« Éruption de la montagne Pelée en 1902 » : différence entre les versions

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{{Infobox Éruption volcanique
[[Image:1902-pelee-map.jpg|thumb|right|300px|Alfred LaCroix. La montagne Pelee et ses Eruptions. Paris, Masson et Cie, 1904.]]
| nom = Éruption de la montagne Pelée en 1902
L''''éruption de la [[montagne Pelée]] en 1902''' détruisit entièrement [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]] en [[Martinique]] faisant près de 26000 morts.
| image = Pelee 1902 2.jpg
| légende = Cinquième cliché d’une série de six de la nuée ardente du {{date-|16 décembre 1902}} par Lacroix, dans ''La montagne Pelée et ses éruptions''.
| pays = {{France}}
| volcan = [[Montagne Pelée]]
| zone activité = [[Cratère volcanique|Cratère sommital]] et [[Rivière Blanche (Martinique)|rivière Blanche]]
| dates = Du 23 avril 1902 au 5 octobre 1905 ({{durée|23|4|1902|5|10|1905}})
| régions affectées = Nord de la [[Martinique]], [[Antilles]]
| type éruption = [[Éruption phréatique|Phréatique]], [[Éruption péléenne|péléenne]]
| phénomènes = [[Nuée ardente|Nuées ardentes]], [[lahar]]s, retombées de cendres, [[Tsunami|raz-de-marée]] (5 et 7 mai)
| volume = {{unité|0.14|km|3}} de [[lave]]s et {{unité|0.2|km|3}} de [[éjecta volcanique|téphras]]
| vei = 4
| morts = environ {{unité|30000}}
| blessés =
| coûts =
| géolocalisation =
}}
L''''éruption de la [[montagne Pelée]] en 1902''' est une [[éruption volcanique]] majeure, la plus meurtrière du {{s|XX}}, survenue sur l’île [[France|française]] de la [[Martinique]] ([[Antilles]]), qui a débuté le 23 avril 1902 et s'est poursuivie jusqu'au 5 octobre 1905.
 
Sa [[nuée ardente]] (ou nuage pyroclastique) du {{date-|8 mai 1902}} reste célèbre pour avoir, en quelques minutes, entièrement détruit ce qui était alors la plus grande ville de la Martinique, [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]], tué la quasi totalité de ses habitants avec seulement trois rescapés certifiés (plus de {{unité|30000|personnes}} sont mortes soit 1/5{{ème}} de la population de l’île)<ref group=alpha>Aucun décompte, estimation.</ref>{{,}}<ref>[https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/saint-pierre-0/bilan-humain-eruption-montagne-pelee-t-il-ete-aggrave-tenue-elections-saint-pierre-707983.html Le bilan humain de l’éruption de la Montagne Pelée a-t-il été aggravé par la tenue des élections à Saint-Pierre ?, Jean-Marc Party, FranceTélévisions, 08 mai 2019]</ref>, et coulé une vingtaine de [[Navire de commerce|navires marchands]]. Cette [[éruption explosive]] (de niveau 4 sur l'[[Indice d'explosivité volcanique|échelle VEI]]) est la [[Grandes catastrophes en France depuis 1900|catastrophe la plus meurtrière]] du {{s|XX}} en [[France]] et l'éruption volcanique la plus meurtrière au monde depuis [[Éruption du Krakatoa en 1883|celle du Krakatoa en 1883]]. La destruction de la ville et de ses alentours était inévitable, mais ses habitants et de nombreux marins ont été les victimes de décisions politiques et administratives sur instructions ministérielles : refus par le [[Liste des gouverneurs de la Martinique|gouverneur de la Martinique]], [[Louis Mouttet]], de faire évacuer la ville et de laisser appareiller les navires ancrés dans la rade afin d’assurer le second tour de l'[[Élections législatives françaises de 1902|élection législative du {{date-|11 mai 1902-}}]].
== Les prémices ==
Bien que considéré comme dormante, la montagne Pelée est entrée en éruption le [[25 avril]] 1902. Au début du mois d'avril, les excursionnistes rapportent l'aspect inhabituel des vapeurs sulfureuses émises des [[fumerolle]]s près du sommet. Elles ne sont pas considérées, car les fumerolles étaient souvent apparues puis disparues dans le passé.
 
L’éruption type de 1889-1905, dont la nuée ardente catastrophique du {{date-|8 mai 1902}} n’était qu’une phase, est une référence fondamentale de [[volcanologie]] : c’est la première éruption volcanique qui ait été scrupuleusement étudiée et décrite scientifiquement (par [[Alfred Lacroix|Lacroix]], [[Angelo Heilprin|Heilprin]], [[Thomas Jaggar|Jaggar]], [[Frank Alvord Perret|Perret]] et beaucoup d'autres). Pour désigner ce type d'éruption, Lacroix a utilisé l'expression « [[éruption péléenne]] » et pour ses événements destructeurs, l'expression « nuée ardente »<ref group="alpha">Lacroix : « Coulée à pyroclastites chaudes formées de deux parties : une partie basale dense qui épouse le relief, et un [[panache volcanique|nuage de cendres]] superficiel qui masque la précédente » {{incise|les volcanologues disent maintenant « déferlante », « avalanche » ou « coulée pyroclastique, turbulente » ou « gravitaire »|stop}}. Le terme ''nuvem'' avait été utilisée pour une éruption aux [[Açores]] en 1808.</ref>.
Le [[23 avril]], le volcan émet une pluie légère de cendres sur ses côtés sud et ouest et des grondements souterrains.
 
De par les conséquences humaines et matérielles de la sous-estimation d'un danger « naturel » imminent, cette éruption montre aussi l'importance de l'évaluation et de la prise en compte par les autorités des [[risque naturel|risques naturels]], et notamment du [[risque volcanique]]. La nuée du {{date-|30 août 1902}} a encore fait un millier de victimes. L'éruption de 1929-1932 n'en a pas fait, car toute la population du Nord de l'île avait été évacuée à la suite du retour d'expérience des événements précédents.
Le [[25 avril]], il émet un grand nuages de roches et de cendres à son sommet, où l'Étang Sec - un bassin asséché - est localisé. Les matériaux éjectés ne produisent que des dégâts minimes.
 
== Cadre et contexte ==
Le [[26 avril]], la zone est recouverte par une couche de cendres indiquant la proximité d'une future éruption ; les autorités publiques ne s'en inquiétent pas outre mesure.
=== Saint-Pierre ===
[[Fichier:Saint Pierre Montagne Pelee.jpg|vignette|Saint-Pierre avant l'éruption de 1902.|alt=]]
 
La ville de [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]] s’étendait en bordure de sa rade bien protégée, sur environ {{unité|3|km}} de long et {{unité|400|m}} de large, au pied du flanc sud-ouest du volcan. Elle était entourée de plusieurs hameaux et villages, le tout étant directement exposé aux effets des éruptions.
Le [[27 avril]], de nombreux curieux au sommet du volcan trouvent l'Étang Sec rempli d'eau, formant un [[lac]] de 180 m de largeur. Il y a un cône de débris volcaniques de 15 m de haut sur un des côtés du lac, alimentant le lac d'un jet régulier d'eau bouillante. Des sons ressemblant à ceux dégagés par un chaudron d'eau bouillante proviennent du sous-sol. Une forte odeur de [[soufre]] envahit les rues de la ville et incommodent hommes et chevaux à 10 km à la ronde.
 
[[Fichier:Martinique Saint-Pierre.jpg|vignette|gauche|redresse|Saint-Pierre, le ''Petit Paris des Antilles''.]]
Le [[30 avril]], les rivières Roxelane et des Peres gonflent, charrient des rochers et des arbres arrachés au sommet. Les villages du Prêcheur et de Sainte-Philomène recoivent des jets réguliers de cendres.
 
Saint-Pierre, surnommée le ''Petit Paris des Antilles''<ref group=alpha>Et aussi : Petit Paris, Paris des Isles, Perle des Antilles, Venise tropicale.</ref>, avait été le [[chef-lieu]] de la Martinique jusqu'en 1692 et en était restée jusqu'à l'éruption de 1902 la capitale économique et culturelle. Elle avait une [[Cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption de Saint-Pierre de la Martinique|cathédrale]], un [[Théâtre de Saint-Pierre|théâtre]], un [[Lycée Victor-Schœlcher (Saint-Pierre)|lycée]], un [[Hôpital militaire Saint Jean-Baptiste de Saint-Pierre|hôpital]], une [[Prison de Saint-Pierre|prison]], une chambre de commerce, des consulats étrangers, un journal (''[[Les Colonies]]''){{etc.}} Son port, en fait un simple mouillage dans la rade, à environ {{unité|100|m}} du rivage, accueillait de nombreux [[Navire de commerce|navires marchands]] internationaux pour exporter le sucre et le rhum produits dans ses usines.
Le [[2 mai]] à 11 h 30, la montagne produit de fortes détonations, des tremblements de terre, et un panache noir de fumée s'élève. Des cendres recouvrent toute la partie nord de la Martinique. Les détonations se reproduisent dans des intervalles de 5 à 6 heures. Le journal local Les Colonies propose de repousser indéfiniment le pique-nique, prévu à l'origine le 4. Les animaux domestiques commencent à souffrir de la [[faim]] et de la [[soif]], la cendre recouvrant l'herbe et souillant l'eau.
 
=== Volcan ===
Le samedi [[3 mai]], le vent souffle au nord, allégeant la crainte à Saint-Pierre.
[[Fichier:1902-pelee-map.jpg|vignette|redresse|Carte de la montagne Pelée avant l’éruption, par Lacroix, in ''La montagne Pelée et ses éruptions''.]]
 
Située au milieu de l’arc de subduction des [[petites Antilles]] qui compte une dizaine de volcans actifs<ref>[http://www.ipgp.fr/fr/petites-antilles-volcans-seismes Les Petites Antilles, des volcans et des séismes] IPGP, consulté le 4 novembre 2020</ref>, à l’extrémité nord de la Martinique, la montagne Pelée est un [[stratovolcan]] [[Volcan gris|gris calco-alcalin]], empilement subconique de blocs et de [[pyroclastite]]s plus ou moins cimentés, enrobant un axe subvertical d’[[andésite]], racine de deux dômes juxtaposés, celui de 1902 au nord-est et celui de 1929, le sommet le plus élevé : {{unité|1397|m}}. Les dômes occupent l'est de la demi-caldeira de l’étang Sec, ouverte au sud-ouest vers Saint-Pierre qui s’étend à son pied. Le [[cône volcanique]] a une surface d'environ {{unité|120|km|2}}. Il est strié par un réseau dense de ravines rayonnantes dont la principale est la rivière Blanche qui part de l’étang Sec et se jette dans la rade, au nord de Saint-Pierre.
Le dimanche [[4 mai]], les chutes de cendres reviennent et s'intensifient, les communications entre Saint-Pierre et [[Le Prêcheur]] sont coupées. Le nuage de cendres est si dense que les bateaux côtiers n'osent plus s'approcher du port. Les habitants commencent à paniquer et à fuir l'île par les bateux à vapeur des lignes régulières. La région est recouverte d'une couche de cendres blanche "comme de la farine".
 
L’activité de la montagne Pelée, de [[Éruption péléenne|type éruptif péléen]], est modérée, avec des éruptions peu fréquentes, courtes, relativement faibles et lentes. Cependant, son dynamisme magmatique peut être violent et son évolution, difficilement prévisible.
Le lundi [[5 mai]], la montagne paraît s'être calmée au matin ; cependant, à 13 h, la mer recule de 100 mètres puis revient sous forme d'un [[raz-de-marée]], inondant les quartiers bas de la ville, et un large nuage de fumée apparaît à l'ouest de la montagne. Une paroi du cratère de l'Étang Sec s'écroule et propulse une masse d'eau bouillante et de boue, ou [[lahar]], dans la rivière Blanche, emportant l'[[usine]] de [[raffinage]] de [[canne à sucre]] Guérin et emportant 150 victimes, dont le patron et son épouse, sous 60 à 90 mètres de boue. Des [[réfugié]]s des villages environnants s'enfuient à Saint-Pierre, croyant y être plus en sécurité. Cette nuit, les conditions météorologiques endommagent le [[réseau électrique]] urbain : la ville est plongée dans le noir absolu.
 
En éruption, son [[Magma (géologie)|magma]] d’[[andésite]] à [[Labradorite|labrador]] et [[hypersthène]], très gazeux et très visqueux, produit des nuées ardentes par explosions violentes de dégazage, des [[lahar]]s par pluies de condensation de vapeur d’eau volcanique et vidange d’étangs temporaires, construit des [[Dôme de lave|dômes]] ou des [[Aiguille de lave|aiguilles]] plus ou moins vacuolaires instables, mais pas de [[Coulée de lave|coulées de lave]]. En {{date-|décembre 2020}}, les scientifiques ont observé {{citation|une reprise de certaines formes d'activité sur la montagne Pelée}}, sans émission de [[fumerolle]]s<ref>[https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/montagne-pelee-la-grande-dame-se-reveille-t-elle-899698.html Montagne Pelée : vigilance jaune pour activité volcanique en augmentation] France tv, 4 décembre 2020</ref>.
Le mardi [[6 mai]], à 2 h du matin, des bruits sourds parviennent des profondeurs de la montagne.
 
=== Activité volcanique ===
Le mercredi [[7 mai]] à la même heure, les nuages de cendres provoquent des [[éclair]]s et les deux cratères du volcan rougeoient dans la nuit. Le jour suivant, les habitants continuent à quitter l'île. Dans le même temps, les ruraux de la région viennent y chercher refuge. Les journaux continuent à dire que la ville ne craint rien. Les nouvelles de la [[Soufrière]] de l'île voisine de [[Saint-Vincent]] rassurent la population en prétendant que « la pression du sous-sol était allégée » et donc les risques atténués. Tout le monde n'était pas rassuré, loin de là. Pour exemple, le capitaine Marina Leboffe, du navire Orsolina, refuse d'embarquer la moitié de sa cargaison de [[sucre]], en dépit des protestations des expéditeurs, du refus des autorités portuaires et des menaces d'arrestation. Le gouverneur Moutett et son épouse restent sur l'île. Le soir, le volcan semble s'être apaisé.
La première phase d’activité de l’arc antillais se serait produite il y a {{unité|50|à=25|millions}} d'années (Ma). La phase actuelle aurait débuté vers {{unité|-5|Ma}}, d’abord au morne Jacob (environ {{unité|-5|à=-2|Ma}}), et aux [[Pitons du Carbet|pitons]] du [[Le Carbet|Carbet]] (environ {{unité|-2|à=-1|Ma}}), puis au piton Conil (plus récent que {{unité|-0,5|Ma}}).
 
La montagne Pelée se serait formée il y a environ {{unité|300000|ans}} sur le bord nord de la dépression de Saint-Pierre entre le morne Jacob et le piton Conil. Lors de l’épisode actuel qui aurait débuté il y a environ {{unité|13500|ans}}, elle aurait eu une trentaine d’éruptions pliniennes ou péléennes, en groupes alternants plus ou moins longs et nombreux, non cycliques.
== L'éruption principale ==
[[Image:Pelee 1902 1.jpg|thumb|right|L'éruption prise en photo.]]
Le matin du jeudi [[8 mai]], jour de l'[[Ascension du Seigneur|Ascension]], les habitants observent des incandescences au sommet du volcan. L'opérateur du [[télégraphe]] de nuit transmet le rapport sur l'activité du volcan à un opérateur de [[Fort-de-France]], sans déclarer de nouveaux développements ; son dernier mot est « Allez », rendant la ligne à l'opérateur de distance. Il est 7 h 52 ; la ligne est coupée la seconde suivante. Un bateau de réparation de câble voit directement la destruction de la ville ; un dense nuage noir s'est réparti horizontalement au-dessus du volcan. Un second nuage noir forme un panache monstrueux en forme de [[champignon]] visible à 100 km à la ronde. La vitesse initiale des deux nuages a été calculée plus tard à 670 km/h.
 
Vers 300, le volcan aurait produit une éruption qui aurait freiné le peuplement caraïbe de la Martinique. Peut-être à la suite d’une éruption au {{s-|XVI}}, les [[Caraïbes (peuple)|Caraïbes]] auraient appelé le volcan « montagne de Feu ».
Une [[nuée ardente]] dévale les pentes du volcan à une vitesse considérable, noire et lourde d'aspect, mais rouge et brûlante à l'intérieur. Elle atteint la ville en une minute, enflammant à son contact tout combustible et couvrant la ville entière.
 
Lors de l’arrivée des Français le {{date-|15 septembre 1635}}, le volcan venait de produire une éruption péléenne — dôme dans le cratère sommital, plusieurs nuées ardentes, destruction de la végétation sur toute la surface du volcan d'où la dénomination de « montagne Pelée ».
Des précipitations surviennent alors, entraînant des torrents de boue qui achèvent la destruction de la ville. Pendant de nombreuses heures, toute communication est coupée aussi bien par terre que par mer. Personne ne sait ce qui s'est passé, ni qui a autorité sur l'île, le gouverneur étant lui aussi dans la ville. Quelques rescapés sont tirés de la mer ; le plus souvent des [[Marin (profession)|marin]]s, tous affreusement brûlés, qui ont été emportés par le souffle dans la mer et se sont accrochés à quelque débris flottant.
 
Depuis, le volcan a eu quatre éruptions documentées en un peu plus de 200 ans : dynamisme phréatique en 1792 et 1851/1854 (paroxysme le {{date-|5 août 1851}}) ; dynamisme magmatique péléen en 1889/1905 (paroxysmes les {{date-|8 mai}} et {{date-|30 août 1902}}) et 1927/1932 (paroxysme le {{date-|18 octobre 1929}}).
Un premier [[navire]] de guerre arrive à 12 h 30, mais la chaleur l'empêche de s'approcher avant 15 h. La ville brûle durant plusieurs jours.
 
== Chronologie d'événements précurseurs à l'éruption de 1902 dans le cadre de l'éruption de 1889-1905 ==
La nuée ardente a dévasté une [[superficie]] de 16 km² et le reste de la ville est la proie des flammes.
[[Fichier:Mount Pelee YORYM-TA0152.jpg|vignette|[[Aiguille de lave]] avant son effondrement, image prise en 1903.]]
 
Après une accalmie d’une trentaine d’années, l’éruption a débuté en 1889. Ses événements majeurs sont la nuée ardente du {{date-|8 mai 1902}} et celle plus puissante du {{date-|30 août}}. Le volcan est loin de s’être réveillé brusquement et de façon inattendue :
Le nuage est composé de [[poussière]]s, de [[État de la matière|vapeur]]s et de gaz volcaniques surchauffés avec des températures de l'ordre de 1000 °C.
* 1889, début de l’éruption : [[fumerolle]]s intermittentes dans l’étang Sec, cratère sommital ;
* {{date-|février 1902}} : permanence et intensification des fumerolles [[Sulfure d'hydrogène|sulfhydriques]] ; pas d'inquiétude ;
* mardi {{date-|22 avril}} : rupture du câble télégraphique vers la Guadeloupe ;
* mercredi {{date-|23 avril}}, début de la phase phréatique : séismes, grondements souterrains, pluie de cendres au sud et à l’ouest sur Saint-Pierre ;
* vendredi {{date-|25 avril}} : [[panache volcanique|nuage de cendres]] ; en bordure de l'étang Sec, construction d'un [[Cône de scories|cône]] de [[pyroclastite]] ;
* samedi {{date-|26 avril}} : les cendres retombent sur Saint-Pierre et les environs ; pas d'inquiétude ;
* dimanche {{date-|27 avril}} : l'étang Sec se remplit d’eau bouillonnante jaillissant du cône de pyroclastite haut d’environ {{unité|15|m}} ; forte odeur de [[soufre]] dans les rues de Saint-Pierre et à {{unité|10|km}} alentour ; [[Élections législatives françaises de 1902|premier tour des élections législatives]] ;
* mercredi {{date-|30 avril}} : dans la ravine Roxelane qui traverse Saint-Pierre et au nord dans celle des Pères, [[lahar]]s charriant des rochers et des arbres arrachés au sommet ; au nord, les villages du Prêcheur et de Sainte-Philomène sont couverts de cendres ;
* vendredi {{date-|2 mai}} à {{heure|11|30}}, début de la phase magmatique : séismes, éclairs, violentes détonations ; soleil masqué ; couche de cendres épaisse de plusieurs centimètres sur toute la partie nord de la Martinique ;
* samedi {{date-|3 mai}} : le vent renvoie le [[panache volcanique|nuage de cendres]] vers le nord, dégageant provisoirement Saint-Pierre ; séismes ; rupture du câble télégraphique vers la Dominique ;
* dimanche {{date-|4 mai}} : retour et intensification des chutes de cendres ; toutes les ravines sont en crue ; coupures des routes vers le nord ; début d’affolement et de départs ;
* lundi {{date-|5 mai}} : le matin, calme apparent du volcan ; chassés des hauts par l’eau et les cendres brûlantes, à l’embouchure de la rivière Blanche, invasion de l’usine Guérin par des myriades de fourmis (''fourmis-fous'') et de [[Scolopendra|scolopendres]] (''bêtes-mille-pattes'') venimeux, et dans les rues de Saint-Pierre, invasion de [[Trigonocéphale|serpents fer-de-lance]] dont la morsure est mortelle — environ 50 personnes et plus de 200 animaux tués<ref>{{Ouvrage|auteur1=Maurice Joseph-Gabriel|titre=Martinique, terre d'éden|éditeur=Éditions Roudil|année=1979|passage=43|isbn=}}.</ref> ; ensuite, le débordement de l’étang Sec produit un [[lahar]] dans la rivière Blanche qui ensevelit l’usine Guérin sous plus de {{unité|6|m}} de boue brûlante {{Incise|23 victimes<ref group="A">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=46}}.</ref>}}, provoque un [[tsunami]] inondant les bas-quartiers de Saint-Pierre, coulant un navire au mouillage<ref>[http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-53623-FR.pdf Tsunamis d’origine volcanique p11] BRGM, janvier 2005</ref> et coupant toutes les liaisons télégraphiques avec les îles voisines ; rupture du réseau électrique surchargé par les cendres humides ;
* mardi {{date-|6 mai}} : début de la formation du dôme au bord de la caldeira de l'étang Sec ; expulsion explosive continue de cendres incandescentes ; pluies torrentielles (condensation de la vapeur d’eau) et [[lahar]]s dans toutes les ravines ; rade couverte d’un épais tapis de cendres, ponces et débris végétaux ;
* mercredi {{date-|7 mai}} : calme apparent, car l’obstruction du cratère par le dôme en [[Surrection (géologie)|surrection]] bloque l’expulsion des gaz et des pyroclastites, préparant l’explosion finale du bouchon du cratère, sous l’énorme pression de dégazage du magma ;
* nuit du 7 au {{date-|8 mai}} : d'intenses orages provoquent des [[Coulée de boue|coulées de boue]] ; entre 3 et 4 heures du matin, elles dévalent les pentes et touchent [[Macouba]], [[Basse-Pointe]] et [[Grand'Rivière]] ; celle qui fait déborder la rivière du Prêcheur cause la mort de {{unité|400|personnes}} au [[Le Prêcheur|Prêcheur]] ; cet événement étant survenu très peu de temps avant le paroxysme, son information ne sera pas diffusée<ref group="A">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=62 ; 160-161}}.</ref>.
 
== Éruption paroxystique et catastrophe du 8 mai 1902 ==
[[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]], alors [[préfecture]] de la [[Martinique]], était peuplée d'environ 26 000 hab., auxquels s'étaient rajoutés les réfugiés des explosions mineures et des torrents précédant les nuées ardentes. Il y eut très peu de survivants : [[Louis-Auguste Cyparis]], un [[prisonnier]] sauvé par l'épaisseur des murs de son cachot, et [[Léon Compère-Léandre]], un [[cordonnier]] qui vivait à la périphérie de la ville. D'autres sources citent Havivra Da Ifrile, une petite fille. Une domestique survécut à la nuée ardente mais périt de ses brûlures ; la seule chose dont elle se souvenait était la brusque montée de chaleur. Elle mourut très peu de temps après qu'on l'eut découverte. Sont aussi considérés comme victimes les passagers et les équipages de bateaux accostés dans le port.
=== Jours précédant le 8 mai à Saint-Pierre ===
Les effets sans victimes, en grande partie limités aux alentours du cratère<ref>Frédéric Denhez, ''Apocalypse à Saint-Pierre, la tragédie de la montagne Pelée'', Larousse, 2007 {{ISBN|978-2-03-583342-6}}.</ref>, des éruptions phréatiques de 1792 et 1851/1854 étaient connus mais vus comme des curiosités pittoresques<ref group=alpha>En août 1851, M. Leprieur, pharmacien de l'hôpital de Fort-de-France, responsable de la commission d'étude des manifestations du volcan, déposa un rapport concluant que {{Citation| le volcan de la Montagne Pelée ne parait devoir être qu'une curiosité de plus ajoutée à l'histoire naturelle de notre Martinique… Par temps calme, des navires qui arrivent de France et qui voient onduler au loin ce long panache de fumée blanche qui s'élève vers le ciel, doivent trouver que c'est une décoration pittoresque ajoutée au pays et le complément qui manquait à la majesté de notre vieille Montagne Pelée}}.</ref>. Il en est ainsi jusqu’au {{date-|27 avril 1902}}, jour du premier tour de l’élection législative.
 
* À partir du {{date-|2 mai}}, les événements inquiétants se succèdent, mais en pleine campagne électorale, l’administration veut que le second tour de l’élection {{incise|prévu le 11 mai<ref group="A">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=65}}.</ref>}} se passe normalement. Les personnalités de la ville se partagent en partisans et adversaires de l’évacuation de la ville selon leurs opinions politiques, et le journal ''[[Les Colonies]]'' ne publie pas d’article alarmant sur le comportement du volcan ;
Le [[Belem]], arrivé du [[Le Havre|Havre]], dut son salut au fait qu'un autre navire avait accosté à son emplacement habituel. Resté au large en dépit des protestations de son capitaine, Julien-Marie Chauvelon, le Belem subit une pluie de scories, de cailloux et de cendres et quelques dégâts sur le gréement et la mâture, mais put reprendre la mer quelques semaines plus tard..
* {{date-|3 mai}} : inspection du [[Liste des gouverneurs de la Martinique|gouverneur]] [[Louis Mouttet]] ; consignation de la troupe mise en état d’alerte ; nombreuses confessions dans la cathédrale et les églises ;
* {{date-|4 mai}} : information du ministère à Paris et demande d’instructions par le gouverneur ; annulation d’une excursion sur le volcan ;
* {{date-|5 mai}} : début de panique à la suite de la destruction de l’usine Guérin ; nouvelle inspection du gouverneur et nomination d’une commission d'étude ; afflux de réfugiés des alentours ;
* {{date-|6 mai}} : plus d’électricité et pénurie de nourriture ; maintien de l’ordre par la troupe ; déclaration rassurante du maire ; départs d’habitants refoulés par la troupe sur la route de [[Fort-de-France]] ;
* {{date-|7 mai}} : dernier numéro du journal ''[[Les Colonies]]'' consacré à l’éruption et aux élections ; avis ''scientifique'' rassurant sur l’évolution de l’éruption<ref group=alpha>{{Citation|La montagne Pelée ne présente pas plus de danger pour Saint-Pierre que le Vésuve n’en offre pour Naples – déclaration malvenue de ''savants'' stupides.}}</ref> ; retour du gouverneur accompagné de son épouse pour rassurer la population ; interdiction aux navires d’appareiller, mais le navire napolitain ''Orsolina'' y contrevient sous menaces d’arrestation de son commandant le capitaine Ferrata, qui réplique aux douaniers le menaçant de lourdes sanctions : {{Citation| Qui me les appliquera ? Demain, vous serez tous morts.}}<ref>{{Lien web|langue = français|titre = Deux montagnes meurtrières - Les 2 villes avant - et après la catastrophe|url = http://etabs.ac-martinique.fr/hnero/pelee/vesuve.htm|site = http://etabs.ac-martinique.fr|date = |consulté le = 31/12/2014}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue = français|titre = 8 mai 1902, la catastrophe de la montagne Pelée|url = http://3mats.net/histoire-du-belem/catastrophe-montagne-pelee.html|site = http://3mats.net|date = |consulté le = 31/12/2014}}.</ref> Ce navire sera le seul de tous ceux qui se trouvaient dans la rade à avoir échappé à la catastrophe en partant avant.
 
=== Nuée ardente dévastatrice ===
== Suites ==
[[Fichier:Karte_Ausbruch_Montagne_Pelée_1902.png|vignette|Carte des zones ravagées par les nuées ardentes du 8 mai (gris foncé) et du 30 août (gris clair).]]
[[Image:Affiche-Martinique.jpg|thumb|right|[[Affiche]] pour une représentation de bienfaisance au profit des sinistrés.]]
La montagne Pelée continua son éruption jusqu'au [[4 juillet]] 1905.
 
Le jeudi {{date-|8 mai}}, jour de l'[[Ascension (fête)|Ascension]], une [[explosion]] se produit dans le [[Cratère volcanique|cratère]] de l’étang Sec, dont le flanc est largement échancré depuis la coulée du {{date-|5 mai}}. Un souffle puissant, suivi en trois minutes par un immense nuage pyroclastique, la [[nuée ardente]], bloquée vers le nord et l’est par la falaise de la [[caldeira]] et le [[Dôme de lave|dôme]], emprunte la brèche de l’étang Sec vers la rivière Blanche, déferle à plus de {{unité|500|km/h}} sur la ville et, à {{heure|7|52}}<ref group="alpha">{{heure|7|52}} : coupure de la ligne télégraphique vers [[Fort-de-France]].</ref> la détruit en grande partie en moins de deux minutes, incendiant les navires ancrés dans la rade.
Le [[20 mai]], une éruption semblable à la première par le type et la force eut lieu.
Lors d'une puisante explosion le [[30 août]] 1902, une nuée ardente s'écoula plus à l'est que celles du 8 et du 20 mai. Bien que moins puissante que les deux premières, elle tua au moins 800 personnes au [[Morne-Rouge]], 250 à [[Ajoupa-Bouillon]], 25 à [[Basse Pointe]] et 10 à [[Morne Capot]]. C'est la dernière éruption mortelle jusqu'à nos jours.
 
L’explosion du bouchon provoque un embrasement du cratère et une [[onde de choc]] atmosphérique [[supersonique]] (environ {{unité|450|m/s}}, {{unité|30|hPa}} de surpression instantanée) ; puis une épaisse [[émulsion]] brûlante (environ {{tmp|1000|°C}})<ref group="alpha">{{tmp|1000|°C}} : température estimée entre les fontes du verre ({{tmp|700|°C}}) et du cuivre ({{tmp|1084|°C}})– voir la photo « Musée Frank Perret : bourdon de la cathédrale déformé par la chaleur ».</ref> de gaz, d’eau et d’éléments solides en suspension s’échappe d’une bouche au pied du dôme, produisant un panache noir en forme de champignon haut de plus de {{unité|4|km}} au-dessus du volcan, visible à plus de {{unité|100|km}} à la ronde ; il s’effondre sur lui-même et la nuée descendante axée sur la rivière Blanche, couvre de boue, de blocs et de cendres une zone triangulaire définie par étang Sec, [[Le Prêcheur]] et Saint-Pierre, de plus de {{unité|40|km|2}}<ref group="alpha">Estimation variable selon les effets pris en compte.</ref> et s’arrête au milieu de la rade à plus de {{unité|1500|m}} du rivage<ref group="alpha">Histoire du Belem, [http://3mats.net/histoire_du_belem/000087.html] : le ''[[Belem]]'', arrivé du [[Le Havre|Havre]] peu avant l'éruption, doit son salut au fait qu’il n’avait pas été autorisé à entrer dans la rade, car son poste habituel était occupé par le ''Tamaya'', interdit d’appareillage. Il subit néanmoins une pluie de ponces, de cailloux et de cendres qui occasionnent des avaries dans ses œuvres vives, mais il peut reprendre la mer quelques semaines plus tard.</ref>.
Les conséquences sur la vie sociale, politique et économique de la Martinique furent considérables. C'est [[Fort-de-France]] qui allait remplacer Saint-Pierre comme ville principale de la Martinique. De nombreux enfants se retrouvèrent orphelins, d'où la création de l'orphelinat de l'Espérance à Fort-de-France. Enfin, une partie de la population sinistrée fut relogée dans d'autres communes de Martinique, sur la côte nord-atlantique et dans le sud de l'île. D'autres partirent vers la [[Guadeloupe]], [[Sainte Lucie]], la [[Guyane]], le [[Panama]] et le [[Vénézuéla]].
 
[[Fichier:Pelee 1902 3.jpg|258x258px|vignette|Saint-Pierre en ruine après la nuée ardente.]]
L'étude des causes de ce désastre marque le début de la [[volcanologie]] moderne avec la définition et l'analyse du risque volcanique le plus mortel : les écoulements pyroclastiques ou nuées ardentes. L'éruption a aussi donné son nom au type d'éruption "[[péléen]]". Parmi ceux qui ont étudié la montagne Pelée, il y a [[Angelo Heilprin]] et [[Antoine Lacroix]]. L'[[illustrateur]] Lacroix est le premier à avoir décrit précisément une nuée ardente.
 
Des incendies et des [[lahar]]s aggravent les destructions. Selon l’endroit où elles se trouvent dans la zone ravagée par la nuée ardente, les {{unité|30000|victimes}}<ref name="Bardintzeff">{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Jacques-Marie|nom1=Bardintzeff|lien auteur1=Jacques-Marie Bardintzeff|titre=Connaître et découvrir les volcans|lieu=Genève, Suisse|éditeur=[[Éditions Liber|Liber]]|année=1997|mois=octobre|pages totales=209|passage=164|isbn=2-88143-117-8}}.</ref>{{,}}<ref group="A">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=35}}.</ref> succombent à l’onde de choc atmosphérique, à l’inhalation de gaz brûlants, à de profondes brûlures, à des chutes de blocs volcaniques, à des écroulements de bâtiments… Le gouverneur [[Louis Mouttet]] et son épouse Hélène de Coppet périssent dans la catastrophe. Il s'agit de la [[Grandes catastrophes en France depuis 1900|catastrophe la plus meurtrière]] du {{s-|XX}} en [[France]] et l'[[éruption volcanique]] la plus meurtrière au monde depuis celle du [[Éruption du Krakatoa en 1883|Krakatoa en 1883]].
Les destructions causées par l'éruption de 1902 sont rapidement publiées grâce aux moyens récents de communication. Elles attirèrent l'attention du public et des gouvernements sur les risques et les dangers d'un [[Volcan|volcanisme]] actif.
 
<gallery mode="packed">
== Survivants ==
Fichier:Ruines du théâtre de Saint-Pierre en 1902 (cropped etc).png|Ruines du théâtre de Saint-Pierre en 1902.
=== Léon Compère-Léandre ===
Fichier:Pont Roche 1902 (adjusted).jpg|Le [[pont Roche]] en 1902, qui a résisté à l'éruption.
{{Référence nécessaire|
Fichier:Collectie Nationaal Museum van Wereldculturen TM-60062344 Gevolgen van een uitbarsting van de Mont Pelee, de stad Saint-Pierre ligt in puin Martinique Delacourt - Kell (Fotostudio) (cropped etc).jpg|Ruines de Saint-Pierre après la catastrophe.
'''Léon Compère-Léandre''' (1874-1936) était un [[cordonnier]] à [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]] en [[Martinique]] lorsque la [[Montagne Pelée]] entra en éruption le [[8 mai]] [[1902]].
Fichier:Les ruines de la cathédrale (cropped etc).jpg|La cathédrale Notre-Dame-du-Bon-Port ruinée.
Fichier:Mt. Pelee- (View of St. Pierre, Martinique, from harbor after eruption of Mt. Pelee) (4555043937) (cropped etc).jpg|Vue de Saint Pierre depuis le large après l'éruption.
Fichier:Mt. Pelee- (Overlook of St. Pierre, Martinique, after eruption of Mt. Pelee) (4544302947) (cropped).jpg|Vue de la ville ruinée.
Fichier:Quartier du Mouillage en 1902 (modified).png|Le [[Quartier du Mouillage (Saint-Pierre)|quartier du Mouillage]] après la catastrophe.
Fichier:Mount Pelée 1902 - Morne Rouge.jpg|[[Le Morne-Rouge]] après l'éruption.
Fichier:Mt. Pelee- Roraima (day before sinking) (4554508673) (cropped etc).jpg|Le navire ''Roraima'' fumant après l'éruption.
</gallery>
 
[[File:Panorama des ruines de Saint-Pierre (cropped etc).jpg|850px|vignette|center|Panorama des ruines de Saint-Pierre après l'éruption.]]
Sa description du matin du 8 mai 1902.
 
Premier secours venant de Fort-de-France, ce navire se présente à l’entrée de la rade à {{heure|12|30}}, mais la chaleur l'empêche d'y entrer avant {{heure|15}} ; il peut secourir des marins et des passagers du navire marchand ''Roraima'' puis des autres navires<ref>Il y avait 18 bateaux au mouillage avec leurs équipages et des voyageurs sur un cargo mixte et un caboteur. Ont échappé à la catastrophe : le [[Belem]] qui n'avait pas pu faire escale, l'Orsolina qui était parti à temps malgré l'interdiction imposée par le règlement portuaire et le Roddam, navire britannique mouillant plus au large. Ceux qui ont coulé : le Diamant (caboteur), la Fusée (remorqueur), le Roraima (cargo mixte), le Grappler (cablier), le Teresa lo Vico, le Sacre Cuore, le Nord-America, la Mara di Pompeï, le Tamaya, la Clementina, la Gabrielle, le R.J. Morse, le Korona, le Biscaye, l'Arama, l'Amélie (voiliers)...</ref> en feu au mouillage dans la rade ; la plupart sont morts à terre, une vingtaine ont survécu.
{{citation_bloc|J'ai senti souffler un vent terrible, la terre commença à trembler et le ciel devint soudainement noir. Je retourna dans ma maison, monta avec de grandes difficultés les trois ou quatre marches qui me séparaient de ma maison, et ait senti mes bras et mes jambes me bruler, et tout mon corps. Je me suis laissé tomber sur une table. À ce moment, quatre autres personnes sont venues se réfugier chez moi, criant et hurlant de douleur, par contre leurs habits ne paraissaient pas avoir été touchés par des flammes. Au bout de 10 minutes, la petite Delavaud, âgée de environ 10 ans, semblait morte ; les autres vivants. Je me suis levé et allé dans une autre pièce, où j'ai trouvé le père Delavaud, toujours habillé et allongé sur le lit, mort. Il était violet et gonflé mais ses vêtements toujours intacts. Fou et presque évanoui, je me suis jeté sur un lit, inerte et attendant la mort. Mes sens me sont revenus peut-être 1 h après, quand j'ai vu le toit bruler. Avec la force de vie suffisante, mes jambes saignantes et couvertes de brulures, j'ai couru à Fonds-Sait-Denis, à six kilomètres de Saint-Pierre.}}
 
=== Rescapés ===
On sait peu de chose sur Léon Compère-Léandre, depuis qu'il s'est retiré de la vue du public après le désastre. Certains disent qu'il a survécu grâce à un bâtiment aux murs épais, mais d'autres disent qu'il s'était enfui et échappa à la [[coulée pyroclastique]] (la dernière version semble peu probable). Certains disent que Léon Compère-Léandre était [[européen]], d'autre qu'il était [[métis]].|date={{CURRENTDAY}} {{CURRENTMONTHNAME}} {{CURRENTYEAR}}}}
[[Fichier:Cyparis.jpg|vignette|Cyparis, un des seuls rescapés de l'éruption.]]
 
À Saint-Pierre, dans la [[zone urbaine]] ravagée par la [[nuée ardente]], il n’y eut que trois rescapés recensés :
=== Louis-Auguste Cyparis ===
* [[Louis-Auguste Cyparis]], un ouvrier de 27 ans, enfermé dans le [[Cachot de Cyparis|cachot]] de la [[prison de Saint-Pierre]] pour avoir participé à une rixe meurtrière dans un bar — le cachot aux murs très épais, n'avait qu’une étroite ouverture sur sa façade opposée au volcan<ref group="A" name="p192">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=192-193}}.</ref>. Il en fut extrait le {{date-|11 mai}}. Bien qu'horriblement brûlé, il survécut, fut gracié et devint célèbre comme « l'homme qui a vécu le jour du [[Jugement dernier]] » au cours d’une tournée aux États-Unis du « plus grand spectacle au monde » du cirque [[Ringling bros. and Barnum & Bailey circus|Barnum and Bailey's]] ; {{refnec|il fut le premier [[noir (type humain)|Noir]] célèbre dans le monde du spectacle aux [[États-Unis]]|date=8 mai 2018}}<ref>Jacques Rouzet, ''Les grandes catastrophes en France'', Ixelles éditions, 2009.</ref> ;
{{Référence nécessaire|'''Louis-Auguste Cyparis''', ou '''Ludger Sylbaris''', était un prisonnier de la prison de [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]]. C'est un survivant de l'éruption du [[8 mai]] [[1902]] de la [[Montagne Pelée]] en [[Martinique]].
* [[Léon Compère]] dit Léandre, jeune et robuste [[cordonnier]] qui vivait dans un bâtiment aux murs épais situé en bordure de la zone dévastée<ref group="A" name="p192" /> ;
* Havivra Da Ifrile, petite fille échappée ''in extremis'' en se réfugiant dans une grotte marine avec la barque de son frère, et recueillie en mer, plusieurs jours plus tard, par le ''[[Suchet (navire)|Suchet]]''<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Jacques-Marie Bardintzeff|titre=Connaître et découvrir les volcans|lieu=Genève|éditeur=[[Éditions Liber|Liber]]|année=1997|isbn=}}.</ref>{{,}}<ref>{{en}} Christian Flaugh, ''Operation Freak: Narrative, Identity, and the Spectrum of Bodily Abilities'', McGill-Queen's Press - MQUP, 2012, page 239.</ref>{{,}}<ref>{{en}} Florin Diacu, ''Megadisasters: The Science of Predicting the Next Catastrophe'', Princeton University Press, 2010, page 45.</ref>{{,}}<ref>{{en}} Michael Woods, Mary B. Woods, ''Volcanoes'', Lerner Publications, 2006, page 29.</ref><sup>,</sup><ref>{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=Chantal |nom=CHARLES-ALFRED |titre=Havivra Da IFRILE - Outremer Memory |url=https://outremermemory.com/havivra-da-ifrile/,%20https://outremermemory.com/havivra-da-ifrile/ |date=2022-05-08 |consulté le=2024-05-18}}</ref>.
 
Au mouillage dans la rade, sur le ''Roraima'' puis sur les autres navires en feu, des marins et des passagers ont été secourus par le ''Suchet'' et le ''Belem'' ; la plupart moururent à quai, seule une vingtaine survécut.
Au moment de l'éruption, Cyparis, un ouvrier de 27 ans, était enfermé seul dans une cellule de la prison pour avoir participé à une bagarre dans un bar. Sa cellule n'avait pas de fenêtre, ventilée par une simple ouverture sur la face cachée au volcan.
 
=== Aide aux sinistrés et réfugiés ===
4 jours plus tard, une équipe de secours entendit ses plaintes et le délivra. Bien que horriblement brûlé, il survécut et put décrire l'évènement. Selon lui, l'éruption eut lieu à l'heure du petit-déjeuner ce jour là, il faisait alors très sombre. De l'air chaud se mélangeait aux fines cendres. Un moment d'intense chaleur a duré très peu de temps, mais assez pour brûler profondément ses mains, ses bras, ses jambes, et son dos, mais ses vêtements ne prirent pas feu et il ne respira pas l'air brûlant.
[[Fichier:Mount Pelée 1902 refugees.jpg|vignette|Un groupe de réfugiés rue du Pavé, à Fort-de-France, à la suite de l'éruption de la montagne Pelée en 1902.|alt=|gauche]]
 
La plupart des quelque {{unité|22000|rescapés}} des communes environnantes se réfugient à Fort-de-France où ils trouvent le dénuement et l'insécurité. Le gouverneur intérimaire G. Lhuerre décide de les renvoyer chez eux dès le {{date-|5 août 1902}} ; mais les routes vers le nord sont impraticables ; pour les inciter néanmoins à partir, il décide qu’ils ne recevront plus aucun secours en nature après le {{date-|15 août}}<ref>''Apocalypse à Saint-Pierre-Frédéric Denhez''.</ref>.
Risquant la peine de mort pour meurtre, il fut pardonné et rejoint le cirque "Barnum & Bailey's" , traversa l'[[Amérique]] et racontant les horreurs de l'[[Volcan|éruption]], et devient célèbre comme, "l'homme qui a vécu le jour du [[jugement dernier]]" ou "l'homme le plus merveilleux au monde". En tant qu'élément du "plus grand spectacle au monde " de "Barnum and Bailey's", il fut le premier [[noir]] célèbre dans le [[show-biz]] durant la ségrégation.
 
Dès le {{date-|13 mai 1902}}, un comité officiel d'assistance et de secours aux victimes est créé et une souscription nationale est ouverte par le ministre des Colonies. Ainsi, quelques fêtes semblent être organisées au profit des sinistrés de la Martinique par les sociétés locales comme c'est le cas à Orléans le {{date-|6 juillet 1902}}<ref>{{Article |langue=français |titre=Fête en faveur des sinistrés de la Martinique |périodique=Journal du Loiret |numéro=153 |date=29 juin 1902 |issn= |lire en ligne=https://mediatheques.orleans-metropole.fr/ark:/77916/ORL259753/1902/06/29/v0001.simple.selectedTab=thumbnail |pages=2 }}</ref>. À sa dissolution, en 1904, le comité avait récolté près de 10 millions de francs-or.
Il y aurait eu, a part les deux autres survivants, un autre miraculée: Havivra Da Ifrile, une petite fille.|date={{CURRENTDAY}} {{CURRENTMONTHNAME}} {{CURRENTYEAR}}}}
 
À l’étranger, les [[États-Unis]], les plus proches des Antilles, interviennent les premiers : le président [[Theodore Roosevelt]] fait voter par le Congrès un crédit de {{unité|200000|dollars}} (environ un million de francs or), pour l'achat de {{unité|1250|tonnes}} de vivres, médicaments…, apportés par le croiseur ''Dixie'' parti de New York le {{date-|14 mai}} et arrivé le {{date-|21 mai}} ; un crédit supplémentaire de {{unité|300000|dollars}} est ensuite alloué aux sinistrés.
{{multi bandeau|Portail montagne|Portail Sciences de la Terre et de l'Univers}}
 
[[Fichier:Affiche-Martinique.jpg|vignette|Affiche pour une représentation de bienfaisance au profit des sinistrés.]]
[[Catégorie:Éruption volcanique|Eruption de la Montagne Pelee en 1902]]
[[Catégorie:Histoire de la Martinique|Eruption de la Montagne Pelee en 1902]]
[[Catégorie:Volcan de Martinique|Eruption de la Montagne Pelee en 1902]]
 
En Europe, le [[Royaume-Uni]], l’[[Italie]], l'[[Allemagne]], les [[Pays-Bas]], la [[Russie]]… participent à cette aide humanitaire pour en moyenne {{unité|5000|dollars}} chacun.
[[de:Aktivitätsphase des Mont Pelée von 1902 bis 1905]]
 
== Poursuite de l'éruption jusqu'en 1905-1910 ==
Il y eut huit nuées entre le {{date-|8 mai}} et le {{date-|30 août}}, puis d’autres de moins en moins violentes, une soixantaine au total jusqu’à fin 1903. L’épaisseur cumulée des couches de cendres qu’elles ont déposé a dépassé {{unité|3|m}} (rue Levassor déblayée).
 
* {{date-|20 mai}} : éruption plus violente que la première ; retombées de cendres sur toute l’île ; achèvement des destructions ; quelques victimes, des pillards ; appelée « éruption sanitaire », car les cendres recouvrant les cadavres empêchèrent leur décomposition ;
* {{date-|26 mai}}, {{date-|6 juin}}, {{date-|9 juillet}} : nuées analogues ;
* {{date-|30 août}} : nuée beaucoup plus étendue vers le sud et l'est — accroissement de la surface détruite à {{unité|60|km|2}} environ. Moins explosive et moins brûlante (moins de {{tmp|120|°C}} - fonte du soufre), ses éléments incandescents incendièrent néanmoins la végétation et les habitations et de ce fait fit environ {{unité|1400|victimes}}<ref name="Bardintzeff"/> dont au moins 800 au [[Le Morne-Rouge|Morne-Rouge]], 250 à [[L'Ajoupa-Bouillon]], 25 à [[Basse-Pointe]] et 10 au Morne Capot, car aucune disposition n'avait été prise pour évacuer les habitants ;
* De {{date-|novembre 1902}} à {{date-|septembre 1903}}, surrection de l'aiguille filée par une crevasse du dôme ; écroulements successifs aux départs des nuées ; hauteur maximale atteinte par l'aiguille : {{unité|310|m}} environ ; nuées ardentes importantes jusqu'en {{date-|janvier 1903}}, s'élevant jusqu'à {{unité|4000|m}}<ref group="A">{{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988|p=207}}.</ref>.
* Après {{date-|juillet 1905}} et jusqu'en 1910, quelques fumerolles et lente [[Surrection (géologie)|surrection]] du dôme ; extinction apparente.
 
<gallery mode="packed">
Fichier:Pelee 1902 1.jpg|Image de la Montagne pelée le {{date-|26 mai 1902}}, prise par le géologue américain [[Angelo Heilprin]].
Fichier:Mont Pelée (8766922898) (cropped etc).jpg|Images prises le {{date-|6 juin 1902}}.
Fichier:Pelee 1902 6.jpg|Aiguille de lave formée après le cataclysme, photographiée avant son effondrement.
Fichier:Pelee 1902 5.jpg|Le volcan et son [[aiguille de lave]] après l'éruption du {{date-|8 mai 1902}}.
Fichier:Pelee 1902 4.jpg|Image d'une nuée ardente, prise par Angelo Heilprin le {{date-|30 août 1902}}.
Fichier:PSM V61 D364 Victims of the eruption in st pierre martinique 2.png|Images de victimes de l'éruption de 1902.
</gallery>
 
== Analyse des causes de la catastrophe de 1902 ==
Comme toutes les [[Catastrophe naturelle|catastrophes dites « naturelles]] », celle-ci a eu deux causes, l’une naturelle {{Incise|la nuée ardente irrépressible, aux effets inévitables, mais qui auraient pu n'être qu’écologiques et matériels}} et l’autre humaine — la décision de ne pas faire évacuer la ville et de ne pas autoriser le départ des navires à l’ancre, dont la conséquence a été la mort de la population et de celle des marins et passagers.
 
[[Fichier:Mouttet, Louis (Dépêche coloniale illustrée, 1902-01-31).jpeg|vignette|[[Louis Mouttet]], [[Liste des gouverneurs de la Martinique|gouverneur de la Martinique]] de 1901 à 1902.]]
 
On savait évidemment que les [[Éruption volcanique|éruptions volcaniques]] étaient susceptibles de provoquer des catastrophes et on en connaissait les effets décrits à propos de celles du [[Vésuve]] ([[Éruption du Vésuve en 79|79]], [[Éruption du Vésuve en 1631|1631]]) du [[Lakagígar]] ([[Lakagígar#Éruption de 1783|1783]]), du [[Krakatoa]] ([[Éruption du Krakatoa en 1883|1883]])… Mais on ignorait pratiquement tout du déroulement, ainsi que de la nature et de la contingence des événements dangereux : le {{date-|7 mai}}, {{unité|150|km}} plus au sud, une nuée ardente de l’éruption en cours de la [[Soufrière (Saint-Vincent)|soufrière de Saint-Vincent]] avait fait près de {{unité|2000|victimes}} malgré l’évacuation de la population exposée ; à [[Saint-Pierre (Martinique)|Saint-Pierre]], les autorités et en premier lieu le gouverneur [[Louis Mouttet]], en poste depuis 1901, le savaient, mais n’en ont pas tiré la leçon qui s’imposait ; les géologues et journalistes américains arrivés sur place le {{date-|21 mai}} avec le ''Dixie'' furent stupéfiés par l’aspect, la nature et l’ampleur des destructions.
 
[[Risque naturel]] inconnu, sous-estimé, négligé ? Quoi qu’il en soit, c’est bien pour assurer le déroulement du second tour de l’[[Élections législatives françaises de 1902|élection législative]] que les autorités politiques et administratives ont empêché l'évacuation de Saint-Pierre, cause humaine qui a provoqué la [[catastrophe humanitaire]].
 
== Conséquences ==
=== Sociales, politiques et économiques ===
Les conséquences sur la vie sociale, politique et économique de la Martinique furent considérables : [[Fort-de-France]], déjà chef-lieu administratif, devint la ville principale de l’île et il ne resta de Saint-Pierre qu’un gros village agricole ; l'orphelinat de l'Espérance fut créé à Fort-de-France pour accueillir de nombreux enfants ; une partie de la population sinistrée fut relogée dans d'autres villes de la Martinique, sur la côte nord-atlantique et dans le Sud de l'île. D'autres partirent pour la [[Guadeloupe]], [[Sainte-Lucie]], [[Trinité (île)|Trinidad]], la [[Guyane]], le [[Panama]], le [[Venezuela]]…
 
[[Fichier:Saint-Pierre (Martinique) avec Montage Pelée.JPG|vignette|Vue générale de Saint-Pierre.]]
 
Saint-Pierre redevient une commune en [[1923]] et la ville commence alors à renaître de ses cendres. Elle est progressivement reconstruite (la chambre de commerce est reconstruite à l'identique et devenue une antenne locale de la [[Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique]]).
 
[[Fichier:Saint-Pierre, Martinique (seen from the harbor - 2005-06-15).jpg|vignette|Vue du centre-ville de Saint-Pierre depuis le large.]]
 
L'ensemble de la ville est labellisée [[Villes et Pays d'art et d'histoire|Ville d'Art et d'Histoire]] en [[1990]] par le ministère de la Culture et de la Communication. De ce fait, l'activité de Saint-Pierre est basée essentiellement sur le tourisme et notamment sur la plongée, le port présentant de nombreuses épaves de navires.
 
=== Naissance de la volcanologie scientifique ===
Avant cette catastrophe, la [[volcanologie]]<ref group=alpha>Le terme ''vulcanologie'' a été pratiquement le seul utilisé jusque vers les années 1970 ; ''volcanologie'' est maintenant recommandé par l’Académie des sciences.</ref> n’était qu’une branche mineure de la [[géologie]]. Elle devint une science à part entière à la suite des nombreuses observations que firent sur place de nombreux géologues et aux comptes-rendus qu’ils publièrent.
 
Le {{date-|21 mai}}, avec les premiers secours, le ''Dixie'' amena aussi sur place plusieurs géologues, [[Angelo Heilprin|Heilprin]], Hovey, [[Thomas Jaggar|Jaggar]]… pour étudier l’événement ; [[Alfred Lacroix|Lacroix]] arriva sur place le {{date-|23 juin}} et en repartit le {{1er}} août. Aucun d’entre eux n’avait pu assister à une nuée ardente et ils donnèrent diverses interprétations différentes du phénomène en cause.
 
Revenu précipitamment après le second désastre du {{date-|30 août}}, Lacroix effectua l’étude détaillée de plusieurs nuées auxquelles il assista jusqu’en {{date-|mars 1903}} ; il en décrivit de façon détaillée la forme et le comportement, expliqua l’origine et la raison de leur dangerosité et produisit le premier rapport de vulcanologie scientifique publié pour le grand public par [[Éditions Masson|Masson]] sous le titre ''La montagne Pelée et ses éruptions''.
 
Perret fit ensuite l’étude complète de l’ensemble de l’éruption de 1929/1932, en a dressé la carte détaillée et a créé l’[[observatoire du Morne des Cadets]].
 
=== Effets sur la nature ===
L’éruption a également ravagé la végétation et la plus grande partie de la faune dans la zone affectée par les nuées successives ; en particulier, on lui attribue la disparition du [[Megalomys desmarestii|rat musqué de la Martinique]]<ref>{{Lien web |url=http://www.iucnredlist.org/apps/redlist/details/12980/0|titre=Megalomys desmarestii|auteur=[[Liste rouge de l'UICN]]|année=2008|site=http://www.iucnredlist.org/|éditeur=[[UICN]]|consulté le =7 février 2012}}.</ref>.
 
== Éruption de 1929-1932 ==
Les effets de cette éruption magmatique, un peu moins violente mais plus durable, ont été limités aux destructions matérielles, car on avait pris la précaution d’évacuer toute la population du Nord de l’île, en utilisant la carte de risque levée par Perret et ses observations depuis le morne des Cadets où il établit ensuite l’[[Observatoire volcanologique et sismologique de Martinique|observatoire]] qui assure toujours la sécurité du Nord de l’île.
 
* fin août : grondements et fumerolles acides ;
* {{date-|16 septembre}} : explosions ; panique à Saint-Pierre ;
* mi-octobre : intensification des explosions de plus en plus violentes ; évacuation de la population ;
* mi-novembre : début des nuées ;
* {{date-|16 décembre 1929}} : nuée la plus violente ; début de la surrection du second dôme ;
* 1930/1932 : diminution progressive de l’activité ; début de l’assoupissement actuel.
 
== Visites à Saint-Pierre ==
* Commémorations :
** Monument (derrière la cathédrale reconstruite) ;
** Statue de Frank Perret (à l’entrée sud de la ville).
* Musées :
** La maison des volcans : photographies, articles de journaux ;
** [[Musée Franck-A.-Perret]] : objets, gravures, photographies, témoignages
* Ruines :
** Rue Levassor : déblayée de cendres sur plus de {{unité|3|m}} d'épaisseur ;
**[[Théâtre de Saint-Pierre|Théâtre]] : escaliers, dallage, pans de murs… ;
**[[Église du Fort de Saint-Pierre|Église du Fort]] : ruines conservées en l’état ;
** [[Cachot de Cyparis]] : les murs épais de ce cachot de la [[prison de Saint-Pierre]] ont sauvé la vie du prisonnier ;
** [[Asile Bethléem]] : ruines de la chapelle ;
* [[Épaves de la rade de Saint-Pierre]] une douzaine d’épaves, ''le Biscaye ex Gabrielle'', le ''Roraima'', le ''Dalia'', le ''Diamant'', le ''Tamaya, le Nord-America, le Clementina, le Grappler, Le Theresa Lo Vigo, l'Amelie'' échouées dans la rade par plus de {{unité|100|m}} de fond, constituent un site d’archéologie sous-marine et de plongée.
* [[Observatoire du Morne des Cadets]] (à [[Fonds-Saint-Denis|Fond-Saint-Denis]]) : installé par Perret pour surveiller le volcan ; panorama de l’ensemble du site.
 
<gallery heights="150px" mode="packed">
Le bourdon de saint-Pierre, Martinique.JPG|<center>Musée Frank Perret : bourdon de la cathédrale déformé par la chaleur.</center>
Theatre Saint Pierre.jpg|<center>Ruines du théâtre.</center>
Prison Saint-Pierre Martinique.JPG|<center>Cachot de Cyparis.</center>
Ancien asile Bethléem 07.jpg|<center>Ruines de l'asile Bethléem.</center>
</gallery>
 
Les différentes ruines et les [[Éruption de la montagne Pelée en 1902 : Les épaves de la rade de Saint-Pierre|épaves des navires]] coulés lors de l'éruption ont fait l'objet d'une demande de classement au patrimoine mondial de l'UNESCO. La décision n'est pas encore prise{{refnec}}.
 
== Voir aussi ==
{{Autres projets| commons=Category:1902 eruption of Mount Pelée}}
 
=== Bibliographie ===
{{Légende plume}}
* [[Alfred Lacroix]], ''La Montagne Pelée et ses éruptions'', Masson et Cie, Paris, 1904.{{Plume}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Angelo|nom1=Heilprin|lien auteur1=Angelo Heilprin|titre=The eruption of Pelée : a summary and discussion of the phenomena and their sequels|lieu=Philadelphie|éditeur=Geographical Society of Philadelphia|année=1908|pages totales=90|lccn=08017912|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/HASH0a691d818470fe033d61ec|consulté le=3 octobre 2011|plume=oui}}
* Frank A. Perret, ''The Eruption of Mt Pelée - 1929-1932'', Carnegie Institution of Washington, 1935. {{Plume}}
* D.Waestyercamp et H. Tazieff, ''Martinique – Guadeloupe'' ; Guides géologiques régionaux, Masson, Paris, 1980, {{p.|20-22}}, 35-40. {{Plume}}
* T. A. Lewwis et autres, ''Les Volcans'' – collection ''La planète Terre'', éditions Time-Life, Amsterdam, third french printing, 1983, {{p.|18-37}}. {{Plume}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Simone|nom1=Chrétien|prénom2=Robert|nom2=Brousse|titre=La Montagne Pelée se réveille|sous-titre=Comment se prépare une éruption cataclysmique|lieu=Paris|éditeur=Boubée|année=1988|année première édition=1988|pages totales=243|isbn=2-85004-057-6|plume=oui}}
* J. M. Bardintzeff, ''Volcanologie'', Masson, Paris, 1992, {{p.|113-115}}. {{Plume}}
* J.-C. Tanguy, ''The 1902-1905 Eruptions of Montagne Pelée, Martinique: Anatomy and Retrospection''. J. Volcanology and Geothermal Research 60, 1994, p.&nbsp;87-107.
* Patrice Louis, ''1902 au jour le jour <small>La chronique officielle de la catastrophe racontée par les acteurs de l'époque</small>'', [[Ibis Rouge Éditions]] {{ISBN|2-84450-135-4}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|nom1=Claude Rives|lien auteur1=Claude Rives|nom2=Frédéric Denhez|titre=Les Épaves du volcan|éditeur=|année=1997|isbn=2-7234-2462-6}}.
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Angelo|nom1=Heilprin|lien auteur1=Angelo Heilprin|titre=The Tower of Pelée : New Studies of the Great Volcano of Martinique|lieu=Philadelphie, Londres|éditeur=J. B. Lippincott Co.|année=1904|pages totales=62|lire en ligne=http://ebooks.library.ualberta.ca/local/towerofpelenew00heiluoft}}.
* {{Ouvrage|langue=fr |prénom1=Jean |nom1=Hess |lien auteur1=Jean Hess | titre=La Catastrophe de la Martinique |sous-titre=notes d’un reporter |éditeur=Charpentier et Fasquelle |année=1902 |pages totales=326 |wikisource=La Catastrophe de la Martinique (Hess)}}.
* {{Article|langue=fr|titre=La Catastrophe de la Martinique|périodique=[[Le Tour du monde]], nouvelle série|volume=8|date=1902|wikisource=La Catastrophe de la Martinique, Le Tour du monde 1902}}
* {{Article|langue=fr|prénom1=Gerrit|nom1=Verschuur|titre=Aux Pays dévastés : la Martinique et Saint-Vincent|périodique=[[Le Tour du monde]], nouvelle série|volume=9|date=1903|wikisource=Aux pays dévastés : la Martinique et Saint-Vincent}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Lambolez|nom1=Charles|titre=Saint-Pierre – Martinique 1635-1902 : Annales des Antilles françaises|sous-titre=journal et album de la Martinique naissance, vie et mort de la cité créole|lieu=Paris|éditeur=Berger Levrault et Cie|année=1905|pages totales=519|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/HASH01914504e0d9a3778d6bd871|consulté le=27 avril 2012}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Césaire|nom1=Philémon|titre=La Montagne Pelée et l’effroyable destruction de Saint-Pierre (Martinique) le 8 mai 1902|sous-titre=le brusque réveil du volcan en 1929|lieu=Paris|éditeur=Impressions Printory|année=1930|pages totales=211|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/PAP11055|consulté le=27 avril 2012}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Césaire|nom1=Philémon|titre=Galeries martiniquaises|sous-titre=populations, mœurs, activités diverses et paysages de la Martinique|lieu=Paris|éditeur=Exposition coloniale internationale|année=1931|pages totales=430|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/PAP11048|consulté le=27 avril 2012}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=William|nom1=Dufougeré|titre=Madinina « Reine des Antilles ». Études de mœurs martiniquaises|lieu=Paris|éditeur=[[Berger-Levrault|Éditions Berger-Levrault]]|année=1931|pages totales=258|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/PAP11065|consulté le=16 Mai 2014}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Francis|nom1=Drouet|titre=Notes sur la Martinique|lieu=Rouen|éditeur=Imprimerie E. Cagniard|année=1902|lire en ligne=http://www.manioc.org/patrimon/NAN13023|consulté le=10 mai 2016}}.
 
=== Vidéographie ===
* {{Ina|MAN7657724851|Eruption de la montagne Pelée - 8 mai 1902|éditeur=Programmes du [[CERIMES]]|date= 01 janvier 1974}}
* {{Ina|CAA7501501201|Témoignage d'une femme ayant vécu l'éruption à Saint Pierre|éditeur=RFO Télé Martinique|date= 01 janvier 1978}}
 
=== Musique ===
* ''La Chandelle'' (paroles en créoles à base lexicale française), d'[[Eugène Mona]], [[1975 en musique|1975]] <ref>{{Lien web |auteur = |url=https://www.buzzmagmartinique.com/buzzistwa-18-leruption-surprise-de-saint-pierre-1902/|titre=Buzzistwa #18 L’éruption « surprise » de saint-Pierre (1902) |éditeur=buzzmagmartinique.com|date=14 octobre 2020|consulté le=22 août 2023}}</ref>
* ''Moin ka douté''{{cpf}}, d'Eugène Mona, [[1976 en musique|1976]] <ref>{{Lien web |auteur = |url=https://miateneo.wordpress.com/2013/12/13/e-oui-sen-pie-te-bel-me/|titre=E oui Sen Piè té bel mé…|éditeur=buzzmagmartinique.com|date=13 décembre 2013|consulté le=22 août 2023}}</ref>. Dans la première chanson, le chanteur évoque les mœurs de la ville d'avant éruption et dans la deuxième, il explique pourquoi Saint-Pierre n’a jamais retrouvé son éclat.
 
=== Littérature ===
* [[Raphaël Confiant]], ''Nuée ardente'', roman. Paris : Mercure de France, 2002. (''Folio'' n° 4065).
* [[Évelyne Brisou-Pellen]], ''La Voix du Volcan'', roman. Oskar éditeur, 2013.
* [[Daniel Picouly]], Quatre-vingt-dix secondes'', éditions Albin Michel, (2018), [[prix Nice-Baie-des-Anges]] 2019
* [[Gaston-Paul Effa]], ''Le Miraculé de Saint-Pierre'', 2017
 
=== Articles connexes ===
* [[Musée Frank-A.-Perret]]
* [[Observatoire du Morne des Cadets]]
* [[Observatoire volcanologique et sismologique de Martinique]]
 
=== Liens externes ===
* [http://www.manioc.org/fichiers/V13103 Les éruptions volcaniques historiques aux Petites Antilles : inventaire et spatialisation des impacts physiques et humains].
* [http://www.alertes-meteo.com/catastrophe/volcan-montagne-pelee.htm 1902 : Saint-Pierre détruit par le volcan - Alertes Météo (Révisé le 04 juin 2019)].
* présentation d'[http://www.fredericdenhez.fr/page21/page21.html ''Apocalypse à Saint-Pierre, la tragédie de la montagne Pelée''] et de ''Les épaves du volcan'' (ouvrage-reportage de 142 pages), Glénat, 1998, primé par l’Académie de marine en 1998 avec photos de Claude Rives ; par Frédéric Denhez.
 
== Notes et références ==
=== Notes ===
{{références| taille=36| groupe=alpha}}
 
=== Références ===
{{Références|taille=15}}
* {{Harvsp|Chrétien|Brousse|1988}}
{{Références|groupe=A}}
 
{{Portail|volcanisme|années 1900|Martinique|risques majeurs}}
 
[[Catégorie:Histoire de Saint-Pierre (Martinique)]]
[[Catégorie:Éruption volcanique en Amérique|Montagne Pelée 1902]]
[[Catégorie:Éruption volcanique en France|Montagne Pelée 1902]]
[[Catégorie:Éruption volcanique au XXe siècle|1902 Montagne Pelée]]
[[Catégorie:Éruption explosive|Montagne Pelée 1902]]
[[Catégorie:Catastrophe naturelle en Martinique]]
[[Catégorie:Montagne Pelée]]
[[Catégorie:1902 aux Amériques]]
[[Catégorie:1902 en France]]
[[Catégorie:Tsunami dans l'océan Atlantique]]
[[Catégorie:Catastrophe naturelle en 1902]]
[[Catégorie:Tsunami en 1902]]
[[Catégorie:Tsunami en Amérique]]
 
[[pt:Monte_Pelée#A_erupção_de_1902]]
[[ast:Monte_Pelée#Erupción_de_1902]]
[[ca:Mont_Pelée#Erupció_de_1902]]
[[cs:Mont_Pelée#Erupce_v_roce_1902]]
[[de:Montagne_Pelée#Der_große_Ausbruch]]
[[el:Όρος_Πελέ#Έκρηξη_του_1902]]
[[it:La_Pelée#Eruzione_del_1902]]
[[he:פלה_(הר)#ההתפרצות_של_1902]]
[[lv:Pelē#Izvirdums]]
[[lb:Montagne_Pelée#Ausbroch_vun_1902]]
[[lt:Pelė_ugnikalnis#1902_m._išsiveržimas]]
[[ms:Gunung_Pelée#Letusan_pada_1902]]
[[ja:プレー山#1902年の噴火]]
[[no:Montagne_Pelée#Katastrofeutbruddet_i_1902]]
[[ro:Muntele_Pelée#Erupția_din_1902]]
[[ru:Монтань-Пеле#Извержение_1902_года]]
[[sk:Pelée_(stratovulkán)#Katastrofa_v_roku_1902]]
[[th:ภูเขาไฟเปอเล#การปะทุเมื่อ_พ.ศ._2445]]
[[zh:培雷火山#爆發]]