Indicateur de pH

substance ou dispositif utilisé pour surveiller une réaction ou un état chimique
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Note : le terme « indicateur coloré » désigne un « indicateur coloré de pH » dans cet article.

Les indicateurs colorés de pH (ou indicateurs acide-base) sont des molécules qui ont la capacité de changer de couleur en fonction de l’acidité (au sens de Brønsted) de leur milieu environnant. La propriété qui lie couleur apparente et pH est appelée halochromisme. Par extension, l'indicateur de pH est un détecteur chimique de l'ion hydronium (ou oxonium) H3O+.

Quelques indicateurs colorés de pH.
Zones de virages du BBT, de la phénolphtaléine et de l'hélianthine.

Cette propriété donne aux indicateurs colorés une utilité dans certaines sciences expérimentales telles que la chimie, la biologie ou la médecine. Elle leur confère, par ailleurs, un attrait pédagogique qui permet, par exemple, d’introduire au lycée les dosages acide-base sans initiation préalable au suivi pH-métrique ou conductimétrique d’une réaction.

Leurs synthèses conduisant le plus souvent à des solides, les indicateurs colorés sont la plupart du temps utilisés en infimes quantités à l’état solvaté (dans l’eau, la soude ou l’éthanol par exemple) dans des solutions aqueuses. Ces quelques gouttes pourront donc colorer très nettement une solution et la couleur de celle-ci sera sensible aux valeurs que prend son pH. Dans les cas où l'on ne peut pas mélanger l'indicateur à la solution[1] (cas, par exemple, de l'alimentaire), on peut imbiber un papier spécial de cet indicateur et y déposer une goutte de la solution pour observer le changement de couleur.

Historique

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Les chimistes du XVIIe siècle connaissaient l’usage d’indicateurs colorés. On trouve des mentions de leur usage dans les écrits des premiers chimistes de l’Académie royale des sciences. Ainsi Cottereau du Clos indique dans son étude des eaux minérales avoir systématiquement examiné « s’ils changeaient en verte la couleur du sirop violat, & s’ils rétablissaient la couleur bleue du Tournesol rougi par quelque acide alumineux ou vitriolique » (Observations sur les eaux minérales[4], p. 25). Dans son magistral Cours de Chymie (1697), Nicolas Lémery indique « Si on prend une teinture bleue ou violette faite dans l’eau, comme celle qui se tire du tournesol ou de la fleur de violette et qu’on verse dessus quelques gouttes d’esprit de vitriol, elle deviendra aussitôt rouge, mais si vous y ajoutez un sel alcali, elle reprendra sa première couleur ».

Décoction de chou rouge dans de l'eau de pluie.

C’est en 1767 qu’a lieu la première utilisation d’un indicateur coloré pour un dosage acide-base. C’est W. Lewis qui eut l’idée d’utiliser un changement de couleur pour caractériser l’équivalence. Jusqu’alors, on utilisait le carbonate de potassium K2CO3 comme base. On observait un dégagement gazeux à l’équivalence.

Le premier indicateur coloré fut donc un extrait de tournesol[5]. Les dosages consistaient alors en l’étude analytique des eaux minérales. Plusieurs autres indicateurs naturels furent rapidement adoptés. On peut citer le chou rouge, l’artichaut, la rose ou encore la betterave. En effet, ces composés présentent tous la propriété de changer de couleur en fonction du pH. Mais ces composés présentent des défauts importants : leur zone de virage est étendue et peu précise, et elle dépend de la nature même du végétal en question. Un même chou rouge pourra voir ses zones de virage déplacées d’une voire deux unités de pH.

Le XIXe siècle voit l’essor considérable de la chimie organique et la mise au point de synthèse de nouvelles substances qui serviront d’indicateurs colorés, comme la phénolphtaléine ou le bleu de bromothymol utilisés par Luck (1877), et la fluorescéine (1876). Ces indicateurs permettent des dosages plus précis.

Aujourd’hui, un très grand nombre d’indicateurs colorés chimiques peuvent être utilisés. Le chou rouge reste utilisé, mais plutôt à titre pédagogique dans les cours de chimie. La teinture de tournesol est de moins en moins utilisée, au profit du bleu de bromothymol notamment.

Quelques indicateurs courants

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Voici une liste non exhaustive[6] des principaux indicateurs utilisés en chimie ou en biologie. Les valeurs des transitions et les teintes peuvent varier légèrement en fonction des conditions d'utilisation (solvants, température, pression, etc.).

Indicateur[7] Couleur[7],[6] (acide) Transition[7] (approximativement) Couleur[7],[6] (base)
Bleu de bromothymol, BBT (1re transition) rose-rouge ≈0,0 jaune
Rouge de crésol (acide - 1re transition) rouge 0,0-1,0 jaune
Violet de gentiane jaune 0,0-1,6 violet foncé
Vert malachite (acide - 1re transition) jaune 0,2-1,8 bleu-vert
Bleu de thymol (acide - 1re transition) rouge 1,2-2,8 jaune
Jaune de méthyle rouge 2,9-4,0 jaune
Bleu de bromophénol (BBP) jaune 3,0-4,6 violet
Rouge Congo bleu 3,0-5,2 rouge
Hélianthine (Méthyl orange) rouge 3,1-4,4 jaune
Hélianthine en solution dans le xylène cyanole pourpre 3,2-4,2 vert
Vert de bromocrésol jaune 3,8-5,4 bleu
Rouge de méthyle rouge 4,2-6,3 jaune
Papier de tournesol (Azolitmine) rouge 4,5-8,3 bleu
Pourpre de bromocrésol jaune 5,2-6,8 violet
Bleu de bromothymol, BBT (2e transition) jaune 6,0-7,6 bleu
Rouge de phénol (Phénolsulfonephtaléine) jaune 6,6-8,0 rouge
Rouge neutre rouge 6,8-8,0 jaune orangé
Rouge de crésol (base - 2e transition) jaune 7,2-8,8 rouge
Bleu de thymol (base - 2e transition) jaune 8,0-9,6 bleu
Phénolphtaléine incolore 8,2-10,0 saumon
Thymolphtaléine incolore 9,4-10,6 bleu
Jaune d'alizarine R jaune 10,1-12,0 orange-rouge
Alizarine rouge 11,0-12,4 violet
Carmin d'indigo bleu 11,4-13,0 jaune
Vert malachite (base - 2e transition) bleu-vert 11,5-13,2 incolore

Indicateurs naturels de pH

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Voici une liste non exhaustive d'indicateurs colorés naturels. Contrairement aux indicateurs chimiques purs, les indicateurs naturels contiennent plusieurs composés chimiques qui influent sur la couleur. Les zones de virage diffèrent donc selon la nature du composé utilisé. Par exemple, le jus de chou rouge peut ne pas virer au jaune avant un pH > 14 s'il date de plusieurs jours. De même, la transition du jus de carotte, par exemple, est difficilement observable. L'avantage majeur des indicateurs naturels sur leurs équivalents de synthèse est leur très faible coût. On les trouve souvent directement dans la nature où ils ne coûtent pratiquement rien au supermarché, alors que les indicateurs chimiques dépassent la dizaine d'euros pour quelques grammes de produits purs.

Forme acide du thym.
Forme basique du thym.
Un indicateur coloré naturel : le curcuma
tube 1 : pH 13 ; tube 2 : pH 11 ; tube 3 : pH 10 ; tube 4 : pH 6 : tube 5 : pH 2.
Indicateur Couleur (acide) Transition (approximativement) Couleur (base)
Hortensia (acide - 1re transition) rose environ 0,0-1,0 rose pâle
Raisin rouge (acide - 1re transition) rose fuchsia environ 0,0-2,0 rose saumon
Betterave rouge (acide - 1re transition) bordeaux environ 1,0-2,0 rouge
Chou rouge (acide - 1re transition) rouge environ 2,0-3,0 rose fuchsia
Chou rouge (acide - 2e transition) rose fuchsia environ 3,0-4,0 mauve
Thé (acide - 1re transition) jaune environ 3,0-4,0 jaune foncé
Myrtilles (acide - 1re transition) rouge environ 3,0-4,0 rose fuchsia
Hortensia (acide - 2e transition) rose clair environ 5,0-6,0 vert pâle
Chou rouge (base - 3e transition) mauve environ 6,0-7,0 violet
Chou rouge (base - 4e transition) violet environ 8,0-9,0 bleu canard
Thé (base - 2e transition) jaune foncé environ 8,0-10,0 brun clair
Chou rouge (base - 5e transition) bleu canard environ 10,0-11,0 vert
Curry jaune environ 10,0-11,0 brun-orangé
Curcuma jaune environ 10,0-11,0 brun-orangé
Hortensia (base - 3e transition) vert pâle environ 10,0-12,0 vert clair
Artichaut jaune clair environ 10,0-12,0 jaune
Raisin rouge (base - 2e transition) rose saumon environ 11,0-12,0 vert
Myrtilles (base - 2e transition) rouge environ 11,0-12,0 vert
Betterave rouge (base - 2e transition) rouge environ 11,0-12,0 jaune
Oignon blanc vert pâle environ 11,0-12,0 jaune
Peau de poire jaune pâle environ 11,0-12,0 jaune
Chou rouge (base - 6e transition) vert environ 11,0-12,0 vert clair
Raisin rouge (base - 3e transition) vert environ 12,0-13,0 jaune doré
Myrtilles (base - 3e transition) vert environ 12,0-13,0 orange
Chou rouge (base - 7e transition) vert clair environ 12,0-13,0 jaune
Thym jaune environ 12,0-13,0 brun
Thé (base - 3e transition) brun clair environ 13,0-14,0 brun foncé

D'autres indicateurs de pH naturels :

Plusieurs composés chimiques peuvent être à l'origine des propriétés halochromiques de ces indicateurs naturels. En voici quelques-uns :

  • les anthocyanes sont des composés naturels que l'on retrouve chez plusieurs plantes. Ces composés sont rouges dans une solution acide et bleu dans une solution basique. Le chou rouge, qui en contient, est l'un des indicateurs les plus populaires et les plus spectaculaires. La betterave rouge contient des bétacyanines, dérivés halochromiques des anthocyanes ;
  • la curcumine est présente dans le curcuma (et donc dans le curry qui contient du curcuma). Elle est brune en milieu basique et jaune en milieu acide ;
  • les caroténoïdes, contenus par exemple dans les carottes, peuvent posséder des propriétés acido-basiques ;
  • les flavonoïdes comme la catéchine (présente dans le thé), la quercétine (présente dans les oignons blancs), l’apigénine et la lutéoline (présente dans l'artichaut) possèdent des propriétés acido-basiques.

Échelle de pH du jus de chou rouge

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Échelle de pH du jus de chou rouge[11].
Échelle de pH du jus de chou rouge[11].

Notions associées

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Acidité et basicité du milieu

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Le pH (potentiel hydrogène) est une grandeur utilisée en sciences expérimentales pour mesurer l’acidité ou la basicité d’une solution. Il est défini par le cologarithme décimal de l’activité des ions H+ dans la solution. Les ions H+ se liant aux molécules d’eau (approximativement 1 pour 1), on mesurera plutôt l’activité des ions hydronium H3O+ (improprement connus en tant qu'ions oxonium). Si l’on estime que les solutions sont assez diluées ([H3O+] < 1 M et [HO] < 1 M), l’activité de l’eau sera égale à 1 et celle des ions hydronium sera assimilée à la concentration en ces ions (Activité = Gama × Concentration et Gama ≈ 1 quand la solution est diluée), ce qui est généralement le cas pour l'utilisation des indicateurs colorés. On a donc :

Traditionnellement, et compte tenu des approximations susmentionnées, on mesurera le pH sur une échelle allant de 0 à 14, bien qu’il puisse se situer en dehors de cette fourchette. En effet, sachant que le produit ionique de l'eau est toujours vérifié, on a :

Une solution est dite acide si son pH est inférieur à 7, basique s’il est supérieur à 7 et neutre s’il égal à 7. C'est tout l'intérêt des indicateurs colorés de pouvoir déterminer facilement et rapidement cette acidité.

Zone de virage

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Zones de virage du BBT.

Le principe d'un indicateur coloré est d'exister sous deux formes dont l'une prédomine par rapport à l'autre en fonction du pH. On appelle zone de virage la plage de pH dans laquelle aucune des deux formes de l’indicateur n’est majoritaire. Pour les calculs et les expériences, les indicateurs possèdent une zone de virage tabulée, reflétant avec précision le changement de couleur. Si l’on ne possède pas de données sur la zone de virage mais uniquement le pKi, on estime alors qu’une espèce prédomine sur l’autre lorsque la concentration de la première est dix fois supérieure à celle de la seconde[12]. Cela se reflète par une variation d’une unité de pH autour du pKi.

Teinte sensible

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La teinte sensible est le nom donné à la couleur que prend la solution dans la zone de virage. Souvent, cette couleur correspond au mélange additif des couleurs des formes mises en jeu. Exemple : le bleu de bromothymol (image) a une teinte sensible verte, superposition des couleurs jaune acide et bleue basique. Certains indicateurs peuvent avoir une transition par l’incolore, à cause d’effets électroniques supplémentaires, de présence d’une troisième forme intermédiaire ou encore à cause d’une perte d’énergie de l’indicateur.

Aspects techniques

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Nature acido-basique des indicateurs

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Un indicateur coloré peut être considéré comme un couple acide faible/base faible (selon la définition de l’acidité de Brönsted)[13]. On notera InH la forme acide d’un indicateur et In sa forme basique. L’équilibre acide-base existant entre ces deux formes est donc : et la constante d’acidité associée est où [X] est la concentration de l’espèce X en mol.l−1

On utilise plus souvent le pKi qui est égal au cologarithme décimal du Ki : Chaque indicateur est caractérisé par le pKi de son couple ou par plusieurs pKi s’il s’agit d’un polyacide.

Détermination expérimentale du pKi d'un indicateur coloré[14],[15]

Les mesures spectrophotométriques permettent de déterminer expérimentalement le pKi d’un indicateur coloré.

D’après la loi de Beer-Lambert, l’absorbance A (sans unité) d’une solution, mesurée au moyen d'un spectrophotomètre ou colorimètre, est proportionnelle à :

  • un coefficient d’absorption molaire ελ intrinsèque à la substance et à une longueur d’onde λ (en cm−1.l.mol−1) ;
  • l’épaisseur l de solution traversée par le rayon de l’appareil (en cm) ;
  • la concentration c de la substance absorbante (en mol.l−1) :

D’autre part, la définition originelle de l’absorbance est :

Φ0 et Φ1 sont les flux lumineux incident et transmis lors du passage dans le spectrophotomètre.

Si le faisceau de l’appareil traverse deux solutions de coefficient ελ(1) et ελ(2) et de concentrations c1 et c2, on a :

Étant donné que l’absorbance est une grandeur additive, on a finalement :

Courbes d'absorbances des différentes formes du BBT.

Appliquons donc ce principe aux indicateurs colorés. En exploitant les courbes d'absorbance des différentes formes d'un indicateur coloré, réalisées expérimentalement, on détermine la longueur pour laquelle la différence d’absorbance entre les deux formes de l’indicateur est la plus grande.

Par la suite, on détermine l’absorbance à cette longueur d’onde d’une nouvelle solution, tamponnée à un pH proche de celui attendu pour le pKi. On peut utiliser les relations de Beer-Lambert pour chacune des deux solutions acides et basiques pour déterminer les coefficients d’absorption et ensuite déterminer par le calcul la concentration de chaque forme de l’indicateur :

  •  : concentration analytique totale connue de l’indicateur, valable à tout instant ;
  •  : absorbance de la solution acide ;
  •  : absorbance de la solution basique.

L'absorbance de la solution en milieu tamponné, où les deux formes cohabitent, est donc donnée par :

d'où en se servant de on obtient :

Reste à déterminer le pKi du couple InH/In :

et donc

Aspects mécanistiques

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Une espèce chimique est colorée à partir du moment où elle peut absorber sélectivement des photons à certaines longueurs d’onde du spectre visible. Elle émet donc de la lumière visible. L’énergie d’absorption du composé est inversement proportionnelle à la longueur d’onde du maximum d’absorption, chaque longueur d’onde d’absorption correspondant à une longueur d'onde d’émission et donc à une couleur. Les molécules colorées sont constituées de l’association de deux types de groupements d’atomes :

Groupes chromophores

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Ils permettent à la molécule de se situer à des énergies d’absorption proches du visible. Il s’agit le plus souvent de systèmes d’électrons conjugués (c’est-à-dire des alternances entre orbitales σ et orbitales π, n ou p). Chaque type de transition électronique (entre orbitales π liantes, n non liantes et π* antiliantes) correspond à des énergies d’absorption différentes[14] (tableau suivant) :

Groupe chromophore Transition électronique Absorption maximale
λmax (nm)
Alcène C=C π → π* 180
Carbonyl C=O π → π* 180
Benzène C6H5 n → π*
π → π*
277
200 - 255
Azo N=N n → π* 347
Nitroso N=O n → π* 665

La longueur d'onde du maximum d’absorption augmente lorsque le nombre d’électrons délocalisés, et donc impliqués dans un système conjugué, augmente lui aussi[16].

Lors d’un virage acide-base, un indicateur coloré change de forme. Sa nouvelle structure possède donc des énergies d’absorption différentes, sa couleur change.

Groupes auxochromes

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Les électrons non partagés de groupes appelés auxochromes tels que –OH, –OCH3, –NH2, –Cl, –N(CH3)2, peuvent se coupler aux groupements chromophores et ainsi influencer sur la couleur des molécules. C’est donc l’origine des différences entre les couleurs des composés présentant la même structure de base.

Catégories d'indicateurs de pH

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Les indicateurs colorés acide-base classiques peuvent être classés principalement selon deux catégories[2],[17] : ceux dérivant du triphénylméthane et ceux dérivant de l’azobenzène. Ces structures permettent un grand nombre de délocalisations d’électrons π, les groupements venant se greffer sur cette structure pouvant augmenter la conjugaison du système.

Structure de base des indicateurs dérivants du triphénylméthane.

Triphénylméthane

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Plusieurs groupes fonctionnels différents peuvent se positionner en para sur les deux cycles principaux — voire le troisième assez rarement — et ce, du fait de la délocalisation de la charge positive pouvant être portée par l'atome de carbone central du triphénylméthane. Il s’agit donc généralement de bases de Lewis possédant un doublet libre d’électrons, c'est-à-dire des composés azotés ou hydrogénés. D’autres groupements peuvent se placer sur les autres positions des deux premiers cycles.

On peut parfois observer la présence d’un cycle lactone R-CO-O-R' entre la position 2" et l'atome de carbone central. C’est le cas des phtaléines.

Un cycle sulfonate R-SO2-O-R' est quant à lui présent entre les mêmes positions dans les molécules du bleu de bromothymol, de bromophénol, du vert de bromocrésoletc. Ces composés sont regroupés au sein d’une famille appelée les « sulfonephtaléines » (ou simplement « sulfones », dans un contexte d’indicateurs de pH).

Nom \ Position 2" 2 3 4 5 2' 3' 4' 5'
Bleu de bromothymol SO3 Me Br OH MeEt Me Br OH MeEt
Bleu de bromophénol SO3 H Br OH Br H Br OH Br
Vert de bromocrésol SO3 Me Br OH Br Me Br OH Br
Rouge de crésol SO3 H Me OH H H Me OH H
Phénolphtaléine CO2 H H OH H H H OH H
Thymolphtaléine CO2 Me H OH MeEt Me H OH MeEt
Vert de malachite H H H NMe2 H H H NMe2 H
Structure de base des indicateurs dérivants de l'azobenzène.

Azobenzène

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Nombreuses sont les molécules colorées qui ont pour structure de base celle du 1,2-diphénylazène, plus connu sous le nom d’azobenzène. Toutefois, ces composés sont bien plus connus en tant que teintures ou colorants que par leurs propriétés halochromiques. Ces molécules sont dites azoïques. De manière analogue aux dérivés du triphénylméthane, des groupements peuvent se positionner en para principalement puis en ortho et méta.

Parmi ces groupements, on peut trouver d’autres cycles, par exemple, pour former des naphtalènes mais aussi d’autres groupes azoïques. Ces derniers engendrent des molécules qualifiées de diazoïques.

Seuls les indicateurs présents dans le tableau ci-dessous sont réellement utilisés malgré le grand nombre de molécules de ce type.

Nom \ Position 2 3 4 5 4'
Hélianthine H H SO3 H NMe2
Rouge congo NH2 naphtyl SO3 sym
Rouge de méthyle CO2H H H H NMe2
Jaune de méthyle H H NMe2 H H
Jaune d'alizarine R H CO2H OH H NO2

Autres composés halochromiques

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Il existe d’autres types d’indicateurs colorés. On peut citer :

  • les anthocyanines : présentes dans la nature, notamment dans le chou rouge, mais aussi dans certaines fleurs (bleuet, delphiniumetc.) ou dans plusieurs baies (myrtilles) ;
  • quelques dérivés de l’anthracène, le xanthène, la pyridine ou d’autres composés polycycliques ;
  • quelques composés aromatiques nitratés tels que les nitrophénols, nitrobenzènes ou nitrotoluènes ;
  • d’autres composés atypiques, souvent naturels et dérivant parfois des anthocyanes.

Mais seuls les dérivés du triphénylméthane et de l’azobenzène sont utilisés en chimie à titre d’indicateur acido-basique.

Applications

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Titrages par indicateurs colorés

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Les indicateurs changeant de couleur en fonction du pH, ils servent donc à repérer l’équivalence lors d’un titrage acido-basique. Considérons le titrage d’un acide AH par une base B ou de la base B par l’acide AH. La réaction acido-basique est la suivante :

Elle résulte des deux demi-équations des couples AH/A et BH+/B :

  • ou de constante d'équilibre
  • ou de constante d'équilibre

Par une étude analytique, on peut déterminer des relations entre le pH à l’équivalence, les concentrations des espèces mises en jeu et le pKA des couples.

Type de titrage Exemples
de AH
Exemples
de B
pH à l'équivalence
Acide faible de concentration c par base forte RCOOH,
HXO, NH4+
HO, NH2+
alcoolate…
Base faible de concentration c par acide fort HX, HXO4,
HNO3
RCOO,
CO32−, NH3
Acide fort par base forte ou base forte par acide fort HX, HXO4,
HNO3
HO, NH2+
alcoolate…
Titrage de l'acide acétique 0,1 M par la soude 0,1 M. pH en fonction du volume versé.

Une fois l’indicateur coloré adéquat choisi de manière que sa zone de virage contienne le pH du point équivalent (PE)[18], on peut donc réaliser un titrage par indicateur coloré.

Exemple d’un titrage d’acide faible par de la soude (cas le plus courant)

Le pH du PE se situant aux alentours de 9, on utilise quelques gouttes de phénolphtaléine (virage 8,2-10), ajoutées dans le mélange réactionnel. L’équivalence se repère donc par le changement de couleur. La solution titrée est incolore dans la première partie de la manipulation. On ajoute progressivement de la soude et la solution passe au rose à l’équivalence, c’est-à-dire lorsque acide et base sont dans les proportions stœchiométriques.

Les indicateurs colorés doivent posséder une absorbance particulièrement grande, même présent en petite quantité (ce qui est le propre d'un indicateur). Ainsi, on peut les utiliser dans les titrages à une concentration pouvant descendre jusqu’à 10−6 M. On est donc certain, dans ces conditions, de pouvoir apercevoir le virage sans jamais influencer sur le pH de la solution, même si l’indicateur reste un couple acide-base. Quelques gouttes d’un indicateur peuvent finalement colorer des dizaines de mL de solution.

Colorants

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Flacon d'hélianthine en teinture.

Quelques-uns des indicateurs les plus courants sont aussi utilisés en tant que colorants organiques (textiles notamment). On peut citer le bleu de bromothymol, qui peut être utilisé comme colorant bleu ou jaune, ou le vert de malachite, qui est utilisé comme colorant vert[19].

Chez la plupart des fournisseurs[20] les indicateurs colorés sont par ailleurs vendus sous le nom explicite de « teinture » lorsqu'ils sont en solution[21] (photo ci-contre).

Autres utilisations

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  • Les indicateurs colorés servent en chimie, outre leur utilisation pour les dosages, pour déterminer rapidement l'acidité ou la basicité d'un milieu. On préférera dans ce cas les utiliser sous la forme d'un papier pH.
  • Le rouge de phénol peut être utilisé par tous pour tester le pH des piscines[22]. Il est souvent vendu en petits flacons et est accompagné d'une échelle de teintes (zone de virage du jaune au rouge) permettant de déterminer qualitativement le pH de l'eau.
  • Quelques indicateurs possèdent aussi des propriétés biologiques, c'est le cas du bleu de bromophénol.

Limites d'utilisations

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Les indicateurs colorés doivent être utilisés en très faibles quantités dans les mesures de pH car ils restent des composés acides ou basiques risquant d'influencer sur le pH de la solution. C'est pour cela qu'ils doivent posséder une grande absorbance. Ils ne peuvent être utilisés dans des solutions destinées à la consommation, du fait de leur toxicité, et ce, malgré leur faible concentration. De leur côté, les indicateurs naturels possèdent souvent des zones de virage très larges qui empêche toute utilisation pour une mesure de pH précise ou un dosage.

Mélanges d'indicateurs

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Indicateur universel

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Un indicateur universel naturel : le jus de chou rouge.

Le terme indicateur universel désigne un mélange d’indicateurs colorés qui a pour vocation de changer de couleur graduellement en fonction du pH. On peut ainsi obtenir rapidement une idée sur le pH d’une solution, plus précisément qu’un indicateur qui possède une, voire deux zones de virage.

Composition[23]

Il existe une composition « classique » de l’indicateur universel. Elle constitue la plupart des solutions pour papiers pH variant de 0 à 14. Voici les constituants de ce mélange :

  • phénolphtaléine ;
  • rouge de méthyle ;
  • phénol-4,4'-(3h-2,1-benzoxathiol-3-ylidène)bis-2-bromométhyl-6-(1-méthyléthyl)-S,S-dioxyde ;
  • phénol-4,4'-(3h-2,1-benzoxathiol-3-ylidène)bis-5-méthyl-2-(1-méthyléthyl)-S,S-dioxyde ;
  • solvant : eau/méthanol/propan-1-ol.
Échelle de teintes

Un indicateur coloré universel possède aussi la particularité de suivre les couleurs du spectre de la lumière blanche lorsque le pH augmente.

Couleurs de l'indicateur universel forme très acide
rouge
forme acide
orange
forme acide
jaune
forme neutre
vert
forme basique
bleu
forme très basique
violet

Certains indicateurs se rapprochent des indicateurs universels en possédant plusieurs zones de virage. C’est le cas, par exemple, d’un indicateur naturel, le chou rouge.

Rouleau de papier pH.
Bandelettes de test de pH.

Papier pH

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Le papier pH est en fait un papier spécial qui est imbibé d’un indicateur universel. Lorsque l’on trempe un morceau de papier pH dans une solution, il prend la tonalité correspondant au pH du milieu. Il est utilisé dans les laboratoires de chimie, mais aussi dans le cabinet des médecins généralistes qui l’utilisent, par exemple, pour vérifier l’acidité de l’urine.

Il est possible par ailleurs d'imbiber une bande de papier de n'importe quel indicateur — sans qu'il soit nécessairement un indicateur universel — puis d'ajouter quelques gouttes de la solution désirée sur cette bande. Cette technique est utilisée pour observer le changement de couleur sans avoir à mélanger l'indicateur au milieu, les indicateurs colorés étant souvent toxiques ou nocifs. Le papier tournesol est un exemple de papier n'utilisant pas d'indicateur universel. Il indique l'acidité par une couleur rouge et la basicité par une couleur bleue. Les chimistes, à l'époque de Lavoisier utilisaient déjà une teinture de tournesol ou du sirop de violette[24] comme indicateur de pH[25].

Crayon pH

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Le papier pH est utilisé pour donner le pH d’un liquide. Pour déterminer le pH d’un solide, un « crayon pH » peut être utilisé ; ce crayon s’utilise sur le papier, textile, bois, ciment, bitume, batterie, peau, plastique, céramique, métal, etc. Il faut passer un coup de crayon sur la surface et attendre quelques secondes. La couleur obtenue indique le pH.

Notes et références

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  1. a et b (pt) Daniela Brotto Lopes Terci et Adriana Vitorino Rossi, Indicadores naturais de pH: usar papel ou solução?, 2001.
  2. a et b Mady Chapon, Véronique Courilleau-Harvelant et Cécille Valette, Chimie des couleurs et des odeurs, Culture et techniques, 1993, p. 157-162.
  3. « Les indicateurs de pH », Culture Sciences-Chimie, École normale supérieure, 2007.
  4. Cotterau du Clos, Samuel, Observations sur les eaux minerales de plusieurs provinces de France, Paris, Imprimerie royale, (lire en ligne).
  5. (en) Edmund Bishop, Indicators, Pergamond Press, Oxford, New York, 1972 (ISBN 0-08-016617-2).
  6. a b et c Liste très complète.
  7. a b c et d (en) David R. Line, Handbook of Chemistry and Physics 84th edition (2003/2004), CRC Press, 2004.
  8. Sébastien Bruneau (resp. Antoine Delon), Teintes sensibles : les indicateurs colorés de pH [PDF], 2007.
  9. Rhodium, Natural pH-Indicators, sur erowid.org.
  10. (en) Opium Poppy, § Flower pH indicator properties, sur MaltaWildPlants.com.
  11. Valentin Parotte, Les indicateurs colorés naturels : recettes et échelles de pH, Mons, Haute École en Hainaut de Mons, .
  12. Wyn Locke (trad. C. Jacoboni), Indicateurs acido-basiques et titration, université du Mans.
  13. Jacques Mesplède, Jérôme Randon, 100 manipulations de chimie générale et analytique, Bréal, 2004, p. 46-48, 130-136 (ISBN 2-7495-0351-5).
  14. a et b René et Éric Mahé, Didier Devilliers, « Expériences portant sur la notion d’indicateur coloré », Bulletin de l'union des physiciens, no 801, février 1998, p. 299-326.
  15. Sabine Chierici et Olivier Thomas, Fascicules de TP de chimie inorganique, UE CHI232, Chimie expérimentale, UJF, 2006.
  16. Claudine Kahane, Fascicule de cours-TD-TP, UE TRA122, Les couleurs en sciences, TD2, UJF, 2006, p. 27-30.
  17. Danielle Cachau-Herreillat, Des expériences de la famille Acide-Base, De Boeck, 2005, p. 71, 112-115, 132-136, 165-167, 326, 339-341.
  18. Bénédicte Nowak-Leclercq, Jean-François Le Maréchal, La chimie expérimentale - chimie générale, coll. « Sciences Sup. », Dunod, Paris, 2000, p. 139-148 (ISBN 2-10-048461-3).
  19. Sabine Chierici, Fascicules de TP de chimie organique, UE CHI232, Chimie expérimentale, UJF, 2006.
  20. Acros Organics (laboratoires, établissements scolaires), Jeulin (établissements scolaires), Pierron (établissements scolaires, particuliers), etc..
  21. Les indicateurs peuvent aussi être vendus directement en poudre (sels de sodium le plus souvent).
  22. Comment mesurer le pH d'une solution ? sur un site personnel consacré à un TPE.
  23. Bruno Fosset, Christine Lefrou, Arlette Masson, et Christophe Mingotaud, Chimie physique et expérimentale, Ermann, 2000, p. 95-97.
  24. Indicateur de pH décrit par Robert Boyle en 1663 lorsque ce chimiste donne le premier protocole expérimental de test d'acidité ; après le dépôt de quelques gouttes de sirop sur un papier blanc puis le dépôt d'une substance acide sur le papier, si la tache de sirop passe du violet au rouge, le test permet de distinguer l'acidité de l'alcalinité d'une substance. Cf René Taton, Histoire générale des sciences, Presses universitaires de France, , p. 362.
  25. Extraits de texte d'Antoine Lavoisier proposant en 1783, à l'Académie, un mémoire sur la composition de l'eau (consulté le 6 février 2011).

Bibliographie

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Voir aussi

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