esprit qu’on a vu s’implanter ''[[Innus|Innu]]'', en remplacement de ''Montagnais'', et ''Wendat'' ou ''[[Hurons-Wendats|Huron-Wendat]]'', préférés à ''Huron''<ref name=bdl/>.}}
 
==== Controverse canadienne sur la refonte des manuels d'histoire ====
Dans le contexte de la refonte des manuels d'histoire canadiens, le [[Conseil en éducation des Premières Nations]] (CÉPN) argue dans un mémoire publié en 2016 que {{citation bloc|Le vocabulaire associé aux Premières Nations et aux Autochtones a beaucoup évolué depuis les cent dernières années. De Sauvages à Premières Nations, en passant par Indiens et Amérindiens, les termes qui ont été utilisés pour décrire les premiers peuples du Canada sont nombreux. Dans la documentation fournie par le ministère sur le nouveau programme, on utilise le terme Amérindien. Ce terme, bien qu’il soit moins péjoratif que Sauvage et plus précis qu’Indien, n'en demeure pas moins problématique et non actuel. Il est important de se rappeler que ce terme provient de la contraction de deux mots, Amérique et Indien, ce qui fait Amérindien […] Lorsque l’on doit parler des premiers habitants de l’Amérique, plusieurs problèmes d’appellation surviennent. De Sauvages à Autochtones en passant par Indigènes, plusieurs termes ont été utilisés au cours de l’Histoire. Au CÉPN, nous recommandons d’utiliser le terme Premières Nations lorsque l’on parle des nations amérindiennes de l’Amérique du Nord. À notre avis, il s’agit du terme le plus adéquat et le plus représentatif; c’est d’ailleurs le terme utilisé par plusieurs organisations (CÉPN, APNQL, etc.) Autochtone peut également être utilisé dans un sens plus large qui inclut les métis, les Inuit et autres groupes se qualifiant d’Autochtones<ref>{{ouvrage|titre=Le nouveau programme d’Histoire du Québec et du Canada du secondaire 3|sous-titre=Analyses et recommandations|auteur=Conseil en Éducation des Premières Nations|année=2016|passage=2-3|url=https://cepn-fnec.ca/wp-content/uploads/2021/01/MemoireHistoireIII-FR.pdf}}.</ref>.}} Dans un second mémoire sur le même sujet, le CEPN ajoute : {{citation|Nous recommandons de ne pas seulement utiliser le terme « Autochtone », car, selon nous, ce terme possède un sens trop large et est souvent imprécis. Par exemple, lorsqu’il est question des personnes qui ont été touchées par la Loi sur les Indiens, il s’agit des Premières Nations et non des Autochtones. Les réserves étaient habitées par les Premières Nations et non par des Autochtones<ref>{{ouvrage|titre=Le nouveau programme d’histoire du Québec de 4e secondaire |sous-titre=Analyses et recommandations|auteur=Conseil en Éducation des Premières Nations|année=2016|passage=1|url=https://cepn-fnec.ca/wp-content/uploads/2021/01/MemoireHistoireIV-FR.pdf}}.</ref>.}}
Ce point de vue est exprimé le {{date-|11|septembre|2016}} lors d'une réunion avec les représentants du Ministère de l'éducation chargés de la refonte des manuels scolaires, {{citation|sans cependant convaincre les responsables qui font valoir l’argument de l’usage très répandu dans le domaine scientifique, du terme « amérindien »}}<ref>{{harvsp|Bories-Sawala|Martin|2020|p=36}}.</ref>. Dans plusieurs courriels internes au ministère du {{date-|14|novembre|2016}}, une responsable fait état de l'arbitrage du ministre : {{citation|[Il] a été convenu d'utiliser le terme Première Nation en remplacement d'Amérindien dans le programme d'histoire du 3ième et 4ième secondaire. Cet enlignement fait suite à la décision du Ministre de donner suite aux recommandations de la commission vérité-réconciliation, et de faire du programme d'histoire le premier jalon vers cette prise de position.}} Elle note toutefois qu'il y a lieu de {{citation|mentionner que l'emploi de l'expression Premières nations pourrait soulever une vive critique de certains historiens. En effet, l'emploi de ce terme avant les années 1970 pourrait être perçu comme une entorse à l'histoire et certains pourrait même affirmer que cette modification s'apparente au fait de parler de « Québécois » avant le 20e siècle<ref>{{harvsp|Bories-Sawala|Martin|2020|p=62}}.</ref>.}}Toutefois, les demandes du CEPN sur ces aspects terminologiques sont entérinés dans le compte-rendu d'une réunion de travail avec le Ministère en date du {{date-|2|février|2017}} dont le compte-rendu fait référence aux recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation et précise : {{citation bloc|L'utilisation des termes « Premières Nations » et « Autochtones » est privilégiée dans l'ensemble du programme provisoire. Les termes « Amérindien » et « Indien » sont utilisés à titre de référence aux noms d'institutions à une époque donnée ou à des expressions consacrées dans l'historiographie<ref>{{harvsp|Bories-Sawala|Martin|2020|p=47}}.</ref>.}}
 
L'article consacré à l'affaire par ''Le Devoir'' du {{date-|19|novembre|2018}} rapporte la réaction de l'historien [[Denys Delâge]] : {{citation|L’effacement du mot « Amérindien » au profit des appellations « Premières Nations » et « Autochtones » a surpris Denys Delâge. « Je ne l’ai pas vu venir. » Paradoxalement, l’ethnonyme honni se voulait « politiquement correct » lorsqu’il a été diffusé par les chercheurs au début des années 1960. « Ce n’est d’aucune manière péjoratif, c’est juste que c’est peu utilisé par les Premières Nations elles-mêmes [...]. Je trouve ça honnêtement un brin sectaire de bannir la désignation amérindienne. Moi, dans tout ce que j’ai écrit, j’ai généralement retenu l’expression ou la désignation « Amérindien» , indique le spécialiste des sociétés autochtones<ref>{{article|titre=La révision des manuels d'histoire dérange|auteurs=Marco Bélair-Cirino et Dave Noël|périodique=Le Devoir|date=20 novembre 2018}}.</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Bories-Sawala|Martin|2020|p=67}}.</ref>.}} En revanche, une lettre ouverte publiée le {{date-|26|novembre|2018}} par seize universitaires québécois affirme : {{citation|Les mots ont un poids: ils sont nécessairement connotés. Le vocable « Amérindien » n’y échappe pas. C’est un terme désuet, dérivé de l’expression « Indien d’Amériques » qui provient elle-même d’une erreur des premiers voyageurs et colonisateurs européens. Ceux qui sont appelés « Amérindiens » préfèrent se nommer membres des Premières Nations. Et si le terme « Amérindiens » n’est pas péjoratif en soi, il homogénéise l’expérience des multiples nations auquel il devrait référer [...] C’est pourtant simple : ‘Rien sur nous sans nous’ clament des chercheur.se.s autochtones. Il est injuste d’aborder ces histoires sans écouter ou mettre de l’avant les voix des personnes concerné.e.s : c’est la moindre des choses et c’est un premier pas vers une vraie réconciliation<ref>{{lien web|titre=Des rapports de pouvoir qui dérangent|site=Histoire engagée|date=26 novembre 2018|url=https://histoireengagee.ca/8787-2/}}.</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Bories-Sawala|Martin|2020|p=70-71}}.</ref>.}}
 
== Exonymie ==
« Indien d'Amérique » et « Amérindien » sont des [[exonymie|exonymes]], des noms qui, au début, n'étaient donnés à des populations que par des étrangers. Selon le chercheur en [[études postcoloniales]] Michael Yellow Bird{{note|groupe=alpha|Michael Yellow Bird (''Doctor of Philosophy'', ''Master of Social Work'') {{citation|est doyen et professeur de la Faculté de [[Travailleur social#Canada, Québec|travail social]] de l'[[Université du Manitoba]]. Il est membre inscrit de la [[Mandans, Hidatsas et Arikaras|nation MHA (Mandan, Hidatsa et Arikara)]] dans le Dakota du Nord.}} Ses recherches portent notamment {{citation|sur les effets de la [[colonisation]] et les méthodes de [[décolonisation]] […] Il est le fondateur, directeur et chercheur principal du ''Centre for Mindful Decolonization and Reconciliation'' de l'Université du Manitoba<ref>{{lien web|url=https://umanitoba.ca/social-work/faculty-and-staff/michael-yellow-bird|titre= Michael Yellow Bird |site=umanitoba.ca|consulté le=8 avril 2020}}.</ref>.}}}} de l'[[université du Manitoba]], ce''Indian'', ''American Indian'', et ''Native American'' sont de ce fait des « appellations oppressives », des « identités colonisées », « contrefaites »<ref>«{{note|groupe=alpha|{{citation étrangère|langue=en|The labels "Indian", " "American Indian", " and "Native American" have been criticized in academic scholarship. I have suggested that these names are oppressive, counterfeit identities that are misleading, inaccurate, and used to control and subjugate the identities of Indigenous Peoples» ;[...] « weWe avoid using "Indian", ""American Indian", and "Native American" because they are "colonized identities" imposed by Europeans and European Americans}}<ref », {{Article |prénom1=Michael Yellow |nom1name=Bird |titre=What We Want to Be Called: Indigenous Peoples' Perspectives on Racial and Ethnic Identity Labels |périodique=American Indian Quarterly |volume=23 |numéro=2 |date=1999 |issn=0095-182X |doi=10.2307/1185964 |lire en ligne=https://www>.jstor.org/stable/1185964 |consulté le=2021-09-27 |pages=1–21 }}</ref>. Les personnes désignées comme amérindiennes se sont considérées historiquement comme appartenant à des peuples divers, non à un groupe ayant une unité ethnique, même si l'expérience de la domination coloniale a établi entre elles des liens de solidarité<ref name="Bird">{{Article harvsp|prénom1=Michael Yellow |nom1=Bird |titre=What We Want to Be Called: Indigenous Peoples' Perspectives on Racial and Ethnic Identity Labels |périodique=American Indian Quarterly |volume=23 |numéro=2 |date=1999 |issn=0095-182X |doi=10.2307/1185964 |lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/1185964 |consulté le=2021-09-27 |pages=1–21 }}.</ref>. Pour Michael Yellow Bird, qui appelle à « décoloniser » le savoir, les Européens ont construit de vastes catégories raciales afin de légitimer leur supériorité et l'exclusion des non-Blancs<ref name="Bird"/>{{,}}<ref>Carmen Salazar-Soler propose la même analyse dans une étude sur le Pérou : « la catégorie d'Indien est une construction coloniale créée en réponse aux besoins du processus de colonisation pour conserver l'opposition entre les indigènes et les colonisateurs. », Carmen Salazar-Soler, « ¿Qué significa ser indio o indígena? Reflexiones sobre estas categorías sociales en el Perú andino », ''Nuevo Mundo Mundos Nuevos'', Débats, [http://journals.openedition.org/nuevomundo/66106 lire en ligne] ; DOI : https://doi.org/10.4000/nuevomundo.66106</ref>{{,}}<ref>Selon Juan-Carlon, qui s'intéresse au cas du Pérou, l'Église a joué un rôle prépondérant dans le maintien de l'appellation « Indien », qui aurait pu être remplacée par celle de « chrétien » ; une telle substitution aurait impliqué une remise en cause de l'ordre colonial, perspective que l'Église rejetait. « La catégorie d'Indien est une construction proprement coloniale qui n'a aucun sens sans le regard et les rapports de pouvoir colonisateurs », écrit Juan Carlos Estenssoro dans « El simio de Dios. Los indígenas y la iglesia frente a la evangelización del Perú , siglos XVI-XVII », ''Bulletin de l’Institut français d’études andines'', 30, 3, 2001, {{p.|457}}</ref>.
 
De même selon l'historien américain {{lien|Robert F. Berkhofer}}, auteur de ''The White Man’s Indian : Images of the American Indian from Columbus to the Present'' (1978) le concept d’« Indien » forgé par les Européens réunit des personnes extrêmement diverses qui, au moment de la conquête espagnole, ne s'identifiaient pas elles-mêmes comme membres d'un groupe continental<ref>« {{note|groupe=alpha|{{citation|Robert F. Berkhofer, ''The White Man’s Indian : Images of the American Indian from Columbus to the Present'' (New York : Knopf, 1978),[…] estime que quand les Européens en sont venus au concept d’« Indien », ils ont fondu en un seul groupe toutes les diverses cultures, sociétés, groupes linguistiques et identités des populationspeuples [[autochtones d'Amérique]]d’Amérique, des gens qui ne se considéraient pas comme formant un groupe ou un peuple continental lors du premier contact », <ref>{{chapitre|auteur=Constance Backhouse, « 2. |titre=Qualification raciale ou théâtre de l’absurde : « le statut d’Esquimau, dragon terrassé », dans ''Re Eskimos'', 1939 » In : ''|ouvrage=De la couleur des lois : Une histoire juridique du racisme au Canada entre 1900 et 1950'', Ottawa : |éditeur=Les Presses de l’Université d’Ottawa |date=2010|isbn=9782760326248|passage=23-69|lire Universityen of Ottawa Press, 2010, [ligne=http://books.openedition.org/uop/469 lire en ligne]. {{ISBN|9782760326248}}.</ref>.}}}}.
 
Dans un article intitulé « Indiens pour qui ? Histoire d'un mot », la [[Linguistique|linguiste]] française Sybille de Pury-Toumi{{note|groupe=alpha|Sybille de Pury-Toumi a notamment été chercheuse au Centre d'études sur les [[Langues amérindiennes|langues indigènes d'Amérique]] (CELIA) du [[Centre national de la recherche scientifique]] (CNRS)<ref>{{lien web|url=https://www.babelio.com/auteur/Sibylle-de-Pury-Toumi/191906|titre=Sybille de Pury-Toumi : biographie et informations|site=babelio.com}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|url=http://sedyl.cnrs.fr/annuaire.php?langue=fr|titre=Anciens membres CELIA - SEDYL|site=sedyl.cnrs.fr}}.</ref>.}} estime que c'est leur supériorité militaire qui a donné aux Européens « le droit de nommer le continent et ses habitants indigènes », d'un terme vague qui prétend subsumer les mots disponibles dans les [[Langues amérindiennes|langues autochtones]]<ref>« Le mot « Indien » reste vague : qui désigne-t-il ? En ce mot, ce sont des groupes ethniques amalgamés qui n'ont souvent en commun que le fait de provenir des terres découvertes par les conquérants venus d'Europe. Puisqu'ils sont victorieux par les armes, les Européens revendiquent le droit de nommer à la fois le continent et ses habitants indigènes. Un seul terme s'impose, celui d'« indien », pour désigner une grande diversité de peuples — ainsi que leurs langues — malgré le fait que chacun porte un nom ; [...] il implique le rejet de tous les autres termes déjà existants dans les langues autochtones. », Sybille de Pury-Toumi, « ¿Indios para quién? Historia de una palabra » In: ''De palabras y maravillas: Ensayo sobre la lengua y la cultura de los nahuas, Sierra Norte de Puebla'' . Mexico: Centro de estudios mexicanos y centroamericanos, 1997, [http://books.openedition.org/cemca/1749 lire en ligne]</ref>.
 
== La question des critères d'identification ==
Tracer une différence entre les Amérindiens et les autres a été au départ une préoccupation politique sur le continent américain : il s'agissait à l'époque coloniale de savoir qui paierait un tribut, ou serait soumis à des travaux forcés<ref>AÀ l'époque coloniale, « la relation Indien/non-Indien ne se pose pas autrement qu’en termes pratiques d’exploitation ; jamais elle ne fut abordée... en termes autres que politico-administratifs », Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref>{{,}}<ref>«AÀ l'époque coloniale, être Indien implique de payer tribut, d'être soumis au travail obligatoire et de ne pas avoir le droit d'occuper les mêmes postes administratifs que les Espagnols ou les Créoles», Carmen Salazar-Soler, « ¿Qué significa ser indio o indígena?
Reflexiones sobre estas categorías sociales en el Perú andino », ''Nuevo Mundo Mundos Nuevos'', Débats, [http://journals.openedition.org/nuevomundo/66106 lire en ligne] ; DOI : https://doi.org/10.4000/nuevomundo.66106</ref>. Par la suite, des anthropologues et des démographes se sont efforcés d'établir cette distinction, avec des objectifs divers. Des institutions politiques, aujourd'hui encore, procèdent en association avec le monde de la recherche à des dénombrements d'Amérindiens, parfois dans le but de déterminer des mesures d'aide éducative ou d'accès à l'emploi, un suivi sanitaire, ou des découpages électoraux etc. Les critères d'identification retenus ont donc des conséquences pratiques considérables, d'où des batailles de chiffres, des accusations de surévaluation ou de sous-estimation. De fait, selon la définition des « Amérindiens » qui est adoptée, la proportion au sein d'une population peut passer du simple au double, ce qui modifie considérablement la vision des relations raciales<ref>« Les critiques visant le recensement provenaient de différents secteurs : Indiens, démographes, anthropologues, universitaires, et peut-être les plus virulentes furent-elles celles des indigénistes eux-mêmes, en particulier celles des travailleurs résidant dans les communautés et les régions indiennes », selon A. Embriz Osorio et L. Ruiz Mondragón (2000), cités dans Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}</ref>{{,}}<ref name=Lavaud>Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}. DOI : 10.3917/anso.052.0487, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref>{{,}}<ref>"Les différences entre les Indiens et les Hispaniques ne sont en aucun cas constantes. La notion de race dépend donc de la définition de l'Indien et varie en conséquence, ce qui rend impossible de définir les Indiens par leurs caractéristiques manifestes. Cela crée une difficulté non seulement pour les anthropologues mais aussi pour les recenseurs des pays où l'on essaie d'enregistrer la composition raciale de la nation », {{Article |prénom1=Julian |nom1=Pitt-Rivers |titre=Race in Latin America : the concept of 'raza' |périodique=European Journal of Sociology / Archives Européennes de Sociologie / Europäisches Archiv für Soziologie |volume=14 |numéro=1 |date=1973 |issn=0003-9756 |lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/23996336 |consulté le=2021-09-23 |pages=3–31 }}</ref>.
 
Souvent reproduite, la démarcation entre Amérindiens et non-Amérindiens est toutefois variable selon les époques et les lieux<ref>« Les définitions de l’Indien ne sont constantes ni dans le temps ni dans l’espace. Ce qui rend les dénombrements délicats et les comparaisons impossibles d’une époque à l’autre, et d’un lieu à l’autre » ; « il ne peut y avoir de décompte scientifique officiel sur la base de grilles préformées d’ensembles d’individus indiens. Voilà pourquoi on peut obtenir des résultats si différents d’un comptage à l’autre, dans une même aire géographique », Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref> et jugée problématique par plusieurs spécialistes<ref>« American Indians, both in the United States and in Latin America have probably been the category with the least determinate boundaries », écrit W.Petersen, qui renvoie notamment à l'ouvrage de James A. Clifton, ''The Invented Indian: Cultural Fictions and Government Policies'', 1990, {{Ouvrage|langue=en|prénom1=William|nom1=Petersen|titre=Ethnicity Counts|éditeur=Routledge|date=2017-07-28|isbn=978-1-351-29174-3|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=_JouDwAAQBAJ&pg=PT325&lpg=PT325&dq=native+americans+americas+labels+counting&source=bl&ots=E4jOcKiuCh&sig=ACfU3U1iQGmsh3sVtcZOMwG1v5X_ZT6bjg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjP-Irfvq7zAhWvyYUKHRKPCGk4ChDoAXoECAgQAw#v=onepage&q=native%20americans%20americas%20labels%20counting&f=false|consulté le=2021-10-03}}, p.317</ref>. Selon Joane Nagel {{note|groupe=alpha|Joane Nagel est une sociologue américaine dont le {{citation|travail se concentre sur les [[ethnie]]s, les [[Genre (sciences sociales)|genres]] et les [[sexualité]]s aux États-Unis et dans le système mondial, l'[[activisme amérindien]], la militarisation de la science et le [[réchauffement climatique]] mondial<ref>{{lien web|url=https://sociology.ku.edu/joane-nagel|titre=Joane P. Nagel, PhD |site=sociology.ku.edu|consulté le=6 avril 2022}}.</ref>}}. Elle note dans l'introduction de son article {{langue|en|''American indian ethnic reviewal''}} : {{citation|Conformément à l'usage des érudits autochtones et non autochtones, j'utilise indifféremment les termes {{langue|en|''American Indian''}}, {{langue|en|''Indian''}}, {{langue|en|''Native American''}} et {{langue|en|''native''}} pour désigner les descendants des habitants aborigènes d'Amérique du Nord<ref>{{article|langue=en|titre=American indian ethnic reviewal : Politics and the resurgence of identity|périodique=American Sociological Review|date=décembre 1995|pages=947|citation={{langue|en|''Consistent with the usage of native and non-native scholars, I use the terms "American Indian," "Indian, "Native American" and "native" interchangeably to refer to the descendants of the aboriginal inhabitants of North America''.}}}}</ref>.}}}} : {{citation|Les travaux pionniers de Fredrik Barth (1969) montrent que l'ethnicité est situationnelle et variable. De nombreuses études ont suivi qui ont montré que l'ethnicité était plus émergente que primordiale, que les frontières entre les groupes ethniques résultaient davantage de conflits d'intérêts contemporains que d'anciennes animosités, que l'histoire et la culture ethniques étaient régulièrement révisées et même inventées, et que l'essence centrale de l'ethnicité - l’identité ethnique - doit être multiforme, négociable et changeante<ref>{{article|périodique=American Sociological Review|langue=en|auteur=Joane Nagel|titre=American indian ethnic reviewal : Politics and the resurgence of identity|date=décembre 1995|passage=948, chapitre ''Negotiating and Changing Individual and Collective Identities''|lire en ligne=http://www.letras.ufmg.br/padrao_cms/documentos/profs/marcel/Native.pdf|citation=The pioneering work of Fredrik Barth (1969), shows ethnicity to be situational and variable. Many studies have followed that have found ethnicityto be more emergentthanprimordial, ethnic group boundariesto be more fluid than fixed, ethnic conflicts to arise more from clashes of contemporary interests than from ancient animosities, ethnic history and culture to be routinely revised and even invented, and the central essence of ethnicity-ethnic identity-to be multifaceted, negotiable, and changeable.}}</ref>.}}
 
=== Identification par des caractéristiques « raciales » ===
La distinction entre Amérindiens et non-Amérindiens a été justifiée dans la deuxième moitié du XIXe siècle{{s-|XIX}} et jusque vers 1950 en fonction de critères raciaux<ref>"Une labellisation raciale très en vogue a prédominé au tournant du siècle et jusqu’à la Seconde Guerre mondiale", Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref>, qui pouvaient faire appel à une description des [[phénotype]]s, des mesures [[Anthropométrie|anthropométriques]], ou mêler des traits présentés comme biologiques et culturels. L'[[anthropologie physique]] ou raciale appliquée aux « Indiens » a été illustrée aux États-Unis notamment par [[Samuel George Morton]] (1799-1851) , auteur de ''Crania Americana'' (1839)<ref>{{ouvrage|langue=en|auteur=[[Samuel George Morton]]|titre=Crania americana; or, A comparative view of the skulls of various aboriginal nations of North and South America. To which is prefixed an essay on the varieties of the human species|éditeur=J. Dobson|lieu=Philadelphie|année=1839|url=https://archive.org/details/Craniaamericana00Mort/}}.</ref>{{,}}{{note|groupe=alpha|Morton range selon le critère de la capacité crânienne combiné à des considérations phrénologiques<ref name=Gould>{{article|langue=en|titre=Morton's Ranking of Races by Cranial Capacity|auteur=[[Stephen Jay Gould]]|périodique=Science|volume=200|numéro=4341|année=1978|jstor=1746562}}.</ref> les Indiens d'Amérique (dont il souligne, en s'appuyant sur des considérations craniologiques, l'unicité raciale, en dépit de différences entre les Indiens {{citation|demi-civilisés}} du Sud de l'Amérique et ceux du Nord, qu'ils considèrent comme des {{citation|barbares}}<ref>{{ouvrage|langue=en|auteur=Robert Bieder|titre=Science encounters the Indian, 1820-1880|sous-titre=The Early Years of American Ethnology|éditeur=University of Oklahoma Press|lieu=Norman|année=1986|passage=68-69}}.</ref>) dans une race distincte et de rang intermédiaire entre celle des Blancs (faisant elle-même l'objet de la distinction hiérarchisée de trois groupes, les Européens, les Juifs et les Hindous) et celle des Noirs<ref name=Backhouse>{{harvsp|Backhouse|2010}}.</ref>, tout en laissant de côté la relation entre cette race et celle des Inuits, ce que [[Nell Irvin Painter]] rapproche du fait que {{citation|les racialistes européens avaient tantôt rejeté et tantôt intégré les Lapons quand il s'agissait de définir l'identité raciale européennes}}<ref>{{ouvrage|auteur=Nell Irvin Painter|titre=Histoire des Blancs|éditeur=Max Milo|lieu=Paris|année=2019|passage=176}}.</ref>.}} et dont la vaste collection de crânes d'aborigènes est demeurée célèbre<ref>{{Article |prénom1=Reginald |nom1=Horsman |titre=Scientific Racism and the American Indian in the Mid-Nineteenth Century |périodique=American Quarterly |volume=27 |numéro=2 |date=1975 |issn=0003-0678 |doi=10.2307/2712339 |lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/2712339 |consulté le=2021-10-03 |pages=152–168 }}.</ref>. En France, [[Henri Victor Vallois]] (1889-1981) propose une description des races humaines où figure une « race amérindienne »<ref>« Selon [[Jaume Bertranpetit]] [professeur de biologie génétique] et Miguel Hernández , qui se sont appuyés sur la nomenclature d'Henri Victor Vallois, il existe dans le Nouveau Monde les sous-races suivantes du tronc [[mongoloïde]] ou [[xanthoderme]] : esquimau et [[amérindien]] », Sergio O. Valdès Bernal, ''La hispanización de América y la americanización de la lengua española'', 2013, [http://www.uh.cu/sites/default/files/public/adjuntos/la_hispanizacion_de_america_y_la_americanizacion_de_la_lengua_espanola-web.pdf lire en ligne p.35].</ref>, dans un ouvrage publié en 1945 et souvent réédité, dont le succès « illustre l'importance de l'[[Racialisme#Anthropologie raciale|anthropologie raciale]] en France » selon l'historienne Carole Reynaud-Paligot (1966-)<ref name=Reynaud>Carole Reynaud-Paligot, « Races et racisme », ''TDC'' N° 1109 [https://www.academia.edu/31294772/TDC_1109_histoire_Reynaud-Paligot.pdf lire en ligne]</ref>. La part plus grande accordée à la culture dans la définition de l'Amérindien conduit à passer d'une distinction raciale à une distinction ethnique<ref>"Certains analystes utilisent aussi le terme d’ethnie pour connoter une distinction culturelle plutôt que raciale", Jean-Pierre Lavaud (Professeur de sociologie), Françoise Lestage, anthropologue, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref>.
 
=== Identification par des traits culturels ===
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=== Identification par la langue ===
La définition des Amérindiens en fonction d'un critère linguistique est privilégiée dans les recensements de certains pays d'Amérique latine. Cependant, le bilinguisme et le [[multilinguisme]] étant très répandus, la question se pose de savoir si des personnes qui parlent une [[Langues amérindiennes|langue amérindienne]] (ou autochtone américaine) et en même temps une ou plusieurs autres langues doivent être incluses dans la catégorie des Amérindiens. L'analyse du recensement [[Bolivie|bolivien]] de 1992 peut conduire à estimer que les Amérindiens forment une petite minorité de 11,5 % de la population (proportion des personnes qui parlent uniquement une [[langue vernaculaire]]), ou au contraire qu'ils sont majoritaires dans le pays (58,9 % des personnes recensées parlant une langue vernaculaire et une autre langue, comme le castillan)<ref name=Lavaud/>.
 
Le critère linguistique est si déterminant dans certains pays comme le [[Guatemala]] qu'il est possible de « changer de race » au cours d'une vie en devenant bilingue : ainsi, écrit Julien Pitt-Rivers, « il n'y a qu'une difficulté limitée pour les Indiens, une fois qu'ils ont appris l'espagnol, à changer d'identité ethnique et à devenir [[Ladino (hispanique)|Ladinos]] »<ref name=Pitt/>.
 
Le [[Mexique]] a longtemps privilégié dans ses recensements une définition des Amérindiens en fonction de critères linguistiques<ref name=Lavaud/>.
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=== Identification dans un contexte social précis ===
Dans certains pays, ce sont les relations sociales (non la culture ou le phénotype) qui font l'Amérindien, mais les éléments retenus pour l'identifier sont très variables d'un lieu à l'autre. Lors du recensement de 1950 au Guatemala, il a été décidé, compte tenu de l'échec d'un recensement antérieur fondé sur des critères physiques, de s'en remettre à l'opinion publique locale. En effet, chaque village « savait » qui était indien et qui ne l'était pas, mais dans certains villages, l'Indien est celui qui va pieds nus, par opposition aux personnes portant des sandales, dans d'autres, c'est l'âge auquel les enfants cessecessent d'être scolarisés qui fait la différence « ethnique », dans d'autres encore c'est le mode d'alimentation. Ainsi à l'exception des Amérindiens qui vivent dans la jungle, l'identification dans les autres situations est inconstante<ref name=Lavaud/>{{,}}<ref name=Pitt/>.
 
De plus, l'identification de l'Indien peut varier dans un même lieu en fonction de la position de l'observateur dans la hiérarchie sociale : au [[Pérou]], un Espagnol a tendance à voir un métis comme un Indien, tandis que « la même déformation optique » selon les termes de Julian Pitt-Rivers, « se produit en sens inverse à l'autre bout de l'échelle sociale », et qu'une personne parlant exclusivement une [[Langues amérindiennes|langue autochtone]] voit dans tout locuteur [[Espagnol|hispanophone]] un « Blanc », quel que soit son phénotype<ref name=métisse>{{Article |prénom1=Julian |nom1=Pitt-Rivers |titre=La Culture métisse : dynamique du statut ethnique |périodique=Homme |volume=32 |numéro=122 |date=1992 |doi=10.3406/hom.1992.369529 |lire en ligne=https://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1992_num_32_122_369529 |consulté le=2021-09-24 |pages=133–148 }}</ref>. De manière générale en Amérique latine, l'apparence physique n'entre pas en ligne de compte pour marquer la frontière entre les Amérindiens et les autres ; des Indiens ont une peau claire et des traits européens sans être considérés pour autant comme « moins indiens »<ref name=Color/>{{,}}<ref>La race est « sociale » en Amérique latine, selon l'anthropologue nord-américain Charles Wagley (1913–1991) , « On the concept of social race in the Americas », ''Actas del XXXIII Congreso de americanistas'', San José de Costa Rica, Lehman, tomo 1, 1959, {{p.|403-417}}.</ref>.
 
Certains spécialistes ont soutenu que c'est la [[classe sociale]] qui en réalité définit les Amérindiens. Ainsi selon l'anthropologue Victor Goldkind « les Indiens sont des paysans pauvres et leurs valeurs et leurs comportements peuvent s'expliquer sans aucun recours à leurs origines [[Civilisation maya|mayas]], par le fait que ce sont des ruraux alors que les [[Ladino (hispanique)|Ladinos]] sont des citadins »<ref>Victor Goldkind, « Ethnic Relations in Southeastern Mexico: a methodological note », ''American Anthropologist'', LXV (1963), 394-399</ref>. [[Julian Pitt-Rivers]] réfute cependant ce type de généralisation, alléguant le fait que la majorité des [[Ladino (hispanique)|Ladinos]] du [[Chiapas]], par exemple, sont majoritairement des paysans pauvres ; s'il est vrai que souvent le statut ethnique et la classe coïncident, il arrive aussi que des Amérindiens soient [[Propriété foncière|propriétaires fonciers]] et que des villes accueillent une proportion indienne importante. Pour J. Pitt-Rivers il faut considérer, pour déterminer qui est Amérindien, non la classe seulement, mais une définition sociale locale ; en Amérique latine, « l'Indien est celui qui est considéré comme naturellement inférieur. Son statut est fonction de la structure sociale totale qui utilise les différences culturelles entre indien et hispanique pour maintenir la distinction sociale »<ref name=Pitt/>. Pour Jean-Pierre Lavaud et Françoise Lestage également « on ne peut pas assimiler le groupe des Indiens à une classe ou à une strate sociale. C’est bien dans la relation sociale, ici et maintenant, que la catégorisation prend son sens »<ref name=Lavaud/>.
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Les Indiens n'étaient pas pris en compte dans les premiers recensements américains, mais une catégorie dédiée est apparue dans le recensement de 1860, seuls étant décomptés jusqu'en 1890 par les agents recenseurs les individus considérés comme assimilés<ref>{{ouvrage|langue=en|titre=Multiracial in America|sous-titre=Proud, Diverse and Growing in Numbers|auteurs=Kim Parker, Rich Morin, Juliana Menasce Horowitz et Mark Hugo Lopez|éditeur=Pew research Center|lieu=Washington|année=2015|passage=24|url=https://www.pewresearch.org/social-trends/wp-content/uploads/sites/3/2015/06/2015-06-11_multiracial-in-america_final-updated.pdf|format=psf}}.</ref>. Depuis 1960, l'auto-identification étant privilégiée, {{cita|chacun est invité à se classer dans une catégorie raciale}}. Parmi les cinq catégories de classement possibles, on trouve celle d’American Indian ; les autres étant Blancs, Noirs, Asiatiques et Hispaniques<ref name=Lavaud/>. Pour ce qui est des Indiens, l’auto-affiliation aboutit à multiplier leur nombre par près de cinq entre 1960 et 2000 (l’augmentation la plus forte se produisant entre 1970 et 1980). En 2000 toute liberté est laissée de déclarer son identification à plus d’une catégorie<ref name=Lavaud/>. Ces changements dans les formulaires ont entraîné une augmentation du nombre de personnes déclarées Amérindiennes, de 65 % entre 1990 et 2000. À partir du remaniement de l'année 2000, ce sont les Amérindiens qui ont été proportionnellement les plus nombreux à choisir deux races (en comparaison avec les Noirs par exemple, qui n'en ont choisi qu'une à une écrasante majorité)<ref name=Lavaud/>.
 
Ce type de catégorisation, qui peut répondre à une intention de lutte contre les discriminations, mérite toutefois discussion car {{cita|on demande aux recensés de se couler [...] dans des cases préétablies en nombre très limité}}. Il s'agirait donc selon Lavaud d'une autodéfinition d'apparence seulement<ref name=Lavaud/>. Pour Lavaud et Lestage, ce type de catégorisation occulte le phénomène massif du métissage étant donné que la catégorie « Métis » est absente des formulaires, alors que beaucoup de Mexicains se définissent ainsi<ref name=Lavaud/>. Pour Denis Lacorne, « les cinq catégories privilégiées ne sont au fond qu’une reprise à peine voilée des cinq races identifiées au XIXe siècle{{s-|XIX}} par les tenants du darwinisme social : les Blancs, les Noirs, les Jaunes, les Bruns, les Rouges »<ref>Denis Lacorne, ''La crise de l’identité américaine. Du melting-pot au multiculturalisme''. Paris, Fayard, 1997, cité dans Jean-Pierre Lavaud, Françoise Lestage, « Compter les Indiens. (Bolivie, Mexique, États-Unis) », ''L'Année sociologique'', 2005/2 (Vol. 55), {{p.|487-517}}, [https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2005-2-page-487.htm lire en ligne]</ref>.
 
=== Changement de statut ethnique ===
En Amérique latine les changements de statut ethnique, soit collectifs, soit individuels, ont été nombreux au cours des siècles<ref name=Pitt/>. Ainsi, au [[Mexique]], des Indiens sont devenus en grand nombre des [[Ladino (hispanique)|Ladinos]] pendant des périodes historiques identifiables, en particulier à l'[[Guerre d'indépendance du Mexique|époque de l'Indépendance]] (fin XVIIIe siècle{{s-|XVIII}}-début XIXe siècle{{s-|XIX}}) et au moment de la [[Révolution mexicaine]] au début du XXe siècle{{s-|XX}}<ref name=métisse/>. Si les [[Ladino (hispanique)|ladinisations]] individuelles représentent les cas les plus fréquents de « changements de race », la transformation inverse est possible<ref name=métisse/>. Une figure bien connue au Mexique est celle de [[Juan Perez Jolote]], originaire d'un village [[Peuple Maya|maya]] du [[Chiapas]], qui est devenu [[Ladino (hispanique)|ladino]] pendant vingt ans avant de redevenir un Indien ; sa vie a donné un lieu à un récit biographique traduit en français, ''Juan Perez Jolote; biografía de un Tzotzil'' (1952) de l'ethnologue {{lien|Ricardo Pozas Arciniega}}<ref name=métisse/>{{,}}<ref>{{Chapitre|prénom1=Henri|nom1=Favre|titre chapitre=Chapitre premier. La communauté|titre ouvrage=Changement et continuité chez les Mayas du Mexique : Contribution à l’étude de la situation coloniale en Amérique latine|éditeur=Éditions de l’IHEAL|collection=Travaux et mémoires|date=2019-07-15|isbn=978-2-37154-094-1|lire en ligne=http://books.openedition.org/iheal/7320|consulté le=2021-09-24|passage=117–141}}</ref>.
 
=== Le métissage ===
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=== Importance des recensements ===
Si les critères et nomenclatures des [[Bureau du recensement des États-Unis |recensements effectués aux États-Unis]] font l'objet de critiques de la part de sociologues comme Jean-Pierre Lavaud en ce qu'ils imposent aux résidents américains le choix entre telle et telle identité collective, au détriment d'une fluidité dans les identifications, la sociologue Joane Nagel examine, quant à elle, la croissance de la population {{langue|en|''Native American''}}, entre 1960 et 1990, résultant en grande partie, d'après les chercheurs, d'un {{langue|en|''ethnic switching''}} {{incise|littéralement « changement d'ethnie », que Lavaud et Lestage traduisent, dans leur article « Compter les indiens » (2005)<ref name=Lavaud/>, par l'expression {{citation|''aiguillage ethnique''}} {{note|groupe=alpha|Les auteurs rappellent<ref name=Lavaud/>dans l'article que le sens donné à cet aiguillage par Joane Nagel mêle :<br>- « l’influence des politiques fédérales du passé en direction des Indiens, amenant progressivement l’apparition d’une population urbaine biculturelle »,<br>- « la politique plus récente à l’égard des droits civiques et l’explosion des ressources fédérales qui l’accompagnent créant une atmosphère favorable à la conscience et à la fierté ethnique », et enfin<br>- « le rôle du mouvement activiste du « pouvoir rouge ».»}}|stop}}.
 
Entre 1960 et 1990, le nombre d'Américains déclarant être de « [[Race humaine|race]] » amérindienne dans le recensement américain a plus que triplé (passant de {{nombre|523591}} à {{nombre|1878285}}). Joane Nagel attribue cet accroissement à trois facteurs favorisant le renouvellement ethnique ({{langue|en|''ethnic renewal}} ''}}) individuel :
* la politique fédérale relative aux Indiens ;
* la politique ethnique américaine ;
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Les groupes amérindiens ont été les premiers à se revendiquer comme [[Peuple autochtone|peuples autochtones]] ; ils ont été le fer de lance d'une mobilisation qui a gagné progressivement un nombre croissant de peuples<ref>{{article|auteur=Joëlle Rostkowski|titre=II. Les indiens des états-unis : hérauts de l'autochtonie sur la scène internationale|périodique=Journal de la Société des Américanistes|année=1998|tome=84|numéro=1|page=264-273|doi=https://doi.org/10.3406/jsa.1998.2823|citation=Les Indiens des États-Unis et du Canada ont exercé à cet égard un rôle exemplaire car ils ont fourni l'impulsion initiale qui a suscité d'autres démarches de la part des peuples autochtones du monde entier. […] On constate donc, au fil des années, que les réunions de l'ONU sur les peuples autochtones, initialement dominées par la question amérindienne, se sont considérablement élargies, acquérant par là-même plus d'importance mais aussi s'alourdissant du fait de l'ampleur de leur champ d'action.}}</ref>{{,}}<ref name=Morin>{{article|auteur=Françoise Morin|titre=L’Autochtonie, forme d’ethnicité ou exemple d’ethnogenèse ?|périodique=Parcours anthropologiques|numéro=6|année=2006|titre numéro=Ethnicité, autochtonie, ethnogenèse|lire en ligne=http://journals.openedition.org/pa/1903|passage=54-64|format=pdf}}</ref>. En 2020, {{nombre|5000|peuples}}, réunissant 476 millions de personnes, sont reconnus comme autochtones par l'[[Organisation des Nations unies]] (ONU)<ref>{{lien web|url=https://www.un.org/fr/observances/indigenous-day|titre=Journée internationale des peuples autochtones|site=un.org|date=|consulté le=28 mars 2022}}.</ref>. La [[Déclaration des droits des peuples autochtones]], adoptée par l'[[Assemblée générale des Nations unies]] en 2007, définit les droits des autochtones comme celui de contrôler leurs terres, ou en matière d'éducation, d'emploi, de santé{{etc}} Ainsi, selon Joëlle Rostowski, les Amérindiens sont à l'origine d'un droit nouveau. Le mouvement a commencé dans les années 1970 ; nord-américain au départ, il s'est diffusé dans tout le continent avant de s'internationaliser dans un intervalle d'une quinzaine d'années<ref name=Morin/>.
 
Les mêmes membres de peuples premiers ont tendance à utiliser selon les contextes les [[Endonymie|endonymes]] propres à leur communauté spécifique, et l'expression générique « peuple autochtone »<ref name=britannica>{{Lien web |langue=en |titre=Tribal Nomenclature: American Indian, Native American, and First Nation |url=https://www.britannica.com/topic/Tribal-Nomenclature-American-Indian-Native-American-and-First-Nation-1386025 |site=Encyclopedia Britannica |consulté le=2021-09-28}}</ref>. Toutefois certains membres de ces nations réprouvent leur désignation comme « autochtones », parce qu'elle les identifie de manière trop large, et qu'elle situe leur peuple comme antérieur à la conquête coloniale, donc encore et toujours par rapport aux colonisateurs<ref>{{Article |prénom1=Michael A. |nom1=Peters |prénom2=Carl T. |nom2=Mika |titre=Aborigine, Indian, indigenous or first nations? |périodique=Educational Philosophy and Theory |volume=49 |numéro=13 |date=2017-11-10 |issn=0013-1857 |doi=10.1080/00131857.2017.1279879 |lire en ligne=https://doi.org/10.1080/00131857.2017.1279879 |consulté le=2021-09-28 |pages=1229–1234 }}</ref>. Pour d'autres au contraire, cette appellation homogénéisante est un instrument de résistance contre la domination exercée par des pouvoirs étrangers<ref>{{Article |langue=anglais |auteur1=Steffi Retzlaff |titre=What's in the Name ? The Politics of Labelling and Native Identity Constructions|périodique=The Canadian Journal of Native Studies |date=2005 |lire en ligne=http://www3.brandonu.ca/cjns/25.2/cjnsv25no2_pg609-626.pdf |pages=609-626 }}</ref>.
 
=== Évolution du contexte social et politique ===
C'est en réaction à des politiques d'assimilation menées aux États-unisUnis, le programme d'[[Indian termination policy]], que les Amérindiens de ce pays ont commencé à se mobiliser à l'échelle nationale, invoquant leur [[Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes|droit à l'autodétermination]].
 
En 1974, « pour la première fois de leur histoire, des milliers de représentants indiens se rencontrèrent », écrit l'anthropologue Françoise Morin, dans le cadre d'une réunion des « nations autochtones souveraines » des deux Amériques, à ''[[Réserve indienne de Standing Rock|Standing Rock]]'' (États-Unis) ; leur objectif est d'obtenir des États le respect des traités signés. Cependant, ce type d'action n'ayant pas porté de fruits, ils décident de changer de stratégie et d'internationaliser leur mouvement<ref>« Les mesures impopulaires qui marquèrent la politique indienne aux États-Unis – Termination Policy – eurent une influence déterminante sur la reprise des contacts entre certaines organisation indiennes et les organisations internationales » (amorcées par les Iroquois dans les années 1920), Joëlle Rostkowski, « II. Les Indiens des États-Unis : hérauts de l'autochtonie sur la scène internationale » . In: ''Journal de la Société des américanistes''. Tome 84 n°1, 1998. pp. 264-273, [www.persee.fr/doc/jsa_0037-9174_1998_num_84_1_2823 lire en ligne]</ref>{{,}}<ref name=Morin/>.<br>En 1975, ils créent le {{lien|trad=World Council of Indigenous Peoples|fr=Conseil mondial des peuples indigènes}}, après avoir pris contact avec plus de cinquante personnalités autochtones d'Europe (des [[Samis]]), du Pacifique (des [[Maoris (Nouvelle-Zélande)|Maori]] et des [[aborigènes d'Australie]]) et des deux Amériques (des [[Inuits]] et des Amérindiens)<ref name=Morin/>.<br>En 1977, se tient à l'[[Organisation des Nations unies |ONU]] une conférence sur « la discrimination contre les populations autochtones des Amériques » à laquelle participent les organisations autochtones ; les représentants amérindiens expriment leur refus d'être catégorisés comme « [[Minorité nationale|minorités ethniques]] » et appellent à la définition d'un nouveau statut<ref>Françoise {{harvsp|Morin, « De l'ethnie à l'autochtonie ». In: ''Caravelle'', n°63, |1994}}. ''501 ans plus tard : Amérique indienne 93''. pp. 161-173,DOI : https://doi.org/10.3406/carav.1994.2612, [https://www.persee.fr/doc/carav_1147-6753_1994_num_63_1_2612 lire en ligne]</ref>.<br>En 1982, l'ONU crée le Groupe de travail sur les populations autochtones (GTPA) pour remédier à l'absence d'outils juridiques<ref name=Morin/>. La mondialisation a favorisé ce processus, en rapprochant des peuples qui ont en partage un passé marqué par la colonisation<ref name=Morin/>.<br>En 2000, les Nations unies créent l'Instance permanente sur les questions autochtones<ref name=britannica/>.
 
Comme le note l'[[anthropologie|anthropologue]] Irène Bellier, dans un chapitre intitulé ''De l’Indien aux peuples autochtones''<ref name=Bellier2012>{{chapitreharvsp|auteur=Irène Bellier|titre chapitre=De l’Indien aux peuples autochtones|sous-titre chapitre=À propos de l’engagement du sociologue et de l’anthropologue en Amérique latine|titre ouvrage=Le multiculturalisme au concret|sous-titre ouvrage=Un modèle latino-américain ?|lieu=Paris|éditeur=Presses Sorbonne Nouvelle|année=2012|url=http://books.openedition.org/psn/651}}.</ref>, un changement de paradigme s'opère dans les années 1970 à 2010 auquel ont contribué des scientifiques, des autochtones, des entités internationales, des dirigeants politiques ; il conduit à une remise en question de la notion d'« ethnie », et à une prise en compte accrue des enjeux politiques dans l'approche anthropologique. L'« amérindianité » tend à céder la place progressivement à l'« autochtonie ». Par exemple, {{citation|l’heure n’est plus à l’analyse de la « chefferie amérindienne », la recherche porte aujourd’hui sur la gouvernance autochtone, politique comme économique}}<ref name=Bellier2012/>.
 
=== Évolution du contexte scientifique ===
Françoise Morin évoque une « révolution conceptuelle » commencée avec les travaux de l’[[Anthropologie|anthropologue]] norvégien [[Fredrik Barth]] (1969) et qui favorise la mobilisation des peuples autochtones<ref>{{Article |prénom1=Françoise |nom1=Morin |prénom2=Bernard Saladin |nom2=D'Anglure |titre=L'ethnicité, un outil politique pour les autochtones de l'Arctique et de l'Amazonie |périodique=Études/Inuit/Studies |volume=19 |numéro=1 |date=1995 |issn=0701-1008 |lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/42870724 |consulté le=2021-09-30 |pages=37–68 }}</ref> : jusqu'aux années 1960 l'[[anthropologie culturelle]] étudiait les « ethnies » pour les classer et les comparer entre elles, en les séparant de la société plus large dans laquelle elles prennent place<ref name=Morin/>. À partir des années 1970, l'approche [[Fredrik Barth|barthienne]] {{incise|qui montre, selon Joane Nagel, {{citation|que l'ethnicité est [[wikt:situationnel|situationnelle]] et variable<ref name=Nagel/>}}}} inspire de nouvelles analyses. Françoise Morin précise<ref name=Morin/> :
{{citation bloc|Il fut en effet le premier à considérer les groupes ethniques non plus comme des grou­pesgroupes isolés, mais comme des formes d’[[organisation sociale]] résultant de l’interaction du groupe et de son environnement. Il faut par conséquent s’intéresser aux frontières qui président aux [[Identité sociale|identités]] qu’un groupe se donne et qui lui sont assignées par ses voisins. Les travaux qui s’inspi­rents’inspirent de cette approche « [[wikt:subjectivisme|subjectiviste]] », ou « situationnelle », ou encore « [[Interaction sociale|interactionnelle]] », bref dynamique et flexible, cherchent à comprendre comment et pourquoi ces frontières sont élaborées et maintenues entre groupes, mais aussi comment elles peuvent se déplacer.}}
 
Les anthropologues « instrumentalistes » soulignent le fait que « l’ethnicité peut être manipulée stratégiquement par des minorités autochtones, dominées politiquement et enclavées dans des États-nations pour revendiquer des droits » ; phénomène dynamique, l'ethnicité s'accentue ou s'estompe selon les contextes<ref name=Morin/>.
[[File:Song-of-Protection-e1517529808707.jpg|thumb|{{lien|langue=es|Herlinda Agustín}}, [[Curandero|curendera]] et artiste de l'ethnie Shipibo-Conibo.]]
 
Ainsi par exemple, les peuples autochtones d’[[Amazonie]] qui voulaient combattre l'accaparement de leurs terres s'auto-désignent comme groupe ethnique dans leur dialogue avec le pouvoir régional ; c'est le cas des [[Shipibo-Conibos]] dans la vallée de l’[[Río Ucayali|Ucayali]]<ref name=Morin/>. Dans un deuxième temps, ils fondent avec les groupes ethniques de la forêt péruvienne l'organisation nationale ''{{langue|es|Asociación Interétnica de Desarrollo de la Selva Peruana }}'' (AIDESEP, en français : « association interethnique pour le développement de la jungle péruvienne »), et revendiquent un statut de ''{{langue|es|pueblos nativos}}'' (peuples indigènes ou autochtones) pour réclamer le respect de leurs droits dans les négociations avec le pouvoir national à [[Lima]]<ref name=Morin/>.
 
Selon Irène Bellier, l'anthropologie française n'est « pas très à l'aise » avec la catégorie de « peuples autochtones », à la différence de l'anthropologie anglo-saxonne qui a pris acte depuis longtemps de l'apparition de la catégorie de l'indigénéité<ref>Irène Bellier. « L’anthropologie, l’indigène et les peuples autochtones ». 19ème{{19e}} Conférence Robert Hertz à l’invitation de l’Association pour la Recherche en Anthropologie Social (APRAS), Jun 2011, Paris, [https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00702527/document lire en ligne]</ref>.
 
== Notes et références ==
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== Bibliographie ==
* {{Article |langue=en |prénom1=Michael Yellow |nom1=Bird |titre=What We Want to Be Called: |sous-titre=Indigenous Peoples' Perspectives on Racial and Ethnic Identity Labels |périodique=American Indian Quarterly |volume=23 |numéro=2 |date=1999 |issn=0095-182X |doi=10.2307/1185964 |lire en lignejstor=https://www.jstor.org/stable/1185964 |consulté le=2021-09-27 |pagespassage=1–21 }}.
* {{Article |langue=en |prénom1=M. Annette |nom1=Jaimes |titre=American Indian Studies: Toward an Indigenous Model |périodique=American Indian Culture and Research Journal |volume=11 |numéro=3 |date=1987 |lire en ligne=https://eric.ed.gov/?id=EJ386051 |consulté le=2021-09-27 |pages=1–16 }}
* {{Lien web |langue=en |titre=Tribal Nomenclature: American Indian, Native American, and First Nation |url=https://www.britannica.com/topic/Tribal-Nomenclature-American-Indian-Native-American-and-First-Nation-1386025 |site=Encyclopedia Britannica |consulté le=2021-09-28}}
* {{Article |langue=anglais |auteur1=Steffi Retzlaff |titre=What's in the Name ? The Politics of Labelling and Native Identity Constructions|périodique=The Canadian Journal of Native Studies |date=2005 |lire en ligne=http://www3.brandonu.ca/cjns/25.2/cjnsv25no2_pg609-626.pdf |pages=609-626 }}
* {{Lien web |langue=en |prénom=Duane |nom=Champagne |titre=The Term ‘American Indian,’ Plus Ethnicity, Sovereignty, and Identity |url=https://indiancountrytoday.com/archive/the-term-american-indian-plus-ethnicity-sovereignty-and-identity |site=Indian Country Today |consulté le=2021-09-30}}
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* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=William|nom1=Petersen|titre=Ethnicity Counts|éditeur=Routledge|date=2017-07-28|isbn=978-1-351-29174-3|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=_JouDwAAQBAJ&pg=PT325&lpg=PT325&dq=native+americans+americas+labels+counting&source=bl&ots=E4jOcKiuCh&sig=ACfU3U1iQGmsh3sVtcZOMwG1v5X_ZT6bjg&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjP-Irfvq7zAhWvyYUKHRKPCGk4ChDoAXoECAgQAw#v=onepage&q=native%20americans%20americas%20labels%20counting&f=false|consulté le=2021-10-03}}
* {{en}} Susan Lobo, « The U.S. Census as “Statistical Genocide” », {{Lien web |titre=Native American Voices |url=https://www.routledge.com/Native-American-Voices/Lobo-Talbot-Carlston/p/book/9781138687684 |site=Routledge & CRC Press |consulté le=2021-10-01}}
* {{chapitre|auteurprénom=Irène |nom=Bellier|titre chapitre=De l’Indien aux peuples autochtones|sous-titre chapitre=À propos de l’engagement du sociologue et de l’anthropologue en Amérique latine|titre ouvrage=Le multiculturalisme au concret|sous-titre ouvrage=Un modèle latino-américain ?|lieu=Paris|éditeur=Presses Sorbonne Nouvelle|année=2012|url=http://books.openedition.org/psn/651}}
* {{chapitre|titre chapitre=Catégories, nominations et droits liés à l’autochtonie en Amérique latine|sous-titre chapitre=Variations historiques et enjeux actuels|auteurs=Leslie Cloud, Veronica Gonzalez et Laurent Lacroix|titre ouvrage=Peuples autochtones dans le monde|sous-titre ouvrage=Les enjeux de la reconnaissance|auteurs ouvrage=Irène Bellier|éditeur=L'Harmattan|lieu=Paris|année=2013|url=https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01078787/document}}
* Françoise Morin, « L’Autochtonie, forme d’ethnicité ou exemple d’ethnogenèse ? », ''Parcours anthropologiques'' [En ligne], 6 | 2006, [http://journals.openedition.org/pa/1903 lire ligne] ; DOI : https://doi.org/10.4000/pa.1903
* {{article|prénom=Françoise |nom=Morin, « |titre=De l’ethnie à l’autochtonie. |sous-titre=Stratégies politiques amérindiennes », ''|périodique=Caravelle'', {{n°|numéro=63}}, |année=1994, {{p.|161passage=61-174}}, DOI : |doi=10.3406/carav.1994.2612 }}.
* Joëlle Rostkowski, « II. Les indiens des États-Unis : hérauts de l'autochtonie sur la scène internationale » . In: ''Journal de la Société des Américanistes''. Tome 84 n°1, 1998. {{p.|264-273}}. DOI : https://doi.org/10.3406/jsa.1998.2823, [www.persee.fr/doc/jsa_0037-9174_1998_num_84_1_2823 lire en ligne]
* {{chapitre|prénom=Constance |nom=Backhouse, « 2.|titre chapitre=Qualification raciale ou théâtre de l’absurde|sous-titre : « lechapitre=Le statut d’Esquimau, dragon terrassé », dans ''Re Eskimos'', 1939|titre » In : ''ouvrage=De la couleur des lois|sous-titre : ouvrage=Une histoire juridique du racisme au Canada entre 1900 et 1950'', |lieu=Ottawa : |éditeur=Les Presses de l’Université d’Ottawa | University of Ottawa Press, année=2010, [|url=http://books.openedition.org/uop/469 lire en ligne]. {{ISBN|9782760326248}}.
* {{Article |prénom1=Julian |nom1=Pitt-Rivers |titre=Race in Latin America : the concept of 'raza' |périodique=European Journal of Sociology / Archives Européennes de Sociologie / Europäisches Archiv für Soziologie |volume=14 |numéro=1 |date=1973 |issn=0003-9756 |lire en ligne=https://www.jstor.org/stable/23996336 |consulté le=2021-09-23 |pages=3–31 }}
* Charles Wagley, « On the concept of social race in the Americas », Actas del XXXIII Congreso de americanistas, San José de Costa Rica, Lehman, tomo 1, 1959, {{p.|403-417}}.
*{{ouvrage|prénom1=Helga Elisabeth|nom1=Bories-Sawala|prénom2=Thibault|nom2=Martin|titre=Eux et Nous|sous-titre=La place des Autochtones dans l'enseignement de l'histoire nationale du Québec|volume=3|éditeur=Université de Brême|année=2020|url=http://classiques.uqac.ca/contemporains/Bories-Sawala_Helga_Elisabeth/Eux_et_Nous_vol_3/Eux_et_Nous_vol_3.pdf|format=pdf}}.
 
== Voir aussi ==
{{catégorie principale|Amérindiens}}
{{autres projets|wiktionary=Amérindien}}
* [[Liste des peuples indigènes des Amériques]]
* {{lien|lang=en|trad=Native American name controversy|fr=Controverse sur la dénomination des peuples autochtones d'Amérique}}
 
{{Palette|Autochtones du Québec}}
{{Portail|Amérique|anthropologie|minorités|culture américaine|politique|Amérique précolombienne}}
 
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[[Catégorie:Ethnologie]]
[[Catégorie:Exonyme]]
[[Catégorie:Histoire d'un mot]]