« Baal » : différence entre les versions
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[[Fichier:Baal thunderbolt Louvre AO15775.jpg|thumb|[[Stèle de Baal au foudre]], {{XVe|s}}-{{s-|XIII}}, trouvée à [[Ugarit]], [[musée du Louvre]].]]
'''Baal''' ou '''Ba'al''' ([[hébreu]] : '''בָּעַל''', '''Báʿal''', qui signifie ''supérieur
Ce nom signifie « Seigneur » ou « Maître » et est couramment employé pour désigner une divinité majeure d'un panthéon local, souvent un dieu de l'Orage, qui représente la fonction souveraine dans ces régions, assimilé ou similaire à ceux portant en Syrie et en Mésopotamie les noms divins [[Adad]], [[Adad|Hadad]], [[Adad|Addu]], Haddu, etc. Le terme Ba'al peut être employé seul pour désigner un dieu, notamment à Ugarit et dans la Bible. Assez souvent une épithète accolée au nom permet de singulariser la divinité parmi la diversité des Baals de la documentation antique, en l'associant notamment à un lieu ou à un champ de compétence particulier : Baal du mont Saphon, Baal des Cieux (Shamen), Baal Hadad, Baal Hammon, etc. Ils sont souvent peu documentés et leurs fonctions et cultes sont très mal connus. Il apparaît en tout cas qu'il ne s'agit pas toujours de dieux de l'Orage, certains ayant plutôt un caractère agraire, guérisseur ou chthonien.
Ces divinités ont des pendants féminins, les déesses appelées Baalat/Ba'alat (« Dame », « Maîtresse »), comme Baalat Gubal, la déesse tutélaire de [[Byblos]].
== Étymologie ==
Le terme Ba'al est un mot répandu dans de nombreuses [[langues sémitiques]] occidentales ([[araméen]], [[phénicien]], [[hébreu]], etc.) pour désigner un être supérieur aux autres, respectable, qui peut se traduire par le « seigneur », le « maître », le « propriétaire » ou encore l'« époux »{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=55}}{{,}}{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132}}{{,}}{{sfn|id=EBR|Schmidt|2011|loc=col. 195}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=43}}. La forme féminine du nom est Ba’alat ou Ba’alah{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=139-140}}.
Ce terme sert en général d'appellatif, pour désigner une divinité qui porte une autre nom ou s'adresser à elle, voire d'épithète divine, mais il peut aussi servir employé seul comme nom propre servant à désigner un dieu souverain qui a le statut de seigneur/maître des autres dieux{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132}}{{,}}{{sfn|Schwemer|2008|p=8-9}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=43}}.
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Le terme Ba'al est attesté en lien avec des divinités depuis la période 2500-2300 av. J.-C., dans des tablettes cunéiformes provenant d'[[Abu Salabikh]], de [[Tell Beydar]] et d'[[Ebla]]. Les historiens sont divisés sur les usages anciens du terme en rapport avec des dieux : il est possible d'y voir les premières attestations du dieu Ba'al à proprement parler{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132}}, mais il est possible qu'il s'agisse uniquement d'appellatifs ou d'épithètes désignant des divinités qui ont un autre nom{{sfn|Schwemer|2008|p=8}}.
De fait la pratique consistant à employer le terme « Maître »/« Seigneur » pour composer le nom ou l'appellatif d'une divinité se retrouve dès les époques les plus anciennes. Dans les langues sémitiques orientales de Mésopotamie et de Syrie, variantes de l'[[akkadien]], le terme employé est ''Bēlu(m)'', abrégé en ''Bēl'', féminin ''Bēltu(m)'', qui désignent de la même manière que Baal et Baalat une grande variété de divinités telles que Bēl gasher le « Seigneur Fort », Bēl matim le « Seigneur du Pays », Bēlet Nippuri(m) la « Dame de Nippur », etc. ; au {{-m|I|er}} Bēl est souvent employé comme épithète ou autre nom du grand dieu souverain babylonien [[Marduk]]{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=54 et sq.}}.
Vers le milieu du {{-m|II|e}} au plus tard Ba'al est employé dans certains royaumes de Syrie et du Levant comme le nom propre principal de la divinité suprême du panthéon, donc le « Seigneur » des dieux, dans ces régions en général le dieu de l'Orage et de la
Quoi qu'il en soit, une dissociation entre les deux est visible dans les premiers siècles du {{-m|I|er}} : le dieu de l'Orage est alors plutôt désigné par le terme Hadad dans les pays araméens, tandis que dans la sphère phénicienne et cananéenne il est plutôt appelé Ba'al. Les textes bibliques emploient le terme Ba'al pour désigner une divinité spécifique, comme à Ugarit{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132}}. Cela n'empêche pas pour autant la persistance de l'emploi du nom Ba'al avec diverses épithètes à Ugarit et en Phénicie : à Ugarit il est notamment désigné comme Ba'al d'Ugarit ou Ba'al du (mont) Saphon ; dans les cités phéniciennes on rencontre Ba'al du (mont) Liban, Ba'al de Sidon, Ba'al des Cieux, etc.{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132-133}}. Plusieurs noms de lieux sont également composés à partir de son nom, évoqués surtout dans la Bible, et en particulier dans les régions hautes de Canaan (Ba'al-gad, Ba'al-hazor, Ba'al hermon, etc.). Reste alors à déterminer s'il s'agit de références au dieu Ba'al et à son culte, ou d'une autre divinité portant le titre de « Seigneur »/« Maître », ce qui se fait au cas par cas{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=140}}{{,}}{{sfn|id=EBR|Schmidt|2011|loc=col. 195}}.
== Un dieu de l'Orage du Levant antique ==
[[image:Baal casting lightening-AO 11598-IMG 1084.JPG|vignette|redresse|Baal brandissant un foudre, {{sp-|XIV|-|XII}} {{avjc}}, [[Minet el-Beida]] (Syrie). Musée du Louvre]]
Dans les pays syro-levantins, le dieu dénommé Ba'al est une divinité souveraine, presque systématiquement un dieu de l'Orage{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=55}}{{,}}{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=132}}{{,}}{{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=179}}{{,}}{{sfn|Schwemer|2008|p=8-9}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=43}}. Cette expression désigne plus exactement des divinités associées à des phénomènes naturels atmosphériques, comprenant certes les éclairs et le tonnerre, mais aussi les tempêtes et d'une manière générale les précipitations, ce qui leur confère un aspect fertilisateur. Dans les régions côtières cela place aussi la navigation dans leur champ de compétences.
Le culte de Baal et sa mythologie sont surtout attestés par les textes d'[[Ugarit]] datés des années 1250-1185 av. J.-C., mais il apparaît de manière plus sporadique dans d'autres sites syriens de l'âge du bronze récent ([[Emar]]), dans le domaine phénicien de l'âge du fer et en Égypte où son culte a été « importé ». La Bible hébraïque comprend également des mentions de son culte dans les pays d'Israël et de Juda et le reste du Levant méridional, présenté sous un jour négatif.
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=== Ugarit et la Syrie ===
{{Article connexe|Religion ougaritique|Cycle de Baal}}
[[Fichier:Ugarit Baal temple 3968.jpg|thumb|gauche|Ruines du temple de Ba'al à Ugarit.]]
[[Ugarit]] sur la côte syrienne est le cas le mieux documenté dans lequel un dieu est appelé Ba'al tout court, plus exactement ''Baʿlu'' dans la langue locale, l'[[Ougaritique|ugaritique]]. Il est néanmoins aussi désigné sous des formes plus traditionnelles, avec une épithète topique, Ba'al d'Ugarit et Ba'al du (mont) Saphon (''Ṣapūna/u''), ou encore une épithète divine Ba'al Hadad, rappelant qu'il est l'aspect local du dieu de l'Orage{{sfn|Schwemer|2008|p=9}}. Le fait qu'on rencontre plusieurs Ba'als dans les listes divines d'Ugarit semble aussi renvoyer au fait que le dieu a un grand nombre de manifestations locales, chacune disposant de son propre culte{{sfn|id=EBR|Schmidt|2011|loc=col. 195}}.
Ba'al est à Ugarit tantôt présenté comme le fils du grand dieu [[El (dieu)|El]], figure patriarcale du panthéon local, ou comme celui de [[Dagon (dieu)|Dagan]], grand dieu agraire de la Syrie. La déesse [[Anat]] n'est pas explicitement présentée comme son épouse, les déesses ayant ce rôle sont Pidray, Tallay et Arsay, aussi présentées comme ses filles. En tant que dieu de l'Orage, il est le maître des pluies, du tonnerre et des éclairs, et plus généralement un dieu de la fertilité. Les épithètes et titres qu'il reçoit indiquent la grande variété de ses rôles. Il est Ba'al d'Ugarit, le protecteur de la cité et du royaume, et son roi à proprement parler. En tant que maître du mont Saphon, il trône au sommet de la plus haute montagne du royaume, rappelant par là son rôle éminent. Son rôle atmosphérique se retrouve ainsi dans le titre de « chevaucheur des nuées ». Il est également défini comme « puissant » (''dnrm''). « Le victorieux » (''aliyn bʿl'') et « le plus puissant des héros » (''aliy qrdm'')
Un groupe de textes mythologiques en ugaritique surnommé « [[Cycle de Ba'al]] » par les spécialistes modernes est dédié à sa gloire et à l'exaltation de la royauté. Le premier récit relate comment Ba'al a vaincu le dieu [[Yam]], la Mer, ce qui le place dans le rôle de divinité protectrice contre les forces du chaos venues de la mer, également documenté par des mentions de ses combats contre d'autres monstres maritimes qui ont des échos dans la Bible (un équivalent de Tannin, des serpents tels que Litanu qui rappelle le Léviathan). Il accède alors au statut du dieu souverain, et un palais est érigé pour lui. Son affrontement suivant le met aux prises avec [[Mot (dieu)|Mot]], le dieu de la Mort, qui le fait venir aux Enfers où il le retient, causant une perte de la fertilité sur terre. Ba'al parvient à s'échapper, puis combat Mot, qui reconnaît sa suprématie bien que le duel n'ait pas eu de vainqueur. Ce récit présente donc Ba'al comme un dieu de la fertilité lié au cycle des saisons, tout en le reliant au monde infernal, ou peut-être encore à la figure du dieu qui meurt et qui renaît présent dans diverses traditions mythologiques, mais à Ugarit il n'y a aucun rituel qui conforterait cette interprétation<ref>{{Chapitre|langue=en|prénom1=John C.L. |nom1=Gibson|titre=The Mythological Texts|auteurs ouvrage=Wilfred G. E. Watson et Nicholas Wyatt (dir.)|titre ouvrage=Handbook of Ugaritic Studies| lieu=Louvain, Boston et Cologne| éditeur= Peeters|collection= Orientalia Lovaniensia Analecta | année=1999| passage=193-199}}</ref>{{,}}{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=134-136}}{{,}}{{sfn|id=EBR|Schmidt|2011|loc=col. 195-198}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=44-45}}.
=== Monde phénicien et punique ===
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=== Israël et la Bible ===
En tant que divinité majeure de Phénicie et de Canaan, Ba'al a été
La rivalité entre YHWH et Ba'al, relatée dans le [[Premier Livre des Rois]] (chapitres 16 à 18), prend place dans le royaume d'Israël sous le règne d'[[Achab (roi)|Achab]], qui a épousé une princesse originaire de Phénicie (Sidon ou Tyr), [[Jézabel]], sous l'influence de laquelle le culte de Ba'al (peut-être [[Melqart]], le Ba'al de Tyr) tend à devenir dominant. Un temple lui est consacré à [[Samarie]], la capitale du royaume. La résistance yahwiste est menée par le prophète [[Élie]], et culmine au chapitre 18 dans son affrontement sur le [[mont Carmel]] contre 450 prophètes de Ba'al : il parvient à produire du feu et de la pluie grâce à l'intervention de Yhwh, alors que ses rivaux échouent, ce qui signifie la supériorité de son dieu, et se conclut par la mise à mort des prophètes de Ba'al. Dans le [[Second Livre des Rois]] (chapitres 9 et 10), Jézabel et les enfants d'Achab sont finalement renversés par [[Jéhu]] et tués, qui massacre également les adeptes de Ba'al et fait de YHWH le dieu du royaume<ref>{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Thomas|nom1=Römer|titre=L'Invention de Dieu|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Points|Points]]|année=2017|passage=154-161}}</ref>. Cette compétition âpre se poursuit par la suite, indiquant l'ancrage profond du culte de Ba'al à Israël et à Juda : comme l'a fait Achab en Israël, [[Manassé (Juda)|Manassé]] promeut son culte à Juda, avant que [[Josias]] ne conduise une purge visant à éradiquer le culte de Ba'al. Cependant, en dépit des diverses victoires attribuées par les récits bibliques à YHWH sur Ba'al, le culte de ce dernier reste ancré dans la population judéenne, puisqu'il semble encore vénéré durant la période de l'Exil{{sfn|id=EBR|Schmidt|2011|loc=col. 199}}.
Malgré cette rivalité, les similitudes
Parmi les autres aspects ignobles imputés au culte de Ba'al, des prostitués, hommes et femmes, servaient sexuellement sur les hauts lieux et certains passages bibliques rapportent parmi les rituels pour obtenir les faveurs de la divinité des sacrifices d'enfants<ref>De telles descriptions sont présentes dans [[Premier Livre des Rois|1 Rois]], [[Deuxième Livre des Rois|2 Rois]], [[Premier Livre des Chroniques|1 Chroniques]] et [[Deuxième Livre des Chroniques|2 Chroniques]].</ref>, dans le ''[[livre de Jérémie]]'' (19:5 ) : {{Citation |Ils ont bâti des hauts lieux à Baal, Pour brûler leurs enfants au feu en holocaustes à Baal : Ce que je n'avais ni ordonné ni prescrit, Ce qui ne m'était point venu à la pensée}}. Néanmoins, les liens entre de tels sacrifices et les cultes de Baal ne sont pas nombreux dans les textes bibliques et les sources extra-bibliques ne sont pas probantes sur de tels liens{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=45}}.
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Lorsque les régions où Ba'al était vénéré passent sous la domination des Grecs puis des Romains, ce dieu passe sous le prisme de l'[[Interpretatio graeca|interpretatio graeca et romana]] et devient [[Zeus]] chez les auteurs grecs et [[Jupiter (mythologie)|Jupiter]] chez les auteurs latins, donc les équivalents du dieu de l'Orage dans les panthéons grecs et romains{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=55}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=46}}. Ba'al du mont Saphon est ainsi traduit en grec comme Zeus du [[Ras Kouroun|mont Kasios]] et se voit consacrer des sanctuaires dans plusieurs régions du monde gréco-romain{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=153}}. Chez [[Philon de Byblos]], Ba'al apparaît plutôt sous le nom de Demarous, qui rappelle l'épithète ''dmrn'' « puissant » qui lui est attribué à Ugarit{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=46}}.
== Les différents
[[image:Baal Ugarit Louvre AO17329.jpg|vignette|Figurine en bronze d'un Baal, {{sp-|XIV|-|XII}} {{avjc}}, trouvée à Ras Shamra (anciennement [[Ugarit]]) près de la côte phénicienne. [[Musée du Louvre]].]]
Il existe dans le Levant antique une pluralité de formes locales de Ba'al, distinguées les unes des autres par une épithète renvoyant souvent à un lieu (ce qui a pu être comparé aux « Notre-Dame » du Catholicisme){{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=179}}. Ci-après une liste non exhaustive de divinités attestées dans des sources antiques dont le nom ou un surnom commence par Ba'al, dans l'ordre alphabétique, qu'il s'agisse ou non d'un dieu de l'Orage. La Bible donne aussi le nom de plusieurs localités dont le nom commence par ''Ba'al'', qui au moins dans certains cas paraissent porter ce nom parce qu'il s'agit d'un lieu de culte de ce dieu ; mais dans bien des cas rien ne vient confirmer cela, et ces lieux pourraient porter un tel nom pour d'autres
* Ba'al addir : Le « Seigneur puissant » (ou « Ba'al le puissant »), attesté à Byblos et surtout en Afrique du Nord, apparemment comme un autre nom de Ba'al hammon, car il lui sert aussi d'épithète (il est aussi appelé « Roi puissant »){{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=55-56}}.
* Ba'al berith : « Ba'al du serment » (ou le « Seigneur du serment », ou « Baal l'allié »), attesté dans le [[Livre des Juges]], en même temps qu'un « El du serment ». Ils disposent d'un lieu de culte dans la ville cananéenne de [[Sichem]] et sont vénérés par des Israélites, qui trahissent ainsi leur propre dieu. D'après son nom Ba'al berith pourrait être un garant des alliances et des serments, mais le texte biblique semble aussi indiquer que son culte est lié à la fertilité et à l'agriculture{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=141-144}}{{,}}{{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=180}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=46}}.
* Ba'al de Byblos : Parèdre de la déesse tutélaire de la ville, Ba'alat Gubal la « Dame de Byblos ». Une inscription l'appelle aussi ''ʾdn'', Adon, qui se traduit également par « Seigneur » (cf. [[Adonis (mythologie)|Adonis]]){{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=57}}.
* Ba'al du Carmel : Il s'agirait d'un des aspects du dieu Ba'al en tant que maître d'une montagne du Levant{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=43 et 46}}. Les textes antiques parlent plutôt du « dieu du Carmel ». Le lien entre Ba'al et le [[mont Carmel]] est surtout indiqué par l'affrontement entre le prophète
* [[Ba'al Hammon|Ba'al ham(m)on]] : Son origine est discutée : il pourrait s'agir de « Ba'al de l'Amanus », donc un autre aspect du dieu en lien avec une montagne, ou bien du « Seigneur de la chapelle (domestique) ». Peu attesté au Levant, il connaît un grand succès en Occident où il devient la divinité principale de Carthage, avec pour parèdre la déesse Tanit. C'est lui qui se cache derrière le Ba'al présent dans de nombreux noms personnels carthaginois, comme Hannibal. C'est un dieu lié à la famille et aux communautés, et aussi à l'agriculture, traits qui le rapprochent plutôt des dieux El et Dagan. Il a aussi des aspects chthoniens. Les Grecs et les Romains l'assimilent à Kronos et Saturne{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=57-58}}{{,}}{{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=73-74}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=46-47}}.
* Ba'al du Hermon : Un des aspects du dieu Ba'al en tant que maître d'une montagne du Levant, le [[mont Hermon]] (actuel Jabal el-Cheikh dans l'Anti-Liban), qui a donné son nom à une localité
* Ba'al du Liban : Un des aspects du dieu Ba'al en tant que maître d'une montagne du Levant, le [[mont Liban]]. Il est attesté par des dédicaces en phénicien mises au jour à Carthage de Chypre, où il dispose manifestement d'un temple. Il est surtout connu à l'époque romaine sous le nom de Zeus Libranios, qui dispose d'un temple sur cette île, à Phassoula, qui pourrait être celui que documentent les inscriptions phéniciennes{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=57}}.
* Ba'al marqod : « Ba'al de la danse » (ou « Seigneur de la danse »), connu par quelques inscriptions en grec et en latin provenant du sanctuaire de Der el-Qala près de Beyrouth. Il est assimilé à Jupiter (et sa parèdre à Junon), ce qui indique qu'il s'agit d'un aspect du dieu de l'Orage, mais la présence d'une source bienfaisante dans le sanctuaire lui confère aussi un aspect guérisseur et fécondant. Son culte est aussi attesté à Rome et en Dacie, où il a été introduit pas des soldats{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=59}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=47-48}}.
* Ba'al du Pe'or ([[Belphégor (divinité)|Belphégor]]) : Dieu local du mont Pe'or, dans le pays de [[Royaume de Moab|Moab]]. Il s'agirait d'une divinité liée au monde infernal. Le nom Pe'or semble lié au terme qui sert en hébreu ancien à désigner la bouche des Enfers. Ce dieu apparaît dans la Bible (Nombres 25) qui évoque des banquets licencieux en son honneur dans lesquels des femmes moabites essayent d'entraîner des hommes israélites. Dans la tradition juive son culte est associé à des banquets (''marzeah''). Il est passé à la postérité sous le nom de Belphégor{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=147-148}}{{,}}{{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=180 et 182}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=48}}.
* Ba'al Peraṣim : Nom d'une localité proche de [[Jérusalem]] (localisation exacte inconnue) évoquée dans la Bible parce que David y vainc les Philistins, dont le nom signifie « Maître/Propriétaire des brèches ». Il pourrait s'agir d'un lieu de culte de Ba'al à Juda, situé sur une hauteur (un Mont Perasim est évoqué dans Isaïe), mais ce n'est pas assuré{{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=179 et 182}}.
* Ba'al du Saphon (Ṣapon) : Désignation du dieu Ba'al quand il est associé à sa résidence du mont Saphon, l'actuel Djebel al-Aqra sur le littoral syrien, aussi connu comme le mont Kasios en grec ancien. Il apparaît en tant que désignation de Ba'al (Hadad) dans les documents rituels d'Ugarit, royaume où se trouve le mont Saphon à l'âge du bronze récent et qui occupe une place importante dans sa mythologie. Il joue un rôle en tant que protecteur des navigateurs. Son culte est attesté en dehors de sa région d'origine (à Tyr, en Égypte), ce qui implique qu'il s'agit d'une figure divine de premier plan dans le Levant antique. Un temple lui est dédié à Carthage, d'où provient probablement le [[tarif de Marseille]]. À l'époque gréco-romaine, il est désigné comme Zeus du (mont) Kasios, dont le culte est attesté en Égypte, en Grèce, en Sicile, en Espagne. En raison de la proximité phonétique entre Saphon et [[Typhon]], il a été proposé que le monstre grec lui ait emprunté son nom et ses traits liés aux tempêtes maritimes{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=60-61}}{{,}}{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=152-154}}{{,}}{{sfn|id=DEB|DEB|2002|p=179 et 181}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=44 et 49}}.
* Ba'al de Sidon : Divinité principale de cette cité phénicienne, peut-être une autre manière de désigner le dieu guérisseur [[Eshmoun]]{{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=60 et 78}}. Pour le Bronze récent un texte mis au jour à Ugarit indique que le grand dieu local est un dieu de l'Orage, ce qui se rapproche plus de la forme habituelle de Ba'al{{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=58}}.
[[image:Temple of Bel, Palmyra 02.jpg|vignette|Temple de Bel/Baal à Palmyre]]
* [[Baalshamin|Ba'al shamem]] / Ba'al shamayim : « Ba'al des Cieux » ou le « Seigneur des Cieux ». Ce nom est attesté à Ugarit à la fin de l'âge du bronze, sans doute en tant qu'aspect du Ba'al local. Il est surtout documenté à partir de la période suivant : il est présent et populaire dans les cités phéniciennes (Byblos, Tyr) et dans la sphère araméenne (Karatepe) à l'âge du fer, et dispose encore d'un sanctuaire à Oum el-Amed près de Tyr au {{-s|II|e}} Il ne paraît pas rattaché à une cité ou un lieu en particulier, même s'il a été proposé qu'il s'agisse d'un autre nom du Ba'al du Carmel voire de Melqart. Aux époques hellénistique et romaine il apparaît sous les noms de Zeus Hypsistos « Très-Haut », Megistos Keraunios « Très-Grand Foudroyant » ou encore Theos Hagios Ouranios « Dieu Saint Céleste », ce qui indique qu'il a acquis un statut de divinité suprême. Son culte est aussi attesté dans les royaumes arabo-araméens ([[Nabatéens]], [[Palmyre]], [[Hatra]]). Il reste important jusqu'à la christianisation. En revanche il est peu attesté en Occident : il dispose d'un temple à Carthage et son culte est attesté en Sardaigne{{sfn|id=DCPP|DCPP|1992|p=61-62}}{{,}}{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=149-151}}{{,}}{{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=72-73}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=49}}.
* Ba'al de Tyr : Il s'agit d'une manière de désigner le dieu principal du panthéon de cette cité, [[Melqart]]{{sfn|id=RPA|Bonnet|2014|p=62-63 et 74-75}}.
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* Ba'al zebub/l ([[Belzébuth]]) : Dieu attesté par quatre occurrences dans la Bible hébraïque, notamment en lien avec la cité philistine d'[[Ekron]]. Son nom a été interprété par l'hébreu ''zebub'' « mouche » comme signifiant le « Maître/Seigneur des mouches », ce qui a longtemps posé divers problèmes d'interprétation. Il est désormais couramment admis qu'il s'agit d'une déformation volontaire des rédacteurs des passages bibliques en question, de manière à déprécier ce dieu, et que son épithète originelle était ''zebul'', « prince », donc que le nom signifie « Ba'al le prince ». L'adjectif « prince » sert à désigner diverses divinités dans des langues ouest-sémitiques, et Ba'al en particulier dans des textes d'Ugarit où il servirait plus spécifiquement à désigner une divinité chthonienne pouvant intervenir pour guérir certaines maladies. Dans le Nouveau Testament et la littérature postérieure, il est devenu le démon Belzébuth{{sfn|id=DDDB|DDDB|1999|p=154-156}}{{,}}{{sfn|Frayne|Stuckey|2021|p=49}}.
== Réceptions ==
== Dans la culture contemporaine ==▼
=== Judaïsme ===
Ba'al est assez peu mentionné dans les textes de la tradition rabbinique, même quand il s'agit d'aborder la question de l'idolâtrie. Les quelques passages qui font référence à cette ancienne divinité ne présentent qu'un lointain rapport avec son culte tel qu'il a existé, ce qui indique que les connaissances le concernant étaient pour l'essentiel perdues et qu'il est évoqué pour être l'objet de dérision. Un texte du [[Talmud de Jérusalem]] (''yShab'' 9 : 1) lie ainsi le culte de Ba'al à la sexualité, puisque sa statue aurait l'aspect d'un phallus{{sfn|id=EBR|Lockshin|2011|loc=col. 200-201}}.
=== Islam ===
La [[As-Saaffat|{{37e}} Sourate]] (123-130) fait référence au prophète Ilyas ([[Élie]]) enjoignant son peuple à abandonner le culte de Ba'al, qui les détourne du véritable Dieu. Il s'agit manifestement d'une allusion à la lutte du prophète contre les adorateurs de Ba'al relatée de la ''[[Premier Livre des Rois]]''{{sfn|id=EBR|Thomas|2011|loc=col. 201}}.
=== Littérature occidentale ===
L'image de Ba'al en tant que faux dieu a été reprise dans l'Europe chrétienne, notamment par des écrivains. La tragédie ''[[Athalie (Racine)|Athalie]]'' de [[Jean Racine]] (1691) évoque ainsi la déchéance d'une reine adoratrice de Ba'al, à partir d'un récit biblique. Dans l'Angleterre victorienne, les Catholiques sont parfois assimilés à des idolâtres vénérant Ba'al{{sfn|id=EBR|Murphy|2011|loc=col. 201-202}}.
La pièce de théâtre [[Baal (Brecht)|Baal]], écrite en 1918-1919 (donc au sortir de la [[Première Guerre mondiale]]) par le dramaturge allemand [[Bertolt Brecht]] alors âgé de 20 ans, met en scène un personnage éponyme, poète maudit et alcoolique dont l'immoralisme reflète, bien que négativement, la figure biblique, notamment au travers de la thématique de la sexualité{{sfn|id=EBR|Murphy|2011|loc=col. 202-203}}. ▼
La figure de Ba'al et les textes bibliques le concernant inspirent d'autres œuvres telles que la pièce de théâtre ''Élie'' de [[Martin Buber]] (1963) qui repense la lutte du prophète contre les idolâtres comme une recherche pour l'intégrité morale, ou encore ''Baal Babylone'' de [[Fernando Arrabal]] (1959){{sfn|id=EBR|Murphy|2011|loc=col. 203-204}}.
Les récits et représentations bibliques à charge contre Ba'al ont été repris par plusieurs médias, y compris à travers la figure de [[Belzébuth]] et en l'associant avec d'autres créatures malfaisantes telles que [[Moloch]], comme certains commentaires du texte hébraïque [[Tanakh]] le font. Son iconographie moderne dérive de cette interprétation démoniaque, forgée par des auteurs tels que [[Jacques Collin de Plancy]] et son ''[[Dictionnaire infernal]]'' (1818), réappropriée et repensée dans divers pans de la culture contemporaine, jusqu'aux [[jeux vidéos]]{{sfn|id=EBR|Zoltes|2011|loc=col. 205-206}}.
▲La pièce de théâtre [[Baal (Brecht)|Baal]], écrite en 1918-1919 par le dramaturge allemand [[Bertolt Brecht]], met en scène un personnage éponyme, poète maudit et alcoolique dont l'immoralisme reflète, bien que négativement, la figure biblique.
La série de [[bande dessinée]] ''[[Alix (bande dessinée)|Alix]]'', de [[Jacques Martin (auteur)|Jacques Martin]], met notamment en scène les sacrifices d'enfants projetés dans les gueules des idoles représentant Moloch-Baal ou Baal-Amon (''[[L'Île maudite]]'', ''[[Le Tombeau étrusque]]'', ''[[Le Spectre de Carthage]]'', ''La Conjuration de Baal''). En dehors des récits bibliques, Martin s'inspire beaucoup de l'histoire de ''[[Salammbô]]''<ref>Ce nom provient du [[phénicien]] Shalambaal « image de Baal » ([[Gisèle Séginger]], ''Salammbô'', Flammarion "GF", 2001 : "Salammbô", le nom d’Astarté [http://flaubert.univ-rouen.fr/bulletin/bulle18.php]).</ref>, de [[Gustave Flaubert]], et fait le lien entre les filles de [[Loth]] et le culte du feu, devenant le culte d'Ammon-Moloch et faisant tache d'huile dans les pays du Proche-Orient<ref>{{lien brisé|auteur=Diego Jiménez|titre=Incoherences historiques dans Alix|url=http://www.tcomt.fr/Sitealix/Dossiers/11produits/Incohences/incoherencesdansalix.pdf|format=pdf|consulté le=21 mai 2019}}.</ref>.
La série télévisée ''[[Stargate SG-1|Stargate-SG1]]'' met en scène
Dans le jeu ''[[Genshin Impact]]'' Baal est le nom de l’ancien archon électro. Baal est un des démons alliés de l'héroïne des jeux ''[[Bayonetta 2]]'' et ''[[Bayonetta 3]]''. Il prend la forme d'un immense crapaud femelle. Elle est surnommée dans le jeu « Impératrice des profondeurs».
Dans le jeu ''[[Diablo II: Lord of
== Notes et références ==
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* {{chapitre|langue=en|titre chapitre=Baal (deity)|prénom=John|nom=Day |titre ouvrage=[[Anchor Bible Dictionary]]|auteurs ouvrage=[[David Noel Freedman]] (dir.)|année=1992|éditeur=Doubleday|lien éditeur=Doubleday}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Karel|nom1=van der Toorn|prénom2=Bob|nom2=Becking|prénom3=Pieter W.|nom3=van der Horst|directeur3=oui|titre=Dictionary of Deities and Demons in the Bible|lieu=Leyde, Boston et Cologne|éditeur=Brill|année=1999|passage=171-173|isbn=90-04-11119-0|id=DDDB}}
* {{Ouvrage| langue=fr| titre=Dictionnaire encyclopédique de la Bible| lieu=Turnhout| éditeur=[[Brepols]]| année=2002| passage=179-182| id=DEB}}
* {{Chapitre|langue=fr|prénom1=Gregorio |nom1=del Olmo Lete|titre=La religion cananéenne des Anciens Hébreux|auteurs ouvrage=Gregorio del Olmo Lete (dir.)|titre ouvrage=Mythologie et religion des Sémites occidentaux| sous-titre ouvrage =II: Émar, Ougarit, Israël, Phénicie, Aram, Arabie| lieu=Louvain| éditeur= Peeters|collection= Orientalia Lovaniensia Analecta | année=2008| passage=165-264| isbn =978-90-429-1897-9}}
* {{Article|langue=en|prénom1= Daniel |nom1= Schwemer| titre= The Storm-Gods of the Ancient Near East: Summary, Synthesis, Recent Studies: Part II| périodique= Journal of Ancient Near Eastern Religions| volume=8| numéro=1 |année=2008 |passage=1-44|doi=10.1163/156921208786182428}}
* {{Chapitre|langue=en|auteurs=Brian B. Schmidt et al. |titre=Baal| titre ouvrage= Encyclopedia of the Bible and Its Reception|volume= 3|éditeur=Walter de Gruyter|lieu= Berlin et Boston|année= 2011|id=EBR}}, col. 195-206
* {{Ouvrage |langue=fr |prénom1=Corinne |nom1=Bonnet |prénom2=Herbert |nom2=Niehr |titre=La religion des Phéniciens et des Araméens |lieu=Genève |éditeur=Labor et fides |année=2014 |id=RPA}}.
* {{Chapitre |langue=de|prénom1= Daniel |nom1= Schwemer|titre= Wettergott(heiten). A. Philologisch|titre ouvrage= Reallexikon der Assyriologie und Vorderasiatischen Archäologie| volume=15 |tome=1/2|année= 2016|passage=69-91}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Douglas R. |nom1= Frayne |prénom2=Johanna H. |nom2=Stuckey |titre=A handbook of gods and goddesses of the ancient Near East |sous-titre= Three thousand deities of Anatolia, Syria, Israel, Sumer, Babylonia, Assyria, and Elam|éditeur= Eisenbrauns, The Pennsylvania State University|lieu=University Park|année=2021| passage=43-49}}
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* [[Cycle de Baal]] ([[Ougarit]])
* [[Koush]]
*
* [[Les Compagnons de Baal]] série télévisée ORTF (1968)
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