Théorème de Rellich

Le théorème de Rellich-Kondrachov est un théorème d'analyse, la branche des mathématiques qui est constituée du calcul différentiel et intégral et des domaines associés.

Énoncé

Si $\Omega$ est un ouvert borné de classe de régularité $C^{1}$, alors de toute suite bornée de $H^{1}(\Omega )$ on peut extraire une sous-suite convergente dans $\mathrm {L} ^{2}(\Omega )$ (on dit que l'injection canonique de $H^{1}(\Omega )$ dans $\mathrm {L} ^{2}(\Omega )$ est compacte).

Remarques

On se place dans $\Omega \subset \mathbb {R} ^{n}$.

$H^{1}(\Omega )$ désigne un espace de Sobolev.

$\mathrm {L} ^{2}(\Omega )$ désigne un espace L^p avec p = 2.

Le caractère $C^{1}$ de $\Omega$ a un sens particulier : il s'agit de la régularité du bord.

L'inclusion de $H^{1}(\mathbb {R} ^{n})$ dans $\mathrm {L} ^{2}(\mathbb {R} ^{n})$ n'est pas, elle, compacte.

Démonstration

On va construire un contre-exemple en exhibant une suite bornée en norme $H^{1}(\mathbb {R} ^{n})$ qui ne converge pas en norme $L^{2}(\mathbb {R} ^{n})$.

Soit $u\in C_{c}^{\infty }(\mathbb {R} ^{n})$ une fonction non nulle $C^{\infty }$ à support compact dans la boule unité ouverte $B(0,1)$ (cf. Fonction C∞ à support_compact). Il est aisé de vérifier que cet ensemble est bien inclus dans $H^{1}(\mathbb {R} ^{n})$. Pour tout naturel $k$, définissons la suite $u_{k}(\cdot ):=u(\cdot -k\mathbf {1} )$ (où $\mathbf {1}$ désigne le point de $\mathbb {R} ^{n}$ dont toutes les composantes sont égales à $1$). Cette suite est bien incluse dans $H^{1}(\mathbb {R} ^{n})$ car chaque élément de la suite est encore dans $C_{c}^{\infty }(\mathbb {R} ^{n})$.

Il est clair que le support de cette fonction est dans la boule $B(k\mathbf {1} ,1)$. Dès lors, comme pour tous naturels distincts $k,l$, les boules $B(k\mathbf {1} ,1)$ et $B(l\mathbf {1} ,1)$ sont disjointes, on a ${\text{supp }}u_{k}\cap {\text{ supp }}u_{l}=\emptyset$ (où ${\text{supp }}f$ désigne le support de la fonction $f$).

D'une part, la norme de $u_{k}$ est constante par rapport à $k$ :

${\begin{aligned}\Vert u_{k}\Vert _{H^{1}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}&=\Vert u_{k}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}+\Vert \nabla u_{k}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}\\&=\int _{\mathbb {R^{n}} }\vert u(x-k\mathbf {1} )\vert ^{2}{\text{d}}x+\int _{\mathbb {R^{n}} }\Vert \nabla u(x-k\mathbf {1} )\Vert _{\mathbb {R} ^{n}}^{2}{\text{d}}x\\&=\int _{B(k\mathbf {1} ,1)}\vert u_{k}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x+\int _{B(k\mathbf {1} ,1)}\Vert \nabla u(x-k\mathbf {1} )\Vert _{\mathbb {R} ^{n}}^{2}{\text{d}}x\\&=\int _{B(0,1)}\vert u(x)\vert ^{2}+\int _{B(0,1)}\Vert \nabla u(x)\Vert _{\mathbb {R} ^{n}}^{2}{\text{d}}x\\&=\Vert u\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}+\Vert \nabla u\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}\\&=\Vert u\Vert _{H^{1}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}\end{aligned}}$

On en conclut que cette suite est bien bornée puisque la norme de $u$ est, par définition, finie. Remarquons de plus que le développement précédente montre aussi et en particulier que $\Vert u_{k}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}$ est constante et égale à $\Vert u\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}$.

D'autre part, pour tous $k,l\in \mathbb {N}$ distincts, on a :

${\begin{aligned}\Vert u_{k}-u_{l}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}&=\int _{\mathbb {R} ^{n}}\vert u_{k}(x)-u_{l}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x\\&=\int _{B(k\mathbf {1} ,1)}\vert u_{k}(x)-u_{l}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x+\int _{B(l\mathbf {1} ,1)}\vert u_{k}(x)-u_{l}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x\\&+\underbrace {\int _{\mathbb {R} ^{n}\setminus \left(B(k\mathbf {1} ,1)\cup B(l\mathbf {1} ,1)\right)}\vert u_{k}(x)-u_{l}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x} _{=0}\\&=\int _{B(k\mathbf {1} ,1)}\vert u_{k}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x+\int _{B(l\mathbf {1} ,1)}\vert u_{l}(x)\vert ^{2}{\text{d}}x\\&=\Vert u_{k}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}+\Vert u_{l}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}\\&=2\Vert u\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}^{2}>0\end{aligned}}$

où on a majoritairement utilisé le fait que les supports d'éléments distincts de la suite sont disjoints, par construction. Dès lors, on en déduit directement que pour tous $k,l\in \mathbb {N}$, on a :

$\Vert u_{k}-u_{l}\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}\geq {\sqrt {2}}\Vert u\Vert _{L^{2}(\mathbb {R} ^{n})}>0$

Dès lors, la suite ne peut pas être de Cauchy. Comme toute suite convergente dans un espace métrique est de Cauchy, on en conclut que la suite $(u_{k})_{k\in \mathbb {R} ^{n}}$ n'est pas convergente dans $L^{2}(\mathbb {R} ^{n})$.

Commentaires :

Il est clair que cette suite ne converge pas non plus dans $H^{1}(\mathbb {R} ^{n})$, mais tout l'intérêt du théorème de Rellich est de permettre à des suites faiblement convergentes de converger fortement lorsqu'on impose une topologie, en quelque sorte plus faible (i.e. "comprenant moins d'ouverts", i.e. la topologie est plus grossière).

On remarquera que cette construction utilise le fait que $\mathbb {R} ^{n}$ est non borné dans au moins une direction, ce qui permet l'existence d'une telle suite.

Certains auteurs utilisent le nom de "théorème de Rellich-Kondrachov" pour le théorème de prolongement de Sobolev qui généralise celui de cet article.

Démonstration

La preuve se base sur le théorème de Fréchet-Kolmogorov qui caractérise les sous-ensembles relativement compacts de $L^{p}(\mathbb {R} ^{n})$.

Applications

Rappelons que $H^{1}(\Omega )$ est un espace de Hilbert lorsque muni du produit hermitien suivant :

$(u,v)\mapsto \int _{\Omega }\nabla u\cdot \nabla {\overline {v}}+\int _{\Omega }u{\overline {v}}$

(où $\nabla$ dénote le gradient, $a\cdot b$ le produit scalaire usuel entre $a,b\in \mathbb {R} ^{n}$ et ${\overline {}}$ dénote le complexe conjugé).

Dès lors, comme toute suite faiblement convergente est bornée, le théorème de Rellich implique que toute suite faiblement convergente dans $H^{1}(\Omega )$ possède une sous-suite qui converge fortement dans $L^{2}(\Omega )$ (autrement dit, qui converge pour la topologie induite par la norme $L^{2}$ sur $\Omega$).

En outre, le théorème de Rellich–Kondrachov peut être utilisé pour prouver l'inégalité de Poincaré.

Bibliographie

• (en) V. I. Kondrachov (en), « On certain properties of functions in the space Lp », Dokl. Akad. Nauk SSSR, vol. 48, 1945, p. 563-566
• (de) Franz Rellich, « Ein Satz über mittlere Konvergenz », Nachrichten von der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, Mathematisch-Physikalische Klasse, vol. 1930,‎ 24 janvier 1930, p. 30–35 (JFM 56.0224.02, lire en ligne)